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30/05/2024 | FRANCE | N°24/00024

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Referes 1er pp, 30 mai 2024, 24/00024


ORDONNANCE

N° 58

















COUR D'APPEL D'AMIENS



RÉFÉRÉS

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



ORDONNANCE DU 30 MAI 2024



*************************************************************



A l'audience publique des référés tenue le 26 Avril 2024 par Mme Chantal MANTION, Présidente de chambre déléguée par ordonnance de Mme la Première Présidente de la Cour d'Appel d'AMIENS en date du 09 Avril 2024,



Assistée de Madame Marie-Estelle CHAPON,

Greffier.



Dans la cause enregistrée sous le N° RG 24/00024 - N° Portalis DBV4-V-B7I-JAIJ du rôle général.





ENTRE :





L'IMMOBILIERE EUROPEENNE DES MOUSQUETAIRES (SA), agissant pour...

ORDONNANCE

N° 58

COUR D'APPEL D'AMIENS

RÉFÉRÉS

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 30 MAI 2024

*************************************************************

A l'audience publique des référés tenue le 26 Avril 2024 par Mme Chantal MANTION, Présidente de chambre déléguée par ordonnance de Mme la Première Présidente de la Cour d'Appel d'AMIENS en date du 09 Avril 2024,

Assistée de Madame Marie-Estelle CHAPON, Greffier.

Dans la cause enregistrée sous le N° RG 24/00024 - N° Portalis DBV4-V-B7I-JAIJ du rôle général.

ENTRE :

L'IMMOBILIERE EUROPEENNE DES MOUSQUETAIRES (SA), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée et plaidant par Me Olympe TURPIN substituant Me Jérôme LE ROY de la SELARL LX AMIENS-DOUAI, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 101, postulant et ayant pour avocat Me Sébastien REGNAULT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : K0055

Assignant en référé suivant exploit de la SELARL LTV, Commissaires de Justice Associés à BEAUVAIS, en date du 21 Février 2024, d'un jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de Beauvais, en date du 20 Novembre 2023, enregistré sous le n° 21/01644.

ET :

La société PLUS OPTIC [R] ( SAS), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Adresse 2]

Représentée par Me François MENDY substituant Me Daniel GAUBOUR, avocat au barreau d'AMIENS

DEFENDERESSE au référé.

Madame la Présidente après avoir constaté qu'il s'était écoulé un temps suffisant depuis l'assignation pour que la partie assignée puisse se défendre.

Après avoir entendu :

- en ses conclusions et sa plaidoirie : Me Turpin, conseil de la SA L'immobilière Européenne des Mousquetaires

- Me Mendy, conseil de la société Plus Optic [R] qui déclare s'en rapporter aux moyens et prétentions développés dans ses conclusions et déposer son dossier

L'affaire a été mise en délibéré au 30 Mai 2024 pour rendre l'ordonnance par mise à disposition au Greffe.

Vu le jugement en date du 20 novembre 2023, du tribunal judiciaire de Beauvais, saisi à la requête de la société Plus Optic [R], qui a notamment :

- déclarée irrecevable d'office la fin de non recevoir soulevée par la SA l'Immobilière Européenne des mousquetaires tirée de la prescription ;

- dit qu'est réputée non écrite, sur le fondement des dispositions de l'article L.112-1 du Code Monétaire et Financier, la clause d'indexation prévue par l'avenant du 24 février 2014 au bail consenti par la SA l'Immobilière Européenne des mousquetaires à la SAS Plus Optic [R] ;

- condamné en conséquence la SA l'Immobilière Européenne des mousquetaires prise en la personne de son représentant légal à rembourser à la SAS Plus Optic [R] les sommes de :

* 7.238,51 euros réglée à titre conservatoire à la suite du commandement au titre des charges locatives de l'année 2015 ;

* 1.814,76 euros TTC au titre des provisions pour charges locatives versées au titre de l'année 2015 ;

* 6.637,86 euros TTC réglée à titre conservatoire à la suite du commandement au titre des charges des années 2016 à 2020 ;

* 3.462,72 euros à titre conservatoire à la suite du commandement ;

* les sommes versées au titre des provisions pour charges locatives au titre des années 2016, 2018, 2019 et 2020 ;

* la différence entre le loyer fixé à la somme de 16.200 euros HT et hors charges par an et le loyer effectivement payé jusqu'à la date de la présente décision, dans la limite de la prescription quinquennale courant rétroactivement cinq ans avant la date de l'assignation en justice ;

- condamné la SA l'Immobilière Européenne des mousquetaires prise en la personne de son représentant légal à verser à la SAS Plus Optic [R] la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamné la SA l'Immobilière Européenne des mousquetaires prise en la personne de son représentant légal à supporter la charge des dépens de l'instance ;

- rappelé l'exécution provisoire de droit du jugement.

La SA l'Immobilière Européenne des mousquetaires a formé appel de ce jugement par déclaration reçue le 5 janvier 2024 au greffe de la cour.

Par acte de commissaire de justice en date du 21 février 2024, la SA l'Immobilière Européenne a fait assigner la SAS Plus Optic [R] à comparaître à l'audience du 14 mars 2024 devant madame la première présidente de la cour d'appel d'Amiens, au visa de l'article 521 du Code de procédure civile aux fins de voir :

- ordonner la consignation de la somme de 53.057,85 euros objet des condamnations entre les mains de tel séquestre qu'il lui plaira de désigner et à défaut, entre les mains de la caisse des dépôts et consignations et ce, dans l'attente de l'arrêt d'appel au fond à intervenir ;

- ordonner la consignation par elle même dans le délai d'un mois à compter de la signification de la présente décision ;

- juger que les dépens du présent référé suivront ceux de l'instance d'appel.

Elle soutient pour l'essentiel que :

- la société Plus Optic [R] ne conteste pas le principe de la refacturation des charges mais simplement l'absence de justification du paiement effectif de ces charges ;

- la consignation lui permettrait de justifier de l'ensemble des charges en cause d'appel ;

- dans le cas où elle n'arriverait pas à justifier de l'intégralité des charges refacturées suivant décomptes produits, les charges non justifiées viendraient en déduction des sommes payées, ce qui réduira considérablement le montant des condamnations ;

- s'agissant des sommes auxquelles elle a été condamnée au titre de la clause d'indexation, le tribunal judiciaire de Beauvais n'a pas appliqué la jurisprudence de principe dont il ressort que, sauf à démontrer que la clause d'indexation est indivisible, seule la stipulation prohibée doit être réputée non écrite de telle sorte que la clause d'indexation produit toujours ses effets ;

- la société Plus Optic [R] connait des difficultés d'exploitation importantes avec un résultat déficitaire au fils des années et qui se creuse de telle sorte qu'il existe un risque de non restitution de sa part des sommes payées dans le cadre de l'exécution provisoire.

Par conclusions transmises le 4 avril 2024, la société Plus Optic [R] s'oppose aux demandes de la société l'Immobilière Européenne des mousquetaires dont elle demande le débouté outre sa condamnation au paiement de la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, elle affirme pour l'essentiel que :

- la SA l'immobilière européenne des mousquetaires n'a pas fait valoir d'observations sur l'exécution provisoire de la décision, dès lors elle doit démontrer l'existence de conséquences manifestement excessives postérieures au jugement de première instance ;

- la SA l'immobilière européenne des mousquetaires contourne ces conditions en demandant la consignation prévue à l'article 521 du Code de procédure civile qui n'est justifiée par aucun élément ;

- la SA l'immobilière européenne des mousquetaires n'a communiqué aucun justificatif de charges en deux ans de procédure ;

- la SA l'immobilière européenne des mousquetaires indique que l'indexation entre 1er juillet 2013 et le 1er mai 2014 doit être annulée et rectifiée dans les comptes entre les parties mais elle n'a jamais évoqué cet argument en première instance ;

- la part des loyers indexés ne représente que la somme de 8.722,92 euros ;

- la SA l'immobilière européenne des mousquetaires opère une confusion entre la société BEAUVOP devenue Plus Optic [R] et la société Plus Optic [R], absorbée par cette première le 25 juillet 2022 ;

- cette opération de restructuration a généré des charges exceptionnelles en 2022, lesquelles ont été absorbées au cours de l'exercice clos le 30 septembre 2023 ;

- il résulte de ce qui précède que sa situation n'est pas obérée, puisque la société Plus Optic [R] a reconstitué ses fonds propre à hauteur d'au moins la moitié de son capital social et que son excédent brut d'exploitation est ressorti à 77.261,30 euros.

Par conclusions en réponse transmises le 10 avril 2024, la SA l'Immobilière Européenne des mousquetaires réplique que :

- les coûts de la transmission universelle de capital restent limités et n'expliquent pas les résultats négatifs enregistrés par la SAS PLUS Optic [R] ;

- comme le rappelle la SAS PLUS Optic [R] (anciennement BEAUVOP), cette dernière a absorbé la société PLUS OPTIC [R], et donc son passif. Par conséquent les comptes de 2019 et 2022 produits restent pertinents puisque la société BEAUVOP a intégré à son patrimoine social l'actif mais également le passif de la société ;

- la situation de SAS PLUS Optic [R] étant particulièrement préoccupante les condamnations, si elles étaient effectivement versées, ne seraient très vraisemblablement jamais restituées ;

- la SAS PLUS Optic [R] verse aux débats les comptes sociaux de l'année de 2023 dont le fond de roulement n'est que de 38.787 euros, ce qui ne couvre même pas les sommes dont la consignation est sollicitée ;

- le versement de la somme de 54.441, 89 euros augmenterait le fond de roulement de 71% de telle sorte que cet argent serait consommé pour les besoins de la société, dont le résultat annuel n'est que de 579,07 euros ;

- la SAS PLUS Optic [R] a fait preuve de mauvaise foi en procédant à une saisie attribution de ces sommes postérieurement à la saisine de madame la première présidente de la cour d'appel d'Amiens dont elle n'a pas fait état lors de la première audience qui s'est tenue le 14 mars 2024 ;

L'affaire a été renvoyée au 11 avril 2024 puis au 26 avril 2024.

Par de nouvelles conclusions en défense transmises le 24 avril 2024, la société Plus Optic [R] indique qu'elle a effectivement procédé à la saisie-attribution des comptes bancaires de la société l'Immobilière Européenne des mousquetaires et que cette dernière manque à faire la preuve du risque de réformation de la décision entreprise s'agissant tant des charges non justifiées que des sommes résultant de la clause d'indexation annulée, se fondant sur des pièces et moyens qui n'ont pas été évoqués en première instance.

Quant au risque de non restitution des sommes dues au titre de l'exécution provisoire du jugement frappé d'appel, elle estime que la société l'Immobilière Européenne des mousquetaires fait une confusion entre la société Beauvop devenue Optic Plus [R] et la société Plus Optic [R] absorbée par la première le 25 juillet 2022.

A l'audience du 26 avril 2024, les conseils des parties ont développé oralement leurs précédentes écritures auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de moyens de fait et de droit invoqués au soutien de leurs prétentions.

SUR CE

L'article 521 du code de procédure civile dispose : 'La partie condamnée au paiement de sommes autres que des aliments, des rentes indemnitaires ou des provisions peut éviter que l'exécution provisoire soit poursuivie en consignant, sur autorisation du juge, les espèces ou les valeurs suffisantes pour garantir, en principal, intérêts et frais, le montant de la condamnation.

En cas de condamnation au versement d'un capital en réparation d'un dommage corporel, le juge peut aussi ordonner que ce capital sera confié à un séquestre à charge d'en verser périodiquement à la victime la part que le juge détermine.'

Il est de jurisprudence constante que le Premier président peut autoriser la consignation des fonds sur ce fondement, sans qu'il soit nécessaire de relever l'existence de conséquences manifestement excessives de telle sorte qu'il n'y pas lieu de rechercher si de telles conséquences sont intervenues postérieurement à la décision frappée d'appel.

Le pouvoir prévu à l'article 521 du code de procédure civile d'aménager l'exécution provisoire est laissé à l'appréciation du premier président saisi d'une offre de consignation formée par le débiteur de la condamnation assortie de l'exécution provisoire, laquelle doit être appréciée au regard de la situation respective des parties et du maintien de l'équilibre de leurs droits dans le cadre de l'appel.

En l'espèce, il ressort des pièces produites et des débats que suivant acte sous seing privé en date du 1er juin 2004, la société Garbet, aux droits de laquelle vient la SA l'Immobilière Européenne des mousquetaires a consenti à compter du 1er juillet 2004 un bail à Mme [Z] [R], aux droits de laquelle vient la SAS PLUS Optic [R] portant sur des locaux commerciaux situés sur la commune de [Localité 5] (60), 40 [Adresse 4] et devant être exclusivement consacrés à l'exploitation d'un fonds de commerce d'orthopédie, analyses, audio-prothèse, optique, matériel, herboristerie, diététique et para-pharmacie, et ce pour une durée de neuf années, le loyer étant fixé à un montant annuel de 12. 000 euros HT.

Un avenant de renouvellement a été conclu en date du 24 février 2014 prévoyant un loyer annuel principal HT et charges de 16.191 euros, révisé au 1er mai 2013 à 16 200,84 euros.

Suivant acte extra judiciaire en date du 27 septembre 2021, la SA l'Immobilière Européenne des mousquetaires a fait délivrer à la la société Plus Optic [R] un commandement de payer visant la clause résolutoire pour un montant total de 17. 313,58 euros en principal au titre des loyers et charges impayés ainsi que pour la somme de 3.462,72 euros au titre de la clause pénale et celle de 209,16 euros au titre des frais.

Par courrier en date du 26 octobre 2021, le conseil de la société Plus Optic [R] a informé le bailleur que la somme de 18.622,23 euros lui avait été réglée au titre des causes du commandement susmentionné mais que ce paiement n'était effectué qu'à titre conservatoire en vue de préserver ses intérêts dans la mesure où elle contestait la créance de la société l'Immobilière Européenne des mousquetaires au titre de la régularisation des charges locatives et de la clause pénale et qu'elle entendait soulever l'illicéité de la clause d'indexation.

C'est dans ces conditions que, par acte de commissaire de justice en date du 03 novembre 2021, la société Plus Optic [R] a fait assigner la SA l'Immobilière Européenne des mousquetaires prise en la personne de son représentant légal devant le Tribunal Judiciaire de Beauvais pour obtenir le remboursement des sommes indûment versées et que la clause d'indexation soit réputée non écrite.

A la suite du jugement du tribunal judiciaire de Beauvais en date du 20 novembre 2023 qui a condamné la société l'Immobilière Européenne des mousquetaires, la société Plus Optic [R] a fait procéder à la saisie attribution entre les mains de la Société Générale des sommes dues au titre du jugement assorti de l'exécution provisoire à hauteur de la somme de 54.441,89 euros, suivant acte de commissaire de justice en date du 12 mars 2024, saisie dénoncée le 14 mars 2024 à la société l'Immobilière Européenne des mousquetaires.

Or, dans le cadre de l'aménagement de l'exécution provisoire tel que l'autorise l'article 521 du code de procédure civile, l'autorisation de consigner les sommes en garantie du paiement suppose que le débiteur ait la libre disposition des fonds qu'il se propose de consigner.

En effet, il n'appartient pas au premier président d'anéantir l'effet attributif immédiat de la saisie attribution à laquelle il a été procédé par la société Plus Optic [R] qui a pour conséquence de rendre indisponible les sommes dont la société l'Immobilière Européenne des mousquetaires est créancière à l'égard de la Société Générale, tiers saisi, cette dernière ayant déclaré détenir la somme de 64.176,89 euros sur le compte à vue de la société l'Immobilière Européenne des mousquetaires qui ne fait pas état d'une contestation de la saisie attribution devant le juge de l'exécution.

Toutefois les parties n'ayant pas conclu sur ce point, il y a lieu d'ordonner la réouverture des débats sur ce moyen relevé d'office.

PAR CES MOTIFS,

Ordonnons la réouverture des débats à l'audience du 27 Juin 2024 à 9 h30 pour permettre aux parties de s'expliquer sur les conséquences de la saisie attribution à laquelle il a été procédé par la société Plus Optic [R] quant à la demande de la société l'Immobilière Européenne des mousquetaires tendant à être autorisée à consigner la somme de 53.057,85 euros objet des condamnations résultant du jugement du tribunal judiciaire de Beauvais en date du 20 novembre 2023 ;

Réservons les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.

A l'audience du 30 Mai 2024, l'ordonnance a été rendue par mise à disposition au Greffe et la minute a été signée par Mme MANTION, Présidente et Mme CHAPON, Greffier.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Referes 1er pp
Numéro d'arrêt : 24/00024
Date de la décision : 30/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-30;24.00024 ?
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