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24/06/2024 | FRANCE | N°22/00804

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 24 juin 2024, 22/00804


ARRET







Organisme URSSAF DE PICARDIE





C/



[D]













COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 24 JUIN 2024



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N° RG 22/00804 - N° Portalis DBV4-V-B7G-ILLK - N° registre 1ère instance : 18/00862



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BEAUVAIS (POLE SOCIAL) EN DATE DU 27 JANVIER 2022





PARTIES EN CAUSE :<

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APPELANTE





URSSAF DE PICARDIE

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 1]





Représentée par Me Laetitia BEREZIG de la SCP BROCHARD-BE...

ARRET

Organisme URSSAF DE PICARDIE

C/

[D]

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 24 JUIN 2024

*************************************************************

N° RG 22/00804 - N° Portalis DBV4-V-B7G-ILLK - N° registre 1ère instance : 18/00862

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BEAUVAIS (POLE SOCIAL) EN DATE DU 27 JANVIER 2022

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

URSSAF DE PICARDIE

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Laetitia BEREZIG de la SCP BROCHARD-BEDIER ET BEREZIG, avocat au barreau d'AMIENS

ET :

INTIME

Monsieur [H] [D]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Non comparant ni représenté

DEBATS :

A l'audience publique du 28 Mars 2024 devant M. Pascal HAMON, président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 945-1 du code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 24 Juin 2024.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Audrey VANHUSE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

M. Pascal HAMON en a rendu compte à la cour composée en outre de :

Mme Jocelyne RUBANTEL, président,

M. Pascal HAMON, président,

et Mme Véronique CORNILLE, conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 24 Juin 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Jocelyne RUBANTEL, président a signé la minute avec Mme Diane VIDECOQ-TYRAN, greffier.

*

* *

DECISION

M. [D], travailleur indépendant, a formé opposition à la contrainte émise le 21 juin 2018 par l'Union des recouvrements des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales de Picardie (ci-après l'URSSAF) et signifiée le 26 juin suivant, lui réclamant la somme de 21 257 euros au titre des cotisations, contributions sociales et majorations de retard dues au titre du 4ème trimestre de l'année 2017.

Par jugement du 27 janvier 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Beauvais a :

annulé la contrainte émise le 21 juin 2018, signifiée le 28 juin 2018, s'agissant des sommes appelées au titre de la régularisation de l'année 2016,

constaté l'acquiescement de M. [D] à la demande de l'URSSAF s'agissant du 4ème trimestre de l'année 2017 à hauteur de 4 066 euros,

en conséquence, dit que la contrainte reprendra son plein et entier effet pour un montant de 4 066 euros,

condamné M. [D] au paiement des frais de signification de la contrainte d'un montant de 70,98 euros,

condamné l'URSSAF au paiement d'une amende civile d'un montant de 1 000 euros,

rappelé que la présente décision est exécutoire à titre provisoire,

laissé les dépens à la charge des parties.

L'URSSAF de Picardie a relevé appel de cette décision le 22 février 2022 suivant notification intervenue le 28 janvier précédent.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 10 juin 2022, lors de laquelle il a été procédé à un renvoi au 14 octobre suivant, puis à une audience de médiation du 10 février 2023, à une audience du 3 juillet 2023 et enfin à l'audience du 28 mars 2024.

Par conclusions, déposées au greffe le 6 janvier 2023 et soutenues oralement à l'audience, l'URSSAF de Picardie demande à la cour de :

la dire recevable et bien fondée en son appel et ses demandes,

infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a validé partiellement la contrainte émise le 21 juin 2018 pour un montant de 4 066 euros,

statuant à nouveau, valider la contrainte pour un montant de 15 267 euros se décomposant comme suit : 14 178 euros au titre des cotisations et 1 089 euros de majorations de retard,

condamner M. [D] au paiement de ladite somme,

y ajoutant, le condamner au paiement de la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

le condamner aux dépens.

Elle fait essentiellement valoir que l'opposant n'a pas fourni ses déclarations de revenus pour les années 2016 à 2019, que devant le tribunal il a produit des éléments justifiant de ses revenus de 2017, mais aucun document pour l'année 2016 de sorte que la régularisation des cotisations 2016, appelées sur le 4ème trimestre 2017 a été calculée sur une base forfaitaire pour un montant de 10 112 euros.

Elle explique que la déclaration de revenus 2017 a permis de calculer les cotisations définitives dues pour l'année 2017, soit 4 088 euros, que les cotisations appelées sur les 1er et 2ème trimestre 2017 ont été annulées et celles appelées sur le 3ème trimestre ont été minorées à la somme de 22 euros et que les cotisations dues au titre du 4ème trimestre 2017 s'élevaient donc à la somme de 14 178 euros, soit 10 112 euros pour la régularisation des cotisations 2016 et 4 066 euros pour les cotisations 2017, outre les 1 089 euros de majorations de retard.

M. [D] n'a ni conclu ni comparu.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties s'agissant de la présentation plus complète de leurs demandes et des moyens qui les fondent.

Motifs

Sur la régularité de la contrainte du 21 juin 2018

Aux termes de l'article L. 244-2 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, toute action ou poursuite effectuée en application de l'article précédent ou des articles L. 244-6 et L. 244-8-1 est obligatoirement précédée, si elle n'a pas lieu à la requête du ministère public, d'une mise en demeure adressée par lettre recommandée à l'employeur ou au travailleur indépendant. Le contenu de la mise en demeure doit être précis et motivé.

L'article R. 244-1 du code de la sécurité sociale prévoit que « L'avertissement ou la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent ».

La jurisprudence admet la validité d'une contrainte qui ne contient pas elle-même toutes ces mentions mais se réfère à une ou plusieurs mises en demeure les comportant.

En l'espèce, la contrainte émise par l'URSSAF de Picardie le 21 juin 2018 et signifiée le 28 juin suivant fait état du recouvrement des cotisations, contributions sociales et majorations dues au titre du 4ème trimestre 2017, pour un montant total de 21 257 euros, correspondant à la somme de 20 168 euros au titre des cotisations et contributions et 1 089 euros au titre des majorations.

En outre, cette contrainte renvoie expressément à la mise en demeure du 20 février 2018 laquelle mentionne la même période et les mêmes montants.

Ainsi, cette mise en demeure détaille la nature des cotisations, contributions sociales et majorations dues pour chaque catégorie et pour chaque période, de sorte qu'il est indiqué clairement les cotisations qui sont dues à titre provisionnel et celles qui sont dues au titre de la régularisation N-1, soit la régularisation de l'année 2016.

Cette dernière permet ainsi de déterminer le montant dû pour chaque période, soit 10 112 euros au titre de la régularisation 2016, 10 056 euros à titre provisionnel pour l'année 2017 et 1 089 euros au titre des majorations de retard, ce qui représente bien la somme totale de 20 168 euros hors majorations de retard et 21 257 euros en tenant compte desdites majorations.

Il résulte de ces dispositions que les mentions de la contrainte litigieuse, par référence à la mise en demeure du 20 février 2018, précisaient la nature des cotisations réclamées ainsi que leur montant et la période à laquelle elles se rapportaient en distinguant entre celles appelées à titre provisionnel et celles résultant d'une régularisation, ce qui permettait au cotisant de connaître la cause, la nature et l'étendue de son obligation.

Partant, le jugement sera réformé en ce qu'il a retenu que l'opposant ne pouvait avoir connaissance de la cause, de la nature et de l'étendue de son obligation en l'absence de mention au titre de la régularisation de l'année 2016.

Sur les cotisations réclamées

Aux termes de l'article L. 131-6-2 du code de la sécurité sociale, « les cotisations des travailleurs indépendants non agricoles autres que ceux mentionnés à l'article L. 613-7 sont dues annuellement. Leurs taux respectifs sont fixés par décret.

Elles sont calculées, à titre provisionnel, sur la base du revenu d'activité de l'avant-dernière année. Pour les deux premières années d'activité, les cotisations provisionnelles sont calculées sur la base d'un revenu forfaitaire fixé par décret après consultation des conseils d'administration des organismes de sécurité sociale concernés. Lorsque le revenu d'activité de la dernière année écoulée est définitivement connu, les cotisations provisionnelles, à l'exception de celles dues au titre de la première année d'activité, sont recalculées sur la base de ce revenu.

Lorsque le revenu d'activité de l'année au titre de laquelle elles sont dues est définitivement connu, les cotisations font l'objet d'une régularisation sur la base de ce revenu.

(') Lorsque les données nécessaires au calcul des cotisations n'ont pas été transmises, celles-ci sont calculées dans les conditions prévues à l'article L. 242-12-1 ».

L'article L. 242-12-1 du même code prévoit que lorsque les données nécessaires au calcul des cotisations n'ont pas été transmises, celles-ci sont calculées à titre provisoire par les organismes chargés du recouvrement sur une base majorée déterminée par référence aux dernières données connues ou sur une base forfaitaire. Dans ce cas, il n'est tenu compte d'aucune exonération dont pourrait bénéficier le cotisant.

Le cotisant reste tenu de fournir les données mentionnées au premier alinéa. Sous réserve qu'il continue d'en remplir les conditions éventuelles, le montant des cotisations finalement dues tient alors compte des exonérations applicables. Le cotisant est, en outre, redevable d'une pénalité calculée sur ce montant et recouvrée sous les mêmes garanties et sanctions que ces cotisations.

Ainsi, il résulte des dispositions précitées que les cotisations sont d'abord appelées à titre provisionnel sur la base du revenu d'activité de l'avant-dernière année, ajustés sur la base du revenu d'activité de la dernière année écoulée et enfin, à titre définitif, sur la base du revenu d'activité de l'année concernée. Et, en l'absence de transmission des justificatifs de revenus au titre de l'année considérée, les cotisations sont recalculées à titre définitif sur une base forfaitaire.

En outre, aux termes de l'article R. 115-5 du code de la sécurité sociale, il est prévu que pour le calcul et le recouvrement des cotisations et contributions sociales dont ils sont redevables, les travailleurs indépendants souscrivent chaque année une déclaration de revenus d'activité.

En matière d'opposition à contrainte, il appartient à l'opposant de rapporter la preuve du caractère infondé de la créance dont le recouvrement est poursuivi par l'URSSAF.

En l'espèce, il est établi et non contesté que M. [D] a transmis, devant les premiers juges, des éléments justifiant des revenus perçus en 2017, ce qui a permis à l'organisme de recouvrement de calculer les cotisations définitives dues pour 2017, soit la somme de 4 088 euros.

En outre, l'URSSAF de Picardie explique, ce qui n'est pas remis en cause, que les cotisations appelées sur les 1er et 2ème trimestre 2017 ont été annulées et que celles appelées sur le 3ème trimestre 2017 ont été minorées de la somme de 22 euros, de sorte que la somme due au titre de l'année 2017 s'élevait à 4 066 euros, suivant la déduction de 22 euros.

Devant le tribunal, M. [D] a indiqué renoncer à son recours s'agissant de la somme réclamée au titre de l'année 2017, réduite à 4 066 euros, de sorte que les premiers juges ont constaté l'acquiescement de l'opposant à la demande de recouvrement formulée par l'URSSAF au titre du 4ème trimestre 2017.

Dès lors il n'est pas nécessaire de revenir sur l'année 2017, le montant pour cette année ayant été accepté par l'opposant et n'étant pas contesté par l'URSSAF.

Toutefois, au titre de l'année 2016, il apparaît que M. [D] n'a jamais procédé à l'envoi de ses déclarations de revenus, de sorte que faute pour l'organisme de recouvrement de disposer d'élément permettant de connaître les revenus servant de base au calcul des cotisations et étant dans l'impossibilité de déterminer les contributions sociales dues, ce dernier a procédé à un calcul sur un revenu taxé d'office conformément à l'article L. 242-12-1 précité.

La cour constate que le montant sollicité par l'URSSAF, détaillé dans la mise en demeure du 20 février 2018, n'est pas utilement contesté par l'opposant.

Dès lors, il y a de faire droit à la demande de l'URSSAF de Picardie et de valider la contrainte émise le 21 juin 2018 pour un montant ramené à la somme de 15 267 euros, se décomposant comme suit : 4 066 euros au titre de l'année 2017, 10 112 euros au titre de la régularisation 2016 et 1 089 euros au titre des majorations de retard, soit la somme totale de 15 267 euros.

Eu égard à ce qui précède, il y a lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné l'URSSAF à une amende civile.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Conformément à l'article 696 du code de procédure civile, M. [D], partie succombante, sera condamnée aux dépens d'appel.

Il sera également condamné à verser à l'URSSAF de Picardie la somme de 1000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a annulé la contrainte émise le 21 juin 2018 s'agissant des sommes appelées au titre de la régularisation de l'année 2016,

Statuant à nouveau,

Valide la contrainte émise le 21 juin 2018 pour un montant de 15 267 euros,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné l'amende civile de 1000 euros à l'encontre de l'URSSAF ,

Dit n'y avoir lieu à amende civile,

Condamne M. [D] aux dépens,

Condamne M. [D] au paiement de la somme de 1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 22/00804
Date de la décision : 24/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-24;22.00804 ?
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