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24/06/2024 | FRANCE | N°22/02227

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 24 juin 2024, 22/02227


ARRET







[N]





C/



CPAM DE [Localité 4] [Localité 5]













COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 24 JUIN 2024



*************************************************************



N° RG 22/02227 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IN5E - N° registre 1ère instance : 20/00263



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE (POLE SOCIAL) EN DATE DU 26 AVRIL 2022





PARTIES EN CAUSE

:





APPELANTE





Madame [C] [N]

[Adresse 1]

[Localité 2]





Représentée par Me Jonathan PORCHER, avocat au barreau d'AMIENS, substituant Me Thibaud VIDAL de la SELEURL VIDAL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS







ET :


...

ARRET

[N]

C/

CPAM DE [Localité 4] [Localité 5]

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 24 JUIN 2024

*************************************************************

N° RG 22/02227 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IN5E - N° registre 1ère instance : 20/00263

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE (POLE SOCIAL) EN DATE DU 26 AVRIL 2022

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

Madame [C] [N]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Jonathan PORCHER, avocat au barreau d'AMIENS, substituant Me Thibaud VIDAL de la SELEURL VIDAL AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

ET :

INTIMEE

CPAM DE [Localité 4] [Localité 5]

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée et plaidant par Mme [G] [I], munie d'un pouvoir régulier

DEBATS :

A l'audience publique du 28 Mars 2024 devant M. Pascal HAMON, président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 945-1 du code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 24 Juin 2024.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Audrey VANHUSE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

M. Pascal HAMON en a rendu compte à la cour composée en outre de :

Mme Jocelyne RUBANTEL, président,

M. Pascal HAMON, président,

et Mme Véronique CORNILLE, conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 24 Juin 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Jocelyne RUBANTEL, président a signé la minute avec Mme Diane VIDECOQ-TYRAN, greffier.

*

* *

DECISION

La caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 4]-[Localité 5] (ci-après la CPAM) a procédé à un contrôle administratif de la facturation de Mme [C] [N], infirmière libérale, portant sur la période d'activité du 20 novembre 2017 au 4 décembre 2018.

A l'issue de ce contrôle, par lettre du 12 août 2019, la caisse a informé Mme [N] du constat des anomalies et a, par lettre du 24 septembre suivant, notifié à cette dernière un indu de 75 384,05 euros pour les motifs suivants :

actes non remboursables selon la NGAP,

actes compris dans la séance AIS 3,

cotations erronées,

doubles facturations,

majorations de nuit et de férié lors d'un même passage,

indemnités kilométriques en plus du forfait déplacement,

déplacements au-delà de ce que prévoit la prescription médicale,

actes non prescrits,

actes en l'absence de prescription médicale valable,

actes en l'absence de prescription médicale,

déplacements sans actes associés,

plus de 4 AIS 3 par jour.

Mme [N] a contesté la notification d'indu devant la commission de recours amiable, laquelle a rejeté sa demande le 14 février 2020.

Parallèlement, la caisse a informé Mme [N] de la mise en 'uvre d'une procédure de pénalité financière et lui a notifié, par courrier du 16 janvier 2020, le montant de cette dernière, soit la somme de 5 600 euros.

Mme [N] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Lille qui, par jugement en date du 22 avril 2022, a :

déclaré le recours présenté par Mme [N] recevable,

condamné Mme [N] à payer à la caisse la somme de 75 106,55 euros au titre de l'indu,

condamné Mme [N] à payer à la caisse la somme de 5 600 euros au titre de la pénalité financière,

condamné Mme [N] aux dépens de la présente instance,

débouté les parties du surplus de leurs demandes plus amples ou contraires.

Mme [N] a formé appel de cette décision le 4 mai 2022, suivant notification intervenue le 30 avril précédent.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 3 juillet 2023 lors de laquelle il a été procédé à un renvoi à l'audience du 28 mars 2024.

Par conclusions visées par le greffe le 28 avril 2024 et déposées lors de l'audience, Mme [N], par l'intermédiaire de son conseil, demande à la cour de :

infirmer et réformer le jugement,

juger que la notification d'indu et la pénalité financière ont été établies au terme d'une procédure de contrôle irrégulière,

juger que la procédure de pénalité financière est irrégulière,

juger que la notification d'indu et la pénalité financière sont insuffisamment motivées,

juger que la caisse ne rapporte pas la preuve du paiement des actes dont elle réclame la répétition,

juger que les griefs ne sont ni établis ni fondés,

juger prescrite l'action en recouvrement de la pénalité financière,

juger que les demandes reconventionnelles en paiement de la pénalité financière de la caisse sont irrecevables car prescrites

En conséquence,

annuler la procédure de contrôle d'activité,

annuler la notification d'indu litigieuse en date du 24 septembre 2019,

annuler la décision de la commission de recours amiable en date du 14 février 2020,

annuler la procédure de pénalité financière,

annuler la pénalité financière litigieuse en date du 16 janvier 2020,

rejeter les demandes reconventionnelles en paiement de la pénalité financière de la caisse comme étant irrecevables car prescrites,

rejeter l'ensemble des demandes, fins et prétentions de la caisse,

mettre à la charge de la caisse la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Par conclusions visées par le greffe le 14 août 2023 et soutenues oralement à l'audience, la CPAM de [Localité 4]-[Localité 5] demande à la cour de :

la recevoir dans ses conclusions de ce jour,

confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

débouter Mme [N] de ses demandes, fins et conclusions,

condamner Mme [N] à lui rembourser la somme de 75 106,55 euros au titre de l'indu,

condamner Mme [N] à lui rembourser la somme de 5 600 euros au titre de la pénalité financière,

débouter Mme [N] de sa demande de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner Mme [N] à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner Mme [N] aux éventuels frais et dépens de l'instance.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux écritures des parties pour un plus amples exposé des demandes des parties et des moyens qui les fondent.

Motifs

Sur la prescription de la notification de la pénalité financière

Aux termes de l'article L. 114-17-1 du code de la sécurité sociale, les faits pouvant donner lieu au prononcé d'une pénalité se prescrivent selon les règles définies à l'article 2224 du code civil. L'action en recouvrement de la pénalité se prescrit par deux ans à compter de la date d'envoi de la notification de la pénalité par le directeur de l'organisme concerné.

L'article 2241 du code civil précise que la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion.

Mme [N] soutient que l'action en recouvrement de la pénalité financière est prescrite dès lors que cette pénalité a été réceptionnée le 20 février 2020, que la caisse disposait de deux ans pour accomplir une diligence, à savoir une mise en demeure ou à titre reconventionnel dans des conclusions aux fins de paiement de ladite pénalité devant la juridiction du contentieux de la sécurité sociale, dans le cadre de la contestation de la pénalité financière. Ainsi, l'action en recouvrement de la pénalité financière par la caisse est prescrite depuis le 22 février 2022.

En l'espèce, il convient de constater qu'à la suite de la notification d'une pénalité financière de 5 600 euros du 16 janvier 2020, réceptionnée le 20 février suivant, l'intéressée a saisi la juridiction de première instance d'un recours le 12 février 2020.

A cette occasion, Mme [N] demandait au tribunal de constater l'irrégularité de la procédure de pénalité financière et d'annuler cette dernière et, à titre subsidiaire, de la ramener à de plus justes proportions. La caisse demandait elle, par conclusions des 7 juin et 15 octobre 2021, de condamner la professionnelle de santé au paiement de la somme de 5 600 euros au titre de la pénalité financière.

Ainsi, il est constant que la saisine de la juridiction de première instance a interrompu le délai biennal de l'action en recouvrement de l'article L. 144-17-1 précité, jusqu'à ce qu'il soit statué sur cette contestation dont le rejet total ou partiel permettra ensuite à l'organisme de sécurité sociale de poursuivre le recouvrement de la notification en cause.

Sur la régularité de la procédure de contrôle

Sur le moyen tiré de la violation du principe de la contradiction et des droits de la défense figurant dans la charte du contrôle de l'activité des professionnels de santé

Mme [N] invoque les articles 4.1 et 6.1.1 de la charte du contrôle de l'activité des professionnels de santé et reproche à la caisse de lui avoir notifié les résultats du contrôle de l'analyse administrative de son activité de façon sommaire par courrier du 21 août 2019, sans motivation, sans communication des pièces et sans la mettre en mesure de présenter utilement ses observations dans un cadre contradictoire, en violation des droits de la défense, avant l'engagement des procédures de répétition d'indu et de pénalité financière.

Elle ajoute que la caisse ne lui a jamais notifié les suites qu'elle entendait donner au contrôle dans un délai de trois mois suivant l'expiration du délai contradictoire d'un mois, à savoir l'engagement de la procédure de pénalité financière et d'une procédure en répétition d'indu.

La caisse soutient qu'elle a, dans son courrier de notification de constat d'anomalies, énuméré l'ensemble des anomalies constatées, détaillé le calcul du préjudice, reçu la professionnelle de santé à sa demande dans les locaux de la caisse pour des explications détaillées et a bien réceptionné des observations de cette dernière. En outre, elle précise que le courrier d'engagement de la procédure de pénalité financière a été adressé à Mme [N] le 15 octobre 2019 et qu'elle n'a émis aucunes observations.

En l'espèce, la caisse a opéré un contrôle des facturations d'actes infirmiers au cours de la période du 20 novembre 2017 au 4 décembre 2018 et a notifié à la professionnelle de santé les anomalies constatées par courrier du 12 août 2019, courrier dans lequel était joint un détail des prestations versées à tort et précisant qu'elle pouvait faire part de ses observations par courrier ou lors d'un entretien.

Mme [N] a sollicité un entretien, au terme duquel un compte-rendu a été établi et transmis à celle-ci le 21 août 2019 .Elle a fait part d'observations écrites par mail, tel qu'indiqué dans un courrier de réponse de la caisse en date du 18 septembre 2019.

Il est de jurisprudence constante qu'en matière d'inobservation des règles de la nomenclature générale des actes professionnels, la procédure de recouvrement de l'indu obéit aux dispositions de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale (Soc., 31 mars 2003, pourvoi n°01-21.470).

La charte du contrôle de l'activité des professionnels de santé par l'assurance maladie, qui prévoit que les moyens déployés par les caisses respectent les principes éthiques tels que le principe de la contradiction et les droits de la défense (article 4-1), et comporte des dispositions relatives au déroulement des opérations de contrôle (article 6-1), précise toutefois, en son préambule, qu'elle n'a pas vocation à se substituer aux textes législatifs, réglementaires et conventionnels. Elle se trouve ainsi dépourvue de toute portée normative (Cass., 2ème Civ., 16 mars 2023, pourvoi n° 21-11.471).

L'article L. 133-4, dans sa version applicable, dispose qu'en cas d'inobservation des règles de tarification, de distribution ou de facturation d'actes, de prestations et de produits ainsi que des frais de transport, l'organisme de prise en charge recouvre l'indu correspondant auprès du professionnel de santé ou de l'établissement à l'origine du non-respect de ces règles et ce, que le paiement ait été effectué à l'assuré, à un autre professionnel de santé ou à un établissement.

Il en est de même en cas de facturation en vue du remboursement, par les organismes d'assurance maladie, d'un acte non effectué ou de prestations et produits non délivrés.

L'action en recouvrement s'ouvre par l'envoi au professionnel ou à l'établissement d'une notification de payer le montant réclamé ou de produire, le cas échéant, leurs observations.

Si le professionnel ou l'établissement n'a ni payé le montant réclamé, ni produit d'observations et sous réserve qu'il n'en conteste pas le caractère indu, l'organisme de prise en charge peut récupérer ce montant par retenue sur les versements de toute nature à venir.

En cas de rejet total ou partiel des observations de l'intéressé, le directeur de l'organisme d'assurance maladie adresse, par lettre recommandée, une mise en demeure à l'intéressé de payer dans le délai d'un mois. La mise en demeure ne peut concerner que des sommes portées sur la notification.

Aux termes de l'article R. 133-9-1 du même code, il est prévu que la notification de payer prévue à l'article L. 133-4 précité est envoyée par le directeur de l'organisme d'assurance maladie au professionnel, qu'elle précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées et la date du ou des versements indus donnant lieu à recouvrement et mentionne un délai pour s'acquitter des sommes réclamées ainsi que les voies et délais de recours.

L'article 12 du code de procédure civile prévoit que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables.

La cour constate, d'une part, que dans le courrier du 12 août 2019, intitulé « Notification des résultats d'un contrôle administratif d'activité », la caisse a indiqué à la professionnelle de santé les anomalies constatées, le montant que ce préjudice généré, a joint un détail des prestations versées à tort et a mentionné qu'elle pouvait apporter des observations sur ces points dans un délai d'un mois faute de quoi il sera considéré qu'elle reconnaît les anomalies constatées et que, d'autre part, le courrier du 16 janvier 2020 notifiant la pénalité financière, est également motivé.

Eu égard à l'ensemble de ces éléments, la cour relève que l'intéressée a été en mesure de faire valoir ses observations de façon circonstanciée, que ce soit lors d'un entretien ou par mail et que la caisse a apporté des réponses à ces observations et ce avant même le prononcé de la pénalité contestée et de la notification d'indu de sorte que, contrairement à ce que soutient l'infirmière, la procédure a été menée dans le respect des droits de la défense, du principe de la contradiction et des textes en vigueur.

Ainsi, le moyen tendant à la méconnaissance de la charte du contrôle de l'activité des professionnels de santé pour violation du principe de la contradiction et des droits de la défense sera rejeté.

Sur le moyen tiré du défaut de compétence des agents de la CPAM

Mme [N] fait valoir que les agents ayant procédé aux opérations de contrôle (à savoir Mme [S] [B] dans le cadre de l'indu et M. [Z] [K] dans le cadre de la pénalité financière) doivent satisfaire aux conditions d'agrément et d'assermentation prévues par l'article L. 114-10 du code de la sécurité sociale, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

La CPAM indique que, pour M. [K], elle verse aux débats sa carte professionnelle et, pour Mme [B], elle explique que cette dernière est habilitée à notifier des indus et que les dispositions de l'article L. 114-10 ne sont pas applicables aux contrôles de l'observation des règles de tarification et de facturation des actes, prestations, produits, fournitures et frais par les professionnels de santé qui obéissent exclusivement aux règles de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale.

Si l'article L. 114-10 du code de la sécurité sociale vise les agents chargés du contrôle de l'attribution des prestations, du respect des conditions de résidence et de la tarification des accidents du travail et maladies professionnelles alors que le contrôle litigieux est un contrôle de la facturation du professionnel de santé intervenu dans le cadre de l'article L. 133-4 précité, il est constant que l'obligation d'agrément et d'assermentation prescrite par cet article s'applique aux agents qui procèdent, sur le fondement de l'article L. 133-4, lorsqu'ils mettent en 'uvre des prérogatives de puissance publique. Tel est le cas, notamment, lorsqu'ils procèdent à une audition. L'absence de publication de l'agrément, dont la preuve peut être rapportée par tous moyens, n'affectant pas son existence, elle est sans incidence sur la régularité des vérifications et enquêtes administratives (Cass. Civ. 2ème, 16 mars 2023, n° 21-17.971, n°21-11.470).

Au cas présent, il convient de constater qu'il n'est ni justifié ni même allégué que le contrôle ait nécessité la mise en 'uvre de prérogative de puissance publique, de sorte que Mme [N] ne saurait se prévaloir de l'absence de justification d'agrément et d'assermentation des agents de contrôle.

En tout état de cause, la caisse produit la carte d'identité professionnelle d'agent de contrôle assermenté de M. [K], qui justifie de son assermentation à la date du 21 juin 2006 et d'un agrément à la date du 1er janvier 2010.

Aucune irrégularité de ce chef n'est donc établie, le moyen sera rejeté.

Sur la régularité de la notification d'indu

Sur la motivation de la notification d'indu

Il résulte de l'article R. 133-9-1 du code de la sécurité sociale que la notification d'indu prévue par les dispositions de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale doit faire l'objet d'une lettre envoyée au professionnel de santé, qui précise notamment la cause, la nature et le montant des sommes réclamées et la date du ou des versements indus donnant lieu à remboursement.

Mme [N] invoque l'insuffisance de la motivation de la notification d'indu. Elle soutient que celle-ci est motivée de façon stéréotypée, qu'elle ne comporte pas les considérations de droit et de fait constitutives du fondement de la décision, et qu'elle n'indique pas que la procédure est engagée dans le cadre des dispositions des articles L. 133-4 et R. 133-9-1 du code de la sécurité sociale.

Or, la notification du 24 septembre 2019, de payer un indu de 75 384,05 euros en raison d'anomalies de facturation pour des soins dispensés du 2 octobre 2017 au 25 novembre 2018 comporte, la nature des anomalies constatées, les dispositions de la NGAP afférentes, le montant de la somme réclamée ainsi que le cadre légal du contrôle.

Le courrier précise, en outre, l'existence d'un délai de deux mois à partir de sa réception pour procéder au règlement de l'indu ou, en cas de contestation, pour saisir la commission de recours amiable avec la possibilité de présenter des observations pendant ce délai.

Par ailleurs, aux termes d'un courrier antérieur à la notification, en date du 12 août 2019, il y était indiqué la nature des investigations réalisées, les mêmes éléments que la notification d'indu et était joint un tableau reprenant le détail des prestations versées à tort.

Ainsi, la notification répond aux exigences de motivations de l'article R. 133-9-1 précité.

Mme [N], qui a été en mesure de prendre connaissance et de comprendre l'intégralité des griefs reprochés sera déboutée de sa demande d'annulation de la notification d'indu pour défaut de motivation.

Sur la régularité de la procédure de pénalité financière

En application des dispositions de l'article R. 147-2 du code de la sécurité sociale lorsqu'il a connaissance de faits susceptibles de faire l'objet de la pénalité financière mentionnée à l'article L. 114-17-1, le directeur de l'organisme local d'assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles adressent à la personne physique ou morale en cause, la notification prévue à cet article par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception. Lorsque ces faits ont donné lieu à l'engagement de la procédure mentionnée à l'article L. 315-1, la notification ne peut intervenir qu'à l'issue de cette procédure. Cette notification précise les faits reprochés et le montant de la pénalité encourue et indique à la personne en cause qu'elle dispose d'un délai d'un mois à compter de sa réception pour demander à être entendue, si elle le souhaite, ou pour présenter des observations écrites.

À l'issue du délai d'un mois à compter de la notification ou après audition de la personne en cause, si celle-ci intervient postérieurement à l'expiration de ce délai, le directeur de l'organisme local d'assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles peut notamment, dans un délai de 15 jours, saisir la commission mentionnée au V de l'article L.114-17-1 et lui communiquer les griefs et, s'ils existent, les observations écrites de la personne en cause ou le procès-verbal de l'audition. Il en informe simultanément cette personne et lui indique qu'elle aura la possibilité, si elle le souhaite, d'être entendue par la commission.

A compter de la réception de l'avis de la commission ou de la date à laquelle celui-ci est réputé avoir été rendu, le directeur de l'organisme local de l'assurance maladie ou le directeur de la caisse peut, dans un délai de quinze jours, saisir le directeur général de l'UNCAM d'une demande d'avis conforme. Ce dernier dispose d'un délai d'un mois pour formuler son avis, si ce dernier est favorable, le directeur de l'organisme local de l'assurance maladie ou le directeur de la caisse à quinze jours pour notifier la pénalité à la personne en cause, par une décision motivée, par tout moyen permettent de rapporter la preuve de la date de réception.

Mme [N] soutient que la caisse lui a adressé une notification de griefs le 15 octobre 2019, l'informant de l'engagement d'une pénalité financière, que ce courrier lui aurait été remis par M. [K] le 16 octobre suivant, sans que la preuve de la réalité de cette notification ne soit rapportée.

Elle indique que la caisse a saisi la commission des pénalités financières de manière prématurée, le 8 novembre 2019, avant l'expiration du délai contradictoire d'un mois qui intervenait le 18 novembre 2019 et a donc violé l'article R. 147-2 du code de la sécurité sociale, qu'elle ne lui a pas notifié la saisine de cette commission tout comme le procès-verbal rendu par elle étant souligné que la carence constatée par la commission était irrégulière.

En outre, elle précise que la pénalité financière ne lui a pas été notifiée dans un délai de quinze jours suivant la communication au directeur de la caisse de l'avis conforme du directeur général de l'UNCAM de sorte que la procédure est réputée abandonnée, conformément à l'article R. 147-2 du code de la sécurité sociale et qu'en tout état de cause aucune preuve n'est rapportée quant à sa notification.

La caisse explique que l'agent a été contraint de procéder au dépôt du courrier dans la boite aux lettres de l'intéressée faute pour cette dernière de s'être présentée au cabinet de l'agent assermenté et qu'étant infirmière libérale elle est amenée à s'absenter de son cabinet.

Sur la notification de la pénalité financière

En l'espèce, la caisse a notifié le 12 aout 2019 à Mme [N] les faits qui lui étaient reprochés afin qu'elle puisse présenter ses observations ou solliciter un entretien. Un entretien a eu lieu le 20 août suivant et a donné lieu à un compte-rendu en date du 21 août indiquant, au titre de la pénalité financière, ce qui suit : « Enfin, pour terminer cet entretien, je vous ai informé du possible passage en commission des pénalités, avec une pénalité financière pouvant aller jusqu'à la moitié de l'indu notifié ».

La professionnelle de santé a fait part de ses observations par mail du 17 septembre 2019, auquel la caisse a répondu aux termes d'un courrier du 18 septembre suivant.

Par courrier du 24 septembre 2019, la caisse a transmis une notification de payer à Mme [N] et a, par courrier du 15 octobre suivant, indiqué à nouveau les faits reprochés en mentionnant qu'elle encourait une pénalité financière d'un montant de 37 692.02 € et qu'elle pouvait présenter des observations écrites ou orales dans un délai d'un mois à compter de la réception de ce courrier.

Le courrier du 15 octobre 2019 comporte la mention manuscrite suivante « Dépôt à l'adresse le 16/10/2019 » avec la signature de l'agent de contrôle, M. [K].

La professionnelle de santé n'a pas formulé d'observations, et par courrier du 8 novembre 2019, la caisse a saisi la commission des pénalités laquelle, lors de sa réunion du 9 décembre 2019 dressé un procès-verbal de carence.

En outre, la caisse produit également la fiche de synthèse de l'avis rendu par le directeur général de l'UNCAM, dans lequel il propose une pénalité d'un montant de 5 600 euros compte tenu de la matérialité des faits constatés.

Suivant la saisine de la commission et l'avis du directeur général de l'UNCAM, la caisse a notifié à l'infirmière, le 16 janvier 2020, une notification de pénalité financière, laquelle rappelle les dispositions légales applicables, le montant de l'indu, les anomalies constatées, l'absence d'observations de Mme [N] sur ce point, le montant retenu pour la pénalité financière et le délai de deux mois pour payer cette somme ou contester la décision.

La cour constate que, par courrier en date du 16 janvier 2020, la caisse a notifié la pénalité financière à Mme [N], qu'il est indiqué que ce courrier a été déposé par agent assermenté, mais également, sous forme d'une mention manuscrite avec signature de M. [K], ce qui suit « courrier déposé dans la boite à lettre le 20/02/20 ».

La caisse explique que c'est en raison de l'absence de Mme [N] au cabinet de l'agent assermenté qu'elle a été contrainte de déposer le courrier dans sa boite aux lettres et indique que dans le cadre de son activité d'infirmière libérale Mme [N] est amenée à s'absenter de son cabinet.

La cour considère que le procès-verbal dressé par l'agent assermenté justifie de l'accomplissement de la diligence, sauf à Mme [N] d'en rapporter la preuve contraire, ce qu'elle ne fait pas.

En conséquence la preuve rapportée de cette notification doit être retenue et doit être reconnue comme régulière.

Sur la motivation de la pénalité financière

Mme [N] soutient que la pénalité financière n'est pas suffisamment motivée.

En l'espèce, la notification de pénalité financière du 16 janvier 2020 mentionne les dispositions légales applicables, un renvoi au courrier du 15 octobre 2019 (qui mentionne les faits reprochés), la période contrôlée, le montant de l'indu, les anomalies constatées, le déroulement de la procédure concernant la pénalité, le montant de cette dernière ainsi que le délai pour payer le montant ou contester cette pénalité.

Ainsi, force est de constater que la pénalité est suffisamment motivée et permet à l'intéressée de connaître la cause, la nature et le montant des sommes réclamées.

Le moyen tiré de la nullité de la pénalité sur ce fondement sera rejeté.

Sur le montant de la pénalité

Mme [N] indique que le montant de la pénalité est disproportionné dès lors qu'elle n'est pas en situation de récidive et qu'aucune mauvaise foi n'est démontrée.

L'article R. 147-8-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, prévoit que la pénalité est fixée en fonction de la gravité des faits reprochés à un montant maximal de 50 % de l'indu.

En l'espèce, le montant maximal de la pénalité financière pouvant être retenu ici était de l'ordre de 37 692,02 euros.

Dès lors, en retenant une pénalité financière de 5 600 euros, il apparaît, comme l'ont justement retenu les premiers juges, qu'il a été fait une application non excessive des textes.

Partant, la pénalité financière sera confirmée .

Sur le bien-fondé de l'indu

Mme [N] soutient qu'il appartient à la caisse de rapporter la preuve du caractère indu de chacun des paiements dont elle entend réclamer la répétition, ce qu'elle ne fait pas.

En application des dispositions des articles L. 133-4 et 1315 devenu 1353 du code civil, il appartient à l'organisme d'assurance maladie de rapporter, à l'appui de sa demande en répétition de l'indu fondée sur les dispositions de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale, la preuve du non-respect des règles de tarification et de facturation, au besoin par la production d'un tableau récapitulatif et le professionnel ou l'établissement de santé est fondé ensuite à discuter des éléments de preuve produits par l'organisme à charge pour lui d'apporter la preuve contraire.

La caisse verse aux débats :

un tableau reprenant le nom des assurés, son immatriculation, la date de la prescription, la date des soins, l'acte réalisé, le montant dépensé et celui remboursé, l'indu constaté ainsi que le motif de l'indu,

des certificats médicaux,

des prescriptions,

des ordonnances bizone.

Ces éléments sont de nature à justifier du paiement des actes en cause sans que l'intéressée ne produise d'élément ni ne fasse d'observations circonstanciées quant aux sommes prises en considération de sorte que la matérialité des griefs apparaît établie par les indications figurant dans les éléments produits par la caisse.

C'est par de pertinents motifs adoptés par la cour que le premier juge a considéré que les indus étaient justifiés, alors que l'appelante ne fait pas état d'élément de fait ou de droit de nature à remettre en cause cette appréciation.

La preuve du caractère indu des sommes étant rapportée et non utilement contestée, le jugement sera confirmé en ce qu'il a maintenu l'indu de 75 106,55 euros et condamné Mme [N] au paiement de cette somme.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Il serait enfin inéquitable de laisser à la charge de la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 4]-[Localité 5] l'intégralité des frais irrépétibles qu'elle a été contrainte d'engager dans la présente instance. Il lui sera allouée la somme de 1000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Conformément à l'article 696 du code de procédure civile, Mme [N], appelante qui succombe, sera condamnée aux dépens d'instance et déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire par mise en disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Déboute Mme [C] [N] de ses demandes,

Condamne Mme [C] [N] aux dépens,

La condamne à payer à la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 4]-[Localité 5] la somme de 1000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 22/02227
Date de la décision : 24/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-24;22.02227 ?
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