ARRÊT N°
DU
12 Avril 2023
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N° RG 18/04500 -
N° Portalis DBV4-V-B7C-HD4O
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COMMUNAUTE D AGGLOMERATION [Localité 7] METROPOLE
C/
[F] [X] veuve [T], [L] [T], SCI CEP, représentée par son liquidateur amiable Me [C] RONGEOT, [D] [T], DIRECTION DÉPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES DE LA SOMME
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COUR D'APPEL D'[Localité 7]
CHAMBRE DES EXPROPRIATIONS
JUGEMENT DU JUGE DES EXPROPRIATIONS DU DÉPARTEMENT DE LA SOMME EN DATE DU 19 octobre 2018
APPELANT :
COMMUNAUTE D'AGGLOMÉRATION [Localité 7] METROPOLE
[Adresse 14]
[Localité 7]
Représentant : Me Juliette DELGORGUE, avocat au barreau de LILLE
INTIMES :
Madame [F] [X] veuve [T]
DÉCÉDÉE
Madame [L] [T]
[Adresse 3]
[Localité 7]
Monsieur [D] [T]
[Adresse 15]
[Localité 6]
Représentant : Me Marie-Pierre ABIVEN, avocat au barreau d'[Localité 7]
SCI CEP, représentée par son liquidateur amiable Me [C] RONGEOT
[Adresse 4]
[Localité 7]
DIRECTION DÉPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES DE LA SOMME
pôle gestion publique - service des évaluations
[Adresse 1]
[Localité 7]
non comparanteeni représentée.
DÉBATS : A l'audience publique de la Chambre des Expropriations tenue à la Cour d'Appel d'[Localité 7] le 8 Février 2023, ont été entendus :
Monsieur BRILLET, en son rapport,
Maîtres [S] DELGORGUE, ABIVEN, et RONGEOT représentant les parties en leurs explications à l'appui de leurs mémoires respectifs régulièrement notifiés,
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur BRILLET, Président de la Chambre des Expropriations,
Monsieur ADRIAN et Madame SEGOND, Conseillers à la Cour, désignés par ordonnance de Madame la Première Présidente en date du 16 décembre 2022,
Qui en a délibéré conformément à la loi et renvoyé l'affaire à l'audience du 12 Avril 2023 pour prononcer arrêt et indiqué aux parties que l'arrêt serait rendu par mise à disposition de la copie au Greffe.
Madame PILVOIX, Greffier.
ARRÊT
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
Pour les besoins de la réalisation d'un projet de re-qualification urbaine et commerciale, déclaré d'utilité publique, la communauté d'agglomération d'[Localité 7] - [Localité 7] métropole (l'expropriante) a engagé une procédure d'expropriation de l'ensemble immobilier constituant le centre commercial du Colvert situé à [Adresse 8], cadastré [Cadastre 12] et [Cadastre 13], appartenant à la SCI [Adresse 9] (la SCI) et placé sous le régime de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965.
[F] [T], depuis décédée, et ses enfants, Mme [L] [T] et M. [D] [T] (les consorts [T]), sont titulaires de parts de la SCI en vertu desquelles ils bénéficient de l'exploitation du lot n° 113, représentant 3138/91236 millièmes de copropriété.
L'ordonnance d'expropriation du juge de l'expropriation de la Somme a été rendue le 28 septembre 2017.
Une offre d'acquisition pour le lot n° 113 a été notifiée à M. [P] en sa qualité de mandataire liquidateur de la SCI et aux consorts [T].
Faute d'accord sur l'indemnisation, l'expropriante a saisi le juge de l'expropriation de la Somme.
Par jugement du 19 octobre 2018, le juge de l'expropriation a fixé l'indemnité à la somme de 96 027,40 euros devant être versée à la SCI à charge pour elle de rétrocéder la valeur de leurs parts aux consorts [T], se décomposant comme suit :
- 69 660 euros au titre de l'indemnité principale pour les parties privatives,
- 5 889 euros à titre d'indemnité accessoire pour la quote-part des parties communes,
- 7 966 euros à titre d'indemnité de remploi sur les parties privatives,
- 12 512,40 euros à titre d'indemnité pour perte de loyers.
Le jugement a été signifié le 9 novembre 2018.
Par déclaration adressée au greffe par lettre recommandée avec demande d'avis de réception postée le 7 décembre 2018, l'expropriante a fait appel du chef de l'indemnisation de la quote-part des parties communes.
Par un arrêt avant-dire droit du 9 janvier 2020, la cour d'appel d'[Localité 7] a ordonné une expertise aux fins de rechercher en tenant compte de la nature des activités du centre commercial, de sa situation et de l'état des locaux, la valeur des parties communes à la date du 19 octobre 2018, et réservé les dépens.
[F] [T] est décédée le 6 septembre 2021.
M. [W] a déposé son rapport le 19 juillet 2022.
Le 28 novembre 2022, l'expropriante a remis au greffe ses conclusions et pièces, qui ont été notifiées le lendemain aux parties, par lettres recommandées avec demande d'avis de réception.
Le 23 janvier 2023, M. [P] a remis au greffe un courrier, qui a été notifié le lendemain aux parties, par lettres recommandées avec demande d'avis de réception.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience du 8 février 2023.
Le 8 février 2023, les consorts [T] ont remis au greffe leurs conclusions.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Aux termes de ses conclusions développées lors de l'audience, l'expropriante demande à la cour :
- d'infirmer le jugement en ce qu'il a accordé une indemnité accessoire pour la quote-part des parties communes d'un montant de 5 889 euros,
- de rejeter la demande de Mme et M. [T] à ce titre,
- de condamner la SCI et Mme et M. [T] à lui payer la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle soutient que la jurisprudence considère de manière constante que dans le cadre d'une emprise totale sur une copropriété, l'autorité expropriante devient propriétaire de la totalité de l'immeuble et que le terrain nu compris dans les parties communes n'a pas de valeur intrinsèque, même s'il s'agit d'un espace utilisable comme parking, et ne fait donc pas l'objet d'une indemnisation distincte. Il ne peut pas être prévu une indemnité distincte pour les parties privatives et les parties communes, puisque celles-ci sont indissociables et ne peuvent être évaluées séparément. Il n'y a donc pas lieu de faire droit à la demande de valorisation distincte des parties communes et le jugement doit donc être censuré pour y avoir procédé. Subsidiairement, elle conteste la méthode et les conclusions du rapport d'expertise ayant retenu une valeur unitaire fixée à 55 euros/m².
M. [P], ès qualités de liquidateur amiable de la SCI, demande à la cour de fixer l'indemnité au titre des parties communes sur la base de 267,45 euros du m² pour 3713 m² sans aucune décote. Il sollicite que l'indemnité lui soit remise à charge de la redistribuer aux associés de la SCI.
Aux termes de leurs conclusions développées lors de l'audience, Mme et M. [T] demandent à la cour :
- d'infirmer le jugement en ce qu'il a alloué une indemnité d'expropriation de 5 889 euros pour l'expropriation de la quote-part des parties communes,
- de condamner l'expropriante à leur payer une somme de 7 023,83 euros conformément au rapport d'expertise au titre de l'expropriation des 3138/91236 millièmes de parties communes,
- d'ordonner à l'expropriante d'avoir à régler cette somme directement entre les mains de Me [B], notaire en charge de la succession,
- de condamner l'expropriante aux dépens comprenant les frais d'expertise et à leur verser la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Ils font valoir qu'ils sont propriétaires du lot n° 113 et sollicitent, à ce titre, que l'indemnité d'expropriation pour leur quote-part des parties communes soit versée directement entre les mains du notaire chargé de la succession.
Le commissaire du gouvernement n'a pas conclu en suite du dépôt du rapport d'expertise.
Par note en délibéré du 17 février 2023, autorisée par la cour, l'expropriante conclut à l'irrecevabilité des conclusions des consorts [T] sur le fondement de l'article R. 311-26 du code de l'expropriation.
Par note en délibéré du 24 février 2023, autorisée par la cour, M. [P] conteste la qualité de propriétaires de leur lot des consorts [T] à défaut d'acte de retrait et s'oppose au paiement de l'indemnité entre les mains du notaire en charge de la succession [T].
MOTIVATION
1. Sur la recevabilité des conclusions des consorts [T]
Aux termes de l'article R. 311-26, alinéa 2, du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, à peine d'irrecevabilité, relevée d'office, l'intimé dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant.
Les conclusions de Mme et M. [T], déposées seulement à l'audience du 8 février 2023, sont tardives et seront donc déclarées irrecevables.
2. Sur le cadre de l'opération d'expropriation
La procédure administrative puis judiciaire a été menée depuis l'origine comme en matière d'expropriation d'un immeuble soumis au statut de la copropriété.
1.1 Selon un arrêté préfectoral du 16 août 2017, dont aucune partie ne conteste le caractère définitif, la déclaration de cessibilité au profit de la Communauté d'agglomération d'[Localité 7] métropole porte sur des immeubles (parcelles et lots de copropriété) désignés dans un état parcellaire et deux plans annexés.
Cet état parcellaire liste ainsi un ensemble d'immeubles cadastrés [Cadastre 10] (nature de sol ' contenance 0ha 00a 58ca ' indivision [A]-[K] propriétaire), [Cadastre 11] (nature de sol ' contenance 0ha 04a 71ca ' SCI Arkmin propriétaire), [Cadastre 12] (0ha 52a 39ca) et [Cadastre 13] (0ha 27a 67ca).
Les assiettes foncières de ces parcelles sont donc bien expropriées.
S'agissant des deux dernières, l'état parcellaire joint à l'arrêté de cessibilité désigne des « fractions d'immeubles dans une copropriété » avec « numéro du lot », « quote-part dans la propriété du sol afférente au lot » et indication du-es propriétaire-s et du-es « porteurs de parts sociales ».
C'est ainsi qu'il vise, parmi d'autres, le lot n° 113, avec pour quote-part dans la propriété du sol afférente au lot 3138/91236 millièmes et indication comme propriétaire la SCI CEP puis, en qualité de titulaires de parts sociales, les consorts [T].
1.2 Il a été engagé devant le juge de l'expropriation autant d'instances que de lots pour lesquels il n'y a pas eu d'accord sur le montant de l'indemnisation entre l'expropriante et les « propriétaires » mentionnés, l'ensemble en conformité dans cette hypothèse avec les articles 16-2 de la loi n° 65'557 du 10 juillet 1965 et L. 221-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.
1.3 L'ordonnance d'expropriation en date du 28 septembre 2017, dont aucune partie ne conteste davantage le caractère définitif, désigne comme suit « les immeubles, portions d'immeubles et droits réels » expropriés :
« Sur le terrain de la commune d'[Localité 7]:
- sol situé [Adresse 5] cadastré section [Cadastre 12] pour une superficie de 0ha 52a 39ca
- sol situé [Adresse 2] cadastré section [Cadastre 13] pour une superficie de 0ha 27a 67ca
Lot de copropriété n°113 Local commercial pour 3138/91236 millièmes ».
Soit exactement la reprise de l'arrêté de cessibilité s'agissant de ce « lot », l'ensemble en conformité avec les mentions portées sur l'état parcellaire que le juge de l'expropriation n'a pas le pouvoir de modifier.
L'ordonnance rappelle d'ailleurs que la déclaration d'utilité publique du 6 mars 2017 a été modifiée par arrêté préfectoral du 10 août suivant, lequel a prévu le retrait des emprises expropriées de la propriété initiale dans les immeubles soumis à la loi n° 65'557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.
1.4 Les consorts [T] n'ont d'ailleurs pas fait appel incident du jugement ayant fixé l'indemnité principale pour les parties privatives, ni formé un pourvoi contre l'arrêt avant-dire droit de cette cour du 9 janvier 2020, lequel a définitivement consacré ce cadre en ordonnant une expertise aux fins d'évaluation des parties communes.
3. Sur la demande d'indemnisation au titre des parties communes
Tant l'arrêté préfectoral de cessibilité que l'ordonnance d'expropriation ont, s'agissant de la procédure concernant le lot de copropriété n° 113, cantonné celle-ci, s'agissant des parties communes, à la seule portion correspondant aux 3138/91236 millièmes.
2.1 Le principe d'une indemnisation de la valeur des parties communes distincte de l'indemnisation du lot privatif est contesté par l'expropriante, rejoint sur cette question par le commissaire du gouvernement.
2.2 En application des articles 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 545 du code civil et L321-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, il importe à la cour de s'assurer que, au-delà de la méthode employée, les indemnités allouées indemnisent l'exproprié de l'intégralité de son préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation.
Il ne s'agit pas en l'espèce d'accorder une indemnité spécifique à des parties communes non dissociables des parties privées ne disposant pas d'une valeur propre. Au contraire, il s'agit d'indemniser la part de parties communes correspondant à l'assiette non bâtie des parcelles visées par l'arrêté de cessibilité et l'ordonnance d'expropriation, soit une surface non négligeable de 3 713 m². Cette assiette est parfaitement dissociable des locaux commerciaux constituant les parties privatives. Elle est par ailleurs constructible à la date de référence, même d'une façon limitée.
Ce sol commun non bâti renferme donc un potentiel de constructibilité justifiant une indemnisation. L'expropriante échoue à convaincre la cour qu'elle ne doit pas être prise en compte.
Par ailleurs, cette dernière n'établit pas comme elle le prétend que les termes privilégiés de comparaison, constitués selon elle des traités d'adhésion régularisés pour d'autres lots du centre commercial du Colvert, laissent ressortir une valeur unitaire englobant, pour chacun des lots, les parties communes et privatives.
Les traités d'adhésion produits concernent huit cessions au profit d'[Localité 7] Métropole par la SCI Boucault, la SCI Ami, les consorts [Z] et [M], les consorts [V] et [H], la SCI Karama, les consorts [J] et [O], la SCI de la Rabouillère et les consorts [E].
Aux termes de ces traités datés du 27 mars 2018, la désignation des biens telle qu'elle ressort des ordonnances d'expropriation est rappelée. Une indemnité principale correspondant à la valeur vénale des biens a été proposée et acceptée. Cette indemnité est calculée sur la base de la surface mesurée par M. [I], géomètre expert, puis pondérée en fonction de son utilité commerciale. Le métrage effectué par M. [I] pour chaque lot concerne exclusivement les parties privatives, à l'exclusion de toute référence aux parties communes.
Par ailleurs, il ressort clairement du détail de l'offre, présentée par l'expropriante dans son mémoire du 13 juillet 2017, qu'elle n'inclut en rien, directement ou indirectement, les parties communes, en tout cas les parties non bâties.
Ainsi, il est indiqué :
« L'estimation des immeubles prenant en compte le préjudice direct, matériel et certain, est établi en fonction des critères suivants :
'la consistance physique des biens (leur nature)
'la consistance juridique des biens (document d'urbanisme)
'la date de référence applicable en matière d'expropriation,
'leur occupation éventuelle ».
Le point II du mémoire « désignation des parcelles et des emprises à acquérir » se borne à mentionner la désignation cadastrale, sur les parcelles [Cadastre 12] et [Cadastre 13], le numéro du lot de copropriété (113) avec indication des millièmes de copropriété, et à intégrer deux plans, celui de l'assiette foncière de la copropriété et parcelle expropriée et celui de la cellule commerciale expropriée en précisant : « le bien à exproprier est une cellule commerciale à usage de café sise au sein d'une copropriété. Son métrage, détaillant la surface du local en fonction de l'affectation des espaces qui le composent, a été réalisé par le cabinet de géomètre expert [I] en janvier 2016. Il est inséré en annexe du mémoire ».
Ce métrage ne vise que des locaux au sous-sol, au rez-de-chaussée et en mezzanine (surface de vente, réserves, sanitaires) pour une surface de 201,40 m², pondérée par l'expropriante à 129 m².
A aucun moment les traités d'adhésion ou l'avis du domaine sur la valeur vénale du 27 septembre 2016 n'exposent en quoi les parties communes non bâties d'une surface de 3 713 m² influencent la valeur vénale au m² retenue. Ni la surface, ni la nature, ni l'affectation (parking, circulation) de ces parties communes non bâties ne sont évoquées.
Il en est de même des conclusions du Commissaire du gouvernement.
2.3 Ce dernier avance pour sa part deux arguments non décisifs pour rejeter la demande d'indemnisation.
Le premier tient au fait que l'expropriation des parties communes d'un ensemble en copropriété ouvre droit à indemnisation au profit du syndicat des propriétaires, lequel est seul habilité à présenter une demande d'indemnité. Toutefois, en l'espèce, et comme il l'indique lui-même dans ses conclusions, il n'existe aucun syndicat des copropriétaires. Celui-ci n'a concrètement pas été mis en place puisque la SCI est restée seule propriétaire.
Le second tient au fait que, s'agissant d'un immeuble en copropriété, il ne serait possible d'évaluer distinctement le terrain et les constructions que si la partie non bâtie du terrain était constructible à la date de référence au regard des règles d'urbanisme applicables.
Cependant, en l'espèce, il n'est pas contesté que les parcelles étaient classées en zone UR du PLU de la ville d'[Localité 7] à la date de référence. La constructibilité est certes limitée, ce qui influe négativement sur la valeur, mais n'est pas exclue. Le rapport d'expertise judiciaire synthétise les occupations et utilisations du sol autorisées (page 43-44)
2.4 Il résulte de tout ce qui précède que, sauf à ne pas satisfaire les dispositions de l'article L321-1 du code de l'expropriation et consacrer un enrichissement sans cause au profit de l'expropriante, c'est à juste titre que le premier juge a retenu qu'une indemnité spécifique devait être prévue et qu'elle devait correspondre à 3138/91236 de la valeur de la surface concernée (3 713 m²).
Au demeurant, s'il avait existé un syndicat de copropriété, l'action aurait été menée contre ce dernier s'agissant des parties communes, mais, en application l'article 16-1 de la loi du 10 juillet 1965, les sommes représentant leur prix se seraient in fine divisées de plein droit entre les copropriétaires dans les lots desquels figurent ces parties communes, ce proportionnellement à la quotité de ses parties afférentes à chaque lot. M. [P] es qualité aurait donc eu vocation à la même indemnisation finale.
2.5 En l'état des pièces versées au débat, la SCI CEP est bien seule propriétaire des biens immobiliers précités.
Ainsi que les motifs du précédent arrêt de cette cour l'ont d'ailleurs déjà indiqué, M. [P] est fondé à demander que l'indemnité à fixer s'agissant des parties communes lui soit remise ès qualité de liquidateur de la SCI, propriétaire du lot n°113, à charge de la redistribuer par ses soins aux associés.
3. Selon les articles L322-1 et L322-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance d'après leur consistance à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété.
3.1 Mettant en 'uvre une évaluation par comparaison à partir de quatre ventes de terrains à bâtir dans le même secteur intervenues les 8 février 2017, 4 mai 2017, 20 avril 2018 et 18 juillet 2018, l'expert judiciaire retient un prix au mètre carré de référence de 267,47 euros sur lequel, compte tenu des caractéristiques physiques (configuration, surface foncière, accessibilité, environnement) et juridiques du bien exproprié (règlement de copropriété, état descriptif de division, parties communes, plan local d'urbanisme, zone UR), il propose une décote de 80 %, soit une estimation finale de 55 euros le mètre carré.
L'estimation proposée par l'expert est contestée.
M. [P] ès qualité conteste la décote de 80 %, soutenant qu'aucun des postes de celle-ci mis en avant ne sont pertinents.
L'expropriante prétend pour sa part que la somme de 55 euros au m² est au contraire excessive, contestant les ventes prises en compte par l'expert judiciaire pour des motifs tenant à la localisation des biens en cause et à la différence de classement au PLU des parcelles concernées.
3.2 Faute d'éléments de comparaison en tous points identiques, l'expert a pris en compte des ventes antérieures au jugement dont appel relatives à des parcelles non bâties situées dans la zone nord d'[Localité 7] à une distance inférieure à 1,5 km des parcelles expropriées.
L'application d'une décote est très largement justifiée en lien notamment, parmi les éléments pris en compte par l'expert, avec le classement des parcelles expropriées en zone UR du PLU. La constructibilité est largement réduite, ce qui influence notablement à la baisse leur valeur vénale.
L'influence d'un tel classement est notamment confirmée par les deux ventes proposées à titre de comparaison par l'expropriante. L'une, postérieure au jugement comme étant intervenue les 20 et 21 décembre 2018, présente cependant les mêmes caractéristiques que celle ayant servi de fondement à la décision du premier juge (1 258 m² classée en UR pour 50 320 euros, soit 40 euros/m²). La seconde, en date du 25 juin 2018, porte sur des parcelles de terrain non bâti, également classée en UR, [Adresse 16] à [Localité 7], pour une valeur unitaire de 15 euros/m².
L'expert judiciaire écarte néanmoins à juste titre ces deux ventes. Celles-ci sont intervenues entre la commune d'[Localité 7] et un établissement public (l'OPHLM vendeur pour celle du 25 juin 2018 et l'établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux acheteur pour celle des 20 et 21 décembre 2018). La condition d'un marché de libre concurrence entre les acheteurs, sans réserves, avec une publicité suffisante n'est pas réalisée. Les valeurs de ses ventes ne reflètent pas utilement la valeur du marché.
La décote proposée d'une manière argumentée et convaincante par l'expert dans son rapport d'expertise mérite d'être consacrée, ce qui conduit la cour à retenir la valeur de 55 euros du mètre carré.
L'indemnité accessoire pour la quote-part des parties communes doit donc être fixée à la somme de 7 023,83 euros (3 713 x 55 x 3 138 / 91 236).
Le jugement est infirmé en ce sens.
4. Sur les frais du procès
Le jugement mérite confirmation en ce qui concerne les dépens.
La déclaration d'appel de l'expropriante ne conteste par le jugement en ce qui concerne sa condamnation au titre des frais irrépétibles.
L'expropriante, qui succombe en son appel, est condamnée aux dépens de la présente instance comprenant les frais d'expertise conformément à l'article 695-4° du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt réputé contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe, après débats publics, en dernier ressort,
Vu l'arrêt en date du 9 janvier 2020,
Statuant dans la limite du recours,
Déclare irrecevables les conclusions de [L] et [D] [T] remises au greffe le 8 février 2023,
Infirme le jugement, sauf en ce qui concerne les dépens de première instance,
Statuant à nouveau du chef infirmé :
Fixe l'indemnité que la Communauté d'agglomération d'[Localité 7] dénommée [Localité 7] Métropole doit verser à la SCI [Adresse 9], représentée par son liquidateur amiable, M. [P], pour la quote-part des parties communes à la somme de 7 023,83 euros,
Déboute les parties de toutes leurs autres demandes,
Condamne la Communauté d'agglomération d'[Localité 7] dénommée [Localité 7] Métropole aux dépens de l'instance d'appel.
A l'audience du 12 Avril 2023 l'arrêt a été rendu par mise à disposition au Greffe et la minute a été signée par Monsieur BRILLET, Président, et Madame PILVOIX, Greffier.
Le Greffier, Le Président,