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04/07/2024 | FRANCE | N°23/02867

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Chambre baux ruraux, 04 juillet 2024, 23/02867


ARRET







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G.A.E.C. [P]







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COUR D'APPEL D'AMIENS



Chambre BAUX RURAUX





ARRET DU 04 JUILLET 2024



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N° RG 23/02867 - N° Portalis DBV4-V-B7H-IZ2W



ORDONNANCE DU TRIBUNAL PARITAIRE DES BAUX RURAUX DE BEAUVAIS EN DATE DU 07 JUILLET 2022





PARTIES EN CAUSE :




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Monsieur [I] [M]

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[Localité 4]





Madame [F] [M]

[Adresse 8]

[Localité 4]



Représentés par Me Eric POILLY substituant Me Jérôme LE ROY de la SELARL LX AMIENS-DOUAI, avocats au barreau d'AMIENS,



Ayant pour avocat plaidant Me D...

ARRET

[M]

[M]

C/

[P]

[P]

G.A.E.C. [P]

VD

COUR D'APPEL D'AMIENS

Chambre BAUX RURAUX

ARRET DU 04 JUILLET 2024

*************************************************************

N° RG 23/02867 - N° Portalis DBV4-V-B7H-IZ2W

ORDONNANCE DU TRIBUNAL PARITAIRE DES BAUX RURAUX DE BEAUVAIS EN DATE DU 07 JUILLET 2022

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTS

Monsieur [I] [M]

[Adresse 8]

[Localité 4]

Madame [F] [M]

[Adresse 8]

[Localité 4]

Représentés par Me Eric POILLY substituant Me Jérôme LE ROY de la SELARL LX AMIENS-DOUAI, avocats au barreau d'AMIENS,

Ayant pour avocat plaidant Me Denis GUERARD, avocats au barreau de BEAUVAIS

ET :

INTIMES

Monsieur [Z] [P]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Monsieur [E] [P]

[Adresse 3]

[Localité 5]

G.A.E.C. [P] agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentés par Me Gilles CABOCHE de la SCP GILLES CABOCHE, avocat au barreau de BEAUVAIS

DEBATS :

A l'audience publique du 09 Avril 2024 devant Mme Valérie DUBAELE, Conseillère, siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu des articles 805 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 04 Juillet 2024.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Madame Diénéba KONÉ

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Valérie DUBAELE en a rendu compte à la Cour composée en outre de :

Mme Odile GREVIN, Présidente de chambre,

Mme Françoise LEROY-RICHARD, Conseillère,

et Mme Valérie DUBAELE , Conseillère,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 04 Juillet 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Odile GREVIN, Présidente a signé la minute avec Mme Diénéba KONÉ, Greffier.

*

* *

DECISION

Messieurs [Z] et [E] [P] étaient, aux termes de deux contrats du 8 juillet 1993, preneurs à bail à ferme de diverses parcelles d'une surface totale de 140 ha et 19 a situées sur les communes de [Localité 6], [Localité 10], [Localité 11], [Localité 7] et [Localité 9] (02), qu'ils ont mises à disposition du GAEC [P].

Ces deux baux ont été renouvelés pour la dernière fois le 12 novembre 2011.

Saisi par les preneurs d'une demande d'annulation des congés pour reprise délivrés le 10 mai 2019, le tribunal paritaire des baux ruraux de Beauvais, par jugement du 7 octobre 2021, les a déboutés, a constaté que la validation des congés prenait effet au 11 novembre 2020, date d'effet des congés, et ordonné la libération des lieux.

Les terres ont été restituées le 27 novembre 2021, un procès-verbal de reprise ayant été dressé par commissaire de justice à cette date.

Suivant ordonnance de référé du 7 juillet 2022, le président du tribunal paritaire des baux ruraux de Beauvais, saisi par les preneurs sortants et le GAEC [P] le 21 mars 2022, a déclaré leur demande d'expertise recevable et ordonné une expertise judiciaire aux frais avancés des preneurs et du Gaec [P] aux fins d'établir l'existence ou l'absence d'améliorations culturales et leur consistance le cas échéant et commis M. [T] [K], expert judiciaire agricole et foncier, pour y procéder et condamné les demandeurs aux dépens.

Les bailleurs ont formé appel de cette ordonnance en toutes ses dispositions et par conclusions notifiées par voie électronique le 19 février 2024 auxquelles ils se rapportent à l'audience demandent à la cour, au visa de l'article L.411-69 dernier alinéa du CRPM et des articles 31, 32, 122, 125 et 145 du CPC, de :

-infirmer l'ordonnance entreprise et, statuant à nouveau, de :

-déclarer Messieurs [Z] et [E] [P] et le GAEC [P] irrecevables en leur action ;

-les débouter de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

-condamner solidairement Messieurs [Z] et [E] [P] et le GAEC [P] à payer à Monsieur [I] [M] et Madame [F] [M] la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du CPC ;

-condamner solidairement Messieurs [Z] et [E] [P] et le GAEC [P] aux entiers dépens de l'instance, tant en référé qu'en cause d'appel.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 12 janvier 2024 auxquelles ils se rapportent à l'audience les preneurs sortants demandent à la cour de confirmer l'ordonnance entreprise et de condamner les appelants aux dépens ainsi qu'à verser au GAEC [P], à Monsieur [Z] [P] et à Monsieur [E] [P] une indemnité de procédure de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE,

Sur la recevabilité de la demande d'expertise in futurum :

Le premier juge a considéré que cette demande était recevable en retenant que le délai pour agir en indemnisation pour améliorations culturales n'a pu commencer à courir que le jour du jugement validant les congés, soit le 7 octobre 2021, que l'action en contestation des congés avait en effet suspendu les effets de ces derniers jusqu'au prononcé du jugement les validant et bénéficiant de l'exécution provisoire, que le délai de forclusion ne peut pas, sans porter au droit d'accès au juge, commencer à courir rétroactivement à compter du 11 novembre 2020, date d'effet des congés, alors que ces derniers ont été suspendus pendant l'instance et qu'au surplus l'alinéa 5 de l'article L.411-69 du code rural n'oblige pas les preneurs qui contestent les congés qui leur sont délivrés à concentrer leurs demandes et prétentions relatives aux baux ruraux en cours.

Les appelants font valoir que les preneurs ne justifient pas d'un motif légitime, au sens de l'article 145 du code de procédure civile, de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve des améliorations culturales qu'ils allèguent, dès lors que toute action indemnitaire sur ce fondement serait forclose par application de l'article L.411-69 du code rural, l'assignation aux fins d'expertise in futurum ayant été délivrée le 21 mars 2022 soit plus d'un an après la fin du bail le 11 novembre 2020, date d'effet des congés. Ils ajoutent que le délai de forclusion a couru, comme l'a réaffirmé la cour de cassation dans son arrêt du 9 mars 2023, à compter de la date de fin du bail et non à compter de la décision judiciaire ayant validé les congés. Ils estiment que contrairement à l'appréciation du premier juge cette disposition ne se heurte pas au principe du droit d'accès au juge dans la mesure où les preneurs avaient la liberté de solliciter devant le tribunal paritaire des baux ruraux, à titre subsidiaire, la fixation des indemnités dues au preneur sortant au cas où le congé serait validé et que la rigueur du délai de forclusion s'explique tout-à-fait dès lors que les dispositions de l'article L.411-76 du code rural permettent même au preneur de solliciter en référé, dès avant la fin du bail, une fixation provisionnelle de l'indemnité de fin de bail pour améliorations culturales, avec un droit au maintien dans les lieux tant que cette indemnité provisionnelle n'est pas versée.

Les intimés font valoir que leur action indemnitaire n'est pas forclose dans la mesure où le délai d'un an pour agir en paiement d'une indemnité de sortie n'a commencé à courir qu'à partir du prononcé du jugement entrepris du 7 octobre 2021 qui a validé les congés. Ils estiment en effet que l'action en contestation des congés a suspendu les effets des congés jusqu'à la date de prononcé du jugement qui a tranché la contestation, que le délai de forclusion ne peut pas, sans porter atteinte au droit d'accès au juge, commencer à courir rétroactivement à compter du 11 novembre 2020, qu'au surplus l'alinéa 5 de l'article L.411-69 du code rural et de la pêche maritime n'oblige pas les preneurs qui contestent les congés à concentrer leurs demandes et prétentions, et enfin que le délai de forclusion n'a commencé à courir qu'à compter du moment où le tribunal a exercé son contrôle sur les conditions de la reprise alléguée.

Aux termes de l'article 145 du code de procédure, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.

Un plaideur n'a de motif légitime d'obtenir en référé la désignation d'un expert aux fins de déterminer le principe et la valeur des améliorations culturales que si l'action au fond aux fins de paiement d'une indemnité pour améliorations culturales n'est pas manifestement irrecevable.

Aux termes de l'article L. 411-69 du code rural et de la pêche maritime « Le preneur qui a, par son travail ou par ses investissements, apporté des améliorations au fonds loué a droit, à l'expiration du bail, à une indemnité due par le bailleur, quelle que soit la cause qui a mis fin au bail. Sont assimilées aux améliorations les réparations nécessaires à la conservation d'un bâtiment indispensable pour assurer l'exploitation du bien loué ou l'habitation du preneur, effectuées avec l'accord du bailleur par le preneur et excédant les obligations légales de ce dernier. Il en est de même des travaux ayant pour objet de permettre d'exploiter le bien loué en conformité avec la législation ou la réglementation. En cas de vente du bien loué, l'acquéreur doit être averti par l'officier public ou ministériel chargé de la vente du fait qu'il supportera, à la sortie du preneur, la charge de l'indemnité éventuellement due à celui-ci. Si la vente a eu lieu par adjudication, le cahier des charges doit mentionner la nature, le coût et la date des améliorations apportées par le preneur dans les conditions prévues aux articles L. 411-71 et L. 411-73. Cette mention est établie par l'officier public ou ministériel chargé de la vente d'après les indications fournies par le bailleur et par le preneur ; en cas de désaccord entre les parties, elle fait état des éléments contestés. La demande du preneur sortant relative à une indemnisation des améliorations apportées au fonds loué se prescrit par douze mois à compter de la date de fin de bail, à peine de forclusion. »

Il est établi que le délai pour agir est un délai de forclusion d'un an, courant à compter de la fin du bail, insusceptible, sauf disposition contraire, d'interruption ou de suspension (Civ.3ème 9 mars 2023, pourvoi n°21-13.646).

En l'espèce, le bail a pris fin au jour de la prise d'effet des congés, soit au terme des baux fixé le 11 novembre 2020.

C'est donc à partir de cette date que le délai d'un an pour agir en indemnisation des améliorations culturales a commencé à courir, peu importe à cet égard que les preneurs aient contesté en justice la validité du congé.

L'action aux fins de versement d'une indemnité pour améliorations culturales étant manifestement forclose à partir du 12 novembre 2021 par application de l'article L.411-69 du code rural, la demande d'expertise in futurum aux fins d'évaluer les améliorations culturales, formulée le 21 mars 2022, apparaît dépourvue de motif légitime.

Dès lors il y a lieu d'infirmer l'ordonnance entreprise.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

Les intimés succombant à l'instance seront condamnés à en supporter les dépens. Il est en revanche équitable de dire que chaque partie supportera la charge de ses frais hors dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, et contradictoirement,

Infirme l'ordonnance entreprise et, statuant à nouveau,

Déclare irrecevable la demande d'expertise de M. [Z] [P], M. [E] [P] et le GAEC [P],

Les condamne aux entiers dépens de première instance et d'appel,

Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Chambre baux ruraux
Numéro d'arrêt : 23/02867
Date de la décision : 04/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-04;23.02867 ?
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