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06/06/2024 | FRANCE | N°23/00182

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 06 juin 2024, 23/00182


ARRET

N°518





Société [5]





C/



CPAM DE L'AISNE











COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 06 JUIN 2024



*************************************************************



N° RG 23/00182 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IUSJ - N° registre 1ère instance : 22/00601



ORDONNANCE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE EN DATE DU 14 DÉCEMBRE 2022





PARTIES EN CAUSE :




r>APPELANTE





Société [5], agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]





Représentée et plaidant par Me Fanny CAFFIN, avocat au barreau de PARIS







ET :

...

ARRET

N°518

Société [5]

C/

CPAM DE L'AISNE

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 06 JUIN 2024

*************************************************************

N° RG 23/00182 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IUSJ - N° registre 1ère instance : 22/00601

ORDONNANCE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE EN DATE DU 14 DÉCEMBRE 2022

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

Société [5], agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée et plaidant par Me Fanny CAFFIN, avocat au barreau de PARIS

ET :

INTIME

CPAM DE L'AISNE, agissant poursuites et diligences en son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Mdame [Z] [U], dûment mandatée

DEBATS :

A l'audience publique du 18 Mars 2024 devant Mme Véronique CORNILLE, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu de l'article 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 06 Juin 2024.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Madame Christine DELMOTTE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Véronique CORNILLE en a rendu compte à la Cour composée en outre de :

Mme Jocelyne RUBANTEL, Président,

Mme Chantal MANTION, Président,

et Mme Véronique CORNILLE, Conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 06 Juin 2024, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Jocelyne RUBANTEL, Président a signé la minute avec Madame Charlotte RODRIGUES, Greffier.

*

* *

DECISION

Le 2 juillet 2021, la société [5] a établi une déclaration d'accident du travail au bénéfice de son salarié M. [L] [B], faisant état d'un fait accidentel survenu le 30 juin 2021 dans les circonstances suivantes « activité de la victime lors de l'accident : tri du linge sur table - nature de l'accident : aucun fait accidentel mais douleur progressive sur la semaine précédente ' siège des lésions : bras droit ».

Le certificat médical initial établi le 30 juin 2021 par le docteur [K] indique « après mouvement brusque douleurs dans le territoire du nerf ulnaire droit ».

La caisse primaire d'assurance maladie (la CPAM ou la caisse) de l'Aisne, après enquête, a pris en charge l'accident déclaré au titre de la législation sur les risques professionnels par décision du 27 septembre 2021.

Contestant le bien-fondé de cette décision, la société [5] a saisi la commission de recours amiable de la CPAM de l'Oise, puis, suite au rejet de sa contestation, le pôle social du tribunal judiciaire de Lille.

Par jugement en date du 14 novembre 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Lille a :

- déclaré opposable à la société [5] la décision de la CPAM de l'Aisne du 27 septembre 2021 relative à la prise en charge de l'accident du travail du 30 juin 2021 de M. [L] [B],

- condamné la société [5] aux dépens de l'instance.

Cette décision a été notifiée à la société [5] le 16 novembre 2022, qui en a relevé appel le 16 décembre 2022.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 18 mars 2024.

Par conclusions, visées le 18 mars 2024 et soutenues oralement à l'audience, la société [5] demande à la cour de :

- constater que la matérialité de l'accident dont aurait été victime M. [L] [B] le 30 juin 2021 n'est pas établie par la caisse, autrement que par les seules allégations de la victime,

- en déduire que la présomption d'imputabilité ne pouvait trouver à s'appliquer,

- infirmer en toutes ses dispositions, le jugement rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de Lille le 14 novembre 2022,

- lui dire inopposable la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle, de l'accident dont aurait été victime M. [L] [B] le 30 juin 2021,

- débouter la CPAM de l'Aisne de l'intégralité de ses demandes.

Elle fait valoir que M. [B] ne lui a pas immédiatement indiqué qu'il avait été victime d'un accident, qu'il lui a demandé de quitter son poste avant la fin de sa journée de travail le 30 juin 2021 au motif qu'un entretien avait été demandé par son médecin, que par la suite, il a indiqué avoir été victime d'un accident du travail sans déclarer de fait accidentel précis et soudain, ni d'heure précise. Il a au contraire fait état de douleurs apparues progressivement puisqu'il a déclaré ressentir des douleurs au bras depuis plusieurs jours et que la douleur se serait accentuée le 30 juin 2021. Elle relève qu'il a précisé dans son questionnaire avoir déjà subi deux interventions chirurgicales du coude droit et qu'en effet la caisse a déjà pris en charge une maladie professionnelle du 4 octobre 2016 consistant en un « syndrome du nerf ulnaire droit » ayant justifié depuis des restrictions posées par le médecin du travail.

Elle soutient qu'il n'y a aucun témoin du prétendu accident, que la CPAM n'a pas interrogé les personnes ayant été en contact avec M. [B] lorsqu'il a obtenu son bon de sortie et que la matérialité de l'accident n'est donc pas rapportée autrement que par les dires du salarié.

Par conclusions, visées le 14 mars 2024 et soutenues oralement à l'audience, la CPAM de l'Aisne demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 14 novembre 2022 par le pôle social du tribunal judiciaire de Lille,

- condamner la société [5] à lui payer la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouter la société [5] des fins de son recours.

Elle fait valoir que l'accident est survenu à 15 heures le 30 juin 2021 alors que M. [B] était à son poste de travail, que la lésion consécutive à cet accident a été constatée le jour même et qu'elle est en parfaite corrélation avec le fait accidentel déclaré, qu'aucun élément n'est susceptible de mettre en doute les faits déclarés par le salarié, que l'employeur ne démontre pas que l'accident aurait une cause totalement étrangère au travail.

Elle observe que l'employeur a été informé le jour même de l'accident par Mme [B], que le fait accidentel consiste en l'apparition d'une grosse douleur au niveau de l'avant-bras et que l'absence de témoin n'est pas de nature à écarter l'application de la présomption légale.

Elle précise être libre s'agissant de la forme de ses investigations et n'avoir donc aucune obligation d'interroger les témoins visés par l'employeur dans son questionnaire.

Elle expose enfin que l'état pathologique antérieur peut renverser la présomption d'imputabilité à condition d'être l'unique cause de l'accident, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties s'agissant de la présentation plus complète de leurs demandes et des moyens qui les fondent.

MOTIFS

Sur la matérialité du fait accidentel

L'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale dispose : « Est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise. »

Aux termes de l'article L.441-1 du même code : « la victime d'un accident du travail doit, dans un délai déterminé, sauf le cas de force majeure, d'impossibilité absolue ou de motifs légitimes, en informer ou en faire informer l'employeur ou l'un de ses préposés ».

Constitue ainsi un accident du travail un événement ou une série d'évènements survenus à des dates certaines par le fait ou à l'occasion du travail, dont il est résulté une lésion corporelle, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci.

Dans ses rapports avec l'employeur, il appartient à la caisse d'apporter la preuve de la matérialité de l'accident dont elle a admis le caractère professionnel.

En l'espèce, M. [B] a déclaré avoir été victime d'un accident du travail 30 juin 2021 à 15 heures soit pendant ses horaires de travail qui a fait l'objet le 2 juillet 2021 d'une déclaration d'accident du travail par son employeur en ces termes :

«Tri du linge sur la table. Aucun fait accidentel mais douleur progressive sur la semaine précédente.

Siège des lésions : bras droit ; Nature des lésions : douleur ».

Il est mentionné que l'accident a été connu le 30 juin 2021 à 16 heures 30 par l'un des préposés de l'employeur, la première personne avisée étant Mme [X].

Le certificat médical initial du 30 juin 202 indique « après mouvement brusque, douleur dans le territoire du nerf ulnaire droit ».

Lors de l'enquête effectuée par la caisse compte tenu des réserves émises par l'employeur, ce dernier a déclaré que le 30 juin 2021, M. [B] avait demandé un bon de sortie pour quitter son poste pendant ses horaires de travail afin de se rendre chez son médecin et que son épouse s'était ensuite présentée pour demander une feuille de soins accident du travail mais en vain en l'absence de déclaration d'accident du travail.

Dans le cadre du questionnaire assuré, M. [B] a déclaré avoir ressenti une grosse douleur en sortant des ballots de linge d'un chariot et avoir constaté, peu de temps après, un gonflement du coude.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments que les douleurs portées à la connaissance de l'employeur le 30 juin 2021, les lésions constatées le jour même de l'accident et la concordance de ces lésions avec les faits relatés par M. [B] et son activité le jour de l'accident constituent un faisceau d'indices permettant d'établir la matérialité de l'accident.

La seule absence de témoin n'est pas de nature à faire obstacle à la reconnaissance d'un accident du travail.

L'accident de M. [B] survenu au temps et au lieu du travail bénéficie de la présomption d'imputabilité.

Il appartient à l'employeur qui entend renverser la présomption d'imputabilité prévue à l'article L. 411-1 précité de démontrer que l'accident résulte d'une cause totalement étrangère au travail.

La société [5] invoque à cette fin l'existence d'un état pathologique antérieur à type de syndrome du nerf ulnaire droit ayant justifié une prise en charge au titre d'une maladie professionnelle et responsable selon elle des douleurs invoquées par M. [B].

Toutefois, s'il est démontré qu'il existe bien un état antérieur sur le même siège des lésions, il n'est pas rapporté la preuve que cet état antérieur soit la cause exclusive de l'accident survenu le 30 juin 2021, à l'exclusion de tout fait imputable à l'activité professionnelle, de sorte que l'employeur échoue à rapporter la preuve d'une cause totalement étrangère au travail.

Il est en outre indifférent que le salarié se soit plaint au préalable de douleurs au niveau du bras dès lors que la matérialité du fait accidentel est démontrée.

La société [5] sera donc déboutée de sa demande d'inopposabilité et le jugement confirmé en toutes ces dispositions

Sur les dépens

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

La société [5], qui succombe, sera condamnée aux dépens d'appel.

Sur les frais irrépétibles

Il serait inéquitable de laisser à la CPAM de l'Aisne la charge de ses frais irrépétibles.

La société [5] sera condamnée à lui verser la somme de 1 000 euros titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort par sa mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la société [5] aux dépens,

Condamne la société [5] à verser à la CPAM de l'Aisne la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 23/00182
Date de la décision : 06/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-06;23.00182 ?
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