La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/05/2023 | FRANCE | N°20/01461

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 25 mai 2023, 20/01461


ARRET

N° 520





S.A.S. [5]





C/



URSSAF NORD PAS DE CALAIS













COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 25 MAI 2023



*************************************************************



N° RG 20/01461 - N° Portalis DBV4-V-B7E-HVVY - N° registre 1ère instance : 19/00138



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOULOGNE SUR MER EN DATE DU 14 février 2020





PARTIES EN CAUSE

:





APPELANTE





S.A.S. [5] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 3]





Représentée et plaidant par Me Sabine JAGODZINSKI-BAHEUX de la SE...

ARRET

N° 520

S.A.S. [5]

C/

URSSAF NORD PAS DE CALAIS

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 25 MAI 2023

*************************************************************

N° RG 20/01461 - N° Portalis DBV4-V-B7E-HVVY - N° registre 1ère instance : 19/00138

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOULOGNE SUR MER EN DATE DU 14 février 2020

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

S.A.S. [5] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représentée et plaidant par Me Sabine JAGODZINSKI-BAHEUX de la SELAS FIDAL, avocat au barreau d'ARRAS et ayant comme avocat postulant

Me TURPIN, avocat au barreau d'AMIENS substituant Me Jérôme LE ROY de la SELARL LEXAVOUE AMIENS-DOUAI, avocat au barreau d'AMIENS

ET :

INTIMEE

URSSAF NORD PAS DE CALAIS agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée et plaidant par Me Maxime DESEURE, avocat au barreau de BETHUNE

DEBATS :

A l'audience publique du 14 Mars 2023 devant Mme Jocelyne RUBANTEL, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 25 Mai 2023.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Marie-Estelle CHAPON

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Jocelyne RUBANTEL en a rendu compte à la Cour composée en outre de:

Mme Jocelyne RUBANTEL, Président,

M. Pascal HAMON, Président,

et Mme Véronique CORNILLE, Conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 25 Mai 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Jocelyne RUBANTEL, Président a signé la minute avec Mme Blanche THARAUD, Greffier.

*

* *

DECISION

La société de sécurité privée [4] a fait l'objet d'un procès-verbal de travail dissimulé dressé par les contrôleurs de l'Urssaf le 30 juin 2017 référence 2017/038.

La société [5] avait confié à la société [4] des prestations de surveillance en sous-traitance.

Par courrier du 14 septembre 2017, les services de l'Urssaf sollicitaient de la SAS [5] les attestations de vigilance et l'extrait Kbis de la société [4] pour les périodes au cours de laquelle la société [5] avait conclu un contrat avec la société [4].

Selon l'Urssaf il est apparu que la société [5] avait manqué à son obligation de vigilance.

l'Urssaf a engagé la procédure de responsabilité financière comme suit

27 février 2018 - Lettre d'observations - mise en 'uvre de la solidarité financière,

27 mars 2018 - observations de la société

4 juillet 2018 ' lettre corrective de la lettre d'observations du 27 février 2018 (la correction concerne le montant du « redressement »),

9 juillet 2018 - réponse de l'Urssaf aux observations du cotisant,

19 juillet 2018 - mise en demeure de l'Urssaf,

10 septembre 2018 - lettre de contestation du cotisant,

6 décembre 2018 - mise en demeure annulant et remplaçant la précédente,

1 ER Février 2019 - saisine de la commission de recours amiable,

29 avril 2019 - saisine du pôle social de Boulogne sur mer contre la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable,

30 avril 2019 - décision explicite de la commission de recours amiable,

15 juillet 2019 - saisine du pôle social contre la décision de la commission de recours amiable.

L'Urssaf évaluait le redressement de cotisations mis à la charge de la société [5] à 5.728 €uros.

La société a saisi le Pôle social du Tribunal de Boulogne sur Mer par requête du 25 avril 2019.

Par jugement en date du 14 février 2020, le Pôle social de Boulogne sur Mer a statué comme suit :

Ordonne la jonction des instances no 19/138 et no 19/282 sous le no 19/138

Confirme le redressement notifié par I ' Urssaf Nord Pas-de-Calais à la SAS [5] pour un montant de 5.722 euros en cotisations et majorations de retard - correspondant aux cotisations éludées en fonction du pourcentage de chiffre d'affaires réalisé - au titre de la solidarité financière prévue aux articles L. 8222-1 et suivants du code du travail à la suite de l'établissement de procès-verbaux de délit pour travail dissimulé à l'encontre de la SARL [4] qui travaillait en qualité de sous-traitante de la SAS [5], donneur d'ordres. pour la période du 1 er janvier 2013 au 31 décembre 2016

Condamne la SAS [5] à payer à l'Urssaf Nord Pas-de-Calais la somme de 5.722 euros ;

Rejette la demande formée par la SAS [5] au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne la SAS [5] aux dépens.

La société a saisi la cour d'appel.

Par conclusions communiquées au greffe le14 mars 2023, soutenues oralement à l'audience, la société [5] demande à la cour :

D'infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer en ce qu'il a

Dire et juger régulière la procédure de contrôle

Condamner la société au paiement de la somme de 5.722 Euros

Débouter la société [5] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

D'annuler le redressement intégral notifié à la société [5] ;

D'annuler la mise en demeure notifiée à la société [4] et, en conséquence, le redressement notifié à la société [5] ;

De condamner l'Urssaf aux entiers frais et dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 5.000,00 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

A titre subsidiaire

D'infirmer le jugement en ce qu'il a :

Dit et jugé fondé la mise en demeure du 6 décembre 2018

Condamné la société au paiement de 5.722 Euros,

Dit et jugé fondé le redressement relatif à l'année 2016,

Condamné la société au paiement de 946 Euros,

Débouté la société [5] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

D'annuler la mise en demeure notifiée à la société [5] ;

A titre infiniment subsidiaire d'annuler le redressement de 946 Euros au titre de 2016 ou à tout le moins le réduire à la somme de 691,77 Euros ;

De condamner l'Urssaf aux entiers frais et dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 5.000,00 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Par conclusions visée au greffe le14 mars 2023et soutenues oralement à l'audience, l'Urssaf demande à la cour de :

Confirmer le jugement dont appel,

Débouter la société [5] de ses demandes contraires,

Condamner la société [5] à payer à l'Urssaf NORD PAS DE CALAIS la somme de 800,00 au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamner la société [5] aux dépens

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des prétentions et moyens.

Motifs

La société [5] sollicite à titre principal l'annulation de l'entier redressement.

Sur le non-respect de la procédure applicable

La société reproche à l'Urssaf d'avoir fait application des dispositions de l'article R 243-59 du Code de la sécurité sociale alors que la procédure concerne la mise en 'uvre de la solidarité financière et non un contrôle direct de la société.

En l'espèce, il y a lieu de rappeler que l'article R.243-59 du Code de la sécurité sociale dispose

l.-Tout contrôle effectué en application de l'article L. 243-7 est précédé, au moins quinze jours avant la date de la première visite de l'agent chargé du contrôle, de l'envoi par l'organisme effectuant le contrôle des cotisations et contributions de sécurité sociale d'un avis de contrôle.

Toutefois, l'organisme n'est pas tenu à cet envoi dans le cas où le contrôle est effectué pour rechercher des infractions aux interdictions mentionnées à l'article L. 8221-1 du code du travail. Dans ce dernier cas, si l'organisme entend poursuivre le contrôle sur d'autres points de la réglementation, un avis de contrôle est envoyé selon les modalités définies au premier alinéa.

Lorsque la personne contrôlée est une personne morale, l'avis de contrôle est adressé à l'attention de son représentant légal et envoyé à l'adresse du siège social de l'entreprise ou le cas échéant à celle de son établissement principal, telles que ces informations ont été préalablement déclarées. Lorsque la personne contrôlée est une personne physique, il est adressé à son domicile ou à défaut à son adresse professionnelle telles que ces informations ont été préalablement déclarées.

Sauf précision contraire, cet avis vaut pour l'ensemble des établissements de la personne contrôlée.

Cet avis fait état de l'existence d'un document intitulé " Charte du cotisant contrôlé " présentant à la personne contrôlée la procédure de contrôle et les droits dont elle dispose pendant son déroulement et à son issue, sur le fondement du présent code. Il précise l'adresse électronique où ce document approuvé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, est consultable et indique qu'il est adressé au cotisant sur sa demande. Les dispositions contenues dans la charte sont opposables aux organismes effectuant le contrôle.

Il.-La personne contrôlée a le droit pendant le contrôle de se faire assister du conseil de son choix. Il est fait mention de ce droit dans l'avis prévu aux précédents alinéas.

La personne contrôlée est tenue de mettre à disposition des agents chargés du contrôle mentionnés à l'article L. 243-7 tout document et de permettre l'accès à tout support d'information qui leur sont demandés par ces agents comme nécessaires à l'exercice du contrôle.

L'agent chargé du contrôle peut demander que les documents à consulter lui soient présentés selon un classement nécessaire au contrôle dont il aura au préalable informé la personne contrôlée.

Ces agents peuvent interroger les personnes rémunérées, notamment pour connaître leurs noms et adresse ainsi que la nature des activités exercées et le montant des rémunérations y afférentes, y compris les avantages en nature.

Lorsqu'il est fait application des dispositions de l'article L. 8271-6-1 du code du travail, il est fait mention au procès-verbal d'audition du consentement de la personne entendue. La signature du procès-verbal d'audition par la personne entendue vaut consentement de sa part à l'audition.

III.-A l'issue du contrôle ou lorsqu'un constat d'infraction de travail dissimulé a été transmis en application des dispositions de l'article L. 8271-6-4 du code du travail afin qu'il soit procédé à un redressement des cotisations et contributions dues, les agents chargés du contrôle mentionnés à l'article L. 243-7 communiquent au représentant légal de la personne morale contrôlée ou au travailleur indépendant une lettre d'observations datée et signée par eux mentionnant l'objet du contrôle réalisé par eux ou par d'autres agents mentionnés à l'article L. 8271-1-2 du code du travail, le ou les documents consultés, la période vérifiée, le cas échéant, la date de la fin du contrôle et les observations faites au cours de celui-ci.

Lorsqu'une infraction mentionnée à l'article L. 8221-1 du code du travail a été constatée, la lettre d'observations mentionne en outre

1 0 La référence au document prévu à l'article R. 133-1 ou les différents éléments listés au premier alinéa de cet article lorsque l'infraction a été constatée à l'occasion du contrôle réalisé par eux

20 La référence au document mentionné à l'article R. 133-1 ainsi que les faits constatés par les agents de contrôle mentionnés à l'article L. 8271-1-2 du code du travail lorsque le constat d'infraction de travail dissimulé a été transmis en application des dispositions de l'article L. 8271-6-4 du code du travail.

Les observations sont motivées par chef de redressement. A ce titre, elles comprennent les considérations de droit et de fait qui constituent leur fondement et, le cas échéant, l'indication du montant des assiettes correspondant ainsi que pour les cotisations et contributions sociales l'indication du mode de calcul et du montant des redressements et des éventuelles majorations et pénalités définies aux articles L. 243-7-2, L. 243-7-6 et L. 243-77 qui sont envisagés.

Le montant des redressements indiqué dans la lettre d'observations peut être différent du montant évalué le cas échéant dans le document mentionné à l'article R. 133-1. S'il est inférieur, il est procédé sans délai à la mainlevée des éventuelles mesures conservatoires prises en application de l'article R. 133-1-1 à hauteur de la différence entre ces deux montants. S'il est supérieur, l'organisme peut engager des mesures conservatoires complémentaires dans les conditions prévues au même article à hauteur de la différence entre ces deux montants.

En cas de réitération d'une pratique ayant déjà fait l'objet d'une observation ou d'un redressement lors d'un précédent contrôle, la lettre d'observations précise les éléments caractérisant le constat d'absence de mise en conformité défini à l'article L. 243-7-6. Le constat d'absence de mise en conformité est contresigné par le directeur de l'organisme effectuant le recouvrement.

La période contradictoire prévue à l'article L. 243-7-1 A est engagée à compter de la réception de la lettre d'observations par la personne contrôlée, qui dispose d'un délai de trente jours pour y répondre. La lettre mentionne la possibilité de se faire assister d'un conseil de son choix.

Dans sa réponse, la personne contrôlée peut indiquer toute précision ou tout complément qu'elle juge nécessaire notamment en proposant des ajouts à la liste des documents consultés.

Lorsque la personne contrôlée répond avant la fin du délai imparti, l'agent chargé du contrôle est tenu de répondre. Chaque observation exprimée de manière circonstanciée par la personne contrôlée fait l'objet d'une réponse motivée. Cette réponse détaille, par motif de redressement, les montants qui, le cas échéant, ne sont pas retenus et les redressements qui demeurent envisagés.

IV.-A l'issue du délai mentionné au huitième alinéa du III ou des échanges mentionnés au III, afin d'engager la mise en recouvrement des cotisations, des majorations et pénalités faisant l'objet du redressement, l'agent chargé du contrôle transmet à l'organisme effectuant le recouvrement le rapport de contrôle faisant état de ses observations, accompagné, s'il y a lieu, de la réponse de l'intéressé et de son propre courrier en réponse.

Le cas échéant, l'organisme de recouvrement communique également les observations ne conduisant pas à redressement mais appelant la personne contrôlée à une mise en conformité en vue des périodes postérieures aux exercices contrôlés, et exposant cette personne, si elle n'y procède pas, aux dispositions du septième alinéa du III du présent article.

Lorsqu'un solde créditeur en faveur de la personne contrôlée résulte de l'ensemble des points examinés, l'organisme le lui notifie et effectue le remboursement dans un délai maximum de quatre mois suivant sa notification.

La période contradictoire prévue à l'article L. 243-7-1 A prend fin à la date de l'envoi de la mise en demeure ou de l'avertissement mentionnés à l'article L. 244-2 du présent code.

Les dispositions du chapitre Il du titre IV du livre Ier sont applicables aux observations de l'organisme ainsi qu'à l'avis de crédit, mentionnés respectivement aux deuxième et troisième alinéas du présent IV.

V. Les documents mentionnés au présent article sont adressés à la personne contrôlée selon les modalités définies au troisième alinéa du l.

Selon l'Urssaf, cet article n'est pas réservé au contrôle d'assiette comptable sur place. Il s'applique également au redressement lié au constat d'une situation de travail dissimulé et donc à la solidarité financière.

Les dispositions de l'article R 133-8 du code de la sécurité sociale ne s'appliquent qu'à l'employeur ou au travailleur indépendant faisant l'objet d'un redressement consécutif à un constat de travail dissimulé, tandis que celles de l'article L 8222-1 du code du travail s'appliquent au donneur d'ordre.

Il n'existe pas de règles de procédure spécifiques au recouvrement auprès du donneur d'ordre tenu solidairement des cotisations dues pour le cocontractant ayant fait l'objet d'un procès-verbal pour délit de travail dissimulé.

La procédure résulte des exigences combinées des dispositions du code du travail en ses articles L 8222-1 et suivants et de celles du code de la sécurité sociale régissant les pouvoirs de contrôle et de redressement des organismes, dont l'article R 243-59 alinéa 5 destinées à garantir le respect du contradictoire.

Dès lors, le visa par l'Urssaf de l'article R 243-59 du code de la sécurité sociale était fondé et ne constitue pas une atteinte aux droits de la société [5].

Il ressort des pièces produites que la société [5], si elle conteste la référence aux textes du contrôle lié à la solidarité du donneur d'ordre, n'établit aucun grief se contentant de procéder par affirmations. Dans ces conditions il y a lieu de rejeter ce moyen.

Sur l'absence de communication des éléments de la procédure

La société fait grief à l'Urssaf de ne pas lui avoir communiqué le procès-verbal de travail dissimulé.

Il résulte des articles L8271-1 et suivants du Code du travail que les infractions constitutives de travail illégal sont recherchées et constatées par les agents de contrôle qui sont notamment les officiers et agents de police judiciaire.

Ces agents communiquent les procès-verbaux de travail dissimulé aux Urssaf qui procèdent à la mise en recouvrement des cotisations et contributions sur la base des informations contenues dans lesdits procès-verbaux.

En conséquence, dans la mise en 'uvre du redressement consécutif au constat de travail dissimulé, l'Urssaf a pour seule obligation, avant la décision de redressement, d'exécuter les formalités assurant le respect du principe de la contradiction par l'envoi d'un document rappelant les références du procès-verbal pour travail dissimulé, la nature, le mode de calcul et le montant des redressements envisagés.

En l'espèce, la société a pu se défendre et former des recours à réception de la mise en demeure, la société a pu saisir la commission de recours amiable, puis les juridictions de sécurité sociale.

La communication du procès-verbal de travail dissimulé ne s'impose que devant le juge judiciaire si le donneur d'ordre conteste la réalité ou le contenu du procès-verbal de travail dissimulé qui fonde la procédure. En revanche, la mise en 'uvre de la solidarité financière du donneur d'ordre n'exige pas la communication préalable du procès-verbal de constat de travail dissimulé. (2e Civ., 6 avril 2023, pourvoi n° 21-17.173)

Il y a donc lieu de rejeter ce moyen.

Sur la communication des éléments en cause d'appel et la nullité de la mise en demeure notifiée à la société [4]

Au vu des pièces fournies par l'Urssaf dans le cadre du contrôle de la société [4], la société [5] reproche à l'Urssaf de ne pas mentionner toutes les périodes auxquelles le contrôle se rapporte, de ne pas reprendre le montant des cotisations reprises dans la lettre d'observations et de ne pas mentionner précisément la nature des cotisations. Elle conclut à la nullité de la procédure à l'égard de la société [4].

Elle s'appuie en particulier sur la lettre d'observations notifiée à la société [4] et la mise en demeure notifiée à la société [4].

La société relève que l'année 2012 mentionnée dans le cadre des cotisations n'est pas visée pour les majorations. Elle ne démontre cependant pas en quoi cette omission serait défavorable à l'entreprise contrôlée. Par ailleurs, elle relève la minoration du montant du redressement entre les lettres d'observation et la mise en demeure. La cour ne peut que constater qu'elle ne démontre pas en quoi cette situation a porté préjudice dans le cadre de la procédure à l'entreprise contrôlée et pourrait constituer à son égard une cause de nullité du redressement. Elle reproche enfin aux documents de ne pas préciser la nature des cotisations alors même que les pièces produites sont suffisamment précises.

La société soutient que la mise en demeure est irrégulière car elle ne permet pas au cotisant de comprendre son obligation. Elle précise que la mention « Régime Général » dans la rubrique « nature des cotisations » doit être considérée insuffisante, en effet A la date du redressement notifié, seule la réduction générale de cotisations (réduction Fillon) était visée. Enfin, le redressement vise la cotisation FNAL qui ne constitue pas une cotisation du régime général mais un impôt.

Dans la présente procédure la mise en demeure a été précédée d'une lettre d'observations, d'une réponse de l'employeur et d'une réplique de l'inspecteur du recouvrement de sorte que la société était parfaitement en mesure de connaître la nature, la cause et l'étendue de leurs obligations, en conséquence il y a lieu de rejeter ce moyen.

Sur la période concernée par le travail dissimulé

La société [5] reproche à la lettre d'observations du 21juillet 2017 adressée à la société [4] de ne pas mentionner précisément la période faisant l'objet du redressement, critiquant le document en ce qui fait simplement référence à des années d'activités sans autres détails.

L'Urssaf quant à elle estime que la lettre d'observations vise parfaitement les périodes de redressement concernées, savoir les années 2013, 2014, 2015 et 2016 qui sont celles durant lesquelles la société [5] a confié du travail à la société [4] et durant lesquelles cette dernière a commis des faits constitutifs de travail dissimulé.

l'article L. 244-11 du Code de la sécurité sociale qui dispose

En cas de constatation d'une infraction de travail illégal par procès-verbal, les délais mentionnés aux articles L. 244-3, L. 244-8-1 et L. 244-9 sont portés à cinq ans.

La cour ne peut constater que les périodes précisées dans la lettre d'observation sont conformes aux règles de prescription des cotisations en matière de travail illégal issues de l'article L. 244-11 du Code de la sécurité sociale.

Sur le mode d'évaluation

La société [5] considère qu'il y avait lieu d'appliquer le mode de calcul préconisé par la circulaire du 31 décembre 2005 qui précise« Pour les dettes sociales (rémunérations et cotisations sociales), le prorata est calculé par rapport au temps de travail et à la masse salariale affectés à la réalisation de la prestation irrégulière

La société [5] reproche à l'Urssaf d'avoir employé un tout autre calcul sans même en informer au préalable la société.

En pratique, les services de l'Urssaf ont évalué le redressement à partir du chiffre d'affaires total de la société [4] et celui résultant des contrats passés avec la société [5]

Cependant L'article L8222-3 du Code du travail invite à calculer la part du redressement due par le donneur d'ordre à « proportion de la valeur des travaux réalisés, des services fournis, du bien vendu et de la rémunération en vigueur dans la profession. »

L'inspecteur du recouvrement a expliqué dans la lettre d'observations avoir chiffré le redressement au prorata du chiffre d'affaires HT réalisé pour le compte de la société [5] par la société [4] par rapport à l'ensemble du chiffre d'affaires HT facturé par cette société au titre des années 2013, 2014, 2015 et 2016.

Il ressort enfin des pièces produites par l'Urssaf que la circulaire DILTI du 31 décembre 2005 relative à la solidarité financière des donneurs d'ordre n'est pas opposable à l'Urssaf.

En effet, il ressort de l'article L. 243-6-2 du Code de la sécurité sociale que pour être opposable lors d'un contrôle la circulaire doit émaner du ministère en charge de la sécurité sociale. En pratique, cette circulaire porte la mention direction de la Sécurité sociale (DSS).

La circulaire devra également être régulièrement publiée au journal officiel du ministère de la santé si elle est antérieure au 1er mai 2009. Les circulaires postérieures au 1er mai 2009 doivent être publiées sur le site internet www.circulaires.gouv.fr.

La circulaire DILTI du 31 décembre 2005 n'ayant pas été publiée au bulletin officiel du ministère de la santé ne remplit pas ces conditions.

En conséquence, il y a lieu de rejeter ce moyen.

Sur les montants erronés des chiffres d'affaires de la SAS [5]

La société prétend que le chiffre d'affaires réalisé par la société [4] pour le compte de la société [5] est erroné.

Elle indique que l'Urssaf a retenu un chiffre d'affaires 2014 de 8 550,00 € alors que la société enregistre dans sa comptabilité un chiffre de 8 592,75 €

Cependant l'inspecteur du recouvrement a répondu que le chiffrage avait été réalisé après un contrôle au sein du cabinet comptable de la société [4] avec exploitation de toutes les factures de 2012 à 2016. Il s'avère par ailleurs que le chiffre retenu par l'inspecteur est minoré par rapport au chiffre retenu par la société. En conséquence, la société ne démontre en aucune manière le préjudice résultant de cette situation qui lui est favorable il y a lieu dès lors de rejeter ce moyen.

Sur la nullité de la mise en demeure du 6 Décembre 2018

L'article R. 244-1 du code de la sécurité sociale précise : L'avertissement ou la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s'y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.

Lorsque la mise en demeure ou l'avertissement est établi en application des dispositions de l'article L. 243-7 le document mentionne au titre des différentes périodes annuelles contrôlées les montants notifiés par la lettre d'observations corrigés le cas échéant à la suite des échanges entre la personne contrôlée et l'agent chargé du contrôle. La référence et les dates de la lettre d'observations et le cas échéant du dernier courrier établi par l'agent en charge du contrôle lors des échanges mentionnés au III de l'article R. 243-59 figurent sur le document. Les montants indiqués tiennent compte des sommes déjà réglées par la personne contrôlée. (...)

La société soutient que la mise en demeure qui lui a été adressée, est irrégulière car elle ne permet pas au cotisant de comprendre son obligation la mise en demeure notifiée en date du 6 Décembre 2018 détaille des calculs incompréhensibles.

A la lecture du tableau établi par le contrôleur dans sa mise en demeure, la société [5] estime être dans l'impossibilité de comprendre les sommes réclamées.

La cour observe que si la mise en demeure peut comporter des erreurs de calcul, cela ne met pas en cause la régularité de ce document dont le contenu et les erreurs qui peuvent s'y attacher ont la possibilité d'être soumises à la commission de recours amiable et au contentieux.

La société retient en particulier des erreurs dans le tableau relatif à l'année 2014, dans ses conclusions, l'Urssaf reconnaît une erreur dans le tableau mais elle justifie la validité du résultat final pour une somme de 1061 € en développant dans ses conclusions sa formule de calcul. La cour observe que si la société relève l'erreur dans le tableau de la mise en demeure, elle ne conteste pas les modalités de calcul de l' Urssaf pour l'année 2014 et son résultat final.

Sur le redressement infondé sur l'année 2016

La société conteste la mise en demeure qui fait état d'une somme de 75.000,00 euros au titre de l'année 2016, et ce en application de la lettre d'observations du 10 août 2018 et du courrier de l'Urssaf du 6 décembre 2018. Elle estime qu'aucun manquement de la société [5] n'a pu être caractérisé au titre de l'année 2016, puisque l'Urssaf avait fait le choix de ne pas contrôler cette année, en effet, dans leur courrier du 14 septembre 2017, les services de l'Urssaf sollicitaient l'attestation de vigilance et l'extrait Kbis pour la période de 2013 à 2015 uniquement.

A aucun moment, il n'a été demandé le moindre élément concernant l'année 2016.

La cour relève que dans ce courrier, l'inspecteur de recouvrement réclamait deux documents à la société en qualité de maître d''uvre, d'une part un extrait Kbis d'autre part une attestation de fourniture de déclarations sociales et de paiement des cotisations étant précisé que ces deux documents devaient avoir moins de six mois.

La demande étant faite en septembre 2017, l'attestation devant être produite aurait englobé l'année 2016 si elle avait été fournie. En l'occurrence, la société ne produit aucune pièce en ce sens tant devant le premier juge que dans la présente instance alors même que l'Urssaf indique qu'elle abandonnerait son recouvrement en cas de production d'une telle pièce. La cour relève par ailleurs que la lettre d'observations du 10 août 2018 est suffisamment précise sur les années concernées indiquant : « Sur la période 2014-2016, le montant de la réduction générale de cotisations patronales que vous avez déclaré est supérieur au plafond de 75000 euros. Dans ces conditions, le rappel est limité à ce montant. Il est imputé sur l'année 2016 ».

En conséquence, il y a lieu de rejeter les demandes la société [5] à ce titre.

Sur l'article 700 et sur les dépens

La société [5] qui succombe en ses prétentions, est déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile, et condamnée au paiement des dépens conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.

Il y a lieu par ailleurs de faire droit à la demande de l'Urssaf au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner la société [5] à lui verser 800 €.

Par ces motifs

LA COUR, statuant par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire, en dernier ressort,

Déboute la société la société [5] de l'ensemble de ses demandes,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions critiquées,

Condamne la société aux dépens,

Condamne la société [5] à payer à l'Urssaf la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 20/01461
Date de la décision : 25/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-25;20.01461 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award