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04/04/2024 | FRANCE | N°22/04982

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 5eme chambre prud'homale, 04 avril 2024, 22/04982


ARRET







[D]





C/



[C]



























































copie exécutoire

le 04 avril 2024

à

Me CAULIER

Me CHERRIER

CBO/IL/BG



COUR D'APPEL D'AMIENS



5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE



ARRET DU 04 AVRIL 2024



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N° RG 22/04982 - N° Portalis DBV4-V-B7G-ITGY



JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BEAUVAIS DU 06 OCTOBRE 2022 (référence dossier N° RG 22/00024)



PARTIES EN CAUSE :



APPELANT



Monsieur [O] [D]

né le 03 Décembre 1960 à [Localité 6] (76)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 4]



représe...

ARRET

[D]

C/

[C]

copie exécutoire

le 04 avril 2024

à

Me CAULIER

Me CHERRIER

CBO/IL/BG

COUR D'APPEL D'AMIENS

5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE

ARRET DU 04 AVRIL 2024

*************************************************************

N° RG 22/04982 - N° Portalis DBV4-V-B7G-ITGY

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BEAUVAIS DU 06 OCTOBRE 2022 (référence dossier N° RG 22/00024)

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur [O] [D]

né le 03 Décembre 1960 à [Localité 6] (76)

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 4]

représenté, concluant et plaidant par Me Frédéric CAULIER de la SELARL CAULIER VALLET, avocat au barreau de ROUEN

représenté par Me Franck DELAHOUSSE de la SELARL DELAHOUSSE ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AMIENS substituée par Me Olympe TURPIN, avocat au barreau d'AMIENS, avocat postulant

ET :

INTIME

Monsieur [W] [C]

né le 15 Juillet 1965 à [Localité 5] (14) (14)

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté, concluant et plaidant par Me Gontrand CHERRIER de la SCP CHERRIER BODINEAU, avocat au barreau de ROUEN

Me Jérôme LE ROY de la SELARL LX AMIENS-DOUAI, avocat au barreau d'AMIENS, avocat postulant

DEBATS :

A l'audience publique du 08 février 2024, devant Madame Corinne BOULOGNE, siégeant en vertu des articles 805 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, ont été entendus :

- Madame Corinne BOULOGNE en son rapport,

- les avocats en leurs conclusions et plaidoiries respectives.

Madame Corinne BOULOGNE indique que l'arrêt sera prononcé le 04 avril 2024 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Isabelle LEROY

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Madame Corinne BOULOGNE en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :

Mme Corinne BOULOGNE, présidente de chambre,

Mme Caroline PACHTER-WALD, présidente de chambre,

Mme Eva GIUDICELLI, conseillère,

qui en a délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 04 avril 2024, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Corinne BOULOGNE, Présidente de Chambre et Mme Isabelle LEROY, Greffière.

*

* *

DECISION :

M. [C], né le 15 juillet 1965, a été embauché à compter du 6 août 1990 dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée par Me [P], aux droits de laquelle se trouve aujourd'hui Me [D], ci-après dénommé l'employeur, en qualité de collaborateur.

L 'étude de Me [D] compte moins de 11 salariés.

La convention collective applicable est celle des administrateurs et mandataires judiciaires.

Par courrier du 20 février 2020, Me [D] a notifié à M. [C] un avertissement pour des faits s'étant déroulés le 19 février 2020.

A compter du 20 février 2020, le salarié a été placé en arrêt de travail.

Par courrier du 6 octobre 2021, M. [C] a été convoqué à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement, fixé au 20 octobre 2021.

Le 28 octobre 2021, il a été licencié pour trouble objectif au bon fonctionnement de l'entreprise, par lettre ainsi libellée :

« Nous vous avons convoqué à un entretien préalable en date du 20 octobre dernier, auquel vous ne vous êtes pas présenté ni fait excuser.

Nous vous informons de notre décision de vous licencier en raison de votre absence continue depuis votre arrêt de travail initial du 20 février 2020, qui perturbe le bon fonctionnement de l'entreprise et rend nécessaire votre remplacement définitif.

Je vous rappelle que vos fonctions de collaborateur au sein de l'étude sont essentielles à son bon fonctionnement puisqu'aucun autre salarié de celle-ci ne peut vous remplacer, en particulier dans toutes les missions dans lesquelles vous pouvez me substituer.

Tel est le cas devant les différentes juridictions qui me mandatent ou lors de la réception des débiteurs.

J'ai tenté de mettre en place, à compter de septembre 2020, votre remplacement temporaire en signant un contrat à durée déterminée avec une nouvelle salariée.

Ce contrat a été renouvelé une fois mais celle-ci vient de me faire savoir qu'elle refusera toute prolongation ou renouvellement de son contrat sous une forme précaire.

Je vais donc devoir, puisque votre arrêt de travail a été renouvelé une nouvelle fois et jusqu'au 20 novembre prochain, lui donner des gages certains de pérennisation de son emploi, faute de quoi elle partira.

L'étude ne peut absolument pas se passer d'un collaborateur ou d'une collaboratrice dans cette période qui devrait voir s'achever, si ce n 'est la pandémie de Covid, au moins une partie des diverses aides financières consenties aux acteurs de l'économie. Nous devons en effet envisager une recrudescence des dépôts de bilan et donc des missions potentiellement confiées par les tribunaux.

Nous vous informons donc de notre décision de vous licencier en raison du trouble objectif au bon fonctionnement de l'entreprise causé par votre absence.

Votre préavis de trois mois débute à la première présentation de cette lettre. A l'issue de cette période de trois mois, vous quitterez les effectifs de l'entreprise. Votre salaire continuera de vous être versé durant le préavis selon les modalités actuelles au titre de la prévoyance.

A la fin de votre contrat de travail, nous vous adresserons par courrier votre certificat de travail, votre reçu pour solde de tout compte et votre attestation Pôle emploi ».

Contestant la légitimité de la sanction disciplinaire prononcée le 20 février 2020 et de son licenciement, M. [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Beauvais le 1er février 2022.

Par jugement du 6 octobre 2022, le conseil a :

- dit et jugé les demandes de M. [C] recevables et partiellement fondées ;

- dit et jugé l'avertissement du 20 février 2020 non justifié ;

- dit et jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- fixé le salaire moyen mensuel brut de M. [C] à la somme de 5 544,32 euros ;

- condamné Me [D] à payer à M. [C] les sommes suivantes :

- 110 886,40 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 300 euros au titre de la sanction disciplinaire injustifiée du 20 février 2020;

- 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit qu'il n'y avait pas lieu à exécution provisoire hors celle de droit ;

- débouté M. [C] de ses autres demandes ;

- débouté Me [D] de sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Me [D], qui est régulièrement appelant de ce jugement, par dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 31 mai 2023, demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, et, statuant à nouveau, de :

- le recevoir en son appel du jugement et le déclarer bien fondé ;

- débouter M. [C] de sa demande tendant à faire annuler l'avertissement dont il a fait l'objet le 20 février 2020 et à lui accorder des dommages-intérêts ;

- le débouter de sa demande tendant à qualifier son licenciement comme ne reposant sur aucune cause réelle et sérieuse et à lui accorder des dommages-intérêts ;

- le débouter de son appel incident tendant à faire juger que son licenciement est un licenciement économique dissimulé qui justifierait l'octroi d'un rappel d'indemnité de licenciement de 40 904,25 euros ;

- subsidiairement, limiter à la somme de 14 553,84 euros le montant de l'indemnité accordée sur le fondement de l 'article L.1235-3 du code du travail sur la base d'un salaire moyen de 4 851,28 euros ;

- débouter M. [C] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [C] à lui régler la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

M. [C], par dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 6 juin 2023, demande à la cour de :

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

* dit et jugé le licenciement notifié comme dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

*dit et jugé l'avertissement notifié comme injustifié et condamné à ce titre l'employeur au paiement d'une somme de 300 euros à titre de dommages et intérêts ;

*condamné l'employeur au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens;

- infirmer le jugement pour le surplus ;

Statuant à nouveau,

- condamner l'employeur à lui payer :

- 117 089 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- 40 904,25 euros à titre de rappel d'indemnité de licenciement ;

Y ajoutant au titre de l'instance d'appel,

- condamner l'employeur à payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.

Il est renvoyé aux conclusions des parties pour le détail de leur argumentation.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 20 septembre 2023.

MOTIFS :

Sur l'exécution du contrat de travail

Sur l'avertissement prononcé le 20 février 2020

M. [C] expose que l'employeur ne démontre ni la matérialité ni la gravité des faits qu'il allègue, et ne verse aucune pièce sur ce sujet. Il précise que l'employeur se borne à lui reprocher des retards et des carences dans la réalisation de ses missions sans en faire la démonstration, et qu'il ne conteste même pas la réalité du comportement irrespectueux à son égard tel que décrit dans la lettre de contestation de cette sanction. Il ajoute que cette sanction injustifiée et les conditions dans lesquelles elle est survenue lui ont causé un préjudice dont il demande réparation.

M. [D] réplique que le salarié ne remet aucunement en cause le fait qu'il ait quitté son poste alors qu'ils évoquaient ensemble un dossier, de sorte que la preuve du fait ayant motivé l'avertissement est donc rapportée par ses propres explications. Il ajoute que M. [C] ne s'explique pas sur les retards qui lui sont reprochés dans le courrier d'avertissement.

Sur ce,

Selon l'article L. 1331-1 du code du travail, constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération.

En l'espèce, la lettre d'avertissement adressée à M. [C] le 20 février 2020 est rédigée comme suit :

« Monsieur,

Je prends acte de votre attitude intolérable à mon égard survenue le 19 février 2020 à 18 heures 30, alors que j'évoquais, avec vous, un dossier de procédure collective que vous suivez.

Vous avez « tourné les talons » et quitté l'étude, sans attendre la fin de ma phrase.

Je vous rappelle qu'il existe un lien de subordination, entre mon étude et vous-même, et que vous êtes salarié.

Vous avez donc l'obligation de vous conformer à mes directives, concernant les dossiers que vous suivez pour le compte de mon étude.

Je constate que les rapports « article L.641-2 » alinéa 2 du code de commerce sont très rarement établis, malgré mes demandes.

Je constate que les états de créances sont souvent déposés hors des délais fixés par le tribunal.

Les demandes de clôture pour insuffisance d'actif sont souvent établies, avec retard, et après insistance et rappel de ma part.

Je vous invite, par conséquent, à changer d'attitude et à travailler plus efficacement, dans l'intérêt de l'ensemble de l'étude.

La présente lettre recommandée avec accusé de réception vaut avertissement ».

La lettre rédigée par le salarié à la suite de cet avertissement évoque le comportement agressif de M. [D] lors de cet échange, et plus généralement son attitude harcelante par des agressions verbales et vexations qu'il ne pouvait plus tolérer.

Alors que les conditions dans lesquelles l'échange litigieux du 19 février 2020 entre MM. [D] et [C] sont indéterminées à défaut de production d'éléments de preuve objectifs, il ne saurait être déduit une insubordination ou une quelconque attitude fautive du salarié en raison de son choix, qu'il reconnait effectivement, de ne pas poursuivre cette conversation.

De plus, aucun élément n'est présenté à la cour permettant d'établir les carences alléguées par l'employeur dans la lettre d'avertissement portant sur l'exécution des tâches de travail, en l'occurrence le non-respect du délai pour déposer les états de créances.

En l'état des éléments de preuve versés aux débats ne permettant pas d'établir la matérialité de fautes imputables au salarié, il conviendra, par voie de confirmation du jugement entrepris, d'annuler l'avertissement prononcé à son encontre le 20 février 2020.

Enfin, compte-tenu du prononcé injustifié d'une sanction disciplinaire pour un salarié ayant, pendant près de 30 ans, exercé ses fonctions sans encourir le moindre reproche, auquel s'ajoute des conséquences sur sa santé en ce qu'il a observé un arrêt de travail continu à compter de cet événement, c'est à raison que les premiers juges ont retenu que M. [C] avait subi un préjudice et lui ont alloué 300 euros de dommages et intérêts en réparation de celui-ci.

Le jugement déféré est également confirmé sur ce point.

Sur la rupture du contrat de travail

Sur le licenciement pour trouble objectif dans le fonctionnement de l'entreprise

M. [C] expose que l'employeur ne fait pas la démonstration de ce que son absence a désorganisé l'étude et que l'embauche de Mme [K] en contrat à durée déterminée n'avait pas pour motif son remplacement mais un accroissement temporaire de l'activité en lien avec la pandémie de Covid-19. Il en conclut que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

M. [D] réplique que si l'activité de l'étude a été ralentie pendant la période d'urgence sanitaire liée à la pandémie de Covid-19, la situation allait manifestement changer par la reprise de l'activité judiciaire et des procédures collectives, de sorte qu'il a embauché Mme [K] par un contrat à durée déterminée. Il ajoute que la raison de cette embauche était le remplacement de M. [C] tel que démontré par la lettre de Mme [K] refusant la prolongation de ce contrat en raison de l'incertitude de son maintien dans l'étude en cas de retour du salarié.

Sur ce,

Si l'article L. 1132-1 du code du travail ne s'oppose pas au licenciement motivé, non par l'état de santé du salarié, mais par la situation objective de l'entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l'absence prolongée ou les absences répétées du salarié, celui-ci ne peut toutefois être licencié que si ces perturbations causent un trouble objectif dans le fonctionnement de l'entreprise ou d'un service essentiel de l'entreprise, et qu'il a été pourvu au remplacement définitif du salarié, lequel ne peut résulter ni d'une embauche en contrat à durée déterminée ni d'une externalisation du contrat.

En l'espèce, la cour relève que les indicateurs de l'année 2022 versé aux débats par l'employeur sur l'état des procédures collectives sont des données générales émises par le conseil national des administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires, et qui sont impropres à apporter une information précise et utile sur les disfonctionnements induits par l'absence de M. [C] dans l'étude administrée par M. [D].

Par ailleurs, outre le fait que Mme [K] ait été embauchée le 1er septembre 2020 au motif d'un accroissement temporaire de l'activité en lien avec la pandémie de Covid-19 et non en remplacement de M. [C], le recours de l'employeur à un contrat à durée déterminée ne permet pas d'établir qu'il était pourvu au remplacement définitif du salarié.

Si l'employeur présente les fiches de paie de Mme [K] jusqu'en avril 2022, ces documents ne portent aucune indication sur la nature du contrat conclu, et aucun autre élément ne vient étayer ces affirmations selon lesquelles le contrat à durée déterminée prolongé jusqu'en février 2022 se serait ensuite mué en contrat à durée indéterminée.

M. [D] ne présentant aucun élément permettant de justifier du trouble objectif dans le fonctionnement de l'entreprise dû à l'absence de M. [C] ni de son remplacement définitif, les premiers juges ont justement retenu que le licenciement prononcé le 28 octobre 2021 était sans cause réelle et sérieuse.

Par conséquent, le jugement entrepris est confirmé de chef.

Sur le motif économique du licenciement et l'indemnité conventionnelle de licenciement

M. [C] soutient que la cause de son licenciement est en réalité économique et que le motif choisi par l'employeur est une tentative de se soustraire à l'application des règles plus favorables prévues par la convention collective en matière de paiement de l'indemnité de licenciement pour motif économique. Il précise que le motif économique de son licenciement est prouvé par le licenciement économique de Mme [X] en avril 2021.

En réponse, M. [D] conteste tout motif économique en indiquant que Mme [X] occupait des fonctions de secrétaire au sein de l'étude, et que, si des difficultés économiques sont apparues en raison des mesures d'urgence liées à la pandémie de Covid-19, il ne pouvait pas se passer d'un collaborateur.

Sur ce,

Il appartient au juge du fond de rechercher, au-delà des énonciations de la lettre de licenciement, la véritable cause du licenciement.

Selon l'article 15-3 de la convention collective nationale du personnel des administrateurs et des mandataires judiciaires, dans sa rédaction applicable à la cause, lorsque le licenciement est prononcé pour motif économique et concerne un salarié ayant plus de 10 ans d'ancienneté dans l'étude et âgé de plus de 55 ans, l'indemnité de licenciement est majorée de 5 0 %.

En l'espèce, s'il est établi que Mme [X] a été licenciée pour motif économique le 14 avril 2021 et qu'il était évoqué une forte baisse des missions confiées par les tribunaux en matière de procédures collectives, il n'en demeure pas moins que, d'une part, M. [C] n'occupait pas les mêmes fonctions que cette salariée, et, d'autre part, un accroissement de l'activité avait été observé en septembre 2020 justifiant l'embauche de Mme [K] dont le contrat à durée déterminée avait été renouvelé le 1er mars 2021 et que cette relation contractuelle a perduré, a minima, jusqu'en avril 2022.

Le contrat initial conclu entre M. [D] et Mme [K] précisait qu'elle était embauchée en qualité de mandataire judiciaire salariée et que dans l'attente de son inscription sur la liste nationale et de sa prestation de serment, elle était embauchée en qualité de collaboratrice.

Ainsi l'étude avait besoin pour un fonctionnement correct de la présence d'un collaborateur notamment pour les audiences commerciales, quand bien même l'employeur était amené à licencier une salariée occupant la fonction de secrétaire, ces deux postes n'étant pas interchangeables, il s'en déduit qu'il n'est pas établi que le licenciement de M. [C] avait en réalité un motif économique.

Le jugement entrepris est confirmé en ce qu'il a rejeté la demande du salarié tendant au paiement d'un rappel d'indemnité conventionnelle de licenciement.

Sur les conséquences du licenciement sans cause réelle et sérieuse

M. [C] soutient qu'en l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement, il est en droit d'obtenir le paiement de dommages et intérêts pour un montant de 117 089 euros compte-tenu de son âge et de son ancienneté au jour de son licenciement, ainsi que d'un salaire de référence s'élevant à 5 854,48 euros.

M. [D] réplique que la demande de dommages et intérêts se fonde sur un calcul erroné de son salaire de référence qui doit être fixé à 4 851,28 euros. Il ajoute que le salarié ne donne aucune indication sur l'évolution de sa situation depuis le licenciement.

Sur ce,

L'article L.1235-3 du code du travail prévoit l'octroi d'une indemnité à la charge de l'employeur au bénéfice du salarié dont le licenciement est survenu pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse.

Le salaire de référence nécessaire au calcul de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse prend en compte les primes et avantages en nature dont il est bénéficiaire en sus de son salaire de base.

Lorsque le salarié était en arrêt de travail, le salaire de référence à prendre en compte pour le calcul de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est celui perçu avant son arrêt de travail.

En l'espèce, M. [C] a observé un arrêt de travail continu depuis le 3 mars 2020 jusqu'au jour de son licenciement prononcé le 28 octobre 2021.

Or, si pour contester le salaire de référence retenu par le conseil, l'employeur présente un document dont il attribut l'émission à son comptable, la cour relève que les périodes choisies sont celles des 12 ou 3 derniers mois précédant la rupture du contrat sans tenir compte de l'arrêt de travail continu observé par le salarié à compter du 3 mars 2020.

Le salarié, quant à lui, se borne à affirmer que son salaire de référence doit être fixé à 5 854,48 euros sans présenter un quelconque argument sur ce point.

C'est donc à raison que les premiers juges, à l'appui de l'attestation émise par Pôle emploi exposant les salaires des douze mois civils précédant le dernier jour travaillé et payé, ont retenu que le salaire de référence de M. [C] devait être fixé à 5 544,32 euros.

Il doit être fait application des dispositions de l'article L1235-3 du code du travail qui fixe le montant de l'indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse pour un salarié ayant plus de 30 ans d'ancienneté à une somme compris entre 3 et 20 mois de salaire.

Compte-tenu des circonstances de la rupture, de l'effectif de la société, du montant de la rémunération de M. [C], alors âgée de 56 ans au jour de son licenciement, de son ancienneté de plus de 31 ans au service de l'étude, les premiers juges ont justement évalué le préjudice subi par le salarié en lui allouant la somme de 110 886,40 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse soit 20 mois de salaire.

Le jugement entrepris est confirmé sur ce point.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Le sens du présent arrêt conduit à confirmer la décision déférée en ses dispositions sur les frais irrépétibles et les dépens.

Me [D], qui succombe en ses prétentions, sera condamné aux dépens, et à payer à M. [C] la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

L'employeur sera débouté de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt contradictoire ;

Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour,

Y ajoutant,

Condamne Me [D] à payer à M. [C] la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel,

Rejette le surplus des demandes,

Condamne Me [D] aux dépens d'appel.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 5eme chambre prud'homale
Numéro d'arrêt : 22/04982
Date de la décision : 04/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 10/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-04;22.04982 ?
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