La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/07/2024 | FRANCE | N°21/03520

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 08 juillet 2024, 21/03520


ARRET

N° 664





Société [5]





C/



CPAM DE L'ARTOIS













COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 08 JUILLET 2024



*************************************************************



N° RG 21/03520 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IE7L

N° registre 1ère instance : 18/00966



Jugement du tribunal judiciaire d'Arras (pôle social) en date du

21 juin  2021





PART

IES EN CAUSE :





APPELANTE





Société [5]

agissant poursuites et diligences de ses réprésentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]



représentée par Monsieur [X] [W] dûment mandaté







ET :







...

ARRET

N° 664

Société [5]

C/

CPAM DE L'ARTOIS

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 08 JUILLET 2024

*************************************************************

N° RG 21/03520 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IE7L

N° registre 1ère instance : 18/00966

Jugement du tribunal judiciaire d'Arras (pôle social) en date du

21 juin  2021

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

Société [5]

agissant poursuites et diligences de ses réprésentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Monsieur [X] [W] dûment mandaté

ET :

INTIMÉE

CPAM de l'Artois

agissant poursuites et diligences de ses réprésentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée et plaidant par Mme [R] [L], munie d'un pouvoi régulier

DEBATS :

A l'audience publique du 16 avril 2024 devant Mme Anne Beauvais, conseillère, siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 945-1 du code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 08 juillet 2024.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Blanche Tharaud

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Anne Beauvais en a rendu compte à la cour composée en outre de :

M. Philippe Mélin, président,

Mme Anne Beauvais, conseillère,

et M. Renaud Deloffre, conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 08 juillet 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, M. Philippe Mélin, président a signé la minute avec Mme Nathalie Lépeingle, greffier.

*

* *

DECISION

Saisi par la société [5] de l'opposition à la contrainte émise le 30 novembre 2018 et signifiée le 4 décembre 2018 par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois (la CPAM ou la caisse) lui réclamant la somme de 5 405,22 euros correspondant à des indus à la suite d'un contrôle d'activité, le pôle social du tribunal judiciaire d'Arras, par un jugement en date du 21 juin 2021 auquel il convient de se référer pour un plus ample exposé des motifs et des faits, a :

- validé la contrainte émise le 30 novembre 2018 et signifiée le 4 décembre 2018 à la requête de la CPAM de l'Artois lui réclamant la somme de 5 405,22 euros correspondant à des indus suite à un contrôle de l'activité du 9 juillet 2013 au 20 mai 2015 (transports non remboursables, transports facturés au vu de prescriptions établies a posteriori, transports facturés sans actes associés, erreurs de tarifications, incompatibilité dans les horaires),

- condamné la société [5] à verser la somme de 5 405,22 euros à la CPAM de l'Artois,

- condamné la société [5] aux dépens.

La société [5] a interjeté appel le 30 juin 2021 de ce jugement qui lui avait été notifié la veille et les parties ont été convoquées à l'audience du

2 mars 2022. Puis l'affaire a fait l'objet de renvois successifs aux audiences du 20 mars 2023, 11 janvier 2024 et 16 avril 2024, afin de permettre aux parties d'échanger leurs pièces et conclusions.

Par conclusions communiquées les 21 septembre 2023 (selon visa du greffe) et 30 mars 2024 (par la voie électronique), développées oralement à l'audience, la société [5], représentée par son gérant M. [X] [W], demande à la cour d'infirmer le jugement et d'annuler l'indu notifié par la caisse.

Elle explique que la CPAM n'a jamais répondu à ses courriers en 2016, à l'issue du contrôle de facturation de son activité de taxi, et que la commission de recours amiable ne l'a jamais entendue. Elle indique avoir notamment envoyé à la caisse deux lettres recommandées demeurées sans réponse.

Elle explique son absence à la procédure de première instance par le fait que sa gestionnaire de facturation, Mme [O], salariée de la société [6], ne s'est jamais présentée aux audiences.

S'agissant de l'indu qui lui est imputé, la société [5] conteste avoir fraudé mais admet que des erreurs de frappe ont pu être commises, ce qui a d'ailleurs justifié selon elle qu'elle ait fait appel à un gestionnaire de tarification, en la personne de Mme [O].

Elle reprend les dix tableaux d'indu de la CPAM point par point, en expliquant qu'elle a fait application, à chaque fois, de la tarification et réglementation en vigueur.

Elle conclut en indiquant que Mme [O], dont le manque de diligence explique la tardiveté de l'établissement de ses conclusions, a quitté l'entreprise [6], et que, de manière générale, le travail de transport a toujours été bien fait, malgré quelques erreurs de frappe dans la saisie des factures.

En réponse et par conclusions communiquées au greffe le 22 janvier 2024, soutenues oralement à l'audience, la CPAM de l'Artois demande à la cour de :

- constater l'absence de motivation de l'opposition à contrainte formée,

Subsidiairement,

- confirmer le jugement,

- constater le bien-fondé de la procédure de notification et de recouvrement de l'indu de 5 405,22 euros,

- confirmer l'indu de 5 405,22 euros notifié le 23 juin 2016 au transporteur,

- condamner le transporteur à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- reconventionnellement, condamner le transporteur au paiement de la somme indue de 5 405,22 euros majorée des intérêts de retard à compter de la date de confirmation de l'indu, soit le 8 septembre 2016, en application de l'article 1352-7 du code civil.

La caisse fait valoir que l'opposition à contrainte de la société [5] n'est pas motivée, cette dernière ne remettant pas en cause le fondement de l'indu à l'appui d'éléments de fait ou de droit dans l'acte de saisine du tribunal.

Elle souligne qu'elle n'a pas de trace du courrier mentionné dans l'opposition à contrainte, qu'elle a seulement réceptionné des observations émises le 19 août 2016 auxquelles il a été répondu par un courrier du 8 septembre 2016.

Sur ce point elle ajoute que le transporteur n'a jamais produit ce supposé courrier, ni en première instance, ni en cause d'appel. Quant à l'accusé de réception produit par mail par la société [5], pièce intitulée « preuve de dépôt à conserver par le client », elle indique que l'adresse et le nom du destinataire sont effacés, que la seule mention lisible est « Arras », ce qui peut tant correspondre à la caisse qu'au tribunal. Sur ce point elle précise que le tampon de la poste indique le chiffre 5 ainsi que l'année 2018 ainsi que le chiffre 2 en fin de date, ce qui correspond soit au mois de février, soit au mois de décembre. Elle en déduit qu'il s'agit en réalité de la preuve de dépôt de l'opposition à contrainte formée le 5 décembre 2018 et non de la preuve de dépôt d'un courrier en décembre 2016.

La caisse soutient encore que le défaut de motivation d'une opposition à contrainte est sanctionné par son irrecevabilité.

A titre subsidiaire, sur le bien-fondé de l'indu, la caisse rappelle qu'aucune fraude n'a été constatée et que le transporteur a expressément reconnu un indu à hauteur de 902,65 euros, partie sur laquelle il ne peut être revenu.

Elle reprend ensuite l'indu point par point ce qu'elle désigne comme étant des anomalies de facturation, à l'aide de tableaux détaillés.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties s'agissant de la présentation plus complète de leurs demandes et des moyens qui les fondent.

MOTIFS

Il ressort des pièces produites aux débats par les parties que suivant courrier en date du 23 juin 2016, la CPAM a notifié à la société [5] un indu relatif à des anomalies de facturation pour des transports remboursés sur la période du 9 juillet 2013 au 20 mai 2015, à hauteur de la somme de 5 405,22 euros.

En réponse et par courrier du 19 août 2016, la société [6], mandatée par la société [5], a présenté des observations.

Par courrier du 8 septembre 2016, la caisse a confirmé à la société [5] sa notification d'avoir à payer l'indu à hauteur de 5 405,22 euros.

Cette décision n'a pas été contestée.

Puis, par courrier recommandé du 17 novembre 2016, réceptionné le 22 novembre suivant, la caisse a mis en demeure la société [5] d'avoir à lui payer la somme de 5 405,22 euros correspondant à l'indu notifié le 8 septembre 2016.

Cette mise en demeure n'a pas été contestée.

Enfin, par courrier du 30 novembre 2018, réceptionné le 4 décembre 2018, la CPAM a signifié à la société [5] une contrainte d'avoir à payer la somme de 5 405,22 euros.

Par courrier réceptionné le 6 décembre 2018, la société [5] a formé opposition à cette contrainte devant le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Arras.

L'affaire a été transférée au pôle social du tribunal judiciaire d'Arras, lequel a statué comme exposé précédemment.

***

En application de l'article R. 133-3 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue du décret n°2017-864 applicable au litige, l'opposition à contrainte doit être motivée dans l'acte de saisine de la juridiction contentieuse.

Ces dispositions exigent que le débiteur fasse connaître les motifs de son opposition dans l'acte saisissant la juridiction à peine d'irrecevabilité de sa demande, peu important qu'il ait ou non contesté la notification d'indu ou la mise en demeure devant la commission de recours amiable au préalable.

L'irrecevabilité de l'opposition à contrainte ne peut être soulevée que si l'obligation de motivation a été mentionnée dans la contrainte.

En l'espèce, la contrainte de la caisse du 30 novembre 2018 mentionne bien que, sous peine d'irrecevabilité, l'opposition doit être motivée.

L'acte de saisine du tribunal d'Arras, formalisant l'opposition à contrainte, est libellé en ces termes : « conformément aux dispositions de l'article R. 133-3 du CSS, nous avons l'honneur de former opposition à la contrainte qui nous a été signifiée par voie de recommandé le 4 décembre 2018 à la demande de la CPAM de l'Artois. Vous trouverez ci-joint une copie de cette contrainte. Notre opposition est motivée par les arguments suivants : suite à un contrôle de mon activité, j'ai émis plusieurs remarques par courrier sollicitant une convocation devant la Commission amiable sans que mes courriers n'aient été suivi d'effet. Depuis mon dernier courrier en date du 20.12.2016 je suis sans nouvelle de la caisse et je me vois notifier cette contrainte sans que mes observations n'aient pu être entendues. Je sollicite donc l'appel de ce dossier devant votre tribunal ».

Cette opposition n'est motivée par aucun élément de fait ou de droit en rapport avec l'indu litigieux.

La société n'a pas répondu au moyen d'irrecevabilité de son opposition soulevé par la caisse et se borne à expliquer qu'en première instance, le dossier était géré par un mandataire, la société [6], laquelle n'aurait pas accompli les diligences qui lui incombaient.

En outre, le courrier du 20 décembre 2016 auquel l'acte d'opposition renvoie, qui semble contenir des éléments de contestation de l'indu formulés par la société appelante, n'est pas produit aux débats et la CPAM déclare n'en avoir jamais eu connaissance.

La société [5] soutient que deux lettres recommandées, pour lesquelles elle ne précise pas les dates d'envoi ou de réception, auraient été expédiées à la caisse aux fins de s'expliquer sur l'indu.

Ces courriers ne sont pas produits, ni même les accusés de réception y afférents, la société déclarant qu'il s'agissait de lettres recommandées.

Aussi, le seul fait de déclarer dans l'opposition à contrainte que la caisse n'a pas pris en compte des observations formulées par un courrier précis, dont l'existence et le contenu ne sont pas démontrés, sans même contester l'indu à l'aide d'élément de fait ou de droit, ne suffit pas à satisfaire à l'obligation de motivation de l'opposition à contrainte incombant à la société [5].

Enfin, la caisse conteste que la preuve de dépôt d'un courrier qui lui a été transmise par la société [5] par courriel du 11 janvier 2024 soit celle du courrier du 20 décembre 2016.

L'appelante ne s'est toutefois aucunement prévalue, à quelque titre que ce soit, de cette preuve de dépôt dans la présente instance, ce document n'ayant d'ailleurs pas été transmis à la cour. Il ressort d'ailleurs de la reproduction de cette pièce dans les écritures de la caisse qu'il s'agit d'un courrier déposé en 2018 et non en 2016.

Partant, il convient, par infirmation du jugement entrepris, de déclarer irrecevable l'opposition à contrainte formalisée par la société [5] le 6 décembre 2018 pour défaut de motivation.

Succombant totalement, la société [5] sera condamnée aux entiers dépens de l'instance.

L'équité commande de laisser aux parties la charge de leurs propres frais irrépétibles. La caisse sera en conséquence déboutée de sa demande de condamnation fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe en dernier ressort,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Déclare irrecevable l'opposition à contrainte de la société [5] du 6 décembre 2018,

Condamne la société [5] aux dépens de l'instance d'appel,

Déboute la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 21/03520
Date de la décision : 08/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 14/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-08;21.03520 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award