ARRET
N° 547
[S]
C/
CPAM CÔTE D'OPALE
COUR D'APPEL D'AMIENS
2EME PROTECTION SOCIALE
ARRET DU 08 JUIN 2023
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N° RG 19/07910 - N° Portalis DBV4-V-B7D-HROB - N° registre 1ère instance : 18/652
JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BOULOGNE SUR MER (Pôle Social) EN DATE DU 24 juillet 2019
ARRÊT DE LA 2IÈME CHAMBRE DE LA PROTECTION SOCIALE DE LA COUR D'APPEL D'AMIENS EN DATE DU 09 Juin 2021
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE
Madame [W] [S] épouse [U]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Comparante, assistée et plaidant par Me Dominique SOMMEVILLE, avocat au barreau de DUNKERQUE
ET :
INTIME
La CPAM CÔTE D'OPALE, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée et plaidant par Mme Fozia MAVOUNGOU dûment mandatée
DEBATS :
A l'audience publique du 09 Février 2023 devant Mme Elisabeth WABLE, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 08 Juin 2023.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Roxane DUGARO
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme Elisabeth WABLE en a rendu compte à la Cour composée en outre de:
Mme Elisabeth WABLE, Président de chambre,
Mme Graziella HAUDUIN, Président,
et Monsieur Renaud DELOFFRE, Conseiller,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
PRONONCE :
Le 08 Juin 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Elisabeth WABLE, Président a signé la minute avec Mme Marie-Estelle CHAPON, Greffier.
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DECISION
Vu le jugement rendu le 24 juillet 2019 par lequel le pôle social du tribunal de grande instance de Lille, statuant dans le litige opposant Mme [W] [S] épouse [U] à la caisse primaire d'assurance maladie de la Côte d'Opale (la CPAM ou la caisse), a :
- déclaré recevable le recours de Mme [W] [U] visant au bénéfice d'une pension d'invalidité de première catégorie,
- l'a dit mal fondé et l'a rejeté,
- dit que les frais et dépens de l'instance seront à la charge de la CPAM de la Côte d'Opale,
Vu l'appel du jugement relevé par Madame [W] [S] épouse [U] le 5 novembre 2019,
Vu l'ordonnance rendue le 8 juin 2020 par le magistrat chargé d'instruire l'affaire, désignant le docteur [N] en qualité de médecin consultant et le rapport déposé par celui-ci le 28 septembre 2020,
Vu l'arrêt avant dire droit rendu le 9 juin 2021 par lequel la cour a sollicité un complément d'expertise du docteur [N] en l'invitant à rendre son avis en se plaçant à la date du 13 mars 2018 et le rapport déposé par celui-ci le 9 décembre 2022,
Vu les conclusions visées le 9 février 2023, soutenues oralement à l'audience, par lesquelles Mme [W] [S] épouse [U] prie la cour de :
- dire son appel recevable et bien fondé,
- infirmer le jugement du pôle social du tribunal de grande instance de Lille du 24 juillet 2019,
- ordonner une nouvelle expertise médicale qui, dans un souci de cohérence, doit être confiée au docteur [D] [P] avec mission identique à celle qui avait été confiée au docteur [N],
En tout état de cause,
- dire la décision de la CPAM de la Côte d'Opale du 23 Avril 2018 rejetant la demande de pension d'invalidité mal-fondée
- dire que la demande de pension d'invalidité formée le 13 mars 2018 est fondée,
- condamner la CPAM de la Côte d'opale en tous les frais et dépens, tant de première instance que d'appel,
Vu les conclusions visées le 9 février 2023, soutenues oralement à l'audience, par lesquelles la CPAM de la Côte d'Opale prie la cour de :
- entériner les conclusions du docteur [N],
- confirmer le jugement du tribunal de grande instance - Pôle social - de Lille en date du 24 juillet 2019,
En conséquence,
- confirmer le rejet d'attribution d'une pension d'invalidité à Mme [W] [S] épouse [U] en date du 13 Mars 2018,
- débouter la requérante de toutes ses demandes.
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SUR CE LA COUR,
Le 13 Mars 2018, Mme [W] [S], née le 28 octobre 1967, exerçant une activité d'animatrice commerciale intérimaire, a adressé au service médical de la CPAM de la Côte d'Opale une demande de pension d'invalidité.
Par courrier en date du 23 avril 2018, la CPAM de la Côte d'Opale a notifié à Madame [W] [S] une décision de rejet d'attribution de pension d'invalidité, au motif qu'elle ne présentait pas une invalidité réduisant des deux tiers au moins sa capacité de travail ou de gain.
Contestant cette décision, Mme [W] [S] a saisi le tribunal du contentieux de l'incapacité de Lille.
En application de la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016, le tribunal du contentieux de l'incapacité s'est dessaisi au profit du pôle social du tribunal de grande instance.
Par jugement en date du 24 juillet 2019 le pôle social du tribunal de grande instance de Lille a statué comme indiqué précédemment.
Mme [W] [S] conclut à l'infirmation de la décision déférée, à la mise en 'uvre d'une nouvelle expertise médicale, et en toute hypothèse à ce que la cour dise que sa demande de pension d'invalidité est fondée.
Elle indique que le docteur [N] a écarté le rapport du docteur [P], qui a conclu à l'impossibilité pour elle de reprendre une quelconque activité à la date du 2 mai 2018, en indiquant simplement que sa conclusion n'était pas soutenue par ses constatations.
Elle estime qu'une nouvelle expertise doit être confiée dans un souci de cohérence au docteur [P].
A titre subsidiaire, elle demande à la cour de dire qu'elle n'était le 13 mars 2018, ni physiquement ni moralement en état de reprendre son activité d'animatrice commerciale, ni une quelconque activité en raison notamment de la nécessité pour elle de procéder à des auto-sondages de sa vessie quotidiennement.
Elle souligne que le rapport du docteur [P] du 17 octobre 2019 mentionnait la nécessité de prévoir une mise en invalidité à 3 ans.
La CPAM de la Côte d'Opale conclut à la confirmation du jugement déféré et au rejet de la demande d'attribution de pension d'invalidité formée par Mme [W] [S].
Elle fait valoir que le médecin conseil de la caisse et le médecin consultant désigné en première instance ont tous deux retenu qu'à la date du 13 mars 2018, Mme [S] ne présentait pas un état d'invalidité réduisant d'au moins deux tiers sa capacité de gain ou de travail.
Elle ajoute que le Docteur [N], médecin consultant désigné par la cour, a également conclu que la mise en invalidité n'était pas justifiée, et que l'expertise à laquelle se réfère l'appelante concerne un autre litige, également pendant devant la Cour.
Elle soutient qu'à la date du 13 mars 2018, Mme [W] [S] ne présentait pas une réduction des deux tiers de sa capacité de gain ou de travail dans une profession quelconque, telle que définie par l'article L. 341-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction alors en vigueur.
Elle considère qu'il n'y a pas lieu de procéder à une nouvelle mesure d'expertise dès lors que les conclusions du docteur [N] sont claires, sans ambigüité et motivées.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des prétentions et moyens.
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* Sur le bénéfice d'une pension d'invalidité
Conformément à l'article L. 341-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à la cause, l'assuré a droit à une pension d'invalidité lorsqu'il présente une invalidité réduisant, dans des proportions déterminées, sa capacité de travail ou de gain, c'est-à-dire le mettant hors d'état de se procurer, dans une profession quelconque, un salaire supérieur à une fraction de la rémunération normale perçue dans la même région par des travailleurs de la même catégorie, dans la profession qu'il exerçait avant la date de l'interruption de travail suivie d'invalidité ou la date de la constatation médicale de l'invalidité si celle-ci résulte de l'usure prématurée de l'organisme.
En application de ces dispositions, le droit à pension d'invalidité est subordonné à la seule constatation médicale d'une invalidité réduisant au moins des deux tiers la capacité de travail ou de gain de l'assuré.
En outre, l'état d'invalidité doit être apprécié à la date de la demande.
En l'espèce, le médecin-conseil de la caisse a, le 19 avril 2018, émis un avis défavorable d'ordre médical à l'attribution de la pension d'invalidité sollicitée, au motif que la réduction de la capacité de gain de Mme [W] [S] était inférieure aux deux tiers, à la date d'effet du 13 mars 2018.
Le médecin consultant désigné en première instance a également été d'avis qu'à la date d'effet de sa demande, Mme [W] [S] ne souffrait pas d'une invalidité réduisant des deux tiers sa capacité de travail ou de gain.
Aux termes de son rapport en date du 5 décembre 2022, le docteur [V] [N], médecin consultant désigné par la cour, indique : « L'état de Madame [U] [W] était jugé compatible avec la reprise d'une activité professionnelle le 02.05.2018 par le médecin conseil et par le médecin expert désigné en commun accord avec le médecin traitant. La décision a été confirmée par le TGI le 16.10.2019 malgré l'avis du médecin expert.
En effet, l'examen clinique réalisé par le Dr [P], médecin expert désigné par le TGI, ne met pas en évidence d'élément invalidant. L'examen est strictement normal en dehors d'une limitation de l'antéflexion du tronc qui peut s'expliquer par l'obésité morbide de la patiente. Il note également une baisse de l'élan vital et une insomnie qui ne sont en aucun cas suffisantes pour caractériser un syndrome dépressif selon la DSM-IV, et encore moins un syndrome dépressif invalidant. Sa conclusion n'est donc pas soutenue par ses constatations.
Au total, l'analyse de l'ensemble des pièces médicales versées au dossier conduit à retenir que l'état de santé de Madame [U] [W] ne justifiait pas une mise en invalidité au 13 mars 2018.
Conclusion :
A la date du 13 mars 2018, la mise en invalidité n'est pas justifiée. »
En considération de ces éléments , si les restrictions relevées par les différents médecins consultés réduisent indéniablement les capacités de Mme [S], au regard notamment des auto-sondages qu'elle doit pratiquer depuis plusieurs années même lorsqu'elle travaillait, les éléments du dossier ne permettent pas de contredire les avis concordants des médecins consultant désignés en premier instance ainsi qu'en appel et de caractériser une réduction des capacités de travail ou de gain de Mme [S] supérieure aux deux tiers lors de la demande au sens des dispositions précitées.
Par voie de conséquence et au vu du rapport du rapport clair, circonstancié et argumenté du docteur [N], il sera dit qu'à la date du 13 mars 2018 Mme [W] [S] ne remplit pas les conditions lui permettant de prétendre au bénéfice d'une pension d'invalidité.
La cour confirmera ainsi le jugement en toutes ses dispositions, sans nécessité de recourir à une nouvelle mesure d'expertise.
* Sur les dépens
Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
Mme [W] [S] qui succombe, sera condamnée aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par arrêt contradictoire rendu publiquement par sa mise à disposition au greffe, en dernier ressort,
CONFIRME la décision déférée dans toutes ses dispositions,
Y AJOUTANT,
DEBOUTE Mme [W] [S] de sa demande d'expertise,
CONDAMNE Mme [W] [S] aux dépens.
Le Greffier, Le Président,