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17/06/2024 | FRANCE | N°23/00072

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 17 juin 2024, 23/00072


ARRET







Société [5]





C/



CPAM DE LA COTE D'OPALE













COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 17 JUIN 2024



*************************************************************



N° RG 23/00072 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IULS - N° registre 1ère instance : 21/02292



Jugement du tribunal judiciaire de Lille en date du 01 décembre 2022





PARTIES EN CAUSE :

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APPELANTE





Société [5], agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège agis



M.P. : M. [G] [S]

[Adresse 4]

[Localité 2]





Représentée et plaidant par Me Michaël Ruimy de la SEL...

ARRET

Société [5]

C/

CPAM DE LA COTE D'OPALE

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 17 JUIN 2024

*************************************************************

N° RG 23/00072 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IULS - N° registre 1ère instance : 21/02292

Jugement du tribunal judiciaire de Lille en date du 01 décembre 2022

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

Société [5], agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège agis

M.P. : M. [G] [S]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée et plaidant par Me Michaël Ruimy de la SELARL R & K avocats, avocat au barreau de Lyon, vestiaire : 1309, substitué par Me Myriam Sanchez, avocat au barreau de Paris

ET :

INTIME

CPAM de la Côte d'Opale, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Mme [R] [H], dûment mandatée

DEBATS :

A l'audience publique du 12 mars 2024 devant Mme Anne Beauvais, conseillère, siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 945-1 du code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 27 mai 2024 puis le 17 juin 2024.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Blanche Tharaud

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Anne Beauvais en a rendu compte à la cour composée en outre de :

M. Philippe Mélin, président,

Mme Anne Beauvais, conseillère,

et M. Renaud Deloffre, conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 17 juin 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, M. Philippe Mélin, président a signé la minute avec Mme Charlotte Rodrigues, greffier.

*

* *

DECISION

Suivant décision en date du 28 juin 2021, la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Opale a pris en charge au titre de la législation professionnelle la pathologie du 18 juin 2020 déclarée par M. [G] [S], salarié de la société [5] (la société [5] ou la société) le 1er mars 2021, sur le fondement d'un certificat médical initial du 1er février 2021 faisant état d'un 'canal carpien gauche opéré le 14/10/2020.'

La société [5] a contesté la prise en charge de la maladie devant la commission de recours amiable, laquelle a rejeté sa demande par décision du 28 octobre 2021.

Saisi à son tour par l'employeur, le tribunal judiciaire de Lille, par jugement en date du 1er décembre 2022, a :

Débouté la société [5] de ses demandes ;

Dit opposable à la société [5] la décision de prise en charge du 28 juin 2021 de la maladie du 18 juin 2020 déclarée par M. [G] [S] ;

Condamné la société [5] aux dépens.

Par lettre recommandée avec demande d'accusé de réception expédiée le 9 décembre 2022, la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Opale a relevé appel dudit jugement.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 12 mars 2024.

Aux termes de ses conclusions visées par le greffe le 22 décembre 2023, oralement développées à l'audience, la société [5] demande à la cour de :

Infirmer le jugement déféré ;

Juger que la CPAM n'a pas respecté le délai de consultation sans observation dont elle devait bénéficier ;

Juger que la CPAM n'a pas respecté le principe du contradictoire ;

En conséquence,

Juger que la décision de prise en charge du 28 juin 2021 de la maladie du 18 juin 2020, déclarée par M. [S], doit lui être déclarée inopposable.

L'employeur indique ne plus soutenir, au vu des pièces produites par la caisse, le motif relatif au fait que le dossier mis à sa disposition pour consultation était incomplet en ce que les certificats médicaux de prolongation n'avaient pas été mis à sa dispostion, mais reproche à la caisse ne pas avoir respecté le délai de consultation sans observations prévu à l'article R. 461-9 du code de la sécurité sociale, dont doit bénéficier l'employeur.

Il précise en substance que la seconde phase de consultation du dossier, qui débutait le 26 juin 2021, devait prendre fin le 5 juillet 2021, mais que la caisse ayant pris sa décision dès le 28 juin 2021, n'a pas respecté cette période de consulation d'autant que le 26 juin 2021 était un samedi et le 27 juin 2021un dimanche, de sorte que dans les faits, elle n'a disposé d'aucun jour de consultation du dossier.

La société [5] ajoute que l'article R. 461-9 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction la plus récente est parfaitement clair sur le fait que la caisse doit fixer une date précise de fin de consultation du dossier et non un délai glissant en fonction de sa date de prise de décision, pour en conclure qu'en l'espèce, elle s'est retrouvée dans l'impossibilité de pouvoir utilement consulter le dossier dans le délai imparti, du fait du retrait de l'ensemble des pièces consultables dès le 28 juin 2021.

*

En réplique, la caisse, aux termes de ses conclusions visées par le greffe le 12 mars 2024, oralement développées à l'audience, demande à la cour de :

Débouter la société [5] de sa prétention selon lequelle elle n'aurait pas respecté le principe du contradictoire à son égard ;

Confirmer le jugement entrepris ;

Juger en conséquence opposable à la société [5] la décision de prise en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels de la maladie du 18 juin 2020 de M. [G] [S].

La caisse expose en substance qu'en application de l'article R. 461-9 du code de la sécurité sociale, elle a respecté le principe du contradictoire dès lors qu'elle a informé l'employeur des dates d'instruction et permis une consultation des pièces ayant fondé la décision de prise en charge pendant une période de dix jours francs.

Elle soutient que l'inopposabilité sanctionne exclusivement la méconnaissance du principe du contradictoire résultant de ce que l'employeur n'a pas été en mesure de faire valoir utilement ses observations pendant le délai règlementaire de dix jours francs et qu'il n'a pu consulter les pièces ayant fondé la décision lui faisant grief.

Elle débat du contenu du dossier, insiste sur sa complétude tout le temps qu'il était consultable sur la période de dix jours francs, revient longuement sur les motifs soutenus devant les premiers juges relatifs à l'absence au dossier des certificats médicaux de prolongation, et demande dans ses motifs à la cour d'appel, de confirmer que l'absence de mise à disposition de l'intégralité des avis de prolongation d'arrêt de travail lors de la consultation des pièces n'a pas causé de grief à l'employeur, lequel a reçu une information complète sur les élément ayant fondé la décision de prise en charge, constituant le dossier d'instruction de la caisse.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des demandes des parties et des moyens qui les fondent.

Motifs

Sur la deuxième phase de consultation

Selon les dispositions de l'article R. 461-9 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue du décret n°2019-356 du 23 avril 2019 :

I.-La caisse dispose d'un délai de cent-vingt jours francs pour statuer sur le caractère professionnel de la maladie ou saisir le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles mentionné à l'article L. 461-1.

Ce délai court à compter de la date à laquelle la caisse dispose de la déclaration de la maladie professionnelle intégrant le certificat médical initial mentionné à l'article L. 461-5 et à laquelle le médecin-conseil dispose du résultat des examens médicaux complémentaires le cas échéant prévus par les tableaux de maladies professionnelles.

La caisse adresse un double de la déclaration de maladie professionnelle intégrant le certificat médical initial à l'employeur auquel la décision est susceptible de faire grief par tout moyen conférant date certaine à sa réception ainsi qu'au médecin du travail compétent.

II.-La caisse engage des investigations et, dans ce cadre, elle adresse, par tout moyen conférant date certaine à sa réception, un questionnaire à la victime ou à ses représentants ainsi qu'à l'employeur auquel la décision est susceptible de faire grief. Le questionnaire est retourné dans un délai de trente jours francs à compter de sa date de réception. La caisse peut en outre recourir à une enquête complémentaire.

La caisse peut également, dans les mêmes conditions, interroger tout employeur ainsi que tout médecin du travail de la victime.

La caisse informe la victime ou ses représentants ainsi que l'employeur de la date d'expiration du délai de cent-vingt jours francs prévu au premier alinéa du I lors de l'envoi du questionnaire ou, le cas échéant, lors de l'ouverture de l'enquête.

III.-A l'issue de ses investigations et au plus tard cent jours francs à compter de la date mentionnée au deuxième alinéa du I, la caisse met le dossier prévu à l'article R. 441-14 à disposition de la victime ou de ses représentants ainsi qu'à celle de l'employeur auquel la décision est susceptible de faire grief.

La victime ou ses représentants et l'employeur disposent d'un délai de dix jours francs pour le consulter et faire connaître leurs observations, qui sont annexées au dossier. Au terme de ce délai, la victime ou ses représentants et l'employeur peuvent consulter le dossier sans formuler d'observations.

La caisse informe la victime ou ses représentants et l'employeur des dates d'ouverture et de clôture de la période au cours de laquelle ils peuvent consulter le dossier ainsi que de celle au cours de laquelle ils peuvent formuler des observations, par tout moyen conférant date certaine à la réception de cette information et au plus tard dix jours francs avant le début de la période de consultation.

En l'espèce, la caisse primaire a, par courrier du 4 mars 2021, informé l'employeur de ce qu'elle avait reçu une déclaration de maladie professionnelle accompagnée du certificat médical lemême jour.

Elle l'invitait à renseigner le questionnaire sous 30 jours.

Elle l'informait encore qu'après étude du dossier, l'employeur aurait la possibilité d'en consulter les pièces et de formuler des observations du 14 juin 2021 au 25 juin 2021, directement en ligne, sur un site internet dont elle fournissait l'adresse, et qu'au-delà de cette date, le dossier resterait consultable jusqu'à la décision, laquelle serait adressée au plus tard le 5 juillet 2021.

La consultation par l'employeur du dossier est donc organisée en deux phases, la première à l'issue de l'instruction du dossier, qui lui permet de formuler ses observations, puis une seconde phase de consultation simple des éléments du dossier, sans possibilité de formuler des observations - motif pour lequel cette phase de consultation du dossier est communément désignée comme étant la phase de consultation 'passive' du dossier.

L'employeur ne conteste pas avoir effectivement disposé de la faculté, durant la première phase, de consulter le dossier, et faire des observations.

Il soutient en revanche avoir été empêché de consulter le dossier lors de la deuxième phase au motif qu'elle était ouverte du 26 juin au 5 juillet 2021, et que la caisse primaire a pris sa décision dès le 28 juin 2021, en le privant de surcroît dans les faits de tout délai de consultation à compter du 26 juin2021 au motif qu'il s'agissait d'un samedi.

Or, la caisse avait dûment informé l'employeur que passé la première phase qui expirait le 25 juin 2024, elle prendrait sa décision au plus tard le 5 juillet 2021 - et non, à la date du 5 juillet 2021.

La société [5] déduit du fait que les 26 et 27 juin constituaient un wee-end, que le dossier n'était pas consultable le week-end, alors qu'il ressort des pièces produites par la caisse que le dossier était accessible via un site internet qui par essence ne souffre d'aucune restriction quotidienne d'accès, et que l'employeur ne rapporte pas la preuve que le dossier n'était pas consultable après le 25 juin ni même au-delà de la date de sa décision, le 28 juin 2021.

Mais en tout état de cause, dans la seconde phase de consultation du dossier durant laquelle l'employeur ne peut plus discuter le bien-fondé de la demande de prise en charge de son salarié au titre de la législation sur les risques professionnelles, l'inopposabilité n'est pas encourue au motif que l'employeur n'aurait pas disposé, au terme du délai de consultation de dix jours francs, d'un nouveau délai de consultation d'une durée suffisante ou précise.

Le grief n'est donc aucunement démontré.

Compte tenu de ces éléments, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris, par substitution de motifs compte tenu du changement de motifs soutenus par l'employeur entre l'instance devant le tribunal judiciaire et la cour d'appel.

Sur la présence au dossier consultable par l'employeur, des certificats médicaux de prolongation

La caisse demande à la cour d'appel, dans ses motifs, de confirmer que l'absence de mise à disposition de l'intégralité des avis de prolongation d'arrêt de travail lors de la consultation des pièces n'a pas causé de grief à l'employeur, lequel a reçu une information complète sur les éléments ayant fondé la décision de prise en charge, constituant le dossier d'instruction de la caisse.

Toutefois, la société [5] soulignant dans le cadre de ses motifs qu'elle ne maintient pas ses motifs soutenus devant les premiers juges, relatifs aux certificats médicaux de prolongation de son salarié, y substituant ses motifs relatifs au délai de consultatin du dossier sans observations dont dispose l'employeur, il n'existe aucun débat sur ce point.

Le juge ayant pour mission de trancher un litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables et conformément la mission qui lui est impartie selon les dispositions de l'article 12 du code de procédure civile, et non d'énoncer ladite règle de droit indépendamment de tout litige, en l'absence de litige relatif à la présence au dossier consultable par l'employeur des certificats médicaux du salarié, la cour n'est saisie d'aucune prétention.

Sur les dépens

La société [5] succombant, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a mis à sa charge les dépens de première instance, y ajoutant pour le même motif, qu'elle sera condamnée aux dépens de l'instance d'appel.

Par ces motifs

La cour, statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire, en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lille le 1er décembre 2022, sauf à dire que la société dite '[5]' a pour dénomination '[5] ;

Condamne la société [5] aux dépens de l'instance d'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 23/00072
Date de la décision : 17/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-17;23.00072 ?
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