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08/07/2024 | FRANCE | N°23/01387

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 08 juillet 2024, 23/01387


ARRET







URSSAF DU [Localité 6]





C/



[Z]













COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 08 JUILLET 2024



*************************************************************



N° RG 23/01387 - N° Portalis DBV4-V-B7H-IW4P



Jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Lille en date du 31 mars 2013





PARTIES EN CAUSE :





APPELANTE
r>



URSSAF du [Localité 6]

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]





représentée par Me Laëtita Berezig, avocat au barreau d'Amiens, substituant Me Ch...

ARRET

URSSAF DU [Localité 6]

C/

[Z]

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 08 JUILLET 2024

*************************************************************

N° RG 23/01387 - N° Portalis DBV4-V-B7H-IW4P

Jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Lille en date du 31 mars 2013

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

URSSAF du [Localité 6]

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Laëtita Berezig, avocat au barreau d'Amiens, substituant Me Charlotte Herbaut de la SELARL Osmoz'avocats, avocat au barreau de Lille

et :

INTIME

Monsieur [M] [Z]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Alain Gravier, avocat au barreau d'Amiens, substituant Me Brigitte Mesureur, avocat au barreau d'Amiens

DEBATS :

A l'audience publique du 08 avril 2024 devant Mme Anne Beauvais, conseillère, siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 945-1 du code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 17 juin 2024.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Blanche Tharaud

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Anne Beauvais en a rendu compte à la cour composée en outre de :

M. Philippe Mélin, président,

Mme Anne Beauvais, conseillère,

et M. Renaud Deloffre, conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 17 juin 2024, le délibéré a été prorogé au 08 juillet 2024.

Le 08 juillet 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, M. Philippe Mélin, président a signé la minute avec Mme Diane Videcoq-Tyran, greffier.

*

* *

DECISION

Une contrainte datée du 12 juillet 2012 a été émise par la caisse nationale du régime social des indépendants (le RSI ou la caisse) et a été signifiée à M. [M] [Z] le 3 août 2012, pour un montant de 29 244 euros, au titre des cotisations et majorations dues pour le 4e trimestre de l'année 2011.

Ce dernier en a formé opposition devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lille aux motifs que la caisse ne lui avait pas payé les indemnités journalières suite à son accident de travail du 11 avril 2011, ajoutant que sa société était liquidée depuis le 5 juin 2012.

Suivant jugement en date du 31 janvier 2013, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lille a :

- dit l'opposition à contrainte n° 3011193907 recevable ;

- annulé ladite contrainte, d'un montant de 29 244 euros ;

- dit que les frais de signification de la contrainte restaient à la charge de la caisse nationale du régime social des indépendants.

Le tribunal a motivé sa décision sur le fondement des articles R. 133-5 du code de la sécurité sociale et 1315 du code civil, au constat que le RSI n'apportait aux débats 'aucun décompte précis et détaillé sur la somme réclamée à Monsieur [Z] [M] qui lui oppose des moyens auxquels elle n'a pas répondu.'

Cette décision a été notifiée aux parties les 11 juillet 2013 et le RSI en a interjeté appel en toutes ses dispositions par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception de son conseil adressée au greffe de la cour d'appel de Douai le 2 août 2013.

La radiation de l'affaire a été ordonnée par ordonnance du 13 novembre 2015 puis, l'affaire a fait l'objet d'une double résinscription au rôle, de sorte qu'une jonction a été ordonnée sous le seul n° de RG 15/04466.

La cour d'appel d'Amiens a ensuite été saisie de ce dossier, lequel a été enrôlé le 1er janvier 2020 sous le n° de RG 19/04439.

L'affaire a été une nouvelle fois radiée suivant arrêt du 8 janvier 2020, puis une fois réinscrite au rôle a fait l'objet d'un retrait de rôle à l'audience du 6 mars 2023, avant finalement d'être réinscrite au rôle sous son numéro de RG actuel et retenue après un ultime renvoi de l'audience du 11 janvier 2024 à l'audience du 8 avril 2024.

Par dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 5 avril 2024, déposées à l'audience, l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales [Localité 6] (l'URSSAF ou la caisse) demande à la cour d'appel de :

Dire l'appel recevable ;

Infirmer le jugement entrepris ;

Valider la contrainte du 12 juillet 2012 pour la somme de 29 244 euros (dont 1 498 euros de majorations de retard) ;

Condamner M. [Z] en tous les frais et dépens ;

Le débouter de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Le débouter de sa demande de condamnation au paiement de dommages-intérêts.

L'URSSAF [Localité 6] expose que M. [Z] a exercé une activité indépendante en qualité de commerçant en sa qualité de gérant de la SARL [5] ([5]) devenue la SARL [7], à compter du 1er janvier 2007 et jusqu'au 5 juin 2012.

Selon elle, l'exercice d'une activité salariée concomitante sur une partie de cette période ne remet pas en cause l'affiliation au régime d'assurance obligatoire des professions indépendantes et ne dispense nullement du paiement des cotisations ; elle souligne qu'au demeurant, le litige porte sur une échéance du 4ème trimestre 2011, postérieure à l'activité salariée exercée qui s'est terminée avec la rupture conventionnelle du contrat de travail le 1er juillet 2009.

Elle rappelle ensuite, par référence à un précédent litige opposant les parties devant la cour d'appel d'Amiens, que dans le cadre de la création de la société 'sans activité (en veille'), le gérant de la société est soumis à cotisations en qualité de travailleur indépendant à la date de création de la société car c'est l'exercice même de ses fonctions de gérant qui justifie son affiliation.

En réponse aux conclusions adverses, l'URSSAF souligne que M. [Z] ayant à la suite de la rupture conventionnelle de son contrat de travail, créé la société [4] le 1er septembre 2009 et soutenant avoir obtenu en cette occasion l'aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprise (l'ACCRE) ouvrant le bénéficie d'une exonération de cotisations et contributions sociales ainsi que d'une couverture sociale gratuite, c'est la société [4] qui a été désignée attributaire de l'ACCRE et non M. [Z] en qualité de travailleur indépendant.

Sur le fond du litige elle détaille le calcul des cotisations qu'elle réclame au titre du 4e trimestre 2011, correspondant selon elle à la régularisation des cotisations dues au titre de l'année 2010, et aux cotisations provisionnelles du 4e trimestre de l'année 2011. Elle fait ensuite valoir qu'en précisant la nature et le montant des cotisations réclamées ainsi que la période à laquelle elles se rapportent et en se référant à la mise en demeure préalable, elle a satisfait à son obligation de motivation.

Elle estime qu'il appartient à M. [Z] de produire les pièces susceptibles de remettre en cause la base des calculs des cotisations et leurs taux, et fait valoir qu'il ne justifie pas s'être libéré de son obligation de paiement des cotisations et contributions sociales.

En réponse à la demande d'indemnité formée à son encontre, elle ajoute que M. [Z] n'étant pas à jour de ses cotisations, les prestations de santé ne pouvaient lui être versées au titre des indemnités journalières dont il se prévaut au soutien de sa demande de dommages-intérêts et souligne qu'en tout état de cause, consécutivement à la suppression juridique du RSI au 1er janvier 2018, la caisse primaire d'assurance maladie est désormais le seul interlocteur pour assurer la gestion de l'assurance maladie.

En réplique et par conclusions notifiées par la voie électronique le 5 avril 2024, déposées à l'audience, M. [M] [Z] demande à la cour d'appel de :

Dire et juger l'URSSAF mal fondée en son appel ;

Confirmer le jugement entrepris ;

Y ajoutant,

Condamner l'URSSAF à lui verser :

- la somme de 13 562 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice ;

- la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamner l'URSSAF aux dépens.

M. [Z] expose que la contrainte du 12 juillet 2012 se contente d'indiquer qu'une mise en demeure en date du 13 février 2012 lui a été adressée correspondant à la période du 4ème trimestre 2011 ; il estime qu'au lu de ces seules informations, il n'est pas en mesure de connaître le motif et la base du redressement.

Il fait grief à l'URSSAF de n'avoir pas répondu à ses deux motifs à l'occasion de son recours :

- l'absence de versement par l'URSSAF des indemnités journalières auxquelles il avait droit consécutivement à son accident du travail du 11 avril 2011 ;

- le fait que la société à responsabilité limitée [7] (la SARL) dont il était le gérant, a été placée en redressement judiciaire le 29 mars 2012 avant d'être liquidée par jugement en date du 5 décembre 2012.

Il ajoute qu'avant de devenir le gérant de la SARL [5] ([5]) créée le 27 décembre 2006, devenue [7] le 1er janvier 2007, il avait une activité professionnelle salariée dans le secteur privé, en dernier lieu, au sein de la société [3] qu'il a quittée le 31 juillet 2009 dans le cadre d'une rupture conventionnelle de son contrat de travail.

Il précise que la société [5] devenue [7] était en veille et n'ayant aucune activité, ne générait pas conséquent aucun revenu.

Il explique ensuite qu'à la suite de la rupture conventionnelle de son contrat de travail, il a créé la société [4] le 1er septembre 2009, obtenant en cette occasion l'aide aux chômeurs créateurs ou repreneurs d'entreprise (l'ACCRE) qui lui ouvrait le bénéficie d'une exonération des cotisations et contributions sociales assises sur ses rémunérations ainsi que d'une couverture sociale gratuites, de sorte que c'est à tort selon lui que l'URSSAF vient lui réclamer le versement de cotisations pour la période concernée.

Il considère que la caisse ne justifie pas des montants de revenus professionnels qu'il aurait déclarés et précise que victime d'un accident du travail en 2011 sans percevoir de la caisse les indemnités journalières auxquelles il avait droit consécutives à cet accident, représentant une somme de 13 562 euros pour la période d'avril 2011 à janvier 2021, il a été contraint de prélever des revenus de gérant sur le compte de la société [7] afin de survivre avec sa famille.

Il conclut sur ce point que faute de procéder à la reddition sur justificatifs des sommes qu'il a versées au titre des cotisations depuis l'origine de son activité, et de produire les déclarations qu'il a établies au titre de ses revenus permettant d'établir les cotisations dues pour telle ou telle période, les tableaux intégrés par l'URSSAF dans ses écritures ne peuvent selon lui satisfaire à l'obligation de preuve, d'autant qu'ils ne prennent pas en compte les bénéfices de l'ACCRE, mais lui reconnaissent le bénéfice d'indemnités journalières qu'il n'a pas perçues. Il en déduit que la cour d'appel ne pourra statuer qu'à l'instar des premiers juges sur le fondement de l'article 1353 du code civil.

En réponse aux motifs soutenus par la caisse, il souligne que cette dernière se contredit en violation de la règle de l'estoppel lorsqu'elle vient justifier son défaut de versement des indemnités journalières auxquelles il avait droit par le fait qu'il n'était pas à jour de ses paiements, alors que pour la période considérée, il avait été pris en charge pendant son arrêt maladie pour la couverture sociale, mais il estime que le RSI n'est pas allé au bout de son raisonnement en ne lui réglant pas les indemnités journalières.

M. [Z] réclame enfin le paiement à son profit d'une indemnité d'un montant de 13 562 euros correspondant aux indemnités dont il a été injustement privé du fait de l'URSSAF, lui occasionnant un préjudice.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

Motifs

Sur la régularité de la contrainte

Selon l'article R. 133-3, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale, en vigueur du 23 août 2009 au 11 mai 2017 :

'Si la mise en demeure ou l'avertissement reste sans effet au terme du délai d'un mois à compter de sa notification, le directeur de l'organisme créancier peut décerner la contrainte mentionnée à l'article L. 244-9 ou celle mentionnée à l'article L. 161-1-5. La contrainte est signifiée au débiteur par acte d'huissier de justice ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. A peine de nullité, l'acte d'huissier ou la lettre recommandée mentionne la référence de la contrainte et son montant, le délai dans lequel l'opposition doit être formée, l'adresse du tribunal compétent et les formes requises pour sa saisine.

L'huissier de justice avise dans les huit jours l'organisme créancier de la date de signification.

Le débiteur peut former opposition par inscription au secrétariat du tribunal compétent dans le ressort duquel il est domicilié ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception adressée au secrétariat dudit tribunal dans les quinze jours à compter de la signification. L'opposition doit être motivée ; une copie de la contrainte contestée doit lui être jointe. Le secrétariat du tribunal informe l'organisme créancier dans les huit jours de la réception de l'opposition.

La décision du tribunal, statuant sur opposition, est exécutoire de droit à titre provisoire.'

Par ailleurs, l'article R. 244-1 prévoit que la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.

En outre, il résulte de la lecture combinée des articles L. 244-2 et L. 244-9 dudit code que la contrainte décernée par un organisme de sécurité sociale pour le recouvrement des cotisations et contributions, doit permettre au redevable d'avoir connaissance de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation et préciser, à cette fin, à peine de nullité, la nature et le montant des cotisations et contributions réclamées et la période à laquelle celles-ci se rapportent, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice.

La contrainte peut faire référence à la mise en demeure pour permettre au cotisant de connaître la nature, la cause et l'étendue de son obligation.

En l'espèce, suivant mise en demeure avant poursuite en date du 13 févier 2012 reçue par M. [M] [Z] le 1er mars 2012, dont justifie la caisse, le RSI [Localité 6] aux droits duquel est venue l'URSSAF [Localité 6] a réclamé à M. [Z] en sa qualité de gérant de la SARL [5] le paiement, sous un mois, des sommes suivantes :

Nature des sommes dues en cotisations, contributions, majorations ou pénalités :

Période : 4e trim 11

Maladie-Maternité 1 Plafd provisionnelle 27,00

Maladie-Maternité 1 Plafd régularisation 208,00

Maladie-Maternité 5 Plafds provisionnelle 265,00

Maladie-Maternité 5 Plafds régularisation 4490,00

Indemnités journalières provisionnelle 47,00

Invalidité 54,00

Décès 4,00

Retraite de base provisionnelle 749,00

Retraite de base régularisation 5469,00

Retraite complémentaire provisionnelle 292,00

Retraite complémentaire régularisation 4832,00

Allocations familiales provisionnelle 243,00

Allocations familiales régularisation 4110,00

CSG - CRDS /rev.act+cot.ob provisionnelle 504,00

CSG - CRDS /rev.act+cot ob régularisation 6452,00

Majorations de retard 1498,00

Pénalités

Sous/Total : 29244,00

Versement(s) jusqu'au 07/02/2012

Total versements(s)

Total dû : 29244,0

TOTAL A PAYER : 29244,00 euros sous réserve de majorations de retard à courir jusqu'à complet paiement

Il convient de rappeler que si l'article L. 131-6 du code de la sécurité sociale a fait l'objet de modifications régulières, il disposait de manière constante :

'Les cotisations d'assurance maladie et maternité et d'allocations familiales des travailleurs non-salariés non agricoles et les cotisations d'assurance vieillesse des professions artisanales, industrielles ou commerciales sont assises sur le revenu professionnel non-salarié ou, le cas échéant, sur des revenus forfaitaires. (...) Les cotisations sont établies sur une base annuelle. Elles sont calculées, à titre provisionnel, en pourcentage du revenu professionnel de l'avant-dernière année ou de revenus forfaitaires. Lorsque le revenu professionnel est définitivement connu, les cotisations font l'objet d'une régularisation (...).'

Ainsi en l'espèce, au lu de la contrainte litigieuse émise consécutivement à la délivrance de la mise en demeure, régulièrement signifiée à M. [Z] par acte d'huissier en date du 3 août 2012, reprenant le numéro et la date de la mise en demeure du 13 février 2012 au titre de la période du 4e trimestre 2011 ('4E TRIM 11'), pour un montant identique de cotisations, contributions et majorations de 29 244 euros, M. [Z] était-il parfaitement en mesure de connaître le motif et la base du redressement et d'apprécier, poste par poste, la nature et les montants de cotisations qui lui étaient réclamées étant observé qu'au 4e trimestre 2011, les régularisations portaient nécessairement sur l'année 2010, tandis que les provisions ne pouvaient être appelées qu'au titre de l'année 2011.

Partant, il est établi que la contrainte était suffisamment motivée au regard des dispositions susvisées, de sorte que M. [Z] était parfaitement informé de la nature, de la cause et de l'étendue de son obligation.

Il convient donc d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a annulé lacontrainte litigieuse au constat que le RSI n'apportait aux débats 'aucun décompte précis et détaillé sur la somme réclamée à Monsieur [Z] [M]'.

Sur les cotisations réclamées

En application des dispositions de l'article R. 133-3 du code de la sécurité sociale en vigueur du 23 août 2009 au 11 mai 2017, conformément aux dispositions de l'article 1315 devenu 1356 du code civil, il incombe à l'opposant à contrainte de rapporter la preuve de l'irrégularité ou du caractère infondé de la créance dont le recouvrement est poursuivi par l'organisme social (en ce sens entre autres arrêts 2e Civ., 19 décembre 2013 N° de pourvoi : 12-28075).

En l'espèce M. [Z] oppose divers motifs à la demande en paiement qui est faite par l'appelante.

S'agissant du motif selon lequel la société [5] dont il était le gérant, devenue [7], en veille et n'ayant aucune activité, ne générait en conséquence aucun revenu, il ressort de ses écritures que M. [Z] a prélevé consécutivement à un accident du travail survenu en avril 2011, des revenus de gérant, sur le compte de cette société, afin de subvenir à ses besoins et ceux de sa famille ; au lu de ces explications, qui suggèrent que ladite société disposait des sommes nécessaires à la rémunération de son gérant, d'un montant suffisant pour faire vivre plusieurs mois durant une famille, selon les explications de l'intéressé, le motif soutenu apparaît inopérant.

M. [Z] ne répond pas par ailleurs au motif de l'URSSAF selon lequel, en sa seule qualité de gérant de la société [7], il était affilié au RSI et soumis à cotisations en qualité de travailleur indépendant.

Il n'y a enfin pas matière à s'interroger sur une affiliation concomitante de M. [Z], travailleur indépendant, en une autre qualité éventuelle de salarié, puisqu'ainsi que le souligne l' Urssaf, le litige porte sur une échéance du 4e trimestre 2011, laquelle correspond à la régularisation de l'année 2010 et l'appel de provisions du 4e trimestre 2011, de sorte que sur la période objet de la contrainte, l'activité salariée ayant pris fin avec la rupture conventionnelle du contrat de travail le 31 juillet 2009 n'était plus d'actualité.

En outre, les moyen tirés de :

- l'absence de versement d'indemnités journalières, et le préjudice allégué en résultant,

- et la contradiction inhérente aux écritures de l'URSSAF qui lui oppose qu'il n'était pas à jour de ses cotisations pour justifier le défaut de versement des indemnités journalières, alors qu'elle l'a pourtant pris en charge pour la couverture sociale,

sont inopérants dès lors que, d'une part, le grief n'est pas dirigé contre la caisse primaire d'assurance maladie territorialement compétente par transfert de la gestion de l'assurance maladie dévolue au RSI consécutivement à sa suppression au 1er janvier 2018, qui n'est pas dans la cause, et que, d'autre part, M. [Z] n'est pas recevable à contester une décision de refus d'attribution d'indemnités journalières à l'occasion d'un litige portant sur le recouvrement des cotisations sociales.

Au demeurant, l'URSSAF n'a pas pris clairement position sur les motifs du défaut de paiement allégué des indemnités journalières revenant à M. [Z], dans le cadre du présent litige pendant devant la cour, en ce qu'elle indique fournir ses explications 'à titre informatif'.

Quant au bénéfice de l'exonération de cotisations sociales liées à l'ACCRE, résultant de la création de la société [4] le 1er septembre 2009, dont allègue M. [Z] pour faire valoir qu'il n'était redevable d'aucune cotisation vis-à-vis du RSI, l'article L. 5141-1 du code du travail de la sécurité socialé modifié par la loi n°2008-1249 du 1er décembre 2008 prévoyait :

'Peuvent bénéficier des exonérations de charges sociales prévues à l'article L. 161-1-1 du code de la sécurité sociale, lorsqu'elles créent ou reprennent une activité économique, industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, soit à titre individuel, soit sous la forme d'une société, à condition d'en exercer effectivement le contrôle, ou entreprennent l'exercice d'une autre profession non salariée :

1° Les demandeurs d'emploi indemnisés ;

2° Les demandeurs d'emploi non indemnisés inscrits à l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 six mois au cours des dix-huit derniers mois ;

3° Les bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique ou du revenu de solidarité active ;

4° Les personnes remplissant les conditions pour bénéficier du contrat emploi-jeune ;

5° Les personnes bénéficiant du contrat emploi-jeune dont le contrat se trouve rompu avant le terme de l'aide prévue à ce même article ;

6° Les personnes salariées ou les personnes licenciées d'une entreprise soumise à l'une des procédures de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires prévues aux titres II, III et IV du livre VI du code de commerce qui reprennent tout ou partie de cette entreprise dès lors qu'elles s'engagent à investir en capital la totalité des aides et à réunir des apports complémentaires en capital au moins égaux à la moitié des aides accordées ;

7° Les personnes ayant conclu un contrat d'appui au projet d'entreprise mentionné à l'article L. 127-1 du code de commerce, sous réserve qu'elles remplissent l'une des conditions prévues aux 1° à 6° à la date de conclusion de ce contrat ;

8° Les personnes physiques créant une entreprise implantée au sein d'une zone urbaine sensible ;

9° Les bénéficiaires du complément de libre choix d'activité mentionné à l'article L. 531-4 du code de la sécurité sociale.'

Et selon les dispositions de l'article L. 161-1-1 du code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 1er mai 2008 au 1er janvier 2016 :

'Par dérogation aux dispositions en vigueur, l'exercice de leur nouvelle activité par les personnes mentionnées aux articles L. 5141-1 et L. 5141-2 du code du travail qui bénéficient de l'aide à la création ou reprise d'entreprise instituée par ledit article ouvre droit, pour une période et dans la limite d'un plafond de revenus ou de rémunérations fixés par décret, à l'exonération des cotisations dues aux régimes d'assurance maladie, maternité, veuvage, vieillesse, invalidité et décès et d'allocations familiales auxquels elles sont affiliées en raison de l'exercice de cette activité et aux prestations servies par ces régimes. La durée de l'exonération, totale ou partielle, peut être prolongée dans des conditions et limites fixées par décret lorsque l'entreprise créée ou reprise entre dans le champ de l'article 50-0 du code général des impôts. Il en va de même lorsque les personnes mentionnées au premier alinéa ont opté pour le régime prévu à l'article 102 ter du même code.

L'exonération prévue à l'alinéa précédent porte :

1° Sur les cotisations à la charge de l'employeur et du salarié et afférentes à la fraction des rémunérations versées au cours de la période d'exonération, si ces personnes relèvent d'un régime de salariés ;

2° Sur les cotisations dues au titre de l'activité exercée au cours de la période d'exonération, si ces personnes relèvent d'un régime de non-salariés.

L'exonération doit être demandée par l'employeur dans le cas mentionné au 1° et par le non-salarié dans le cas mentionné au 2°.

L'exonération dont bénéficient les personnes mentionnées à l'article L. 5141-2 du code du travail ainsi que la prolongation de la durée d'exonération prévue au premier alinéa du présent article ne donnent pas lieu à application de l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale.'

Or, selon les explication et les pièces produites aux débats par les parties, M. [Z] a créé une société [4], qui a employé à compter du 5 octobre 2009 un salarié en la personne de M. [T] [L], décédé le 14 décembre 2011.

L'URSSAF considère que la demande d'attribution de l'ACCRE datée du 14 septembre 2009 produite aux débats concerne la société [4], et non M. [Z] en sa qualité de travailleur indépendant, objet de sa demande de cotisations. Elle précise qu'il en est de même de l'attestation d'attribution de l'ACCRE, datée du 23 septembre 2009 et adressée à la société à la suite de sa création. Elle en déduit que l'exonération de cotisations demandée entrait dans les prévisions de l'article L. 161-1-1, 1° du code de la sécurité sociale, et non de l'article l'article L. 161-1-1, 2° dudit code.

M. [Z] soutient que bénéficiant de l'ACCRE, il n'était pas assujetti au paiement des cotisations réclamées dans le cadre du présent litige, mais ne réfute pas utilement l'analyse soutenue par la caisse.

La cour constate au vu des pièces produites, que la demande d'ACCRE a été formée au titre de la création d'une société, la société [4], ainsi que le souligne l'URSSAF, et non au titre de la création d'une entreprise individuelle, comme le prévoit également le formulaire Cerfa de demande de l'aide à la création à à la reprise d'une entreprise produit aux débats et complété par M. [Z].

En l'état des pièces produites et des explications des parties, M. [Z] ne justifie pas d'une cause d'exonération des cotisations dues au titre de son activité de commerçant en tant que gérant de la SARL [5] ([5]) devenue la SARL [7] jusqu'au 5 juin 2012.

Il apparaît enfin que M. [Z] conteste les calculs de l'URSSAF en ce que cette dernière ne procède pas à une reddition sur justificatifs des sommes qu'il a versées à titre de cotisations depuis l'origine de son activité, qu'elle ne produit pas ses déclarations au titre des revenus professionnels qu'il aurait déclarés, encore, qu'elle n'explique pas l'absence de versement d'indemnités journalières sur l'année 2011, enfin, que les tableaux intégrés dans ses écritures lui reconnaissent le bénéfice d'indemnités journalières qu'il aurait perçues, alors qu'il a indiqué dans son recours ne pas en avoir bénéficié en 2011.

Aucun de ces motifs n'est de nature à remettre en cause la charge de la preuve de l'irrégularité ou du caractère infondé de la créance dont le recouvrement est poursuivi par l'organisme social, qui pèse sur l'opposant à contrainte.

M. [Z] procède par voie d'affirmations, sans établir de discordance entre ses déclarations effectuées auprès du RSI, qu'il lui appartient au premier chef de produire aux débats, et l'assiette de cotisations provisionnelles ou définitives prises en compte par l'URSSAF - selon qu'elle procède à un appel de cotisations provisionnelles au titre du 4e trimestre de l'année 2011 ou à la régularisation de l'année 2010.

Au lu des écritures de la caisse, les indemnités journalières sont effectivement constitutives d'une partie de l'assiette des cotisations provisionnelles au titre de l'année 2011, reprises pour un montant de 13 562 euros dans l'un des tableaux critiqués. M. [Z] se contente d'indiquer qu'il n'a pas perçu ces indemnités journalières pour ce montant alors que les tableaux intégrés dans ses écritures lui en reconnaissent le bénéfice, sans jamais préciser sur quel fondement juridique elles ne devaient pas être retenues dans l'assiette des cotisations correspondante, et même, sans jamais justifier de la réalité de ce défaut de versement, par des échanges de courriers avec le RSI par exemple.

Eu égard à l'ensemble de ces éléments, en l'absence d'autres motifs pertinents, il est établi que M. [M] [F] redevable à l'égard de l'URSSAF [Localité 6] de la somme de 29 244 euros, majorations de retard incluses à hauteur de la somme de 1 498 euros, conformément à la contrainte du 12 juillet 2012.

Il convient donc de valider purement et simplement ladite contrainte.

Sur la demande de dommages-intérêts

Il résulte des constats posés que M. [Z] ne rapporte pas la preuve d'un manquement de l'URSSAF venant aux droits du RSI, à une éventuelle obligation d'avoir à lui verser des indemnités journalières consécutivement à son accident d'avril 2011.

Ce moyen manquant en fait, et en droit, il convient de le débouter de sa demande.

Sur les frais de signification de la contrainte et les dépens

Le jugement a dit que les frais de signification de la contrainte resteraient à la charge de la caisse nationale du régime social des indépendants.

Aucune des deux parties ne conclut expressément sur ce point.

Néanmoins, dans sa demande de confirmation du jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lille du 31 janvier 2013, M. [Z] inclut nécessairement les frais de signifiation de la contrainte, alors mis à la charge de la 'caisse nationale du régime social des indépendants'.

La caisse, concluant à l'infirmation du même jugement et sollicitant la condamnation de M. [Z] 'en tous les frais et dépens', englobe de même dans sa demande, les dispositions relatives aux frais de signification de la contrainte.

Saisie de ces demandes, la cour infirme le jugement entrepris en ce qu'il a dit que les frais de signification de la contrainte resteraient à la charge de la caisse, et condamne M. [M] [Z], partie succombante, à les payer.

Pour le même motif, M. [M] [Z] est condamné aux dépens de première instance, et de l'instance d'appel.

L'équité commande enfin de le débouter de sa demande au titre de ses frais irrépétibles, non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement entrepris ;

Valide la contrainte en date du 12 juillet 2012 signifiée à M. [M] [Z] pour un montant global de 29 244 euros, dont 1 498 euros de majorations de retard ;

Condamne M. [Z] au paiement des frais de signification de ladite contrainte ;

Déboute M. [M] [Z] de sa demande de dommages-intérêts ;

Déboute M. [M] [Z] de sa demande au titre de ses frais irrépétibles, non compris dans les dépens ;

Condamne M. [M] [Z] aux dépens de première instance, et de l'instance d'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 23/01387
Date de la décision : 08/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 14/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-08;23.01387 ?
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