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05/06/2024 | FRANCE | N°23/02673

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 5eme chambre prud'homale, 05 juin 2024, 23/02673


ARRET







[K]





C/



[Y]



























































copie exécutoire

le 05 juin 2024

à

Me CHEMLA

Me BERTHELOT

EG/IL/BG



COUR D'APPEL D'AMIENS



5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE



ARRET DU 05 JUIN 2024



*************************************

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N° RG 23/02673 - N° Portalis DBV4-V-B7H-IZOF



JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE SAINT QUENTIN DU 15 MAI 2023 (référence dossier N° RG 22/00053)



PARTIES EN CAUSE :



APPELANT



Monsieur [F] [K]

né le 16 Février 1993 à [Localité 4] (02)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 1]



concluant ...

ARRET

[K]

C/

[Y]

copie exécutoire

le 05 juin 2024

à

Me CHEMLA

Me BERTHELOT

EG/IL/BG

COUR D'APPEL D'AMIENS

5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE

ARRET DU 05 JUIN 2024

*************************************************************

N° RG 23/02673 - N° Portalis DBV4-V-B7H-IZOF

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE SAINT QUENTIN DU 15 MAI 2023 (référence dossier N° RG 22/00053)

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur [F] [K]

né le 16 Février 1993 à [Localité 4] (02)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 1]

concluant par Me Gérard CHEMLA de la SCP ACG & ASSOCIES, avocat au barreau de REIMS

ET :

INTIME

Monsieur [M] [Y]

[Adresse 2]

[Localité 1]

concluant par Me Amaury BERTHELOT de la SCP PINCHON-CACHEUX-

BERTHELOT, avocat au barreau de SAINT-QUENTIN

DEBATS :

A l'audience publique du 10 avril 2024, devant Mme Eva GIUDICELLI, siégeant en vertu des articles 805 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, l'affaire a été appelée.

Mme Eva GIUDICELLI indique que l'arrêt sera prononcé le 05 juin 2024 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Isabelle LEROY

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Eva GIUDICELLI en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :

Mme Laurence de SURIREY, présidente de chambre,

Mme Caroline PACHTER-WALD, présidente de chambre,

Mme Eva GIUDICELLI, conseillère,

qui en a délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 05 juin 2024, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Laurence de SURIREY, Présidente de Chambre et Mme Isabelle LEROY, Greffière.

*

* *

DECISION :

M. [K], né le 16 février 1993, a été embauché à compter du 7 mars 2014 dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée par M. [Y] (l'employeur), en qualité de salarié agricole. La relation contractuelle s'est poursuivie dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée à compter du 1er août 2017.

La convention collective applicable est celle des exploitations agricoles de polycultures du département de l'Aisne.

Le 28 juillet 2021, M. [K] a démissionné de son poste.

Ne s'estimant pas rempli de ses droits au titre de l'exécution de son contrat de travail, il a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Quentin le 1er juin 2022.

Par jugement du 15 mai 2023, le conseil a :

- déclaré M. [K] recevable et bien fondé ;

- condamné M. [Y] à verser M. [K] les sommes de :

- 1 700 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

- 170 euros à titre des congés payés y afférents ;

- 1 056,41 euros à titre de rappel de congés payés ;

- 340 euros à titre des congés payés dits « de fractionnement » ;

- débouté M. [K] de sa demande de dommages et intérêts pour absence de repos compensateur ;

- condamné M. [Y] à verser à M. [K] la somme de 500 euros au visa de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté M. [K] de l'exécution provisoire conformément à l'article 515 du code de procédure civile.

M. [K], régulièrement appelant de ce jugement, par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 13 février 2024, demande à la cour de :

- infirmer le jugement relativement au débouté des demandes de condamnation aux sommes de 6 637,46 euros à titre de rappel de congés payés et 3 231,60 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de repos compensateur,

Statuant à nouveau,

- condamner M. [Y] à lui verser les sommes de :

- 2 380,84 euros à titre de rappel de congés payés ;

- 3 231,60 euros au titre de dommages et intérêts pour absence de repos compensateur ;

- confirmer le jugement sur le surplus ;

En tout état de cause,

- condamner M. [Y] à lui verser 2 500 euros, au visa de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [Y], par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 8 mars 2024, demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il :

- l'a condamné à payer à M. [K] 1 056,41 euros à titre de rappel des congés payés ;

- a débouté M. [K] de sa demande de dommages et intérêts pour absence de repos compensateur ;

- confirmer le jugement pour le surplus ;

- débouter M. [K] de toutes demandes plus amples ou contraires ;

- condamner M. [K] à lui payer 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Il est renvoyé aux conclusions des parties pour le détail de leur argumentation.

EXPOSE DES MOTIFS

1/ Sur la demande au titre de l'indemnité de congés payés

M. [K] demande un rappel d'indemnité de congés payés exigible au 1er juin 2019, 1er juin 2020 et 1er juin 2021 par application de la règle des 10%, et soutient que les primes doivent être intégrées dans l'assiette de calcul des congés payés s'agissant d'une rémunération versée en contrepartie de son travail.

L'employeur soulève l'irrecevabilité de la demande en raison de la prescription pour la période antérieure au 1er juin 2019 et de son caractère nouveau au vu de la modification de la période de référence ; il conteste la prise en compte des primes expressément exclues de l'assiette de calcul par la convention collective applicable.

L'article L.3141-24 du code du travail dispose notamment que :

I.- Le congé annuel prévu à l'article L. 3141-3 ouvre droit à une indemnité égale au dixième de la rémunération brute totale perçue par le salarié au cours de la période de référence.

II.- Toutefois, l'indemnité prévue au I du présent article ne peut être inférieure au montant de la rémunération qui aurait été perçue pendant la période de congé si le salarié avait continué à travailler.

Le point de départ de la prescription des congés payés doit être fixé à l'expiration de la période légale ou conventionnelle au cours de laquelle les congés auraient pu être pris.

En l'espèce, il convient de constater que M. [K] ne demande plus en appel que l'indemnité de congés payés exigible au 1er juin 2019, 1er juin 2020 et 1er juin 2021.

Or, l'indemnité de congés payés exigible au 1er juin 2019 se calcule sur la période de référence allant du 1er juin 2018 au 31 mai 2019, ce qui fixe le point de départ du délai de prescription triennale au 1er juin 2019.

M. [K] ayant saisi le conseil de prud'hommes le 1er juin 2022, la demande de rappel d'indemnité de congés payés n'est pas prescrite.

Par ailleurs, la modification du mode de calcul fondant la demande par le salarié ne constitue pas une demande nouvelle mais une modification de moyen.

La demande formée en appel est donc recevable.

Les bulletins de salaire produits mentionnent le versement sur la période considérée de primes de moisson, de primes exceptionnelles et de primes de fin d'année.

L'employeur ne saurait prétendre que la prime de fin d'année visée à l'article 57 i) de la convention collective applicable pour l'exclure de l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés correspond à la prime de fin d'année portée sur les bulletins de salaire alors que l'article 37 de cette même convention prévoit qu'elle remplace notamment la prime de moisson qu'il verse par ailleurs.

L'employeur n'apportant aucun élément permettant d'établir que la prime de moisson n'est pas versée en contrepartie du travail fourni par le salarié et que la prime de fin d'année couvre des périodes de travail et de congés, il convient de les inclure dans l'assiette de calcul de l'indemnité de congés payés.

En revanche, la prime exceptionnelle, dont le caractère obligatoire n'est pas avéré, ne doit pas être prise en compte.

Au vu de la rémunération brute totale perçue par le salarié sur la période de référence et des indemnités versées sur cette même période, M. [K] est bien fondé à réclamer la somme de 2 380,84 euros.

Le jugement entrepris est donc infirmé de ce chef.

2/ Sur la demande au titre du repos compensateur

M. [K] affirme qu'il n'a pas pu bénéficier de son droit à repos compensateur à défaut de notification de ses droits dans une annexe au bulletin de salaire, ce qui a empêché le délai de prescription de courir, et demande à être indemnisé sur la base des textes du code du travail plus favorables que ceux de la convention collective applicable en la matière.

L'employeur oppose la prescription de la demande pour la période antérieure à 2019 faisant valoir que les modalités d'information du salarié sur ses droits sont conformes à la convention collective applicable, et se prévaut du dispositif prévu par cette dernière pour calculer les droits acquis.

L'article L. 3245-1 du code du travail dispose que l'action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat.

Cette prescription triennale s'applique à toute action engagée à raison de sommes afférentes aux salaires dus au titre du contrat de travail. Tel est le cas d'une demande tendant au versement de sommes qui auraient dû être payées au titre du repos compensateur ou de la contrepartie obligatoire en repos.

L'article L.3121-30 du même code dispose notamment que des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d'un contingent annuel. Les heures effectuées au-delà de ce contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie obligatoire sous forme de repos. Les heures prises en compte pour le calcul du contingent annuel d'heures supplémentaires sont celles accomplies au-delà de la durée légale.

En l'espèce, le contingent d'heures supplémentaires réglementaire ne s'appliquant qu'en l'absence de règles conventionnelles, il convient de se référer à l'article 7.4 de l'accord national du 23 décembre 1981 sur la durée du travail dans les exploitations et entreprises agricoles pour déterminer si les droits de M. [K] au titre de la contrepartie obligatoire en repos ont été respectés.

Ce texte prévoit qu'un repos compensateur payé est accordé au salarié qui accomplit plus de 1 860 heures de travail par an, que les droits à repos compensateur sont d'un jour de 1861 à 1900 heures annuelles effectuées, de deux jours de 1901 à 1940 heures annuelles effectuées et de trois jours de 1941 à 2000 heures effectuées, et qu'à la fin de la période annuelle, l'employeur enregistre sur un document prévu à cet effet, le nombre de journées de congé porté au crédit de chaque salarié au titre du repos compensateur, ce document étant tenu à jour tous les mois avec remise d'une copie au salarié en même temps que la paie.

Si l'employeur ne justifie pas de l'annexe au bulletin de paie requise, la cour constate que les bulletins de paie de décembre 2018, décembre 2019 et décembre 2020 mentionnent le nombre de jour de repos compensateur acquis et pris.

M. [K] étant en situation de connaître ses droits pour chaque année à ces dates et ayant saisi le conseil de prud'hommes en indemnisation le 1er juin 2022, sa demande est prescrite pour la période antérieure au 1er juin 2019.

Concernant la période 2020-2021, les bulletins de paie produits montrent qu'il a été rempli de ses droits en application du texte précité de la convention collective.

En revanche, les bulletins de paie font apparaître 2 149,69 heures travaillées sur 2019-2020 soit un dépassement de 149,69 heures du maximum prévu par la convention collective qu'il convient d'indemniser à hauteur de 852,51 euros.

Le jugement entrepris est donc infirmé de ce chef.

3/ Sur les demandes accessoires

L'employeur succombant principalement, il convient de mettre à sa charge les dépens, omis par le conseil de prud'hommes, ainsi que les dépens d'appel.

L'équité commande de le condamner à payer au salarié 2 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés en appel et de rejeter sa demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déclare recevable la demande de rappel de congés payés,

Déclare irrecevable la demande au titre du repos compensateur pour la période antérieure au 1er juin 2019,

Condamne M. [M] [Y] à payer à M. [F] [K] 2 380,84 euros au titre du rappel de congés payés,

Condamne M. [M] [Y] à payer à M. [F] [K] 852,51 euros au titre du repos compensateur,

Condamne M. [M] [Y] à payer à M. [F] [K] 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette le surplus des demandes,

Condamne M. [Y] aux dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 5eme chambre prud'homale
Numéro d'arrêt : 23/02673
Date de la décision : 05/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-05;23.02673 ?
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