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11/07/2024 | FRANCE | N°22/03112

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 11 juillet 2024, 22/03112


ARRET







Organisme CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DE LA SOMME





C/



[I]













COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 11 JUILLET 2024



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N° RG 22/03112 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IPQT - N° registre 1ère instance : 21/00323



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE D'AMIENS (POLE SOCIAL) EN DATE DU 30 MAI 2022




r>PARTIES EN CAUSE :





APPELANTE





Caisse d'allocations familiales de la Somme

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 2]





Représentée...

ARRET

Organisme CAISSE D'ALLOCATIONS FAMILIALES DE LA SOMME

C/

[I]

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 11 JUILLET 2024

*************************************************************

N° RG 22/03112 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IPQT - N° registre 1ère instance : 21/00323

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE D'AMIENS (POLE SOCIAL) EN DATE DU 30 MAI 2022

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

Caisse d'allocations familiales de la Somme

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Amélie ROHAUT, avocat au barreau d'AMIENS, substituant Me Gonzague DE LIMERVILLE de la SCP GONZAGUE DE LIMERVILLE - AVOCAT, avocat au barreau d'AMIENS

ET :

INTIMEE

Madame [W] [I]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Aurélie GUYOT, avocat au barreau d'AMIENS, substituant Me Anthony CONTANT, avocat au barreau de LAON

DEBATS :

A l'audience publique du 13 Mai 2024 devant Mme Véronique CORNILLE, conseillère, siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 945-1 du code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 11 Juillet 2024.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Madame Christine DELMOTTE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Véronique CORNILLE, conseillère en a rendu compte à la cour composée en outre de :

Mme Jocelyne RUBANTEL, président,

M. Pascal HAMON, président,

et Mme Véronique CORNILLE, conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 11 Juillet 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Jocelyne RUBANTEL, président a signé la minute avec Mme Diane VIDECOQ-TYRAN, greffier.

*

* *

DECISION

Par courrier du 19 mars 2020, la Caisse d'allocations familiales de la Somme ( ci-après la CAF ) a notifié à Mme [W] [I] un indu d'un montant de 10 831,54 euros pour avoir perçu à tort l'allocation aux adultes handicapés (AAH) au cours de la période du 1er avril 2018 au 30 septembre 2019.

Mme [I] a contesté cette décision devant la commission de recours amiable de la CAF laquelle a rejeté son recours puis elle a saisi le tribunal.

Par jugement du 30 mai 2022, le tribunal judiciaire d'Amiens, pôle social, a :

- dit le recours de Mme [I] recevable et bien fondé,

- rejeté la demande de la CAF de la Somme en condamnation de Mme [I] au paiement d'un indu d'un montant de 10 831,54 euros au titre de l'AAH,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la CAF de la Somme aux dépens.

Par déclaration d'appel du 22 juin 2022, la CAF de la Somme a relevé appel du jugement.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 21 septembre 2023 lors de laquelle l'affaire a été renvoyée en raison d'un mouvement de grève des personnels de greffe.

Par conclusions transmises par RPVA le 17 avril 2023 auxquelles elle s'est rapportée, la CAF demande à la cour de :

- dire et juger recevable et bien fondé son appel,

- infirmer la décision du 30 mai 2022 du pôle social du tribunal judiciaire d'Amiens,

Statuant à nouveau,

- condamner Mme [I] à lui payer la somme de 10 295,84 euros au titre de l'indu d'allocation hadulte handicapé restant dû pour les années 2018 et 2019,

- condamner en tout état de cause Mme [I] à lui payer la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et la condamner au paiement des dépens de première instance et d'appel.

La CAF fait valoir que l'indu fait suite à la modification de la situation professionnelle apparue lors d'un contrôle de situation du 20 mars 2020, du concubin de Mme [I], M. [D] [V], en maladie de longue durée depuis le 20 mai 2017, qui a repris une activité en mi-temps thérapeutique à compter du 20 mai 2018. Elle explique que M. [V] bénéficiait jusqu'à sa reprise d'activité, d'une neutralisation de ses ressources en raison de l'affection de longue durée et qu'il ne pouvait plus prétendre à cet avantage sur le calcul des ressources.

La CAF précise que dans un premier temps la régularisation s'est faite sur l'année 2018, à réception d'une première partie des justificatifs le 26 février 2020, et qu'ayant reçu les pièces de l'année 2019 ensuite, elle a notifié un second indu.

Elle ajoute que la modification du montant de l'AAH résulte également de la régularisation effectuée le 20 mars 2020 faisant suite à un contrôle de ressources qui avait révélé une incompatibilité entre les ressources trimestrielles AAH et les ressources annuelles 2018 issues de l'échange avec la direction générale des finances publiques, à savoir la perception d'indemnités journalières de maladies imposables non prises en compte dans les ressources trimestrielles pour le calcul de l'AAH.

Par conclusions réceptionnées le 18 septembre 2023 auxquelles elle s'est rapportée, Mme [I] demande à la cour de :

- confirmer le jugement,

- débouter la CAF de toutes ses demandes,

- condamner la CAF de la Somme à lui payer la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et la condamner aux dépens.

Elle soutient que les indemnités journalières perçues par M. [V] versées dans le cadre d'une affection longue durée exonérante sont exlues du calcul de l'AAH comme l'a précisé la CAF dans son courrier du 22 mai 2019 ; que M.. [V] est en arrêt pour maladie longue durée depuis le 22 septembre 2016 avec une reprise en mi-temps thérapeutique du 1er avril 2017 au 3 mai 2017, un nouvel arrêt du 4 mai 2017 au 24 mai 2018 puis un mi-temps thérapeutique du 25 mai 2018 au 17 avril 2019, enfin en arrêt du 18 avril 2019 au 31 décembre 2020 ; qu'il n'a jamais caché ses revenus ; que les indemnités journalières ne sont pas imposables dès lors qu'elles concernent une affection longue durée ; que seuls doivent être déclarés les revenus imposables pour le calcul de l'AAH aux termes de l'article R. 532-3 du code de la sécurité sociale. Elle ajoute que les indemnités journalières avaient été déclarées par ignorance de ces règles.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux écritures des parties pour l'exposé plus ample des moyens.

Motifs

L' allocation aux adultes handicapés est une prestation sous conditions de ressources. Selon l'article L. 821-3 du code de la sécurité sociale, elle peut se cumuler avec les ressources personnelles de l'intéressé et, s'il y a lieu, de son conjoint, concubin ou partenaire d'un pacte civil de solidarité dans la limite d'un plafond fixé par décret, qui varie selon qu'il est marié, concubin ou partenaire d'un pacte civil de solidarité et a une ou plusieurs personnes à sa charge. Les rémunérations de l'intéressé tirées d'une activité professionnelle en milieu ordinaire de travail et les indemnités de fonction des élus locaux sont en partie exclues du montant des ressources servant au calcul de l'allocation selon des modalités fixées par décret.

L'article R. 821-4-1 du même code prévoit que lorsque le demandeur ou le bénéficiaire de l'allocation aux adultes handicapés perçoit au jour du dépôt de la dmeande ou en cours de service, des revenus d'activité professionnelle, la confition de ressources prévue à l'article L. 821-3 s'apprécie au regard des revenus perçus au cours du trimestre de référence (trois mois civils précédant la période de droits). Les revenus pris en compte sont ceux définis au II de l'article R. 821-4 (soit les revenus définis aux articles R. 532-3 à R. 532-7 qui renvoient au revenu net retenu pour l'établissement de l'impôt sur le revenu).

Il résulte de l'article 80 quinquies du code général des impôts, que les indemnités journalières versées par les organismes de sécurité sociale sont soumises à l'impôt sur le revenu suivant les règles applicables aux traitements et salaires, à l'exclusion des indemnités qui sont allouées à des personnes atteintes d'une affection comportant un traitement prolongé et une thérapeutique particulièrement coûteuse.

Les indemnités journalières en affection longue durée (ALD) peuvent être versées pendant 3 ans maximum, ou 4 ans si un travail à temps partiel thérapeutique est mis en place. Les ALD sont des affections qui nécessitent une interruption de travail ou des soins continus d'une durée de 6 mois ou plus (article L. 324-1 du code de la sécurité sociale).

Il incombe à l'organisme de prestations familiales saisi d'une demande d'allocation aux adultes handicapés de vérifier que les conditions administratives applicables sont réunies.

En l'espèce, le litige porte sur l'allocation aux adultes handicapés attribuée à Mme [I] sur la période du 1er avril 2018 au 30 septembre 2019.

La CAF a notifié un indu de 10 831, 54 euros correspondant à un trop-perçu au motif de la reprise d'activité en mi-temps thérapeutique du compagnon de Mme [I].

Mme [I] qui soutient que les indemnités versées à M. [V] sont exonérées d'impôts, justifie des éléments suivants :

- M. [V] est pris en charge dans le cadre d'une affection longue durée depuis septembre 2016 ;

- l'attestation de paiement des indemnités journalières en date du 8 juin 2021 montre un arrêt de travail à temps partiel pour motif thérapeutique (soit une reprise de travail en mi-temps thérapeutique) du 1er avril 2017 au 3 mai 2017, un arrêt de travail du 4 mai 2017 au 24 mai 2018, une reprise de travail en mi-temps thérapeutique du 25 mai 2018 au 26 février 2019, un arrêt de travail du 27 février 2019 au 12 mars 2019, une reprise de travail en mi-temps thérapeutique du 13 mars 2019 au 31 décembre 2020 ;

- l'attestation de paiement des indemnités journalières mentionne que tous les arrêts de travail sont en rapport avec une affection de longue durée .

- par courrier du 22 mai 2019, la CAF de l'Aisne a informé Mme [I] que les indemnités journalières versées à son conjoint au titre de l'affection longue durée n'étaient pas prises en compte dans le calcul de l'AAH et qu'elle ne retenait que le net imposable de chaque bulletin de salaire de son conjoint ; elle précisait 'Ils (vos droits) changent à partir du 01/04/2018. Il apparaît après calcul que pour l'AAH M., l'AAH Mme, vous avez reçu 4 940,87 euros alors que vous aviez droit à 12 826, 08 euros. Nous vous devons 7 885,21 euros.'

Au vu de ces éléments, il est établi que les indemnités journalières de M. [V] sont toutes perçues au titre de son affection longue durée que ce soit en arrêt total ou en temps partiel thérapeutique. Elles sont toutes exonérées d'impôt et exclues du calcul de l'AAH comme en convient la CAF dans son courrier du 22 mai 2019.

Or par courrier du 19 mars 2020, la CAF de l'Aisne a notifié à Mme [I] un indu de 10 831, 54 euros au motif que ses droits avaient changé à partir du 01/04/2018 jusqu'au 30/09/2019, soit sur la même période que celle visée par le courrier du 22 mai 2019. Elle écrit : ' Nous avons pris en compte le changement de situation professionnelle de votre conjoint et rectifié le montant de vos ressources trimestrielles. En effet, votre mari a repris son activité en mi-temps thérapeutique depuis 2018. De plus ses indemnités de maladie étant imposables, elles doivent être prises en compte pour le calcul de l'AAH'.

La CAF confirmait sa position dans un courrier du 2 juin 2020 notifiant un indu de 3 069,17 euros pour la période du 1er avril 2019 au 30 janvier 2020 en précisant 'il faut bien indiquer les salaires nets imposables et non nets payés et indiquer les indemnités journalières de maladie qui sont imposables'.

Au regard des dispositions précitées du code général des impôts, c'est à tort que la CAF a considéré que les indemnités journalières versées étaient imposables dès lors qu'elles concernent une affection longue durée y compris sur les périodes de mi-temps thérapeutique.

La CAF évoque dans ses écritures une incompatibilité entre les ressources trimestrielles AAH et les ressources annuelles 2018 issues de l'échange avec la direction générale des impôts. Elle n'apporte pas plus de précisions et par ailleurs ne fait pas état de chiffre précis quant au calcul de l'indu comme l'avaient retenu les premiers juges.

En considération de ce qui précède, la CAF ne rapporte pas la preuve qui lui incombe du bien-fondé de l'indu.

Les premiers juges ont rejeté la demande de la CAF en paiement de la somme de 10 831,54 euros au titre de l'AAH.

Il convient donc de confirmer le jugement.

L'appelante succombant supportera les dépens d'appel et sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En revanche, il serait inéquitable de laisser à la charge de Mme [I] l'intégralité des frais qu'elle a été contraitne d'engager dans la présente instance. Il lui sera alloué la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

Confirme le jugement du tribunal judiciaire d'Amiens, pôle social, en date du 30 mai 2022,

Y ajoutant,

Déboute la caisse d'allocations familiales de la Somme de l'intégralité de ses demandes,

La condamne à payer à Mme [I] la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la caisse d'allocations familiales de la Somme aux dépens d'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 22/03112
Date de la décision : 11/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-11;22.03112 ?
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