ARRET
N°
[R]
C/
S.A.S. DIFFUSION BUREAUTIQUE DE LA SOMME
copie exécutoire
le 29/03/2023
à
CABINET D'HELLENCOURT
Me ANTON
EG/IL/SF
COUR D'APPEL D'AMIENS
5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE
ARRET DU 29 MARS 2023
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N° RG 22/00777 - N° Portalis DBV4-V-B7G-ILJN
JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AMIENS DU 26 JANVIER 2022 (référence dossier N° RG F 20/00348)
PARTIES EN CAUSE :
APPELANT
Monsieur [Y] [R]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
comparant en personne,
assisté, concluant et plaidant par Me Xavier D'HELLENCOURT de l'ASSOCIATION CABINET D HELLENCOURT, avocat au barreau d'AMIENS substituée par Me Emmanuel VERFAILLIE, avocat au barreau D'AMIENS
ET :
INTIMEE
S.A.S. DIFFUSION BUREAUTIQUE DE LA SOMME
[Adresse 2]
[Adresse 2]
représentée, concluant et plaidant par Me Laurent ANTON de la SELARL ANTON LAURENT, avocat au barreau D'AMIENS
DEBATS :
A l'audience publique du 01 février 2023, devant Mme Eva GIUDICELLI, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, ont été entendus :
- Mme Eva GIUDICELLI en son rapport,
- les avocats en leurs conclusions et plaidoiries respectives.
Mme Eva GIUDICELLI indique que l'arrêt sera prononcé le 29 mars 2023 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Isabelle LEROY
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme Eva GIUDICELLI en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :
Mme Laurence de SURIREY, présidente de chambre,
Mme Caroline PACHTER-WALD, présidente de chambre,
Mme Eva GIUDICELLI, conseillère,
qui en a délibéré conformément à la Loi.
PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :
Le 29 mars 2023, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Laurence de SURIREY, Présidente de Chambre et Mme Isabelle LEROY, Greffière.
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DECISION :
EXPOSE DU LITIGE
M. [Y] [R], né le 7 avril 1960, et M. [E], gérant de la société Diffusion bureautique de la Somme, se sont rencontrés au cours de l'été 2019 relativement à un travail de technicien informatique.
Une collaboration de quelques mois s'est alors instaurée entre la société et M. [R].
La convention collective applicable est celle des entreprises du bureau et du numérique.
L'entreprise emploie un effectif supérieur à 11 salariés.
S'estimant lié par un contrat de travail lui ouvrant droit notamment à des indemnités de rupture, M. [R] a saisi le conseil de prud'hommes d'Amiens le 9 septembre 2020.
Par jugement du 26 janvier 2022, la juridiction prud'homale a :
- dit que la relation de travail nouée entre M. [R] et la société DBS était un contrat de prestation de service et non un contrat de travail ;
- rejeté la demande de requalification du contrat en contrat de travail à durée indéterminée et débouté M. [R] de l'intégralité de ses demandes indemnitaires et accessoires subséquentes ;
- débouté la société DBS de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
- débouté les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- laissé à chacune des parties la charge de leurs propres dépens.
Par conclusions remises le 8 septembre 2022, M. [R], régulièrement appelant de ce jugement, demande à la cour de :
- infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Amiens, en l'ensemble de ses dispositions ;
- requalifier la relation de travail s'étant nouée entre la société DBS et lui en relation de travail à durée indéterminée relevant du droit de travail, sans qu'il soit besoin de constater la conclusion d'un contrat à durée indéterminée écrit ou non ;
- condamner la société à établir et à lui remettre des fiches de paye au titre de l'ensemble de la période travaillée et de régulariser auprès des organismes sociaux le versement des charges sociales et patronales dues (dont les cotisations retraites) ;
- condamner la société DBS à verser auprès de l'éventuelle mutuelle d'entreprise, les cotisations et contributions qui lui sont dues ;
- condamner la société DBS à faire le nécessaire dans un délai de 15 jours à compter de l'arrêt à intervenir sous peine d'astreinte de 500 euros par jour de retard ;
- condamner la société DBS à lui régler une indemnité de 15 000 euros au titre de la commission de l'infraction de travail dissimulé ;
- prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur et dire que cette résiliation produira les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- subsidiairement sur ce point, dans l'hypothèse où la Cour viendrait à considérer qu'il a démissionné le 11 mai 2020, requalifier cette démission en prise d'acte de la rupture de la relation de travail aux torts de l'employeur et dire que cette prise d'acte produira les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- en tout état de cause, condamner la société DBS à lui régler les indemnités suivantes au titre de la rupture :
- 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif en écartant l'application du barème Macron de l'article L. 1235-3 du code du travail,
- 2.500 euros d'indemnité de préavis, outre 250 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,
- 468,75 euros à titre d'indemnité de licenciement ;
- condamner la société DBS à établir et à lui remettre des fiches de paye au titre de la période travaillée et de régulariser auprès des organismes sociaux le versement des charges sociales et patronales dues ;
- condamner la société DBS à faire le nécessaire dans un délai de 15 jours à compter de 1'arrêt à intervenir sous peine d'astreinte de 500 euros par jours de retard ;
- condamner la société DBS à lui régler une indemnité compensatrice de congés payés de 2 096 euros au titre de l'ensemble de la période travaillée ;
- condamner la société DBS à lui remettre des documents de fin de contrat conformes à l'arrêt à intervenir (attestation Pôle emploi, derniers bulletins de paye, certificat de travail), dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
- condamner la société DBS à lui verser la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens ;
- débouter la société DBS de ses demandes, fins et prétentions contraires.
Par conclusions remises le 22 novembre 2022, la société Diffusion bureautique de la Somme demande à la cour de :
- dire que M. [R] ne lui était pas lié par un contrat de travail ;
- confirmer le jugement rendu le 26 janvier 2022 en ce qu'il a débouté M. [R] de ses demandes de :
- dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- indemnité compensatrice de préavis ainsi que l'indemnité compensatrice de congés payés afférente,
- indemnité de licenciement,
- indemnité compensatrice de congés payés,
- indemnité pour travail dissimulé,
- régularisation de fiches de paies,
- régularisation des cotisations auprès des organismes sociaux, sous astreinte de 500 euros par jour de retard,
- de résiliation judiciaire et de requalification de sa démission en prise d'acte de la rupture à ses torts.
- accueillir son appel incident et condamner M. [R] à lui payer :
- la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- la somme de 5 000 en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
Il est renvoyé aux conclusions des parties pour le détail de leur argumentation.
EXPOSE DES MOTIFS
1/ Sur l'existence d'un contrat de travail liant les parties
M. [R] soutient qu'il a été embauché de façon dissimulée afin de satisfaire l'employeur mais que les éléments suivants démontrent sa qualité de salarié : la société lui a imposé par planning des horaires de travail fixes correspondant à 39 heures hebdomadaires et des temps d'intervention chez les clients, lui a donné des instructions précises attendant qu'il rende des comptes, lui a fourni des moyens matériels (badge d'accès, bureau, téléphone fixe, ordinateur et téléphone portable adresse mail professionnelle, véhicule) à l'instar des autres salariés, et lui a remis une attestation de déplacement professionnel au moment du confinement.
La société répond que M. [R] a préféré travailler en qualité de prestataire afin de ne pas perdre sa pension de retraite de l'armée, un contrat de prestation de service lui étant adressé sans qu'il le signe, et que les éléments suivants démontrent l'absence de lien de subordination : son inscription au registre du commerce et des sociétés en qualité d'entrepreneur individuel, l'absence de preuve qu'il était tenu par un planning impératif au-delà des nécessités d'organisation de leur collaboration, l'absence de preuve qu'il était tenu par les précisions données quant aux exigences des clients ou de rendre compte, le ticket à fournir en fin d'intervention permettant seulement de facturer le client, l'absence de preuve qu'il intervenait plus que ponctuellement en suivant des directives.
Elle ajoute que les factures produites ne correspondent pas à une rémunération constante, qu'aucun bureau n'a été mis à la disposition de M. [R], et que les quelques documents mentionnant la qualité de salarié qu'invoque ce dernier correspondent à des erreurs.
Le contrat de travail est un contrat par lequel une personne s'engage à travailler pour le compte et sous la direction d'une autre personne, moyennant rémunération. Il suppose donc l'existence de trois éléments : la fourniture d'un travail, le paiement d'une rémunération et l'existence d'un lien de subordination juridique.
En l'absence d'un contrat de travail apparent, c'est à celui qui se prévaut de l'existence d'une relation de travail d'en apporter la preuve.
L'existence d'une relation de travail salarié ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs.
En application de l'article L. 8221-6-1 du code du travail, les auto-entrepreneurs bénéficient d'une présomption de non-salariat. Toutefois, cette présomption peut être détruite s'il est établi qu'ils fournissent directement ou par une personne interposée des prestations au donneur d'ordre dans des conditions qui les placent dans une subordination juridique permanente à l'égard de celui-ci.
En l'espèce, il ressort des factures produites que M. [R] a été rémunéré pour un montant mensuel quasi identique par la société Diffusion bureautique de la Somme de septembre 2019 à mars 2020 afin de réaliser des travaux d'installation et de maintenance informatique auprès des clients de cette dernière.
Si M. [R] a effectivement été affilié à l'URSSAF en qualité d'auto-entrepreneur à compter du 1er septembre 2019, l'agenda partagé et les courriels qu'il produit montrent que cet agenda était géré par la société et qu'il travaillait dans ce cadre tous les jours de la semaine, ce qui contredit les témoignages de M. [K] et [O], responsable administratif et financier et directeur commercial, qui font respectivement état de missions ponctuelles et de ressources de renfort.
De même, l'attestation de M. [D], responsable informatique, qui mentionne un cadre de missions donc sans lien de subordination ne résiste pas à l'examen du contenu des courriels d'échange produits par M. [R].
Ainsi, le 9 mars 2020, M. [D] adresse à deux techniciens informatiques de la société et à M. [Y] [R], qui dispose d'une messagerie électronique fournie par cette dernière, le message suivant :
'Bonjour [L], [I] et [Y]
Dans le cadre d'un audit, j'aimerai un truc un peu plus 'professionnel' (...)
J'ai reçu de la part de [P] un très bon exemple de dossier, on en parlera lors de la prochaine réunion. L'idée n'est pas de ne faire qu'un relevé technique mais de vous faire monter en compétence dans le choix des choses à faire et des dossiers à monter.'
Dans un message du 11 mars 2020, ce même responsable de l'équipe des techniciens informatiques demande à un technicien informatique de la société et à M. [R] :
'[Y], [L], avez-vous saisie les informations dans un ticket suite aux problèmes sur les impressions chez [S] '
Merci de donner des informations à la hotline svp.
Pour rappel : Chaque intervention doit apparaître dans Newway, à partir du moment où vous passez du temps, vous saisissez le temps passé.'
Au vu de ces éléments qui démontrent que M. [R] recevait les mêmes consignes et rappels que les techniciens informatiques salariés de la société, cette dernière, qui par ailleurs ne produit ni contrat de prestation de service ni ordre de mission, ne saurait contester l'existence d'un contrat de travail à durée indéterminée caractérisé par la fourniture d'un travail, le paiement d'une rémunération et l'existence d'un lien de subordination juridique permanent.
Il convient donc d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que la relation de travail nouée entre M. [R] et la société DBS était un contrat de prestation de service et non un contrat de travail.
Il en résulte que la société DBS devra remettre à M. [R] des bulletins de salaire basés sur les factures acquittées, dans le mois de la notification de l'arrêt, sans que le prononcé d'une astreinte apparaisse justifié, ce qui suppose nécessairement une régularisation auprès des organismes sociaux, sauf à commettre le délit de travail dissimulé.
M. [R] n'ayant jamais manifesté le souhait de souscrire à la mutuelle de l'entreprise, sa demande de ce chef est rejetée.
2/ Sur la demande d'indemnité au titre du travail dissimulé
M. [R] invoque la volonté de la société de dissimuler son emploi salarié pour échapper au droit du travail et de la Sécurité sociale.
La société répond qu'à considérer qu'une relation salariée ait existé, la forme de collaboration mise en place l'a été sur demande de M. [R], sans volonté de dissimulation de sa part.
L'article L. 8221-1 du code du travail prohibe le travail totalement ou partiellement dissimulé défini par l'article L. 8221-3 du même code relatif à la dissimulation d'activité ou exercé dans les conditions de l'article L. 8221-5 du même code relatif à la dissimulation d'emploi salarié.
Aux termes de l'article L .8223-1 du code du travail, le salarié auquel l'employeur a recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 relatifs au travail dissimulé a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.
En application de l'adage selon lequel la fraude corrompt tout, le salarié qui, dans son intérêt et dans une intention de fraude, a concouru à l'infraction de travail dissimulé ne peut se prévaloir de celle-ci pour obtenir l'indemnité prévue à l'article L. 8223-1
En l'espèce, il ressort des développements précédents que le statut de salarié de M. [R] a été dissimulé tout au long de la relation de travail qui a duré 7 mois.
M. [R] ayant activement participé à cette dissimulation en se déclarant à l'Urssaf en qualité d'auto-entrepreneur dès le début de la relation contractuelle et en émettant de fausses factures tout au long de cette relation, ce qui lui a permis d'éluder les cotisations salariales, sans qu'il apporte aucun élément permettant d'établir qu'il y a été contraint, il ne saurait prétendre à percevoir une indemnité au titre du travail dissimulé.
Le jugement entrepris est donc confirmé de ce chef.
3/ Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail
M. [R] expose qu'en déguisant délibérément la relation de travail, la société a manqué à l'ensemble de ses obligations d'employeur justifiant la résiliation du contrat de travail à ses torts.
La société oppose l'absence de contrat de travail.
Lorsque les manquements de l'employeur à ses obligations légales, conventionnelles ou contractuelles sont établis, ont revêtu une gravité suffisante et empêchent la poursuite du contrat de travail, la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail doit être accueillie et produit, tous les effets attachés à un licenciement prononcé sans cause réelle et sérieuse ou nul avec effet à la date du licenciement s'il est survenu postérieurement à la demande en résiliation judiciaire.
En application de l'adage selon lequel la fraude corrompt tout, le salarié, qui s'est délibérément placé dans la situation de se soustraire au statut du salariat, ne peut ultérieurement l'invoquer pour en tirer profit.
En l'espèce, il ressort des développements précédents que M. [R] a délibérément, en accord avec la société, dissimulé son emploi salarié dès le début de la relation de travail et pendant tout son déroulement, se déclarant à l'Urssaf en qualité d'auto-entrepreneur, émettant de fausses factures mensuelles, demandant la régularisation d'une prime versée aux salariés en émettant une facture du montant correspondant (courriels du 17 février 2020), négociant sa situation avec la société sans jamais déplorer l'absence de reconnaissance du statut de salarié (courriel du 3 mai 2020, courrier du 15 mai 2020).
Percevant une pension de retraité de l'armée et ayant cédé sa précédente activité professionnelle, il n'apporte aucun élément permettant d'établir qu'il a été contraint à cette dissimulation d'une quelconque façon, notamment à raison d'un état de vulnérabilité économique.
Dès lors, il ne saurait opposer à l'employeur des manquements contractuels justifiant la résiliation judiciaire du contrat de travail qui a existé nonobstant la volonté des parties.
Le jugement entrepris est donc confirmé de ce chef.
4/ Sur la rupture du contrat de travail
M. [R] avance que la restitution du matériel fourni le 11 mai 2020 doit s'analyser en une prise d'acte de la rupture aux torts de l'employeur.
La société affirme que M. [R] était le décideur de la rupture.
L'article L. 1231-1 alinéa 1 du code du travail dispose que le contrat de travail à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié, ou d'un commun accord, dans les conditions prévues par les dispositions du présent titre.
La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de rompre le contrat de travail.
Lorsque l'une des parties au contrat de travail considère que le comportement de l'autre rend impossible le maintien du contrat, la situation s'analyse en une prise d'acte de la rupture de ce contrat, qui constitue une voie de rupture alternative au licenciement et à la démission.
En l'espèce, il est constant que M. [R] a restitué à la société le 11 mai 2020 le matériel qui lui avait été fourni dans le cadre de la relation de travail, ce fait actant la fin du contrat de travail.
Préalablement à cette restitution, il a adressé au directeur général de la société un courriel demandant des informations sur les conditions de sa reprise d'activité après le confinement en précisant 'Le 31 mars tu m'as expliqué que mon statut d'auto-entrepreneur t'empêchait de continuer à m'employer alors que tu avais des salariés au chômage partiel. J'ai pris acte de ta décision. Aujourd'hui, si je reprends à plein temps, je souhaite pouvoir rattraper le manque à gagner (...) En espérant que mes arguments auront retenu ton attention, merci de me confirmer tout cela afin que je puisse m'organiser', et obtenant la réponse suivante : 'On va tous repartir mais progressivement. Je travaille sur le plan de reprise qui sera communiqué dans la semaine'.
A la suite de cette restitution, il a adressé un courrier le 15 mai 2020 au directeur général de la société dans lequel il sollicite un complément de rémunération sans émettre aucune réserve sur le déroulement de la relation de travail ou les circonstances de la rupture.
Au vu de ces éléments qui montrent notamment que l'employeur souhaitait la poursuite de la collaboration, M. [R] a manifesté de façon claire et non équivoque sa volonté de rompre le contrat de travail, sans droit à aucune indemnité de rupture ou dommages et intérêts en réparation de cette rupture.
En revanche, n'ayant pas bénéficié de congés payés pendant la période d'emploi, il est en droit de percevoir l'indemnité compensatrice de congés payés réclamée dont le quantum n'est pas spécifiquement contesté.
Des documents de fin de contrat conformes à la décision devront lui être remis, dans le mois de sa notification, sans que le prononcé d'une astreinte apparaisse justifié.
5/ Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive
L'article 32-1 du code de procédure civile dispose que celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.
En l'espèce, la collaboration entre la société et M. [R] relevant effectivement du statut du salariat, aucune faute n'est imputable à ce dernier dans l'engagement de la présente procédure.
C'est donc à bon droit que les premiers juges ont débouté la société de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive.
6/ Sur les demandes accessoires
Chacune des parties succombant à son tour, le jugement entrepris est confirmé quant aux dépens et aux frais irrépétibles, qui seront arbitrés de la même façon en appel.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant par arrêt contradictoire,
confirme le jugement du 26 janvier 2022 en ses dispositions soumises à la cour, sauf en ce qu'il a dit que la relation de travail nouée entre M. [Y] [R] et la société DBS était un contrat de prestation de service et non un contrat de travail, et a débouté M. [Y] [R] de sa demande au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés et de ses demandes de remise de bulletins de paie et de documents de fin de contrat,
statuant à nouveau et y ajoutant,
dit que les parties étaient liées par un contrat de travail à durée indéterminée,
dit que le contrat de travail a pris fin par la démission de M. [Y] [R] le 11 mai 2020,
condamne la société Diffusion bureautique de la Somme à payer à M. [Y] [R] 2 096 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés,
ordonne à la société Diffusion bureautique de la Somme de remettre à M. [Y] [R] des bulletins de salaire basés sur les factures acquittées, dans le mois de la notification de l'arrêt,
ordonne à la société Diffusion bureautique de la Somme de remettre à M. [Y] [R] des documents de fin de contrat conformes à la décision, dans le mois de la notification de l'arrêt,
rejette le surplus des demandes,
dit que chaque partie conserve la charge des dépens d'appel qu'elle a engagés.
LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.