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18/06/2024 | FRANCE | N°22/02308

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 18 juin 2024, 22/02308


ARRET







CPAM DE L'OISE





C/



[H]













COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 18 JUIN 2024



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N° RG 22/02308 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IOCR - N° registre 1ère instance : 19/00831



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BEAUVAIS (POLE SOCIAL) EN DATE DU 07 AVRIL 2022





PARTIES EN CAUSE :



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APPELANTE





CPAM de l'Oise

ayant fait élection de domicile à la CPAM de la Somme, Gestion Mutualisée du contentieux Technique, ayant son siége [Adresse 5]

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette ...

ARRET

CPAM DE L'OISE

C/

[H]

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 18 JUIN 2024

*************************************************************

N° RG 22/02308 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IOCR - N° registre 1ère instance : 19/00831

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BEAUVAIS (POLE SOCIAL) EN DATE DU 07 AVRIL 2022

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

CPAM de l'Oise

ayant fait élection de domicile à la CPAM de la Somme, Gestion Mutualisée du contentieux Technique, ayant son siége [Adresse 5]

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée et plaidant par Mme [S] [V], munie d'un pouvoir régulier

ET :

INTIME

Monsieur [Y] [H]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté et plaidant par Me Stéphanie THUILLIER de la SELARL STEPHANIE THUILLIER, avocat au barreau d'AMIENS

DEBATS :

A l'audience publique du 18 Avril 2024 devant Mme Véronique CORNILLE, conseiller, siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 945-1 du code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 18 Juin 2024.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Madame Christine DELMOTTE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Véronique CORNILLE en a rendu compte à la cour composée en outre de:

Mme Jocelyne RUBANTEL, président de chambre,

M. Pascal HAMON, président,

et Mme Véronique CORNILLE, conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 18 Juin 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Jocelyne RUBANTEL, président a signé la minute avec Mme Diane VIDECOQ-TYRAN, greffier.

*

* *

DECISION

Le 31 janvier 2015, M. [Y] [H], né en 1975, chef d'équipe, a été victime d'un accident du travail, pris en charge par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise (ci-après la CPAM) au titre de la législation sur les risques professionnels.

La consolidation de son état de santé est en date du 23 octobre 2018 et par décision du 11 janvier 2019, la CPAM a fixé son taux d'incapacité permanente partielle à 12%.

Contestant l'évaluation du taux d'incapacité, M. [Y] [H] a saisi la commission médicale de recours amiable, puis il a saisi le tribunal de grande instance de Beauvais d'un recours contre la décision de rejet de la commission.

Par jugement du 7 avril 2022, le tribunal judiciaire de Beauvais, pôle social, a:

- déclaré M. [Y] [H] bien fondé en son recours,

- fixé à 20% le taux d'incapacité permanente partielle de M. [Y] [H] au résultat de l'accident du travail survenu à son préjudice le 31 janvier 2015,

- rappelé que les frais de consultation seront pris en charge par la caisse nationale d'assurance maladie,

- condamné la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise à payer à M. [Y] [H] la somme de 300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'au paiement des dépens.

Le 9 mai 2022, la CPAM a interjeté appel du jugement qui lui avait été notifié le 8 avril 2022.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 18 mars 2023 lors de laquelle l'affaire a été renvoyée à celle du 18 avril 2024.

Par conclusions visées par le greffe le 18 avril 2024 soutenues oralement, la CPAM de l'Oise demande à la cour de :

- la déclarer recevable en son appel,

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement du 7 avril 2022,

- écarter le rapport du docteur [O],

- dire et juger que le taux d'incapacité permanente indemnisant les séquelles de l'accident du travail dont a été victime M. [Y] [H] le 31 janvier 2015 doit être fixé à 12% à la date de consolidation du 23 octobre 2018,

- rejeter toute demande contraire de M. [Y] [H],

- dans tous les cas rejeter toute demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La CPAM soutient que son appel est recevable, le délai d'appel expirant le 8 mai qui est un jour férié et se trouvant prorogé au lendemain.

Elle soutient que le médecin consultant a pris en compte une aggravation de l'état scapulaire de l'assuré alors que le taux d'incapacité s'apprécie à la date de consolidation ; que trois mouvements simples sont limités et non la totalité des mouvements comme indiqué dans le rapport de consultation ; qu'aucun argument de l'assuré ne permet de remettre en cause le taux de 12%.

Elle s'oppose au taux professionnel en l'absence de tout préjudice financier à la date de consolidation causé par les séquelles de l'accident.

Par conclusions visées par le greffe le 18 avril 2024 soutenues oralement à l'audience, M. [Y] [H] demande à la cour de :

A titre principal,

- dire et juger l'appel irrecevable et débouter la CPAM,

A titre subsidiaire,

- infirmer la décision entreprise sauf en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile,

- fixer à 40% tous éléments confondus son taux d'incapacité permanente partielle consécutif à l'accident du travail du 31 janvier 2015,

A titre infiniment subsidiaire,

- confirmer le jugement rendu,

- condamner la CPAM de l'Oise à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner aux entiers dépens.

Il fait valoir que l'appel est hors délai ; que le taux de 12% ne correspond pas aux données de l'examen clinique ; que les médecins consultants ont conclu à un taux de 20% du fait d'une limitation moyenne des mouvements de l'épaule sur le membre dominant ; que toutefois ce taux ne tient pas compte des douleurs ressenties quotidiennement, ni de l'incidence professionnelle des séquelles difficilement compatibles avec l'exercice d'une profession manuelle de sorte que le risque de perte d'emploi et de difficultés de reclassement est réel.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties s'agissant de la présentation plus complète de leurs demandes et des moyens qui les fondent.

Motifs

Sur la recevabilité de l'appel

Conformément aux dispositions de l'article 538 du code de procédure civile, le délai de recours par les voies ordinaires est d'un mois en matière contentieuse.

En application de ces dispositions et de celles de l'article 668 du code de procédure civile, lorsque l'appel est formé par déclaration notifiée par voie postale, la date de notification est, à l'égard de celui qui y procède, celle de l'expédition de la lettre.

Conformément à l'article 642 du code de procédure civile, tout délai expire le dernier jour à 24 heures. Le délai qui expirerait normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant.

En l'espèce, le jugement ayant été notifié le 8 avril 2022, le délai d'appel qui expirait le 8 mai soit un jour férié, s'est trouvé prorogé au lendemain.

L'appel effectué le 9 mai 2022 est donc recevable.

Sur le fond

En application de l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale, le taux d'incapacité permanente partielle est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité.

En l'espèce, M. [H] a été victime d'une chute le 31 janvier 2015 à l'origine d'une luxation de l'épaule droite avec fracture du glène selon le certificat médical initial du 31 mai 2015.

Le médecin conseil du service médical de la CPAM a évalué le taux d'incapacité permanente partielle à 12% pour les séquelles suivantes : «'Séquelles d'une luxation épaule droite avec fracture du glène compliquée d'une capsule rétractile, à type de limitation de l'antépulsion à 160° et diminution de moitié de la force musculaire du membre supérieur côté dominant'.

La commission médicale de recours amiable a confirmé ce taux le 7 mai 2019.

Le chapitre 1.1.2 du barème indicatif d'invalidité, relatif à l'atteinte des fonctions articulaires, indique que la mobilité de l'épaule est considérée comme normale lorsque l'élévation latérale est de 170°, l'adduction de 20°, l'antépulsion de 180°, la rétropulsion de 40°, la rotation interne de 80° et la rotation externe de 60°.

Il est ajouté : 'La main doit se porter avec aisance au sommet de la tête et derrière les lombes, et la circumduction doit s'effectuer sans aucune gêne.

Les mouvements du côté blessé seront toujours estimés par comparaison avec ceux du côté sain. On notera d'éventuels ressauts au cours du relâchement brusque de la position d'adduction du membre supérieur, pouvant indiquer une lésion du sus-épineux, l'amyotrophie deltoïdienne (par mensuration des périmètres auxiliaires vertical et horizontal), les craquements articulaires. Enfin, il sera tenu compte des examens radiologiques.'

Ce même chapitre préconise un taux compris entre 10 et 15 % en cas de limitation légère de tous les mouvements de l'épaule dominante et un taux de 20% en cas de limitation moyenne de tous les mouvements côté dominant.

Aux termes du jugement entrepris, le docteur [J], médecin consultant désigné en première instance, a indiqué 'avoir constaté une dégradation significative des mobilités actives de l'épaule (dominante) très probablement en rapport avec une pseudarthrose de la greffe osseuse mise en place par le docteur [I] le 11 janvier 2017.'

Le tribunal a entériné l'avis du docteur [J] qui proposait un taux de 20%.

Le docteur [O], médecin consultant désigné en cause d'appel, a relevé dans son rapport que le certificat médical final du 23 octobre 2018 concluait à la 'persistance de douleurs de l'épaule droite invalidante avec limitation RI (LI) et fatigabilité ++, échec de la greffe osseuse', que l'étude des documents médicaux présentés ne mettaient pas en évidence d'antécédents pathologiques susceptibles d'avoir une incidence sur les lésions initiales, leur évolution et les séquelles, et que l'examen clinique réalisé par le médecin conseil du 26 novembre 2018 indiquait :

' examen clinique orienté : épaule droite:

sommeil : je ne peux pas dormir sur mon épaule

abduction épaule droite à 160° - à gauche : 170

antépulsion droite à 160 - à gauche 180

rotation externe limitée à 10° - gauche à 40°

main vertex correcte

main longue : droite lombaire basse gauche dorsale

force de préhension main droite 30- gauche 40

hand grip droit 40 gauche 75".

Puis il a émis l'avis suivant :

'L'examen clinique réalisé par le médecin conseil le 26 novembre 2018 retrouvait une limitation des amplitudes articulaires de l'épaule droite (côté dominant) avec une perte de force de moitié par rapport au controlatéral'.

Il rappelle ensuite le barème relatif à l'épaule comme la cour l'a indiqué ci-dessus et conclut : ' Dans le cas présent, M. [Y] [H] présente une limitation moyenne de plusieurs mouvements de l'épaule avec perte de force de moitié par rapport au côté controlatéral permettant de justifier un taux d'IPP de 20%'.

A l'appui de son appel, la CPAM soutient que tous les mouvements n'étaient pas limités lors de l'examen clinique réalisé par son médecin conseil, que cette limitation ne peut être qualifiée de moyenne et que le docteur [J] a à tort pris en compte une dégradation de l'état de santé de M. [H] sans se placer à la date de consolidation.

La cour relève que dans le rapport de consultation du 18 janvier 2022 qui figure en intégralité au dossier de M. [H], le docteur [J] note au paragraphe discussion médico-légale : ' La consolidation a été fixée au 23 octobre 2018 et le taux d'incapacité a été fixé à 12% compte tenu d'une limitation de l'antépulsion à 160° et diminution de la force musculaire du membre supérieur côté dominant. Taux confirmé par la CMRA.

Le barème prévoit un taux de 10 à 15% en cas de limitation légère de tous les mouvements de l'épaule dominante. Ce qui correspond à ce qui avait été constaté lors de la consolidation le 23 octobre 2018 (tous les mouvements de l'épaule n'étaient pas atteints). Toutefois lors de la consultation en date du 30/09/2021, il est constaté une dégradation significative des mobilités actives de cette épaule dans l'ensemble des secteurs de mobilité. L'ensemble du tableau clinique est très probablement en rapport avec une pseudarthrose de la greffe osseuse mise en place par le docteur [I] du 11/01/2017. Monsieur [Y] [H] présente donc une limitation moyenne de l'ensemble de ces mouvements de l'épaule sur le membre dominant correspondant à 20% d'IPP.

Sur le plan professionnel, aucun avis d'inaptitude du médecin du travail n'est produit, et Monsieur [H] a conservé son emploi. Ainsi, à la date de consolidation du 23 octobre 2018, il n'est démontré aucune perte de revenu ou d'emploi en relation avec les séquelles de l'accident du travail du 31 janvier 2015 ; par conséquent, une majoration du taux d'incapacité permanente à ce titre n'est aucunement justifiée.

Conclusion médico-légale :

Dans ces conditions, il me semble licite de modifier la décision du 11 janvier 2019, qui fixait le taux d'incapacité permanente en réparation des séquelles de l'accident du travail dont a été victime Monsieur [Y] [H] le 31 janvier 2015 pour le monter à 20% correspondant à l'état actuel de son incapacité permanente.'

Il ressort du rapport que le médecin consultant a fixé le taux d'incapacité à 20% en prenant en considération une dégradation de l'état de santé de M. [H] résultant des mesures de mobilité de l'épaule effectuée lors de la consultation réalisée le 19 novembre 2021, soit trois ans après la date de consolidation et la décision contestée. Il a constaté une antépulsion à 110°, une rétropulsion à 20°, une adduction à 10°, une rotation externe à 10°.

Or en matière d'incapacité permanente partielle, il convient de se placer au jour de la consolidation pour évaluer le taux d'incapacité. Les éléments postérieurs, s'ils peuvent le cas échéant justifier une révision dans les conditions de l'article L 443-1 du code de la sécurité sociale, n'ont donc pas en principe à être pris en compte.

Le tribunal a donc à tort entériné le rapport du docteur [J] qui admet au surplus dans son rapport que tous les mouvements de l'épaule n'étaient pas atteints lors de la consolidation et que ce qui avait été constaté à l'époque correspondait à la fourchette de 10 à 15% du barème prévue en cas de limitation légère de tous les mouvements de l'épaule dominante, de sorte que le taux de 12% était conforme.

Le docteur [K] désigné en cause d'appel conclut à un taux de 20%. Elle retient comme le docteur [J] que tous les mouvements ne sont pas atteints puisqu'elle conclut à une limitation de plusieurs mouvements de l'épaule et non de tous les mouvements. En outre, elle n'indique pas en quoi elle qualifie cette limitation de moyenne alors que l'antépulsion et l'abduction sont mesurées à 160° au lieu de 170 et 180°, ce qui correspond à une limitation légère et que seules la limitation de la rotation externe à 10° et le mouvement complexe main lombes peuvent être qualifiés ainsi.

Ces éléments qui caractérisent une limitation moyenne de deux mouvements de l'épaule et une limitation légère d'un mouvement justifient la fixation du taux d'incapacité à 15% à la date de consolidation.

Le jugement sera infirmé.

Sur les dépens et sur l'article 700 du code de procédure civile

Partie succombante, M. [H] sera condamné aux dépens et débouté de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe, en dernier ressort,

Déclare l'appel recevable,

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a rappelé que les frais de consultation seront pris en charge par la caisse nationale d'assurance maladie,

Statuant à nouveau,

Fixe à 15% le taux d'incapacité permanente partielle de M. [Y] [H] à la date de consolidation du 23 octobre 2018, au titre des séquelles de l'accident du travail du 31 janvier 2015,

Condamne M. [Y] [H] aux dépens,

Le déboute de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 22/02308
Date de la décision : 18/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 24/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-18;22.02308 ?
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