ARRET
N°
[Y]
C/
S.A.S. ENTREPRISE [X] [C]
copie exécutoire
le 26 avril 2023
à
Me Wallart
Me Berthaud
LDS/MR
COUR D'APPEL D'AMIENS
5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE
ARRET DU 26 AVRIL 2023
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N° RG 22/02171 - N° Portalis DBV4-V-B7G-INZY
JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BEAUVAIS DU 04 AVRIL 2022 (référence dossier N° RG 21/00242)
PARTIES EN CAUSE :
APPELANT
Monsieur [H] [Y]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représenté, concluant par Me Carl WALLART de la SELARL GAUBOUR WALLART RUELLAN, avocat au barreau D'AMIENS
ET :
INTIMEE
S.A.S. ENTREPRISE [X] [C] agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège :
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée, concluant par Me Thierry BERTHAUD de la SELARL BERTHAUD ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de BEAUVAIS substitué par Me Gaelle DEFER, avocat au barreau de BEAUVAIS
DEBATS :
A l'audience publique du 01 mars 2023, devant Madame Laurence de SURIREY, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, l'affaire a été appelée.
Madame [K] [B] indique que l'arrêt sera prononcé le 26 avril 2023 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Malika RABHI
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Madame [K] [B] en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :
Mme Laurence de SURIREY, présidente de chambre,
Mme Caroline PACHTER-WALD, présidente de chambre,
Mme Eva GIUDICELLI, conseillère,
qui en a délibéré conformément à la Loi.
PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :
Le 26 avril 2023, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Laurence de SURIREY, Présidente de Chambre et Mme Malika RABHI, Greffière.
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DECISION :
M. [Y] a été embauché par la société [X] [C] et fils (la société ou l'employeur) le 27 août 2019, d'abord par contrat à durée déterminée, puis par contrat à durée indéterminée, en qualité de couvreur.
Le contrat était régi par la convention collective nationale des ouvriers du bâtiment.
Le 27 novembre 2020, le salarié a présenté sa démission. Dès le lundi 30 novembre suivant, il a contesté la rupture.
Il a saisi le conseil de prud'hommes de Beauvais le 8 octobre 2021 pour obtenir la requalification de sa démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse et le paiement de diverses sommes.
Par jugement du 4 avril 2022, le conseil de prud'hommes a constaté que sa démission était claire et sans équivoque, l'a débouté de l'ensemble de ses demandes et condamné aux dépens. Il a rejeté les demandes présentées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [Y], qui est régulièrement appelant de ce jugement, par conclusions remises le 26 juillet 2022, demande à la cour de :
- Infirmer en toutes ses dispositions la décision rendue par le conseil de prud'hommes,
- Dire que la rupture du contrat de travail doit produire les effets d'un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,
- Condamner la société à lui payer les sommes de :
- 701,30 euros à titre d'indemnité de licenciement,
- 2 244,15 euros brut à titre d'indemnité de préavis, soit l'équivalent d'un mois de salaire,
- 224,42 euros brut au titre des congés payés y afférent,
-4 488,30 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- 2 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner la société à lui communiquer l'ensemble des documents de fin de contrat conformes à la décision à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement,
- Condamner la société en l'ensemble des frais et dépens de la procédure.
Il soutient que les circonstances ayant entouré la rupture du contrat de travail confirment que sa démission a été extorquée par son employeur qui a profité de son état de faiblesse psychologique, qu'en effet, il rencontrait des problèmes d'ordre personnel et sentimental qui l'ont conduit à s'absenter de son poste de travail pour cause de maladie non professionnelle à plusieurs reprises courant novembre 2020, que ne supportant pas ses absences répétées l'employeur l'a contraint, au cours d'un rendez-vous qui s'est tenu le 27 novembre 2020, à établir un courrier de démission qui lui a été dicté par l'épouse du directeur de l'entreprise, qu'il a contesté cette rupture le premier jour ouvrable ayant suivi la remise de cette lettre ce qui permet de considérer cette dernière comme équivoque et que par conséquent la rupture du contrat de travail doit produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Aux termes de ses conclusions déposées le 25 octobre 2022, la société demande à la cour de :
A titre principal :
- Confirmer le jugement entrepris en toutes ces dispositions,
- Condamner M. [Y] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Le condamner aux entiers dépens,
A titre subsidiaire :
- Fixer la moyenne du salaire à la somme de 1 981,08 euros,
- Fixer les indemnités de fin contrat à la somme de :
o 1 981,08 euros brut au titre de l'indemnité de préavis,
o 198,10 euros brut au titre des congés payés afférents,
- Réduire l'indemnité sollicitée au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse à une somme qui ne pourrait être supérieure à un mois de salaire,
- Débouter M. [Y] du surplus de ses demandes.
Elle fait valoir que la terminologie adoptée dans la lettre, la demande de dispense d'exécution du préavis et l'absence de réserve ne permettent pas de retenir que la démission est entachée d'équivoque, que la preuve d'une quelconque fragilité psychologique qui aurait conduit le salarié à la démission n'est pas non plus prouvée et que si le salarié avait vraiment eu l'intention de revenir sur sa démission, il serait revenu travailler le 30 novembre et n'aurait pas attendu 10 mois pour saisir le conseil de prud'hommes.
Il est renvoyé aux conclusions des parties pour le détail de leur argumentation.
EXPOSE DES MOTIFS :
La démission est l'acte par lequel le salarié fait connaître à l'employeur sa décision de résilier son contrat de travail. Elle doit être librement consentie, c'est-à-dire que le salarié doit avoir la capacité de démissionner et que son consentement ne doit pas avoir été vicié. A défaut, la démission est nulle et la rupture du contrat s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
La démission n'est pas librement consentie lorsqu'elle est donnée dans un état psychologique anormal. Sont également illégitimes les démissions données sous la contrainte ou la pression de l'employeur, notamment en cas de menace d'une plainte pénale ou d'un licenciement, lorsque le salarié s'est trouvé dans une situation d'infériorité ou d'intimidation.
Lorsqu'elle est notifiée sans réserve, la démission peut être considérée comme équivoque si elle est remise en cause dans un délai raisonnable.
En l'espèce, la lettre de démission, remise en main propre le 27 novembre 2020 à 17 heures, est ainsi rédigée : « par cette lettre, je vous informe de ma décision de quitter le poste de ouvrier couvreur que j'occupe de le 27/08/2019 dans votre entreprise. J'ai bien noté que les termes de mon contrat de travail prévoi un préavis de 15 jours, cependant et par dérogation, je sollicite la possibilité de ne pas effectuer ce préavis et par conséquent, de quitter l'entreprise ce vendredi 27 novembre 2020 date de la lettre de démission, et mettan ainsi fin à mon contrat de travail ».
Cette lettre ne comporte aucune réserve, toutefois la démission ayant été remise en cause dès le 30 novembre par l'intermédiaire d'un avocat, elle peut être considérée comme équivoque.
Il incombe cependant encore au salarié de rapporter la preuve de ses allégations selon lesquelles l'employeur a profité de sa situation de faiblesse psychologique pour le contraindre à la démission.
Or, la seule pièce qu'il verse aux débats est un certificat de son médecin traitant, qui certifie qu'il l'a consulté le 12 novembre dans un état d'anxiété ayant nécessité la mise en place d'un traitement médicamenteux et la prescription d'un arrêt de travail de neuf jours, ne suffit pas à établir cette preuve.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de l'intégralité de ses demandes.
Perdant le procès en appel, il doit en supporter les dépens et sera condamné à payer à la société la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Sa demande présentée sur le même fondement sera rejetée.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement en ses dispositions soumises à la cour,
Y ajoutant,
Condamne M. [H] [Y] à payer à la société entreprise [X] [D] la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette sa demande présentée sur le même fondement,
Le condamne aux dépens d'appel
LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.