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11/06/2024 | FRANCE | N°22/00170

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 11 juin 2024, 22/00170


ARRET







CPAM DE [Localité 5] [Localité 6]





C/



S.A.S.U. [3]













COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 11 JUIN 2024



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N° RG 22/00170 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IKD3 - N° registre 1ère instance : 19/03743



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE EN DATE DU 14 DECEMBRE 2021





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APPELANT





CPAM DE [Localité 5] [Localité 6]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 6]



Représentée et plaidant par Madame [B] [W], munie d'un pouvoir régulier;











ET :





INTIMEE





S.A.S.U. [3]

[Adresse 1]

[A...

ARRET

CPAM DE [Localité 5] [Localité 6]

C/

S.A.S.U. [3]

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 11 JUIN 2024

*************************************************************

N° RG 22/00170 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IKD3 - N° registre 1ère instance : 19/03743

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE EN DATE DU 14 DECEMBRE 2021

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

CPAM DE [Localité 5] [Localité 6]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée et plaidant par Madame [B] [W], munie d'un pouvoir régulier;

ET :

INTIMEE

S.A.S.U. [3]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée et plaidant par Me Michaël RUIMY de la SELARL R & K AVOCATS, avocat au barreau de LYON

DEBATS :

A l'audience publique du 15 Avril 2024 devant Mme Jocelyne RUBANTEL, Président, siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 945-1 du code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 11 Juin 2024.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Madame Christine DELMOTTE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Jocelyne RUBANTEL en a rendu compte à la cour composée en outre de :

Mme Jocelyne RUBANTEL, Président,

M. Pascal HAMON, Conseiller,

et Mme Véronique CORNILLE, Conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 11 Juin 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Jocelyne RUBANTEL, président a signé la minute avec Mme Charlotte RODRIGUES, greffier.

*

* *

DECISION

Le 17 juin 2013, M. [J], salarié de la société [3] en qualité de distributeur, a été victime d'un accident du travail. " Alors qu'il chutait dans les escaliers, sa main droite a cogné une poutre de séparation en voulant se rattraper ".

Le certificat médical initial établi le 18 juin 2013 mentionnait " traumatisme main droite-contusion ".

Le 25 juin 2013, la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5]-[Localité 6] a notifié à l'employeur la prise en charge de cet accident au titre de la législation professionnelle.

Par courrier du 2 septembre 2019, la société [3] a saisi la commission de recours amiable d'une contestation de la durée des soins et arrêts prescrits au titre de l'accident.

Après rejet de sa demande, elle a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Lille qui par jugement du 14 décembre 2021 a :

Vu le rapport d'expertise médicale du docteur [E] du 7 juin 2021,

- dit que la date de consolidation/guérison dans les rapports entre la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5]-[Localité 6] et la société [3] de l'accident du travail de M. [J] survenu le 17 juin 2013 doit être fixée au 23 septembre 2013,

- dit que les soins et arrêts délivrés à M. [J] à compter du 24 septembre 2013 sont inopposables à la société [3],

- dit que la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5]-[Localité 6] devra communiquer à la CARSAT compétente l'ensemble des informations nécessaires à la rectification des taux de cotisation AT/MP de la société [3],

- condamné la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5] [Localité 6] aux dépens qui comprendront les frais d'expertise médicale judiciaire (541 euros).

La caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5]-[Localité 6] a le 11 janvier 2022 relevé appel de ce jugement qui lui avait été notifié par un courrier recommandé dont elle avait accusé réception le 16 décembre 2021.

Par arrêt avant dire droit du 10 juillet 2023, la cour a ordonné une expertise médicale sur pièces confiée au docteur [L] avec mission de :

- se faire communiquer l'entier dossier médical de M. [J] détenu par la caisse primaire d'assurance maladie,

- retracer l'évolution des lésions de M. [J],

- déterminer si l'ensemble des arrêts de travail pris en charge peuvent résulter directement et uniquement de l'accident du travail survenu le 17 juin 2013,

- déterminer le cas échéant si un état indépendant évoluant pour son propre compte serait à l'origine ou non d'une partie des arrêts de travail et déterminer la date à laquelle les arrêts auraient éventuellement pour origine une cause étrangère au travail.

L'arrêt renvoyait l'affaire à l'audience du 14 mars 2024.

L'expert a déposé son rapport le 22 février 2024.

Un renvoi a été accordé pour l'audience du 15 avril 2024.

Aux termes de son écrit visé par le greffe le 8 avril 2024, oralement développé à l'audience, la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5]-[Localité 6] demande à la cour de maintenir l'opposabilité à l'égard de l'employeur l'ensemble des soins et arrêts pris en charge des suites de l'accident du travail du 17 juin 2013 jusqu'au 13 janvier 2024, date de guérison.

Au soutien de ses demandes, elle fait valoir que les services administratif et médical n'ont pas été convoqués à cette mesure d'expertise et que par ailleurs, le médecin conseil qui a produit un argumentaire est en désaccord avec les experts.

Aux termes de ses écritures visées par le greffe le 8 avril 2024, oralement développées à l'audience, la société [3] demande à la cour de :

A titre principal,

- juger que la CPAM a délibérément violé le principe du contradictoire en s'abstenant de transmettre l'entier dossier médical de M. [J] à l'expert judiciaire, et plus particulièrement, les certificats médicaux de prolongation,

En conséquence,

- juger inopposable l'ensemble des arrêts de travail et soins prescrits à M. [J] au titre de son accident du travail du 17 juin 2013,

A titre subsidiaire,

- entériner les conclusions d'expertise du docteur [L],

- juger que les arrêts de travail et soins et autres conséquences exclusivement imputables à l'accident du travail du 17 juin 2013 sont inopposables à la société [3],

- condamner la caisse primaire d'assurance maladie à prendre à sa charge l'intégralité des frais d'expertise.

Au soutien de ses demandes, la société [3] fait valoir que la caisse primaire d'assurance maladie n'a transmis à l'expert désigné par la cour que l'argumentaire du médecin conseil et non pas l'intégralité du dossier détenu par elle, dont les certificats médicaux de prolongation des arrêts de travail.

Elle a ainsi manqué au contradictoire et au principe de l'égalité des armes, ce qui doit conduire à déclarer inopposable l'ensemble des arrêts de travail.

A titre subsidiaire, elle demande que le rapport d'expertise soit entériné et qu'en conséquence, lui soient déclarés opposables les arrêts de travail prescrits jusqu'au 22 octobre 2013.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des demandes des parties et des moyens qui les fondent.

Motifs

En application des articles L. 411-1, L. 431-1 et L. 433-1 du code de la sécurité sociale, la présomption d'imputabilité s'applique aux lésions initiales, à leurs complications, à l'état pathologique antérieur aggravé par l'accident du travail ou la maladie professionnelle, pendant toute la période d'incapacité, précédant la guérison complète ou la consolidation, et postérieurement aux soins destinés à prévenir une aggravation et plus généralement, à toutes les conséquences directes de l'accident du travail ou la maladie professionnelle.

La présomption d'imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle telle qu'elle résulte de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, dès lors qu'un arrêt de travail a été initialement prescrit ou que le certificat médical initial d'accident du travail est assorti d'un arrêt de travail, s'étend à toute la durée d'incapacité de travail précédant soit la guérison complète, soit la consolidation de l'état de la victime, et il appartient à l'employeur qui conteste cette présomption d'apporter la preuve contraire.

Seule la circonstance d'une lésion totalement étrangère au travail permet d'écarter la présomption d'imputabilité.

La caisse primaire d'assurance maladie reproche à l'expert désigné par la cour de ne pas avoir convoqué le service médical ni le service administratif.

Cette critique est sans objet dès lors que la cour avait ordonné une expertise sur pièces.

Le docteur [L] experte désignée par la cour indique dans son rapport que la caisse primaire d'assurance maladie ne lui a envoyé qu'un argumentaire du médecin conseil, et aucune pièce médicale.

La société [3] demande que tous les arrêts de travail et soins lui soient déclarés inopposables.

La carence de la caisse dans la transmission des pièces du dossier qu'elle détient n'a pas permis à l'expert d'accomplir pleinement sa mission, ce qu'elle indique explicitement dans son rapport.

Si la caisse a ainsi porté atteinte au principe de l'égalité des armes garantissant la mise en 'uvre d'un procès équitable, pour autant, l'inopposabilité de la prise en charge de l'ensemble des arrêts de travail et soins ne saurait être ordonnée à compter du 17 juin 2013, l'arrêt de travail initial qui a prescrit un arrêt de travail jusqu'au 22 juin 2013 n'étant pas susceptible d'être remis en cause.

Par ailleurs, le rapport d'expertise médicale ordonnée par le tribunal n'est pas affecté par cette irrégularité, étant observé que le docteur [E] avait reçu communication des certificats médicaux de prolongation des arrêts de travail.

Il concluait au fait que les arrêts de travail étaient justifiés jusqu'au 23 septembre 2013, et il résulte du jugement déféré que la société [3] demandait au tribunal d'entériner ce rapport.

La cour avait estimé nécessaire d'ordonner une nouvelle expertise au motif que l'expert [E] avait privilégié l'hypothèse d'une dolorisation d'un état pathologique antérieur ou concomitant en soulignant une carence d'informations sur les résultats des investigations cliniques et para cliniques apportées par le médecin conseil de la caisse. Par ailleurs, la cour relevait qu'il existait une incertitude quant au siège exact des lésions au regard du compte-rendu du médecin rhumatologue du 22 octobre 2013 faisait état d'une lésion du quatrième rayon de la métacarpo-phalangienne tandis que les précédents certificats médicaux de prolongation mentionnaient un traumatisme de la main droite, la notion de cinquième métacarpe apparaissant ponctuellement.

Dès lors que la caisse n'a pas permis à l'expert nommé par la cour d'accomplir pleinement sa mission, et alors que l'examen des certificats médicaux de prolongation était déterminant, il y a lieu de confirmer le jugement qui a entériné le rapport d'expertise du docteur [E].

Les arrêts de travail et soins postérieurs au 23 septembre 2013 seront donc déclarés inopposables à la société [3].

Dépens

Conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure, la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5]-[Localité 6] est condamnée aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise médicale ordonnée par la cour.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt rendu par mise à disposition au greffe, contradictoire, en dernier ressort,

Déboute la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5]-[Localité 6] de l'ensemble de ses demandes,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré,

Condamne la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 5]-[Localité 6] aux entiers dépens de l'instance d'appel, en ce compris les frais d'expertise.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 22/00170
Date de la décision : 11/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 17/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-11;22.00170 ?
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