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27/03/2024 | FRANCE | N°23/02013

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 5eme chambre prud'homale, 27 mars 2024, 23/02013


ARRET







[B]





C/



Société PATRIMOINE INNOV



S.C.P. ANGEL [P] DUVAL



UNEDIC



























































copie exécutoire

le 27 mars 2024

à

Me VRILLAC

Me LEQUILLERIER

UNEDIC

LDS/IL/BG



COUR D'APPEL D'AMIENS



5EME CHAMBRE

PRUD'HOMALE



ARRET DU 27 MARS 2024



*************************************************************



N° RG 23/02013 - N° Portalis DBV4-V-B7H-IYDK



JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE CREIL DU 28 MARS 2023 (référence dossier N° RG 22/00043)





PARTIES EN CAUSE :



APPELANTE



Madame [G] [B]

née le 22 Février 1993 à [Localité 7]

de ...

ARRET

[B]

C/

Société PATRIMOINE INNOV

S.C.P. ANGEL [P] DUVAL

UNEDIC

copie exécutoire

le 27 mars 2024

à

Me VRILLAC

Me LEQUILLERIER

UNEDIC

LDS/IL/BG

COUR D'APPEL D'AMIENS

5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE

ARRET DU 27 MARS 2024

*************************************************************

N° RG 23/02013 - N° Portalis DBV4-V-B7H-IYDK

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE CREIL DU 28 MARS 2023 (référence dossier N° RG 22/00043)

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

Madame [G] [B]

née le 22 Février 1993 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 4]

représentée et concluant par Me Barbara VRILLAC, avocat au barreau de SENLIS substitué par Me Chéryl FOSSIER-VOGT, avocat au barreau de REIMS

ET :

INTIMEES

S.C.P. ANGEL [P] DUVAL prise en la personne de Maître [I] [P], ès qualités de liquidateur judiciaire de la SARL PATRIMOINE INNOV

[Adresse 2]

[Localité 3]

concluante par Me Serge LEQUILLERIER de la SCP LEQUILLERIER - GARNIER, avocat au barreau de SENLIS

UNEDIC - CENTRE DE GESTION ET ETUDE AGS

[Adresse 1]

[Localité 6]

non constituée, non comparante

DEBATS :

A l'audience publique du 07 février 2024, devant Madame Laurence de SURIREY, siégeant en vertu des articles 805 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, l'affaire a été appelée.

Madame Laurence de SURIREY indique que l'arrêt sera prononcé le 27 mars 2024 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Isabelle LEROY

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Madame Laurence de SURIREY en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :

Mme Laurence de SURIREY, présidente de chambre,

Mme Caroline PACHTER-WALD, présidente de chambre,

Mme Eva GIUDICELLI, conseillère,

qui en a délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 27 mars 2024, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Laurence de SURIREY, Présidente de Chambre et Mme Isabelle LEROY, Greffière.

*

* *

DECISION :

Mme [B], née le 22 février 1993, a été embauchée à compter du 27 janvier 2021 dans le cadre d'un contrat d'apprentissage par la société Patrimoine innov (la société ou l'employeur), en qualité d'apprenti. Le contrat prévoyait une durée hebdomadaire de 35 heures et une rémunération à 100% du SMIC.

Par courrier du 2 août 2021, la société Patrimoine innov a informé Mme [B] que son contrat d'apprentissage ne serait pas renouvelé.

Par courrier du 19 septembre 2021, la salariée a sollicité le paiement de son salaire du mois d'août et la remise des documents de fin de contrat.

Contestant la légitimité de la rupture de son contrat d'apprentissage, Mme [B] a saisi le conseil de prud'hommes de Creil le 21 février 2022.

Par jugement du 13 juillet 2022, le tribunal de commerce de Compiègne a prononcé la liquidation judiciaire simplifiée de la société Patrimoine innov et a désigné la société Angel [P] Duval en qualité de liquidateur judiciaire.

Par jugement du 28 mars 2023, le conseil a :

- fixé le salaire moyen de Mme [B] à 1 554,62 euros brut ;

- fixé au passif de la société Patrimoine innov, représentée par M. [P], en qualité de liquidateur judiciaire et au bénéfice de Mme [B], les sommes suivantes :

- 1 554,62 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat d'apprentissage ;

- 1 000 euros de dommages et intérêts pour remise d'une attestation Pôle emploi erronée ;

- 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté Mme [B] de ses demandes plus amples ou contraires ;

- dit que le jugement était opposable au CGEA [Localité 8] ;

- dit que le CGEA [Localité 8] ne pouvait être condamné à avancer le montant des créances salariales que dans les limites et plafonds de sa garantie prévus aux articles L.3253-6, L.3253-8 à L.3253-13, L.3253-17, D.3253-1 à D.3253-6 du code du travail ;

- rappelé que le CGEA [Localité 8], gestionnaire de l'AGS, ne pouvait être amené à avancer le montant des créances dues en exécution d'un contrat de travail fixé par le conseil que dans la limite de sa garantie légale, et que la garantie de l'AGS était plafonnée, toutes créances avancées pour le compte du salarié, aux plafonds définis à l'article D.3253-5 du code du travail ;

- ordonné l'exécution provisoire sur l'intégralité du jugement ;

- dit que les dépens seraient inscrits au passif de la liquidation judiciaire de la société Patrimoine innov.

Mme [B], qui est régulièrement appelante de ce jugement, par dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 6 octobre 2023, demande à la cour de :

- débouter la société Angel [P] Duval, représentée par M. [P] ès qualités, de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

A titre principal,

- infirmer le jugement en ce qu'il a fixé au passif de la société Patrimoine innov la somme de 1 554,62 euros au titre de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat d'apprentissage.

Statuant à nouveau

- fixer au passif de la liquidation de la société Patrimoine innov la somme de 21 048 euros outre, à titre de dommages-intérêts suite à la rupture abusive du contrat d'apprentissage,

Pour le surplus,

- confirmer le jugement soit la fixation au passif de la société Patrimoine innov de la somme de 1 000 euros de dommages et intérêts pour remise d'une attestation Pôle emploi erronée ;

- et en outre condamner la société Angel [P] Duval, représentée par M. [P] en qualité de mandataire liquidateur de la société Patrimoine innov, à la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

A titre subsidiaire,

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions.

En outre,

- condamner la société Angel [P] Duval, représentée par M. [P] ès qualités, à la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonner que l'ensemble de ces condamnations porte intérêts au taux légal, à compter de la saisine du conseil de prud'hommes pour les sommes à caractère salarial et à compter du prononcé de la décision pour les dommages-intérêts ;

- ordonner la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil.

La société Angel [P] Duval, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Patrimoine innov, par dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 21 septembre 2023, demande à la cour de :

- réformer le jugement en toutes ses dispositions ;

- cantonner la fixation au passif des créances de Mme [B] à la somme de 478,37 euros outre 47,84 euros au titre des congés payés afférents correspondant à la fraction des salaires dont elle aurait été privée pour la période du 21 août 2021 au 30 août 2021, sous réserve qu'elle justifie s'être maintenue à la disposition de son employeur jusqu'à ce terme contractuel ;

- débouter Mme [B] de toutes ses prétentions ;

- rappeler que les créances reconnues par l'arrêt ne pourront faire l'objet que d'une fixation au passif et qu'elles seront soumises à la garantie de l'AGS sauf en ce qui concerne l'article 700 du code de procédure civile.

L'AGS n'a pas constitué avocat.

Il est renvoyé aux conclusions des parties pour le détail de leur argumentation.

EXPOSE DES MOTIFS :

1/ Sur la rupture du contrat d'apprentissage :

Mme [B] soutient que son contrat d'apprentissage devait se terminer le 30 août 2022 et non le 30 août 2021, le document initial comportant une erreur matérielle qui a été corrigée le 21 avril 2023 après qu'elle l'a signalée ; que l'employeur l'a rompu sans invoquer aucun des motifs prévus par l'article L.6222-18 du code du travail et sans respecter les modalités prévues aux articles L.1232-2 et L.1232-6 du même code. Elle estime que son préjudice doit être réparé par l'octroi d'une indemnité égale au salaire qu'elle aurait perçu jusqu'au 30 août 2022, incluant la période du 20 au 30 août 2021.

Le liquidateur, ès qualités, fait valoir que les parties avaient manifestement prévu une date de fin de contrat au 30 août 2021 et non à la fin du cycle scolaire dans le cadre des dérogations prévues par le texte et que Mme [B] pourrait prétendre au plus à une indemnité égale au salaire non perçu pour la période du 20 au 30 août 2021.

Selon l'article L.6222-7-1 du code du travail : « La durée du contrat d'apprentissage, lorsqu'il est conclu pour une durée limitée, ou de la période d'apprentissage, lorsque le contrat d'apprentissage est conclu pour une durée indéterminée, varie entre six mois et trois ans, sous réserve des cas de prolongation prévus à l'article L. 6222-11.

Elle est égale à la durée du cycle de formation préparant à la qualification qui fait l'objet du contrat, laquelle est fixée en fonction du type de profession et du niveau de qualification préparés.

Par dérogation au deuxième alinéa du présent article, la durée du contrat ou de la période d'apprentissage peut être inférieure ou supérieure à celle du cycle de formation préparant à la qualification qui fait l'objet du contrat, compte tenu du niveau initial de compétences de l'apprenti ou des compétences acquises, le cas échéant, lors d'une mobilité à l'étranger, telle que prévue à l'article L. 6222-42, lors d'une activité militaire dans la réserve opérationnelle prévue au livre II de la quatrième partie du code de la défense, lors d'un service civique défini au II de l'article L. 120-1 du code du service national, lors d'un volontariat militaire prévu à l'article L. 121-1 du même code ou lors d'un engagement comme sapeur-pompier volontaire en application de l'article L. 723-3 du code de la sécurité intérieure. Cette durée est alors fixée par une convention tripartite signée par le centre de formation, l'employeur et l'apprenti ou son représentant légal, annexée au contrat d'apprentissage ».

L'article L.6222-18 du code du travail dispose : « le contrat d'apprentissage peut être rompu par l'une ou l'autre des parties jusqu'à l'échéance des quarante-cinq premiers jours, consécutifs ou non, de formation pratique en entreprise effectuée par l'apprenti.

Passé ce délai, le contrat peut être rompu par accord écrit signé des deux parties.

A défaut, le contrat peut être rompu en cas de force majeure, de faute grave de l'apprenti, d'inaptitude constatée par le médecin du travail dans les conditions définies à l'article L. 4624-4 ou en cas de décès d'un employeur maître d'apprentissage dans le cadre d'une entreprise unipersonnelle. La rupture prend la forme d'un licenciement prononcé selon les modalités prévues aux articles L. 1232-2 à L. 1232-6 et L.1332-3 à L. 1332-5. (') ».

Quelles que soient ses causes et sa date d'intervention, la rupture du contrat d'apprentissage doit être constatée, par écrit, et notifiée au directeur du centre de formation d'apprentis (article  R. 6222-21 ).

En l'espèce, bien que le contrat, à la rubrique « date de fin du contrat ou de la période d'apprentissage », mentionne « 30/08/2021 », il ne fait aucun doute que la commune intention des parties était de fixer la fin du contrat au 30 août 2022. C'est d'ailleurs ce qu'ont considéré Mme [F] de la cellule administrative de la CCI de l'Oise et son directeur M. [M] qui ont adressé à Mme [B] le 21 avril 2023, un email en ce sens et le contrat rectifié.

En effet, cela résulte :

- des autres mentions du contrat qui stipulent une rémunération jusqu'au 30 août 2022 et une fin des épreuves ou examens à la même date,

- de l'attestation d'inscription délivrée par la CCI de l'Oise qui porte la mention « date de fin de contrat : 30/08/2022 »,

- de l'absence de convention tripartite actant une durée d'apprentissage très inférieure à celle de la formation,

- de l'incapacité du liquidateur à justifier d'un motif de recours à un contrat d'une durée inférieure à celle de la formation.

Il en résulte que la société ne pouvait rompre unilatéralement le contrat avant le 30 août 2022 sans justifier de l'un des motifs prévus à l'article L.6222-18 et que la rupture prononcée le 2 août 2021, qui plus est hors les formes légales, au seul prétexte du non-renouvellement du contrat est abusive. La société est donc tenue de réparer le préjudice causé qui est égal aux rémunérations que l'apprentie aurait perçues jusqu'au terme du contrat, soit la somme de 19 133,81 euros correspondant à la période du 21 août 2021 au 30 août 2022 avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt.

Cette somme de nature indemnitaire n'ouvre pas droit à congés payés, la demande de ce chef étant rejetée.

2/ Sur la demande de dommages-intérêts pour délivrance d'une attestation Pôle emploi erronée :

Mme [B] expose que le fait que l'attestation Pôle emploi porte la mention fausse « rupture anticipée d'un contrat à durée déterminée ou d'un contrat d'apprentissage à l'initiative du salarié » a eu pour effet de la priver d'indemnisation, que l'employeur n'a pas tenu son engagement de lui remettre une attestation rectifiée lors de l'audience devant le conseil de prud'hommes et que cette situation lui a causé un important préjudice financier.

Le liquidateur fait valoir que Mme [B] ne rapporte pas la preuve de ce qu'elle a été privée d'allocation chômage du fait de l a mention figurant sur l'attestation Pôle emploi, que si la cour octroyait une indemnité égale aux salaires jusqu'au 30 août 2022, l'apprentie ne pourrait cumuler cette indemnité avec une allocation de retour à l'emploi et qu'elle ne justifie pas avoir présenté une demande d'ARE en faisant valoir l'erreur figurant sur le document litigieux.

L'employeur est en faute d'avoir remis à l'apprentie une attestation Pôle emploi erronée en violation de l'article R.1234-9 du code du travail.

Cependant, en l'absence de preuve de ce que Mme [B] a été privée, pour ce motif, d'indemnités de chômage et donc d'un préjudice, il y a lieu d'infirmer le jugement qui a fixé au passif de la société la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts.

3/ Sur les demandes accessoires :

Le liquidateur ès qualités doit supporter les dépens d'appel et il sera fixé au passif la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais engagés devant la cour.

PAR CES MOTIFS :

Infirme le jugement en ce qu'il a fixé au passif de la société Patrimoine innov les sommes de 1554,62 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat d'apprentissage et 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour remise d'une attestation Pôle emploi erronée,

Le confirme pour le surplus des dispositions soumises à la cour,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Fixe au passif de la liquidation de la société Patrimoine innov au profit de Mme [G] [B] les sommes de :

- 19 133,81 euros à titre d'indemnité pour rupture abusive du contrat d'apprentissage avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

- 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- les dépens d'appel,

Rejette le surplus des demandes,

Dit que la présente décision est opposable à l'Unedic Délégation AGS CGEA [Localité 8] dans les limites de la garantie qui ne porte pas sur les frais irrépétibles.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 5eme chambre prud'homale
Numéro d'arrêt : 23/02013
Date de la décision : 27/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 02/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-27;23.02013 ?
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