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16/04/2024 | FRANCE | N°23/04086

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 5eme chambre prud'homale, 16 avril 2024, 23/04086


ARRET







S.A.R.L. NORDCALL





C/



[R]

































































copie exécutoire

le 16 avril 2024

à

Me PELAN

Me DURIEZ

EG/IL/





COUR D'APPEL D'AMIENS



5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE



PRUD'HOMMES APRES CASSATION>


ARRET DU 16 AVRIL 2024



*************************************************************

N° RG 23/04086 - N° Portalis DBV4-V-B7H-I4GG



CONSEIL DE PRUD HOMMES DE TOURCOING du 19 février 2020

COUR D'APPEL DE DOUAI du 25 février 2022

RENVOI CASSATION DU 5 juillet 2023

SAISSINE DE LA COUR D'APPEL D'AMIENS du 28 septembre 2023



La Cour, composée ainsi qu'il est dit ci-...

ARRET

S.A.R.L. NORDCALL

C/

[R]

copie exécutoire

le 16 avril 2024

à

Me PELAN

Me DURIEZ

EG/IL/

COUR D'APPEL D'AMIENS

5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE

PRUD'HOMMES APRES CASSATION

ARRET DU 16 AVRIL 2024

*************************************************************

N° RG 23/04086 - N° Portalis DBV4-V-B7H-I4GG

CONSEIL DE PRUD HOMMES DE TOURCOING du 19 février 2020

COUR D'APPEL DE DOUAI du 25 février 2022

RENVOI CASSATION DU 5 juillet 2023

SAISSINE DE LA COUR D'APPEL D'AMIENS du 28 septembre 2023

La Cour, composée ainsi qu'il est dit ci-dessous, statuant sur l'appel formé contre le jugement du Conseil de Prud'hommes de Tourcoing du 19 février 2020, après en avoir débattu et délibéré conformément à la Loi, a rendu entre les parties en cause la présente décision le 16 avril 2024 par mise à disposition de la copie au greffe de la cour.

PARTIES EN CAUSE

DEMANDERESSE A LA SAISINE

S.A.R.L. NORDCALL agissant poursuites et diligences de son gérant domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée, concluant et plaidant par Me Mikaël PELAN de la SELARL LUSIS AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

représentée par Me Hélène CAMIER de la SELARL LX AMIENS-DOUAI, avocat au barreau d'AMIENS substituée par Me Alexis DAVID, avocat au barreau d'AMIENS, avocat postulant

ET :

DEFENDERESSE A LA SAISINE

Madame [O] [R]

née le 25 Février 1967 à [Localité 2]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée, concluant et plaidant par Me Anne DURIEZ, avocat au barreau de LILLE substitué par Me Dalila ACHAMMAMI, avocat au barreau de LILLE

ACTE INITIAL : déclaration de renvoi après cassation du 28 septembre 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :

Madame Laurence de SURIREY, présidente de chambre,

Mme Caroline PACHTER-WALD, présidente de chambre,

et Mme Eva GIUDICELLI, conseillère,

GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme Isabelle LEROY, Greffière

PROCEDURE DEVANT LA COUR :

Les parties et leurs conseils ont été régulièrement avisés pour le 20 février 2024, dans les formes et délais prévus par la loi.

Le jour dit, l'affaire a été appelée en audience publique devant la formation chargée des renvois après cassation en matière sociale.

Après avoir successivement entendu le conseiller rapporteur en son rapport, les avocats des parties en leurs demandes, fins et conclusions, la Cour a mis l'affaire en délibéré et indiqué aux parties que l'arrêt serait prononcé le 16 avril 2024 par sa mise à disposition au greffe, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 16 avril 2024, l'arrêt a été prononcé par sa mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Madame Laurence de SURIREY, Présidente de chambre, et Mme Isabelle LEROY, Greffière.

*

* *

DECISION :

Mme [R] a été engagée par la société Nordcall (la société ou l'employeur) pour une durée indéterminée à compter du 3 septembre 2008 en qualité de chargée de clientèle.

Par jugement du 19 février 2020, le conseil de prud'hommes de Tourcoing, statuant dans le litige opposant la salariée à son employeur, a notamment :

- dit et jugé que le régime de prévoyance mis en place au sein de la société Nordcall n'étant pas globalement plus favorable que celui résultant de la convention collective Syntec, Mme [R], en cas de maladie devait en relais des garanties prévues par la convention collective SYNTEC bénéficier des garanties prévoyance reprises par la société Nordcall, dans sa décision unilatérale applicable depuis le 1er janvier 2008 et dans la notice d'information du 17 août 2012, sans délai de carence pour le maintien conventionnel du salaire à la charge de la société Nordcall, lequel maintien conventionnel s'entend dès le premier jour d'absence pour maladie ou accident dûment constaté par certificat médical,

- dit et jugé que le bénéfice de ces dispositions restait acquis à Mme [R] postérieurement à la date du 1er juillet 2016,

- ordonné à la société Nordcall le respect des dispositions à compter du jugement à intervenir, soit le maintien de salaire dès le premier jour d'absence pour maladie ou accident dûment constaté par certificat médical, et ce, sous astreinte de 20 euros par jour de retard par infraction constatée, chaque infraction s'entendant par jour de carence imposé au salarié, à compter du 1er jour du mois suivant la notification du présent jugement,

- condamné la société Nordcall à payer à Mme [R] les sommes suivantes

- 494,66 euros à titre de rappels de salaires pour non-respect des dispositions conventionnelles relatives à la maladie,

- 49,46 euros pour les congés payés y afférent,

- 2.000 euros au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail.

- 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur appel de la société Nordcall, par un arrêt du 25 février 2022, la cour d'appel de Douai a :

- infirmé le jugement déféré sauf en ses dispositions sur les dépens,

Statuant à nouveau et y ajoutant :

- condamné la société Nordcall à payer à Mme [R] les sommes suivantes

au titre de l'indemnisation des arrêts de travail en cas de maladie :

- 567,78 euros au titre des jours de carence indûment retenus en février 2017, janvier 2018, mai 2018 et juillet 2019, et 56,77 euros au titre des congés payés y afférents,

- 1 835,87 euros à titre de rémunération des temps de pause entre le 1er juillet 2016 et le 30 septembre 2021 et 183,58 euros au titre des congés payés afférents,

- 2 000 euros de dommages et intérêts pour non respect des dispositions de l'article R.3243-4 du code du travail,

- 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné à la société Nordcall de remettre à Mme [R] des bulletins de paie rectifiés conformes,

- débouté les parties de leurs demandes plus amples,

- condamné la société Nordcall aux dépens d'appel.

Sur pourvoi formé par la société Nordcall, la Cour de cassation a, par arrêt du 5 juillet 2023, rendu la décision suivante :

«CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Nordcall à payer à Mme [R] les sommes de 567,78 euros au titre des jours de carence indûment retenus en février 2017, janvier 2018, mai 2018 et juillet 2019 et 56,77 euros au titre des congés payés afférents,, l'arrêt rendu le 25 février 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ; condamne Mme [R] aux dépens ; en application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes;»

La cassation est motivée de la façon suivante :

«(...)

Vu l'article L. 2261-14 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à' la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, et l'article 2 de l'accord collectif d'entreprise du 9 juin 2016 :

6. Selon le premier de ces textes, lorsque l'application d'une convention ou d'un accord est mise en cause dans une entreprise déterminée en raison notamment d'une fusion, d'une cession, d'une scission ou d'un changement d'activité, cette convention ou cet accord continue de produire effet jusqu'à' l'entrée en vigueur de la convention ou de l'accord qui lui est substitué ou, à'défaut, pendant une durée d'un an à'compter de l'expiration du délai de préavis prévu à l'article L.2261-9, sauf clause prévoyant une durée supérieure.

Lorsque la convention ou l'accord mis en cause n'a pas été remplacé par une nouvelle convention ou un nouvel accord dans les délais précisés au premier alinéa, les salariés des entreprises concernées conservent les avantages individuels qu'ils ont acquis, en application de la convention ou de l'accord, à l'expiration de ces délais.

Une nouvelle négociation doit s'engager dans l'entreprise concernée, à' la demande d'une des parties intéressées, dans les trois mois suivant la mise en cause, soit pour l'adaptation aux dispositions conventionnelles nouvellement applicables, soit pour l'élaboration de nouvelles stipulations.

7. Selon le second de ces textes, les parties signataires ont convenu de la mise en place d'un nouveau statut collectif applicable aux salariés de la société à' compter du 1er juillet 2016, visant à l'application de la convention collective des prestataires de services dans le domaine du secteur tertiaire et à' l'amélioration du statut social applicable aux salariés et notamment les congés exceptionnels, les absences enfants malades, les congés d'ancienneté, la rémunération des pauses et la mise en place d'une grille de classification. Les parties signataires constatent que le nouveau statut social est globalement plus favorable que celui existant dans l'entreprise à' la date de signature du présent accord, de sorte qu'il se substitue en tout point à' l'ensemble des usages, engagements unilatéraux et accords d'entreprise existant à la date de sa signature.

8. L'arrêt retient d'abord que les parties ont substitué, à' compter du 1er juillet 2016, à l'application de la convention collective Syntec celle des prestataires de services et qu'elles ont toutefois également prévu expressément le maintien des acquis ou des avantages consentis avant ce changement de convention collective, étant précisé que la substitution mentionnée dans l'article 2 s'entend des engagements unilatéraux et des accords existant dans l'entreprise à l'exclusion de la précédente convention collective.

9, II ajoute que la convention collective nationale des prestataires de services dans le domaine du secteur tertiaires prévoit la prise en charge des arrêts en cas de maladie ou d'accident maladie avec un délai de 7 jours de carence.

10, La cour d'appel en a déduit que l'indemnisation de ces mêmes arrêts sans délai de carence en vertu de la convention Syntec applicable jusqu'au 1er juillet 2016 constitue un avantage acquis qui doit être conservé au profit des salariés ayant au moins un an d'ancienneté.

11, L'arrêt retient ensuite que l'article 6 de l'accord du 9 juin 2016 n'y change rien, rappelant notamment « à titre d'information » que le régime de prévoyance mis en place par la décision unilatérale du 21 janvier 2008 au bénéfice des salariés non cadres était applicable « à ce jour» à' l'entreprise et ajoutant : « l'ensemble des parties signataires rappelle que le maintien de salaire par l'employeur intervient à l'issue des trois premiers jours de maladie ou d'accident non professionnel s'agissant des salariés non cadres de plus d'un an d'ancienneté et confirme le caractère globalement plus favorable de l'ensemble des dispositions en vigueur, par rapport à celles prévues par la convention collective des prestataires de services dans le domaine tertiaire». Il relève qu'il en est de même de l'accord collectif d'entreprise 'sur les garanties collective incapacité invalidité et décès de la sociaté Nordcall' conclu le 1er juillet 2016 ayant vocation à se substituer notamment à'la décision unilatérale du 21 janvier 2008 par lequel la société s'engage à'maintenir un délai de carence de trois jours calendaires en cas de maladie ou d'accident non professionnel pour les salariés non cadres de plus d'un an d'ancienneté après la reconnaissance par les parties que : « l'ensemble de garanties du régime incapacité invalidité décès mis en oeuvre au sein de l'entreprise sont globalement plus favorables que celles prévues par la convention collective nationale de branche de prestataire de service du domaine du secteur tertiaire ».

12, En statuant ainsi, alors, d'une part, qu'elle constatait qu'un accord d'entreprise prévoyant l'application de la convention collective des prestataires de services à compter du 1er juillet 2016 avait été conclu le 9 juin 2016 et, d'autre part, que l'absence de jour de carence résultait des dispositions de la convention collective Syntec qui ne s'appliquait plus et qui ne constituait pas un avantages acquis, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Le 28 septembre 2023, la société Nordcall a saisi la cour d'appel d'Amiens du renvoi après cassation.

Vu les dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 28 novembre 2023 dans lesquelles la société Nordcall forme les demandes suivantes à la cour :

- infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Tourcoing le 19 février 2020 en ce qu'il a :

- dit et jugé que le régime de prévoyance mis en place au sein de la société n'étant pas globalement plus favorable que celui résultant de la convention collective Syntec, Mme [R], en cas de maladie devait en relais des garanties prévues par la convention collective SYNTEC bénéficier des garanties prévoyance reprises par la société Nordcall, dans sa décision unilatérale applicable depuis le 1 er janvier 2008 et dans la notice d'information du 17 août 2012, sans délai de carence pour le maintien conventionnel du salaire à la charge de la société, lequel maintien conventionnel s'entend dès le premier jour d'absence pour maladie ou accident dûment constaté par certificat médical,

- dit et jugé que le bénéfice de ces dispositions restait acquis à Mme [R] postérieurement à la date du 1er juillet 2016,

- l'a condamnée à payer à Mme [R] les sommes suivantes :

- 494,66 euros à titre de rappels de salaires pour non-respect des dispositions conventionnelles relatives à la maladie,

- 49,46 euros pour les congés payés y afférent,

- 2.000 euros au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail,

- 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau,

- débouter Mme [R] de l'intégralité de ses demandes,

- condamner Mme [R] à lui verser 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 15 février 2024 dans lesquelles Mme [R] forme les demandes suivantes à la cour :

- confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Tourcoing en ce qu'il a :

- dit et jugé qu'en cas d'arrêt maladie et/ou un arrêt pour accident, elle devait, en relais des garanties prévues par la convention collective SYNTEC, bénéficier des garanties prévoyance reprises par la société Nordcall dans sa décision unilatérale applicable depuis le 1 er janvier 2008 et dans la notice d'information du 17 août 2012, sans délai de carence pour le maintien conventionnel du salaire à la charge de la société Nordcall, lequel maintien convention s'entend dès le premier jour d'absence pour maladie ou accident dûment constaté par certifi cat médical,

- dit et jugé que le bénéfice de ces dispositions lui restait acquis postérieurement à la date du 1er juillet 2016,

- condamné la société Nordcall à lui payer 567,78 euros outre la somme de 56,78 euros au titre des congés payés y afférents au titre des jours de carence indûment prélevés et des CP y afférents pour la période à compter du 1er juillet 2016 au 31 décembre 2020,

Y ajoutant,

- condamner la société Nordcall à lui payer 493,58 euros au titre du maintien de salaire dû à compter du 1er janvier 2021 à ce jour outre la somme de 49,35 euros correspondant aux congés payés sur cette somme,

- ordonner à la société Nordcall le respect de ces dispositions à compter du jugement à intervenir, soit le maintien de salaire dès le premier jour d'absence pour maladie ou accident dûment constaté par certifi cat médical, et ce, sous astreinte à hauteur de 50 euros par jour de retard par infraction constatée ; chaque infraction s'entendant par jour de carence imposé à la salariée,

Pour le reste,

- dire n'y avoir lieu à statuer à nouveau sur les condamnations au titre de la rémunération des temps de pause, des dommages et intérêts pour non- respect des dispositions de l'article R.3243-4 du code du travail,

- condamner la société Nordcall à lui payer 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code procédure civile ainsi qu'en tous les frais et dépens avec droit de recouvrement au profit de Maître Anne Duriez conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions de procédure notifiées par la voie électronique le 19 février 2024, la société Nordcall demande que les conclusions de Mme [R] soit déclarée irrecevables et que les pièces communiquées le 15 février 2024 soient écartées des débats.

Par courriel du 27 février 2024, les observations des parties ont été sollicitées quant à la recevabilité de la demande d'infirmation de la condamnation à 2 000 euros de dommages et intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail au vu de l'étendue de la saisine de la cour d'appel de renvoi résultant de l'arrêt de cassation partielle.

La société Nordcall et Mme [R] ont répondu respectivement le 6 mars 2024 et le 14 mars 2024 par voie électronique.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé aux dernières conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DECISION

1/ Sur la recevabilité des conclusions et pièces de l'intimée

L'article 1037-1 du code de procédure civile dispose notamment que les conclusions de l'auteur de la déclaration de saisine de la cour d'appel de renvoi sont remises au greffe et notifiées dans un délai de deux mois suivant cette déclaration. Les parties adverses remettent et notifient leurs conclusions dans un délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l'auteur de la déclaration. Les parties qui ne respectent pas ces délais sont réputées s'en tenir aux moyens et prétentions qu'elles avaient soumis à la cour d'appel dont l'arrêt est cassé.

En l'espèce, la société Nordcall a signifié ses conclusions à l'intimée le 4 décembre 2023 alors qu'elle n'avait pas encore constitué avocat. .

Mme [R] ayant remis ses conclusions par voie électronique le 15 février 2024, plus de deux mois après, ces dernières sont irrecevables.

2/ Sur l'étendue de la saisine de la cour d'appel de renvoi

Selon l'article 624 du code de procédure civile, la censure qui s'attache à un arrêt de cassation est limitée à la portée du moyen qui constitue la base de la cassation, sauf le cas d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire. Aux termes de l'article 625 alinéa 1er du même code, sur les points qu'elle atteint, la cassation replace les parties dans l'état où elles se trouvaient avant le jugement cassé.

En l'espèce, aux termes de l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 5 juillet 2023, ne restent litigieuses que les dispositions de l'arrêt partiellement cassé ayant condamné la société à payer à Mme [R] les sommes de 567,78 euros au titre des jours de carence indûment retenus en février 2017, janvier 2018, mai 2018 et juillet 2019 et 56,77 euros au titre des congés payés afférents.

Le litige étant ainsi circonscrit par les termes de l'arrêt, la demande de l'employeur portant sur les dommages et intérêts accordés pour exécution déloyale du contrat de travail n'est pas recevable.

3/ Sur la demande de rappel de salaire pour la période postérieure au 1er juillet 2016

L'employeur soutient que la convention collective Syntec n'étant plus applicable à compter du 1er juillet 2016, date d'application de la convention collective des prestataires de service qui l'a remplacée, l'absence de délai de carence en cas d'arrêt-maladie qu'elle prévoyait ne pouvait plus être revendiquée par la salariée qui était soumise au délai de carence de 3 jours prévu par l'accord d'entreprise du 9 juin 2016.

Mme [R] est réputée s'en tenir aux moyens et prétentions qu'elle avait soumis à la cour d'appel dont l'arrêt est cassé, soit le droit au maintien de l'avantage individuel acquis et de la disposition plus favorable en vigueur antérieurement au 1er juillet 2016 au titre de l'absence de délai de carence en cas d'arrêt-maladie.

Sur ce,

L'article L.2261-14 du code du travail, dans sa version applicable au présent litige, dispose que lorsque l'application d'une convention ou d'un accord est mise en cause dans une entreprise déterminée en raison notamment d'une fusion, d'une cession, d'une scission ou d'un changement d'activité, cette convention ou cet accord continue de produire effet jusqu'à' l'entrée en vigueur de la convention ou de l'accord qui lui est substitué ou, à' défaut, pendant une durée d'un an à' compter de l'expiration du délai de préavis prévu à l'article L.2261-9, sauf clause prévoyant une durée supérieure.

Lorsque la convention ou l'accord mis en cause n'a pas été remplacé par une nouvelle convention ou un nouvel accord dans les délais précisés au premier alinéa, les salariés des entreprises concernées conservent les avantages individuels qu'ils ont acquis, en application de la convention ou de l'accord, à l'expiration de ces délais.

Une nouvelle négociation doit s'engager dans l'entreprise concernée, à' la demande d'une des parties intéressées, dans les trois mois suivant la mise en cause, soit pour l'adaptation aux dispositions conventionnelles nouvellement applicables, soit pour l'élaboration de nouvelles stipulations.

En l'espèce, la relation de travail était initialement soumise à la convention collective Syntec qui prévoyait l'absence de jour de carence en cas d'arrêt-maladie, plus favorable que le régime instauré par décision unilatérale de l'employeur du 21 janvier 2008 instaurant le maintien de salaire après 3 jours de carence.

L'article 2 de l'accord d'entreprise du 9 juin 2016, qui prévoit que les parties signataires ont convenu de la mise en place d'un nouveau statut collectif applicable aux salariés de la société à' compter du 1er juillet 2016, visant notamment à l'application de la convention collective des prestataires de services dans le domaine du secteur tertiaire, la convention collective Syntec a cessé de s'appliquer au sein de l'entreprise à compter de cette date.

Mme [R] ne pouvait donc plus s'en prévaloir pour servir de terme de comparaison avec le régime 'maison'.

La nouvelle convention collective applicable devenant le nouveau terme de comparaison et prévoyant un délai de carence de 7 jours, les salariés bénéficiaient à compter du 1er juillet 2016 du délai de 3 jours, plus favorable, à défaut de dénonciation du régime interne à l'entreprise concernant la prévoyance.

C'est donc à bon droit que l'employeur a déduit 3 jours de carence pour les arrêts-maladie postérieurs au 30 juin 2016.

Madame [R] étant remplie de ses droits à ce titre, il convient de rejeter sa demande de rappel de salaire par infirmation du jugement entrepris.

4/ Sur les demandes accessoires

En application des articles 696 et 700 du code de procédure civile, la partie perdante est, sauf décision contraire motivée par l'équité ou la situation économique de la partie succombante, condamnée aux dépens, et à payer à l'autre partie la somme que le tribunal détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

En vertu de l'article 639 du même code, la juridiction de renvoi statue sur la charge de tous les dépens exposés devant les juridictions du fond y compris sur ceux afférents à la décision cassée.

En application des dispositions de l'article 624 du code de procédure civile, les effets de la cassation partielle prononcée s'étendent nécessairement aux condamnations prononcées par la décision cassée au titre des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile.

En l'espèce, le sens de la présente décision commande de confirmer le jugement déféré en ses dispositions sur les dépens. En outre, il y a lieu de dire que la société sera condamnée aux dépens exposés devant la cour d'appel de l'instance ayant donné lieu à la décision cassée, et que Mme [R] sera condamnée aux dépens exposés devant la cour d'appel de renvoi.

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, le jugement étant confirmé en ses dispositions au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

La cour, statuant contradictoirement sur renvoi après cassation et dans les limites de la cassation, par mise à disposition au greffe,

Déclare irrecevable la demande formée par la société Nordcall quant aux dommages et intérêts accordés par la cour d'appel de Douai pour exécution déloyale du contrat de travail ;

Déclare irrecevables les conclusions remises le 15 février 2024 par Mme [R] ;

Infirme le jugement déféré en ses dispositions soumises à la cour, en ce qu'il a

- dit et jugé que le bénéfice des dispositions de la convention collective Syntec restait acquis à Mme [R] postérieurement à la date du 1er juillet 2016,

- ordonné à la société Nordcall le respect des dispositions à compter du jugement à intervenir, soit le maintien de salaire dès le premier jour d'absence pour maladie ou accident dûment constaté par certificat médical, et ce, sous astreinte de 20 euros par jour de retard par infraction constatée, chaque infraction s'entendant par jour de carence imposé au salarié, à compter du 1er jour du mois suivant la notification du présent jugement,

- condamné la société Nordcall à payer à Mme [R] 494,66 euros à titre de rappel de salaires pour non-respect des dispositions conventionnelles relatives à la maladie, et 49,46 euros pour les congés payés y afférent ;

Le confirme pour le surplus des chefs de jugement déférés ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Déboute Mme [R] de sa demande de rappel de salaire au titre des jours de carence ;

Déboute la société Nordcall de sa demande d'indemnité pour frais de procédure formée devant la cour d'appel de renvoi ;

Condamne la société Nordcall aux dépens exposés devant la cour d'appel de l'instance ayant donné lieu à la décision cassée ;

Condamne Mme [R] aux dépens exposés devant la cour d'appel de renvoi.

LA GREFFIERE, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 5eme chambre prud'homale
Numéro d'arrêt : 23/04086
Date de la décision : 16/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 22/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-16;23.04086 ?
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