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04/04/2024 | FRANCE | N°23/04253

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 5eme chambre prud'homale, 04 avril 2024, 23/04253


ARRET







[U]





C/



S.A.S.U. BATIMENT SOLUTIONS































































copie exécutoire

le 04 avril 2024

à

Me DAIME

Me GILLES

CBO/IL/MR



COUR D'APPEL D'AMIENS



5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE



ARRET DU 04 AVRIL 2024


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N° RG 23/04253 - N° Portalis DBV4-V-B7H-I4RD



ORDONNANCE DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE COMPIEGNE DU 28 SEPTEMBRE 2023



PARTIES EN CAUSE :



APPELANT



Monsieur [S] [U]

[Adresse 2]

[Localité 3]



représenté et concluant par Me Aurelien DAIME, avocat au barreau de COMPIEGNE



ET ...

ARRET

[U]

C/

S.A.S.U. BATIMENT SOLUTIONS

copie exécutoire

le 04 avril 2024

à

Me DAIME

Me GILLES

CBO/IL/MR

COUR D'APPEL D'AMIENS

5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE

ARRET DU 04 AVRIL 2024

*************************************************************

N° RG 23/04253 - N° Portalis DBV4-V-B7H-I4RD

ORDONNANCE DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE COMPIEGNE DU 28 SEPTEMBRE 2023

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur [S] [U]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté et concluant par Me Aurelien DAIME, avocat au barreau de COMPIEGNE

ET :

INTIMEE

S.A.S.U. BATIMENT SOLUTIONS prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

concluant par Me Jean-marie GILLES de la SELEURL CABINET GILLES, avocat au barreau de PARIS

DEBATS :

A l'audience publique du 08 février 2024, devant Madame Corinne BOULOGNE, siégeant en vertu des articles 805 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, l'affaire a été appelée.

Madame Corinne BOULOGNE indique que l'arrêt sera prononcé le 04 avril 2024 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Isabelle LEROY

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Madame Corinne BOULOGNE en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :

Mme Corinne BOULOGNE, présidente de chambre,

Mme Caroline PACHTER-WALD, présidente de chambre,

Mme Eva GIUDICELLI, conseillère,

qui en a délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 04 avril 2024, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Corinne BOULOGNE, Présidente de Chambre et Mme Isabelle LEROY, Greffière.

*

* *

DECISION :

M. [U], né le 9 juin 2002, a été embauché à compter du 1er février jusqu'au 29 juillet 2022 dans le cadre d'un contrat de travail à durée déterminée par la société Bâtiment solutions, ci-après dénommée la société ou l'employeur, en qualité d'ouvrier.

La société Bâtiment solutions compte moins de 11 salariés.

La convention collective applicable est celle des ouvriers du bâtiment.

Ne s'estimant pas rempli de ses droits au titre de l'exécution du contrat de travail, M. [U] a saisi le conseil de prud'hommes de Compiègne.

Par ordonnance du 31 mars 2023, le conseil de prud'hommes a fait droit aux demandes du salarié, et a ordonné, sous astreinte, la remise des documents de fin de contrat et du certificat de congés payés.

Le 19 décembre 2023, M. [U] a donc ressaisi le conseil de prud'hommes de Compiègne aux fins de liquidation de l'astreinte.

Par ordonnance de référé du 28 septembre 2023, le conseil a :

ordonné à la société Bâtiment solutions de payer à M. [U] les sommes suivantes :

- 1 500 euros nets au titre de l'astreinte provisoire concernant le certificat de congés payés et le reçu pour solde de tout compte qui n'étaient toujours pas remis à M. [U] ;

- 1 000 euros nets au titre de l'astreinte définitive concernant la remise du certificat de travail et de l'attestation Pôle emploi de M. [U], ces deux documents ayant été fournis au salarié avec 82 jours de retard, à la suite de l'astreinte ordonnée par le conseil de prud'hommes en date du 31 mars 2023;

- 500 euros nets au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;

l'intégralité des sommes dues porteraient intérêt au taux légal à compter de la notification de l'ordonnance ;

en cas d'exécution forcée de ladite ordonnance, les frais d'huissier seraient à la charge de la société Bâtiment solutions ;

de façon provisoire, cette ordonnance était exécutoire de plein.

M. [U], qui est régulièrement appelant de ce jugement, par dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 8 janvier 2024, demande à la cour de :

infirmer l'ordonnance de référé en ce qu'elle a limité le montant des astreintes à 1 500 euros nets pour l'astreinte, sur l'astreinte provisoire, sur le certificat de congés payés et à 1 000 euros nets sur l'astreinte définitive sur le certificat de travail et l'attestation Pôle emploi.

Statuant à nouveau de,

le dire et juger recevable et bien fondé en toutes ses demandes.

En conséquence,

liquider l'astreinte ;

condamner la société Bâtiment solutions au paiement des sommes suivantes :

- astreinte provisoire pour le certificat des congés payés et le reçu pour solde de tout compte dont le montant est provisoirement estimé à 21 300 euros nets ;

- astreinte définitive pour le certificat de travail et l'attestation Pôle Emploi dont le montant est de 8 200 euros nets ;

- 2 000 euros nets au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens.

- condamner la société Bâtiment solutions aux intérêts au taux légal à compter de la saisine ;

- débouter la société Bâtiment solutions de ses demandes.

La société Bâtiment solutions, par dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 16 décembre 2023, demande à la cour de :

- infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :

- ordonné à la société Bâtiment solutions de payer à M. [U] les sommes suivantes :

1 500 euros nets au titre de l'astreinte provisoire concernant le certificat de congés payés et le reçu pour solde de tout compte qui n'étaient toujours pas remis à M. [U] ;

1 000 euros nets au titre de l'astreinte définitive concernant la remise du certificat de travail et de l'attestation pôle emploi de M. [U], ces 2 documents ayant été fourni au salarié avec 82 jours de retard, à la suite de l'astreinte ordonnée par le conseil de prud'hommes en date du 31 mars 2023 ;

500 euros nets au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;

- l'intégralité des sommes dues porteraient intérêt au taux légal à compter de la notification de l'ordonnance ;

- en cas d'exécution forcée de ladite ordonnance, les frais d'huissier seraient à sa charge.

Et statuant à nouveau de,

juger infondées les prétentions de M. [U] ;

en conséquence, débouter M. [U] de toutes ses demandes, fins ou conclusions ;

condamner M. [U] à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

L'ordonnance de clôture a été rendue le jour de l'audience et il sera renvoyé aux conclusions des parties pour le détail de leur argumentation.

Pendant le cours du délibéré, la cour a sollicité de M. [U] la production de l'acte de signification de l'ordonnance de référé dans le délai de 8 jours.

Faute de production la cour a sollicité par note en délibéré que les parties formulent leurs observations suite à l'absence de production de l'acte de signification de l'ordonnance de référé.

M. [U] a répondu par RPVA le 15 mars 2024 précisant qu'en application de l'article R 1424-26 du code du travail la notification fait courir les délais sans nécessité de signification.

MOTIFS

Sur la liquidation d'astreinte

M. [U] fait valoir que suite à l'ordonnance de référé du 31 mars 2023 l'employeur lui a réglé les sommes dues mais n'a pas communiqué l'ensemble des documents qu'il devait transmettre, à savoir le solde de tout compte et le certificat de congés payés ; il demande en conséquence la liquidation de l'astreinte exécutoire de plein droit qui doit débuter à compter du 17 avril 2023 soit 10 jours après sa notification et pour une somme totale de 21 300 euros.

Concernant l'astreinte relative au certificat de travail et à l'attestation Pôle emploi il soutient n'avoir reçu ces documents que le 7 juillet 2023.

Il argue que l'employeur ne justifie d'aucune cause particulière expliquant le retard pris dans l'exécution de l'ordonnance de référé, que les premiers juges n'ont pas vérifié la réalité des difficultés exposées, qu'il importe peu que le montant de l'astreinte soit important car il n'est que la résultante du comportement du débiteur qui pouvait régulariser les documents sans l'assistance de son comptable, qu'il ne dispose toujours pas de fonds adressé par la caisse de congés payés ce qui signifie que l'employeur n'a pas communiqué le certificat de congés payés.

La société s'y oppose répliquant que lors de la notification de l'ordonnance de référé elle a changé d'expert-comptable qui a tardé à élaborer les documents demandés, qu'elle n'a découvert que par hasard la procédure de liquidation entamée à son égard par M. [U] qui avait refusé tout renvoi de l'affaire si bien qu'elle s'est présentée sans justificatif.

L'employeur ajoute que devant les premiers juges M. [U] n'a pas demandé la fixation d'une astreinte définitive et que le conseil de prud'hommes ne pouvait liquider l'astreinte provisoire en la qualifiant de définitive puisque l'astreinte provisoire n'a pas été liquidée au préalable, qu'il a, immédiatement après l'audience de référé du 26 septembre 2023, communiqué le courrier qu'il a adressé à la caisse de congés payés au conseil du salarié avec un certificat de congés payés.

Sur ce

L'article L 131-2 du code des procédures civiles d'exécution dispose que « l'astreinte est indépendante des dommages-intérêts. L'astreinte est provisoire ou définitive. L'astreinte est considérée comme provisoire, à moins que le juge n'ait précisé son caractère définitif. Une astreinte définitive ne peut être ordonnée qu'après le prononcé d'une astreinte provisoire et pour une durée que le juge détermine. Si l'une de ces conditions n'a pas été respectée, l'astreinte est liquidée comme une astreinte provisoire. »

L'article L131-3 du même code précise que « l'astreinte, même définitive, est liquidée par le juge de l'exécution, sauf si le juge qui l'a ordonnée reste saisi de l'affaire ou s'en est expressément réservé le pouvoir. »

L'article L 131-4 du même code ajoute que « le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter.

Le taux de l'astreinte définitive ne peut jamais être modifié lors de sa liquidation.

L'astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction du juge provient, en tout ou partie, d'une cause étrangère. »

En l'espèce il ne peut être sollicité qu'une liquidation d'astreinte provisoire et non définitive faute d'une liquidation antérieure et d'une fixation d'astreinte définitive.

L'ordonnance de référé rendue le 31 mars 2023 par le conseil de prud'homme de Compiègne est exécutoire et a ordonné la remise à M. [U] dans le délai de 10 jours après notification de la décision les documents de fin de contrat. Il n'est pas contesté que cette ordonnance a été notifiée à la société le 6 avril 2023.

Pour apprécier la liquidation d'astreinte le juge doit apprécier les difficultés rencontrées par la partie condamnée pour exécuter la décision judiciaire. Il doit aussi, au besoin, faire application du principe de proportionnalité entre la liquidation de l'astreinte pouvant entrainer un effet confiscatoire et l'atteinte aux droits du salarié de disposer des documents de fin de contrat.

En l'espèce le salarié argue d'un retard d'exécution pour la délivrance du bulletin de paie du mois de juin 2023, du certificat de travail et de l'attestation Unedic et une absence d'exécution pour la remise du solde de tout compte et le certificat de congés payés.

La débitrice a produit aux débats la copie de l'envoi par courriel du 7 juillet 2023 au conseil de M. [U] le bulletin de paie du mois de juin 2023, du certificat de travail et de l'attestation Unedic soit au-delà du délai qui expirait au 17 avril 2023. En outre, il n'est pas justifié la communication au salarié du solde de tout compte.

La société verse aux débats le courrier de la caisse de congés payés d'Ile de France datée du 24 juillet 2023 indiquant qu'elle communique le certificat de congé du personnel employé entre le 1er avril 2022 et le 31 mars 2023 et qui doivent être remis au personnel. Cependant il n'est pas rapporté la preuve que ce certificat aurait été envoyé à M. [U] qui de son côté affirme qu'il n'en a pas été destinataire.

En raison de l'absence de limitation de l'astreinte dans le temps, la durée à prendre en compte au titre de la liquidation, rend nécessaire d'opérer un contrôle de proportionnalité afin d'éviter, par le prononcé d'une condamnation quasi confiscatoire, du fait de la petite taille de l'entreprise, une atteinte injustifiée au droit de propriété alors que l'enjeu du litige est limité à la remise des documents de fin de contrat.

C'est donc à bon droit que le conseil de prud'hommes a liquidé l'astreinte provisoire à la somme de 2500 euros au total pour le retard dans la délivrance de l'attestation pôle emploi et du certificat de travail et pour le certificat de congés payés et le solde de tout compte ; la cour infirme le jugement en ce qu'il a dit que l'astreinte était définitive concernant la délivrance de l'attestation pôle emploi et du certificat de travail.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Les dispositions de première instance seront confirmées.

Succombant en son appel, il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de M. [U] les frais qu'il a dû exposer pour la présente procédure de liquidation d'astreinte. Il est débouté de sa demande sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que la société en sa demande sur le même fondement.

La société Bâtiment solutions, supportera les dépens de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort, par arrêt mis à disposition au greffe

Confirme l'ordonnance rendue le 28 septembre 2023 sauf en ce qu'elle a dit que l'astreinte concernant la délivrance de l'attestation pôle emploi et du certificat de travail était définitive,

Statuant à nouveau et y ajoutant

- Dit que l'astreinte concernant la délivrance de l'attestation pôle emploi et du certificat de travail liquidée est provisoire ;

- Déboute les parties de leurs demandes respectives sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel ;

- Condamne la société Bâtiment solutions aux dépens de la procédure d'appel.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 5eme chambre prud'homale
Numéro d'arrêt : 23/04253
Date de la décision : 04/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-04;23.04253 ?
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