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24/06/2024 | FRANCE | N°22/02332

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 24 juin 2024, 22/02332


ARRET







CPAM DE L'ARTOIS





C/



Société [5]













COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 24 JUIN 2024



*************************************************************



N° RG 22/02332 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IOEC - N° registre 1ère instance : 20/00117



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE D'ARRAS (POLE SOCIAL) EN DATE DU 18 FÉVRIER 2022





PARTIES EN CAUSE :
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APPELANTE





CPAM DE L'ARTOIS

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représentée et plaidant par Mme [F] [O], munie d'un pouvoir régulier ...

ARRET

CPAM DE L'ARTOIS

C/

Société [5]

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 24 JUIN 2024

*************************************************************

N° RG 22/02332 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IOEC - N° registre 1ère instance : 20/00117

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE D'ARRAS (POLE SOCIAL) EN DATE DU 18 FÉVRIER 2022

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

CPAM DE L'ARTOIS

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée et plaidant par Mme [F] [O], munie d'un pouvoir régulier

ET :

INTIMEE

Société [5] venant aux droits de la société [4]

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représentée et plaidant par Me Aurélie GUYOT, avocat au barreau d'AMIENS

DEBATS :

A l'audience publique du 28 Mars 2024 devant M. Pascal HAMON, président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 945-1 du code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 24 Juin 2024.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Audrey VANHUSE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

M. Pascal HAMON en a rendu compte à la cour composée en outre de :

Mme Jocelyne RUBANTEL, président,

M. Pascal HAMON, président,

et Mme Véronique CORNILLE, conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 24 Juin 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Jocelyne RUBANTEL, président a signé la minute avec Mme Diane VIDECOQ-TYRAN, greffier.

*

* *

DECISION

Le 4 octobre 2018, M. [C] [S], salarié de la SASU [4] en qualité de chef de chantier, a effectué une déclaration de maladie professionnelle sur la base d'un certificat médical initial du 21 août 2018 mentionnant un « syndrome du canal carpien bilatéral avec paresthésie, paralysie des mains nocturnes, confirmé à l'EMG (atteinte sévère) opéré à droite le 23 juillet 18 opération à gauche prévue le 2.10.18 ».

A réception des deux dossiers (canal carpien droit et gauche), la caisse primaire d'assurance maladie de l'Artois (ci-après la CPAM), qui a considéré que les conditions tenant au délai de prise en charge et à la liste limitative des travaux fixés par le tableau n° 57 C des maladies professionnelles n'étaient pas remplies, a soumis les dossiers pour avis au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (ci-après CRRMP).

Lors de sa séance du 31 juillet 2019, le CRRMP de la région Tourcoing Hauts-de-France a rendu, dans chaque dossier, un avis favorable à la reconnaissance du caractère professionnel des maladies déclarées par M. [S] en retenant l'existence d'un lien direct entre les maladies et le travail habituel de la victime.

Le 1er août 2019, la caisse a notifié ses deux décisions de prise en charge des maladies au titre de la législation professionnelle.

Contestant cette prise en charge, la société a saisi la commission de recours amiable, puis le pôle social du tribunal judiciaire d'Arras qui, par jugement en date du 18 février 2022, a :

ordonnée la jonction des affaires enregistrées au rôle sous les numéros 20/00117, 20/00118, 20/00476 et 20/00477,

déclaré inopposables à la société [4] les décisions de la caisse du 1er août 2019 prenant en charge les pathologies déclarées le 4 octobre 2018, à savoir des syndromes du canal carpien droit et gauche, par M. [S],

débouté la caisse de ses demandes,

condamné la caisse à verser à la société [4] la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la caisse aux dépens.

La CPAM de l'Artois a relevé appel de cette décision le 11 mai 2022 suivant notification intervenue le 14 avril précédent.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 3 juillet 2023 lors de laquelle il a été procédé à un renvoi à l'audience du 28 mars 2024.

Par conclusions visées par le greffe le 28 mars 2024 et soutenues oralement à l'audience, la CPAM de l'Artois demande à la cour de :

la déclarer bien fondée en son appel,

la recevoir dans ses fins, moyens et conclusions,

ce faisant, infirmer le jugement entrepris,

déclarer les décisions de prise en charge au titre de la législation professionnelle de la maladie professionnelle bilatérale déclarée par M. [S] parfaitement fondées et opposables à la société,

condamner la société au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

dire n'y avoir lieu à sa condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

S'agissant du respect du contradictoire, elle explique que c'est à tort que les premiers juges ont considéré qu'elle ne justifiait pas de la réception effective du courrier de clôture alors même que des pièces attestant de la réception sont versées au débat et ajoute que les développements de la société relatifs au devoir d'information pesant sur elle préalablement à la prise de décision après avis du CRRMP sont inopérants.

Sur le caractère professionnel de la pathologie, elle indique que la société n'a pas transmis de rapport circonstancié tel que demandé, qu'au cours de l'instruction du dossier elle a constaté que les travaux effectués par l'assuré ne correspondaient pas à ceux limitativement énumérés par le tableau n°57 et que le délai de prise en charge était dépassé ce qui a justifié de la transmission de ce dernier au CRRMP.

Par conclusions visées par le greffe le 28 mars 2024 et soutenues oralement à l'audience, la société [5], venant aux droits de la société [4], demande à la cour de :

confirmer le jugement entrepris,

subsidiairement et dans l'hypothèse ou la cour jugerait que la procédure d'instruction a été menée contradictoirement :

annuler l'avis du CRRMP en date du 31 juillet 2019,

déclarer inopposables les décisions du 1er août 2019 prenant en charge les syndromes de canal carpien droit et gauche au titre des maladies professionnelles,

réformer les décisions prononcées le 1er août 2019 par la caisse qui a reconnu en maladie professionnelle la pathologie de M. [S],

réformer la décision de la commission de recours amiable,

dire que la pathologie déclarée par M. [S] ne relève pas de la législation des maladies professionnelles,

à défaut, recueillir l'avis d'un autre CRRMP relativement au lien de causalité entre le travail habituel de M. [S] et ses pathologies,

en tout état de cause, débouter la caisse de toutes ses demandes, fins et conclusions,

condamner la caisse au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait essentiellement valoir que la caisse, après la saisine du CRRMP et avant la notification de prise en charge, n'a pas communiqué l'avis du CRRMP et ne lui a pas écrit pour l'informer de la prochaine clôture de l'instruction et de la possibilité de venir consulter le dossier dans un délai de dix jours avant prise de décision.

Elle soutient que les avis du CRRMP sont nuls dès lors que ce comité s'est prononcé sans que soit joint au dossier le questionnaire employeur.

Elle indique qu'il n'y a pas de lien direct entre la pathologie et le travail, que des visites médicales de 2015 et 2016 n'ont décelé aucune pathologie, que l'assuré avait été déclaré apte, qu'il n'était plus maçon fumiste depuis 1997 mais chef de chantier, poste dans lequel l'activité manuelle était réduite voire inexistante et que M. [S] était en arrêt du 29 mai 2017 au 30 octobre 2019 pour une autre pathologie que le canal carpien, notamment un burn-out.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties s'agissant de la présentation plus complète de leurs demandes et des moyens qui les fondent.

Motifs

Sur le respect du principe de la contradiction

Aux termes de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, il est prévu qu'en cas de réserves motivées de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie avant décision à l'employeur et à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés.

L'article R. 441-14 du même code, dans sa rédaction applicable au présent litige, prévoit que « Lorsqu'il y a nécessité d'examen ou d'enquête complémentaire, la caisse doit en informer la victime ou ses ayants droit et l'employeur avant l'expiration du délai prévu au premier alinéa de l'article R. 441-10 par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. A l'expiration d'un nouveau délai qui ne peut excéder deux mois en matière d'accidents du travail ou trois mois en matière de maladies professionnelle à compter de la date de cette notification et en l'absence de décision de la caisse, le caractère professionnel de l'accident ou de la maladie est reconnu.

En cas de saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, mentionné au cinquième alinéa de l'article L. 461-1, le délai imparti à ce comité pour donner son avis s'impute sur les délais prévus à l'alinéa qui précède.

Dans les cas prévus au dernier alinéa de l'article R. 441-11, la caisse communique à la victime ou à ses ayants droit et à l'employeur au moins dix jours francs avant de prendre sa décision, par tout moyen permettant d'en déterminer la date de réception, l'information sur les éléments recueillis et susceptibles de leur faire grief, ainsi que sur la possibilité de consulter le dossier mentionné à l'article R. 441-13.

La décision motivée de la caisse est notifiée, avec mention des voies et délais de recours par tout moyen permettant de déterminer la date de réception, à la victime ou ses ayants droit, si le caractère professionnel de l'accident, de la maladie professionnelle ou de la rechute n'est pas reconnu, ou à l'employeur dans le cas contraire. Cette décision est également notifiée à la personne à laquelle la décision ne fait pas grief.

Le médecin traitant est informé de cette décision ».

En l'espèce, à réception du certificat médical initial et de la déclaration de maladie professionnelle du 4 octobre 2018, la caisse a diligenté une enquête au moyen de questionnaires transmis à l'employeur et au salarié.

Par courriers du 16 novembre 2018, reçus le 20 novembre suivant par la société, la caisse a demandé des renseignements complémentaires sur la maladie, la société a répondu en transmettant des fiches de postes, puis par courriers du 28 février 2019, réceptionnés le 5 mars suivant, elle a demandé à l'employeur un rapport circonstancié.

Par courriers du 11 mars 2019, reçus le 14 mars suivant a transmis un courrier à la société lui indiquant qu'elle avait la possibilité de consulter le dossier avant transmission au CRRMP, en indiquant notamment ce qui suit : « Avant la transmission au CRRMP, vous avez la possibilité de venir consulter les pièces constitutives du dossier jusqu'au 31 mars 2019. Pendant cette période vous pouvez également formuler des observations qui seront annexées au dossier. (') Dès que j'aurai reçu l'avis du CRRMP je vous adresserai une notification de la décision prise ».

Le CRRMP de la région Tourcoing Hauts-de-France a rendu un avis le 31 juillet 2019.

La caisse a alors notifié sa décision de prise en charge des maladies, après avis du CRRMP, par courrier du 1er août 2019 en joignant à ce courrier l'avis rendu, la société a réceptionné ce courrier le 5 août suivant.

Eu égard à l'ensemble de ces éléments, la cour constate que la caisse a respecté les obligations découlant des articles précités en ce qu'elle a transmis un questionnaire à l'employeur et à l'assuré, demandé des renseignements et un rapport circonstancié à l'employeur, informé de la saisine d'un CRRMP et de la possibilité, avant cette saisine, de consulter le dossier et de formuler des observations jusqu'au 31 mars 2019 et a, à réception de l'avis dudit comité, informé la société de sa décision et transmis l'avis.

Etant précisé qu'aux termes des articles L. 461-1 et D. 461-29 du code de la sécurité sociale, il est prévu qu'en cas de saisine d'un CRRMP, dont l'avis s'impose à la caisse, l'information du salarié, de ses ayants droit et de l'employeur sur la procédure d'instruction et sur les points susceptibles de leur faire grief s'effectue avant la transmission du dossier audit comité, ce qui a été fait par la caisse.

Ainsi, par infirmation du jugement sur ce point, il y a lieu de débouter la société de sa demande d'inopposabilité des décisions de prise en charge sur ce fondement.

Sur les avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles

Aux termes de l'article D. 461-29 du code de la sécurité sociale, il est prévu que le dossier constitué par la caisse doit comprendre :

1° Une demande motivée de reconnaissance signée par la victime ou ses ayants droit intégrant le certificat médical initial rempli par un médecin choisi par la victime dont le modèle est fixé par arrêté,

2° Un avis motivé du médecin du travail de la ou des entreprises où la victime a été employée portant notamment sur la maladie et la réalité de l'exposition de celle-ci à un risque professionnel présent dans cette ou ces entreprises,

3° Un rapport circonstancié du ou des employeurs de la victime décrivant notamment chaque poste de travail détenu par celle-ci depuis son entrée dans l'entreprise et permettant d'apprécier les conditions d'exposition de la victime à un risque professionnel,

4° Le cas échéant les conclusions des enquêtes conduites par les caisses compétentes, dans les conditions du présent livre,

5° Le rapport établi par les services du contrôle médical de la caisse primaire d'assurance maladie indiquant, le cas échéant, le taux d'incapacité permanente de la victime.

Les pièces demandées par la caisse au deuxième et troisième paragraphes doivent être fournies dans un délai d'un mois.

La société soutient que le CRRMP ne disposait pas des rapports circonstanciés alors même qu'il avait bien rempli un questionnaire et un rapport employeur.

En l'espèce, eu égard aux éléments versés au débat, la cour constate que la caisse a diligenté une enquête au moyen, notamment, de questionnaires, lesquels ont été transmis par l'employeur le 5 novembre et le 3 décembre 2018 avec des fiches de postes.

Parallèlement, par courrier du 16 novembre 2018, la caisse demandait des renseignements complémentaires à l'employeur, lequel a répondu le 4 décembre suivant en transmettant des fiches de postes de chef de chantier et de maçon fumiste.

En outre, aux termes de son enquête, la caisse a demandé des informations à l'employeur sur les différents postes occupés, lequel a répondu par mail le 1er février 2019.

Par la suite, par courrier du 28 février 2019, réceptionné le 5 mars suivant par l'employeur, tel que l'atteste l'accusé de réception, la caisse a demandé à la société un rapport circonstancié, en indiquant ce qui suit : « Aussi, je vous invite à me retourner dès que possible un rapport (cf. Documents explicatifs en annexe) décrivant les postes de travail successivement tenus par votre salarié et permettant d'apprécier les risques d'exposition.

Ce rapport, daté et signé, avec mention lisible du nom et de la qualité du signataire revêtu du cachet de l'entreprise, doit être fourni dans un délai d'un mois. Il est de votre intérêt de fournir ce document.

A défaut, l'appréciation du caractère professionnel de l'affection déclarée reposera sur les seuls éléments recueillis par la CPAM et les éléments fournis par votre salarié.

Vous trouverez en annexe, une fiche indicative pour la rédaction du rapport ».

La société n'a pas apporté de suites à ce courrier.

Comme indiqué précédemment, le 11 mars 2019 la caisse a indiqué à l'employeur qu'il pouvait consulter le dossier et formuler des observations jusqu'au 31 mars 2019.

Il ressort de l'avis du CRRMP de la région Tourcoing Hauts-de-France du 31 juillet 2019 que ce dernier a pris en compte les éléments suivants :

la demande motivée de reconnaissance présentée par la victime ou les ayants droit,

le certificat établi par le médecin traitant,

l'avis motivé du (ou des) médecin(s) du travail,

les enquêtes réalisées par l'organisme gestionnaire,

le rapport du contrôle médical de l'organisme gestionnaire.

La case « le rapport circonstancié de (ou des) employeur(s) » n'est pas cochée, dès lors que l'employeur s'est abstenu de produire ce document.

En conséquence, le comité a bien pris en compte l'ensemble des éléments fournis par la caisse, à savoir les informations obtenues lors de son enquête et notamment les éléments transmis par l'employeur.

Partant, la société ne saurait valablement solliciter la nullité des avis du CRRMP, faute pour ce dernier d'avoir pris en compte le rapport circonstancié, en l'absence de production de ce document.

Les dispositions de l'article D. 461-29 précité sont respectées et la demande de la société tendant à la nullité des avis du CRRMP sur ce fondement sera rejetée.

Sur le lien entre la maladie et l'activité professionnelle

Eu égard aux conditions manquantes au titre du délai de prise en charge et à la liste limitative des travaux, le CRRMP de la région Tourcoing Hauts-de-France a été saisi et a rendu un avis, le 31 juillet 2019, aux termes duquel il a indiqué, que ce soit pour le canal carpien droit ou gauche, ce qui suit : « Monsieur [S] [C], né en 1963, a exercé comme maçon fumiste de 1981 à 1997 puis comme chef de chantier. Il est en arrêt de travail pour une pathologie intercurrente à compter du 28.05.17.

Il présente un syndrome du canal carpien (') en date du 19.03.18.

Le dossier nous est présenté pour dépassement du délai de prise en charge (9 mois 19 jours au lieu des 30 jours requis) et pour un travail hors liste limitative des travaux.

Après avoir étudié les pièces du dossier communiqué et après avis complémentaire sollicité auprès du médecin du travail, le CRRMP constate la réalité d'une exposition à des gestes répétitifs hyper sollicitant pour les mains et les poignets tout au long de sa carrière, y compris dans le cadre de l'activité en tant que chef de chantier. Par ailleurs, la lecture attentive du dossier a permis d'identifier des éléments d'histoire clinique antérieurs à la date de première constatation médicale retenue ce qui permet d'annuler l'apparent dépassement du délai de prise en charge.

Pour toutes ces raisons il convient de retenir un lien direct entre l'affection présentée et l'exposition professionnelle ».

La société soutient que le délai de prise en charge n'est pas respecté, qu'elle ignore sur quels fondements la date de première constatation du 19 mars 2018 a été retenue, que les travaux confiés à M. [S] ne correspondaient pas à la liste limitative des gestes listés au tableau n°57 C, qu'il n'était pas exposé de manière habituelle au risque et qu'il n'existe donc pas de lien de causalité essentiel et direct entre les maladies déclarées par M. [S] le 4 octobre 2018 et son travail habituel.

Selon l'article R. 142-17-2 du code de la sécurité sociale, lorsque le différend porte sur la reconnaissance de l'origine professionnelle d'une maladie dans les conditions prévues aux sixième et septième alinéas de l'article L. 461-1 (maladies hors tableaux ou dont les conditions ne sont pas remplies), le tribunal recueille préalablement l'avis d'un comité régional autre que celui qui a déjà été saisi par la caisse en application du huitième alinéa de l'article L. 461-1. Le tribunal désigne alors le comité d'une des régions les plus proches.

Il convient, dès lors, par application de ce texte de saisir un second CRRMP afin qu'il se prononce sur le lien entre le travail de l'assuré et la maladie, au regard du dépassement du délai de prise en charge et à la liste limitative des travaux.

Sur les dépens

Ils seront réservés jusqu'à ce que la décision intervienne.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe,

Déboute la société [5] de sa demande d'inopposabilité tirée d'un manquement au principe du contradictoire et de sa demande d'annulation de l'avis du CRRMP,

Avant dire droit sur le caractère professionnel de la maladie,

Désigne le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région Grand Est avec pour mission de :

prendre connaissance du dossier médical de M. [C] [S] dont la transmission devra être assurée par la caisse,

indiquer si la pathologie dont il est atteint a un lien direct et essentiel avec son travail habituel,

Impartit au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région Grand Est un délai de quatre mois à compter de sa saisine pour nous faire connaître son avis,

Dit que les parties pourront communiquer au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région Grand Est toutes les pièces qu'elles estimeront utiles et qu'elles devront lui communiquer toutes les pièces qu'il serait amené à leur demander, et que ce dernier pourra le cas échéant les convoquer,

Dit que l'affaire sera appelée à l'audience du 9 janvier 2025 à 13 heures 30 après avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles,

Dit que le présent arrêt vaut convocation des parties à l'audience,

Sursoit à statuer sur les autres demandes,

Réserve les dépens.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 22/02332
Date de la décision : 24/06/2024
Sens de l'arrêt : Renvoi

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-24;22.02332 ?
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