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06/05/2024 | FRANCE | N°23/01113

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 5eme chambre prud'homale, 06 mai 2024, 23/01113


ARRET







[J]





C/



S.A.S. DEVRED



























































copie exécutoire

le 06 mai 2024

à

Selarl DELAHOUSSE

Me ROBIN

EG/IL/BG



COUR D'APPEL D'AMIENS



5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE



ARRET DU 06 MAI 2024



*************************

************************************

N° RG 23/01113 - N° Portalis DBV4-V-B7H-IWMC



JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AMIENS DU 23 JANVIER 2023 (référence dossier N° RG 21/00299)





PARTIES EN CAUSE :



APPELANTE



Madame [K] [J]

[Adresse 1]

[Localité 4]



représentée, concluant et plaidant par Me Romain GUILLEMARD de la SELA...

ARRET

[J]

C/

S.A.S. DEVRED

copie exécutoire

le 06 mai 2024

à

Selarl DELAHOUSSE

Me ROBIN

EG/IL/BG

COUR D'APPEL D'AMIENS

5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE

ARRET DU 06 MAI 2024

*************************************************************

N° RG 23/01113 - N° Portalis DBV4-V-B7H-IWMC

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AMIENS DU 23 JANVIER 2023 (référence dossier N° RG 21/00299)

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

Madame [K] [J]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée, concluant et plaidant par Me Romain GUILLEMARD de la SELARL DELAHOUSSE ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AMIENS

ET :

INTIMEE

S.A.S. DEVRED

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée, concluant et plaidant par Me Jocelyn ROBIN de la SELARL CHEVALLIER ET ASSOCIES, avocat au barreau de BREST

DEBATS :

A l'audience publique du 06 mars 2024, devant Mme Eva GIUDICELLI, siégeant en vertu des articles 805 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, ont été entendus :

- Mme [O] [V] en son rapport,

- les avocats en leurs conclusions et plaidoiries respectives.

Mme [O] [V] indique que l'arrêt sera prononcé le 06 mai 2024 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Isabelle LEROY

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme [O] [V] en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :

Mme Laurence de SURIREY, présidente de chambre,

Mme Caroline PACHTER-WALD, présidente de chambre,

Mme Eva GIUDICELLI, conseillère,

qui en a délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 06 mai 2024, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Laurence de SURIREY, Présidente de Chambre et Mme Isabelle LEROY, Greffière.

*

* *

DECISION :

Mme [J], née le 22 juillet 1974, a été embauchée à compter du 15 novembre 2010 dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée par la société Devred (la société ou l'employeur), en qualité d'assistante de direction.

Au dernier état de la relation contractuelle, elle exerçait les fonctions de responsable formation.

La société Devred compte plus de 10 salariés. La convention collective applicable est celle des maisons à succursales de vente au détail d'habillement.

Par courrier du 7 janvier 2021, la salariée a été convoquée à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement, fixé au 19 janvier 2021.

Le 22 janvier 2021, elle a été licenciée pour cause réelle et sérieuse.

Contestant la légitimité de son licenciement et ne s'estimant pas remplie de ses droits au titre de l'exécution du contrat de travail, Mme [J] a saisi le conseil de prud'hommes d'Amiens le 4 octobre 2021.

Par jugement du 23 janvier 2023, le conseil a :

dit et jugé que le licenciement de Mme [J] reposait sur une cause réelle et sérieuse ;

débouté Mme [J] de sa demande de reconnaissance du licenciement en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et des demandes de dommages et intérêts afférentes ;

condamné la société Devred à verser à Mme [J] les sommes suivantes :

- 5 822 euros au titre du rappel de salaire de la prime codir 2019 ;

- 582,20 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés calculée sur le rappel de salaire de la prime codir 2019 ;

- 119,30 euros au titre de complément de l'indemnité légale de licenciement ;

ordonné à la société Devred de remettre à Mme [J] les documents de fin de contrat (reçu pour solde de tout compte, attestation Pôle emploi et certificat de travail) actualisés et conformes au jugement sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette obligation d'une astreinte ;

dit que l'exécution provisoire serait limitée à celle prévue de plein droit par l'article R.1454-28 du code du travail ;

débouté Mme [J] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

débouté la société Devred de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens.

Mme [J], régulièrement appelante de ce jugement, par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 20 octobre 2023, demande à la cour de :

dire son appel recevable et bienfondé ;

dire l'appel incident de la société Devred mal fondé ;

infirmer le jugement en ses dispositions jugeant son licenciement comme reposant sur une cause réelle et sérieuse, et en celles la déboutant de ses demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que des autres demandes formulées en conséquence ;

confirmer le jugement en ses dispositions condamnant la société Devred à lui verser un rappel sur prime codir 2019 et un rappel sur indemnité de licenciement, sauf à l'infirmer concernant le quantum retenu pour ces rappels ;

Statuant à nouveau,

la juger recevable et bien fondée en toutes ses demandes, fins et prétentions ;

juger son licenciement comme dénué de cause réelle et sérieuse ;

condamner la société Devred à lui verser les sommes suivantes :

- 47 560 euros net à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 7 872 euros brut à titre de rappel sur bonus codir, outre la somme de 787,20 euros brut au titre des congés payés afférents ;

- 1 658,75 euros net à titre de rappel sur indemnité de licenciement ;

condamner la société Devred à lui remettre ses documents de fin de contrat, conformes à la décision à intervenir, ceci sous astreinte de 50 euros par jour de retard, passés 8 jours à compter de la décision à intervenir ;

condamner la société Devred à lui verser 4 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

La société Devred, par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 19 décembre 2023, demande à la cour de :

confirmer le jugement en ce qu'il a :

- dit et jugé que le licenciement de Mme [J] reposait sur une cause réelle et sérieuse.

- débouté Mme [J] de sa demande de reconnaissance du licenciement en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et des demandes de dommages et intérêts afférents ;

débouter Mme [J] de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions présentées en cause d'appel aux termes de ses écritures ;

constater que Mme [J] a bénéficié d'une prime de bonus de 2 050 euros et la débouter de toute autre prétention de ce chef et en toute hypothèse d'une quelconque demande en lien avec une indemnité compensatrice de congés payés afférente à la prime bonus codir 2019 ;

la recevoir en son appel incident d'une partie du jugement et infirmer le jugement en ce qu'il :

- l'a condamnée à verser à Mme [J] les sommes suivantes :

5 822 euros ['] au titre du rappel de salaire de la prime codir 2019 ;

582,20 euros ['] au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés calculée sur le rappel de salaire de la prime codir 2019 ;

119,30 euros ['] au titre de complément de l'indemnité légale de licenciement ;

- lui a ordonné de remettre à Mme [J] les documents de fin de contrat (reçu pour solde de tout compte, attestation Pôle emploi et certificat de travail) actualisés et conformes au jugement sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette obligation d'une astreinte ;

condamner Mme [J] à lui verser la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Il est renvoyé aux conclusions des parties pour le détail de leur argumentation.

EXPOSE DES MOTIFS

1/ Sur l'exécution du contrat de travail

L'employeur soutient que Mme [J] a été remplie de ses droits par le versement d'un bonus de 2 050 euros en juin 2020, et qu'en tout état de cause, ce bonus, qui n'est pas complétement lié à l'activité de la salariée et concerne des périodes de travail et de congés confondus pour l'année en cause, n'ouvre pas droit à congés payés.

Mme [J] répond que la prime versée en juin 2020 correspond à la prime d'équipes services centraux dont elle devait bénéficier à compter du 1er janvier 2020 à défaut de preuve contraire, et que le bonus en cause, versé en fonction de l'atteinte d'objectifs résultant du travail des salariés participant aux comités de direction, ouvre droit à congés payés.

Aux termes de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

En l'espèce, par avenant au contrat de travail du 2 janvier 2016, les parties ont convenu que la rémunération de la salariée serait composée d'une partie fixe et d'une partie variable dite « bonus annuel comité de direction » calculée en pourcentage de la rémunération fixe brute annuelle sur la base du taux de réalisation des résultats d'exploitation de la société.

La clause précise des conditions préalables telles que : avoir respecté ses objectifs managériaux selon une évaluation du président de la société en fonction de plusieurs critères individuels (attitude managériale, compétence technique dans son domaine, apport au collectif de la marque et du groupe, atteinte des objectifs spécifiques), avec un malus en cas de non atteinte de ces objectifs.

L'avenant du 17 juin 2019 stipule que pour l'exercice 2019, la salariée continue de bénéficier de ce bonus selon les conditions et barème actuellement en vigueur, et qu'à compter du 1er janvier 2020, ce système deviendra caduc et sera remplacé par un nouveau système au plus tard le 30 octobre 2019.

L'avenant du 1er octobre 2019 rappelle le maintien du bonus codir jusqu'au 31 décembre 2019 et prévoit son remplacement à compter du 1er janvier 2020 par les primes équipes services centraux.

Le bulletin de paie de juin 2020 mentionne le versement de la somme de 2 050 euros sous l'intitulé « bonus annuel » déjà employé sur le bulletin de mars 2019.

Cet intitulé et l'absence de preuve que la prime de remplacement était exigible dès l'année 2020 conduisent à retenir qu'il s'agit bien du paiement du bonus codir pour l'exercice 2019.

L'employeur ne justifiant d'aucun élément permettant d'appliquer un malus sur cette prime pour l'année 2019, Mme [J] était en droit de la percevoir en totalité, portant le solde dû à 5 822 euros comme justement jugé par le conseil de prud'hommes.

En revanche, le mode de calcul de la prime basé sur la rémunération fixe brute annuelle incluant déjà dans son assiette les congés payés, il n'y a pas lieu de les accorder une seconde fois.

Le jugement entrepris est donc infirmé sur ce point.

2/ Sur la rupture du contrat de travail

2-1/ sur le bien-fondé du licenciement

La lettre de licenciement est ainsi motivée :

« Au cours de cet entretien, nous vous avons présenté les différents points venant illustrer ces manquements et insuffisances professionnelles touchant à la gestion administrative et au pilotage de la formation, conduisant notamment à mettre l'Entreprise en risque financier et déclaratif à plusieurs reprises. Afin d'illustrer nos constats, nous vous avons exposé les faits suivants :

Suivi des entretiens annuels (RAC) : pas de suivi structuré, de relance, ni d'alerte lancée sur la réalisation partielle (35%) et de la conformité de l'événement à notre obligation légale.

Conséquence : redémarrer une campagne (création des trames, formation des managers') au dernier moment pour respecter nos obligations avec un risque financier évalué à 600k euros.

Déclaration formation : Erreur commise dans le calcul de l'acompte en raison de la non-vérification de la masse salariale estimée. Conséquence : un risque de trop versé de 90k euros, qui a été rattrapé au dernier moment par [T][N] [[T] [N]].

Déclaration CSA (Apprentissage) : Erreurs commises dans la déclaration (fév.2020) et dans le mode de calcul des effectifs moyens (3,8% déclaré vs 1,91% réel). Conséquence: Nous passons d'un état d'exonération à un coup régularisé de 56k euros ASAP.

Contrat d'alternance et déclaration en ligne : Erreurs commises dans les cerfa et sur la plateforme (date fin erronée, travail handicapé non mentionné, numéro de SIRET ne correspondant pas au lieu d'exercice du contrat). Conséquence : Refaire tous les contrats pour être éligible aux primes.

Suivi et bilan des actions de formation : Non pris en charge depuis la fin du contrat avec CIMES (Mai 2020). Conséquence : Difficulté à retrouver des historiques de formation pour les bilans de fin d'année, pas d'organisation des dossiers de formations suivi avec feuilles d'émargement, convention, programme.

Suivi prestataires : Conventions non faites pour les formations vente, fin de contrat futurskills au 31/12/2020.

Formation Sécurité : Pas de réalisation des formations incendie sur les ouvertures magasins malgré relance (dernière 26 octobre).

Sur l'ensemble de ces aspects, nous avons mis en évidences des manquements et erreurs majeurs dans l'exécution de vos attributions, remettant en cause la suite de notre collaboration et votre capacité à exécuter pleinement les missions confiées.

Face aux éléments présentés vous n'avez pas souhaité nous fournir d'explications pouvant nous permettre d'apprécier les faits reprochés et leur circonstances exacts, soulignant simplement le manque d'alerte de la part de votre Manager direct, et une activité professionnelle en temps réduit.

En conséquence, nous sommes dans l'obligation de constater votre incapacité à exécuter les responsabilités qui vous sont confiées avec le niveau d'autonomie et d'efficacité que nous pouvons attendre de ce poste. Considérant que cette situation rend impossible la poursuite de notre collaboration, nous vous informons de notre décision de vous notifier par la présente votre licenciement individuel pour cause réelle et sérieuse ».

Mme [J] soutient que l'employeur, l'ayant rétrogradée au poste de responsable formation le 1er novembre 2019, sans formation adaptée ni accompagnement alors qu'elle disposait préalablement pour ce champ de compétence d'une collaboratrice qui lui a été retirée, ne pouvait lui reprocher une insuffisance professionnelle une année plus tard, par ailleurs entrecoupées par des périodes d'activité partielle du fait de la pandémie de covid qui ont compliqué sa tâche.

Elle conteste, également, la matérialité des faits qui lui sont reprochés affirmant avoir informé sa hiérarchie sur l'état d'avancement des entretiens professionnels dans le cadre du suivi qu'elle avait mis en place, n'avoir ni le rôle ni les moyens de vérifier les données transmises par le service des ressources humaines, ne pas être à l'origine d'erreurs qui n'ont pu finalement être régularisées, n'avoir jamais eu la responsabilité de la gestion administrative et logistique des actions de formation, n'être aucunement responsable d'un manquement dans le suivi des prestataires, et n'avoir jamais été relancée sur l'organisation des formations incendie.

Elle ajoute que son licenciement était, en réalité, motivé par la politique de réorganisation de la gouvernance de l'entreprise ayant conduit à de nombreux départs de cadres.

L'employeur répond que la salariée était en charge de la formation depuis le 1er octobre 2018, a bénéficié d'une formation à ce sujet fin 2018 et d'un accompagnement de la responsable développement RH à compter d'avril 2020, et a accepté l'évolution de ses fonctions par la signature d'un avenant le 1er novembre 2019 sans signaler de difficultés, mentionnant simplement ne pas avoir d'appétence pour la gestion administrative liée à son nouveau poste, ce qui peut expliquer son manque d'investissement constitutif d'insuffisance professionnelle.

Il ajoute qu'au vu de l'ancienneté de la salariée dans l'entreprise et de son niveau de responsabilité, elle ne peut se retrancher derrière les erreurs d'autres services ou le retrait d'une subordonnée qu'elle était chargée de superviser pour justifier les manquements relevés, qui n'ont pu être rattrapés que grâce à la vigilance de sa propre supérieure hiérarchique pourtant arrivée depuis peu.

L'article L.1232-1 du code du travail dispose notamment que tout licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

L'insuffisance professionnelle consiste en l'incapacité du salarié à exécuter son travail de façon satisfaisante, sans que cela corresponde à une défaillance passagère, alors que l'employeur lui a donné tous les moyens pour qu'il puisse faire ses preuves en temps et en formation.

En l'espèce, Mme [J] a exercé au sein de la société Devred des fonctions d'assistante de direction du 15 novembre 2010 au 30 septembre 2018, de responsable développement RH et communication interne du 1er octobre 2018 au 30 octobre 2019, puis de responsable de formation du 1er novembre 2019 au 22 janvier 2021, date de son licenciement pour insuffisance professionnelle.

Pour l'ensemble de ces fonctions, elle bénéficiait du statut de cadre.

Si l'insuffisance professionnelle doit s'apprécier au regard des dernières fonctions exercées, la cour relève, néanmoins, qu'il ressort de la liste des tâches mentionnées dans les avenants au contrat de travail des 1er octobre 2018 et 1er octobre 2019 que les responsabilités de la salariée en tant que responsable de formation étaient déjà incluses dans le poste de responsable développement RH et communication interne précédemment occupé.

Dans ce cadre, Mme [J] a bénéficié d'une formation de 21 h du 19 au 21 décembre 2018 sur les points-clés du management de la formation visant à lui permettre de :

Piloter la politique de formation de l'entreprise, notamment en s'appropriant le système de financement de la formation professionnelle,

S'appuyer sur les dispositifs légaux existants et sur les outils et ressources proposés par la branche professionnelle ou par l'interprofessionnelle, optimiser le budget

Elaborer et mettre en 'uvre le plan d'adaptation et de développement des compétences

Intégrer le compte personnel de formation dans une logique de co-investissement.

Un rappel à l'ordre sur des insuffisances dans la conduite de ses missions lui a été adressé par courrier du 30 septembre 2019.

Il convient de noter que sur les 7 points d'insuffisance évoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement, les points 1, 5 et 6 n'ont fait l'objet d'aucune remarque lors de l'entretien d'évaluation du 26 novembre 2020 alors que ces situations étaient déjà connues de la supérieure hiérarchique de Mme [J].

Quant au point 7, aucun manquement n'est démontré.

L'employeur ne peut donc se prévaloir de ces points pour caractériser l'insuffisance professionnelle.

Les points 2, 3 et 4 n'ayant été découverts que postérieurement à l'entretien d'évaluation, il convient de les examiner pour apprécier s'ils peuvent fonder le licenciement.

Il ressort des pièces produites par l'employeur que la salariée a commis des erreurs de plusieurs dizaines de milliers d'euros en établissant les bordereaux de versement des sommes dues par l'entreprise au titre de la formation professionnelle.

Il est également justifié d'erreurs dans la formalisation de plusieurs contrats d'apprentissage dont le contenu a dû être repris.

Mme [J], en responsabilité sur ces questions depuis le 1er octobre 2018, soit directement, soit en supervision d'une collaboratrice, après une formation spécialement dédiée, ne saurait se retrancher derrière les erreurs d'autres services que son niveau de cadre devait lui permettre de détecter afin de les faire rectifier.

Par ailleurs, il importe peu que les erreurs commises aient pu être rectifiées avant toute conséquence dommageable pour l'entreprise alors que l'employeur, qui avait déjà alerté la salariée de son insatisfaction quant à la réalisation de ses missions, devait pouvoir compter sur des compétences professionnelles maitrisées.

Au vu de l'importance des erreurs commises et du niveau de responsabilité de Mme [J] l'insuffisance professionnelle fondant le licenciement est caractérisée.

La salariée ne produisant aucun élément probant permettant d'identifier une cause de licenciement distincte de l'insuffisance professionnelle invoquée par l'employeur, il convient donc de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de requalification du licenciement en licenciement sans cause réelle et sérieuse et de ses demandes subséquentes.

2-2/ sur le solde de l'indemnité de licenciement

L'employeur fait valoir que le bonus codir ne saurait être intégré dans l'assiette de calcul du salaire de référence alors qu'il n'était pas dû pour l'année 2020 précédent le licenciement.

Mme [J] prétend à la réintégration dans son salaire de référence du bonus codir auquel elle avait droit.

L'article R.1234-4 du code du travail dispose que le salaire à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié :

1° Soit la moyenne mensuelle des douze derniers mois précédant le licenciement, ou lorsque la durée de service du salarié est inférieure à douze mois, la moyenne mensuelle de la rémunération de l'ensemble des mois précédant le licenciement ;
2° Soit le tiers des trois derniers mois. Dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel, versée au salarié pendant cette période, n'est prise en compte que dans la limite d'un montant calculé à due proportion.

En l'espèce, le bonus codir 2019 ayant été versé en juin 2020 alors que le licenciement a été notifié le 22 janvier 2021, il convient d'en réintégrer l'exact montant pour calculer le solde de l'indemnité de licenciement due qui s'établit, dès lors, à 1 117,93 euros brut.

Le jugement entrepris est donc infirmé de ce chef.

3/ Sur les demandes accessoires

L'employeur devra remettre des documents de fin de contrat conformes au présent arrêt dans le mois de sa notification, sans que le prononcé d'une astreinte apparaisse justifié.

L'employeur succombant partiellement, il convient de mettre les dépens d'appel à sa charge.

L'équité commande de laisser à la charge de chaque partie les frais irrépétibles engagés en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour, sauf en ce qu'il a condamné l'employeur au paiement de congés payés afférents au bonus codir et d'un solde d'indemnité de licenciement de 119,30 euros,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la société Devred à payer à Mme [K] [J] 1 117,93 euros brut au titre du solde de l'indemnité de licenciement déjà versée,

Dit n'y avoir lieu à congés payés sur la somme allouée au titre du solde du bonus codir,

Ordonne à la société Devred de remettre à Mme [K] [J] des documents de fin de contrat conformes au présent arrêt dans le mois de sa notification,

Rejette le surplus des demandes,

Condamne la société Devred aux dépens d'appel.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 5eme chambre prud'homale
Numéro d'arrêt : 23/01113
Date de la décision : 06/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 12/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-06;23.01113 ?
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