ARRET
N°
S.A.S. LES TOUQUET PLANTS COTE D'OPALE
C/
[X]
copie exécutoire
le 22/03/2023
à
SELARL DORE
SELARL WACQUET
EG/IL/
COUR D'APPEL D'AMIENS
5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE
ARRET DU 22 MARS 2023
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N° RG 22/03010 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IPKS
JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'ABBEVILLE DU 24 MAI 2022 (référence dossier N° RG 21/00029)
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE
S.A.S. LES TOUQUET PLANTS COTE
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée et concluant par Me Christophe DORE de la SELARL DORE-TANY-BENITAH, avocat au barreau d'AMIENS substituée par Me Isabelle LESPIAUC, avocat au barreau D'AMIENS
ET :
INTIMEE
Madame [Z] [X]
née le 29 Mai 1966 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée et concluant par Me Christophe WACQUET de la SELARL WACQUET ET ASSOCIÉS, avocat au barreau d'AMIENS substituée par Me Amélie ROHAUT, avocat au barreau D'AMIENS
DEBATS :
A l'audience publique du 25 janvier 2023, devant Mme Eva GIUDICELLI, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, l'affaire a été appelée.
Mme Eva GIUDICELLI indique que l'arrêt sera prononcé le 22 mars 2023 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Isabelle LEROY
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme Eva GIUDICELLI en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :
Mme Laurence de SURIREY, présidente de chambre,
Mme Caroline PACHTER-WALD, présidente de chambre,
Mme Eva GIUDICELLI, conseillère,
qui en a délibéré conformément à la Loi.
PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :
Le 22 mars 2023, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Laurence de SURIREY, Présidente de Chambre et Mme Isabelle LEROY, Greffière.
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DECISION :
Mme [X], née le 29 mai 1966, a été embauchée par la société Les Touquet plants Côte d'Opale, (la société ou l'employeur) par contrat à durée indéterminée à compter du 4 septembre 2019 en qualité d'assistante de direction.
Son contrat est régi par la convention collective des exploitations agricoles de polyculture-élevage et entreprises de travaux agricoles du département de la Somme.
La société emploie moins de 11 salariés.
Mme [X] a été placée en arrêt maladie à compter du 3 juin 2020.
Ne s'estimant pas remplie de ses droits au titre de l'exécution du contrat de travail et sollicitant la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, elle a saisi le conseil de prud'hommes d'Abbeville le 12 avril 2021.
Le conseil de prud'hommes d'Abbeville par jugement du 24 mai 2022 a :
- dit et jugé que les parties étaient liées par un contrat à durée indéterminée,
- dit et jugé que la rupture était imputable à l'employeur,
- dit et jugé que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse sans faute lourde,
- condamné la société Les Touquet plants Côte d'Opale à payer à Mme [X] :
- la somme de 2 321,64 euros brut au titre du préavis d'un mois + congés payés 232,16 euros
- la somme de 7 200 euros net au titre de l'indemnité de licenciement (4 mois de salaire)
- la somme de 7 832,54 euros brut au titre des indemnités complémentaires conventionnelles
- la somme de 800 euros net au titre des dommages et intérêts pour préjudice absence mutuelle
- la somme de 2 500 euros net au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- «dit qu'à défaut de remise dans les 15 jours suivant la notification de la présente décision, une astreinte provisoire de 50 euros par jour serait due par la société Les Touquet plants Côte d'Opale à Mme [X] jusqu'à complète exécution de tous les documents de fin de contrat»,
- débouté Mme [X] de ses autres demandes,
- débouté la société Les Touquet plants Côte d'Opale de sa demande reconventionnelle,
- condamné la société Les Touquet plants Côte d'Opale aux dépens,
- dit qu'en cas d'exécution provisoire, en application de l'article R 1454-28 du code du travail, la moyenne des trois derniers mois de salaire est arrêtée à la somme de 2.321,64 € brut.
Par conclusions remises le 6 juillet 2022, la société Les Touquet plants Côte d'Opale, régulièrement appelante de ce jugement, demande à la cour de :
- la dire et juger bien fondée en son appel,
En conséquence,
- réformer en toutes ses dispositions le jugement du 24 mai 2022,
En conséquence,
- réformer le jugement du 24 mai 2022 en ce qu'il a considéré que la rupture du contrat de travail lui était imputable et en ce qu'il a dit et jugé que le licenciement de Mme [X] reposait sur une cause réelle et sérieuse sans faute lourde,
En conséquence,
- débouter Mme [X] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail à ses tort,
En conséquence,
- débouter Mme [X] de l'ensemble de ses demandes afférentes à la rupture du contrat de travail,
- réformer le jugement du 24 mai 2022 en ce qu'il l'a condamnée à payer à Mme [X] la somme de 2 321,64 euros en valeur brute à titre d'indemnité compensatrice de préavis, la somme de 232,16 euros en valeur brute à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis et la somme de 7 200 euros au titre de l'indemnité de licenciement,
En conséquence,
- débouter Mme [X] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de sa demande d'indemnité compensatrice de préavis, de sa demande d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis, de sa demande d'indemnité de licenciement et de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral spécial et violation de l'obligation de sécurité,
A titre infiniment subsidiaire,
- Si par impossible, la Cour devait considérer que la rupture du contrat de travail lui était imputable, réduire alors substantiellement le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse correspondant à 6 mois de salaire dont Mme [X] sollicite le paiement,
En toute hypothèse,
- réformer également le jugement du 24 mai 2022 en ce qu'il l'a condamnée à payer à Mme [X] la somme de 7 832,54 euros au titre des indemnités complémentaires conventionnelles,
- En conséquence,
- débouter Mme [X] de sa demande de complément de salaire,
- réformer encore le jugement du 24 mai 2022 en ce qu'il l'a condamnée à payer à Mme [X] la somme de 800 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice absence mutuelle,
En conséquence,
- débouter Mme [X] de sa demande de dommages et intérêts en raison du préjudice (prétendu) subi du fait de l'absence de mutuelle,
- débouter Mme [X] de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée,
- réformer le jugement du 24 mai 2022 en ce qu'il l'a condamnée à payer à Mme [X] la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- En conséquence,
- débouter Mme [X] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- condamner Mme [X] à lui payer la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- condamner Mme [X] aux entiers dépens.
Par conclusions remises le 27 septembre 2022, Mme [X] demande à la cour de :
- déclarer ses demandes recevables et bien fondées,
Sur la résiliation judiciaire :
- confirmer le jugement en ce qu'il a dit que l'employeur avait commis des violations suffisamment graves du contrat de travail pour justifier la résiliation du contrat et la prononcer avec effet à compter de la décision à intervenir,
- dire et juger que la résiliation aux torts de l'employeur s'analyse en un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,
- condamner en conséquence l'employeur au paiement des sommes suivantes :
Préavis : CCN 1 mois : 2 321,64 euros
Congés payés afférents : 232,16 euros
Indemnités de licenciement (IL plus favorable) : ancienneté 1 an et 7 mois à l'issue du préavis : 918,98 euros
Dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (confirmation sauf à réparer l'erreur sur la dénomination) : 7 200 euros
Dommages et intérêts pour préjudice moral spécial et violation de l'obligation de sécurité : 2500 euros
- dire que l'employeur devra transmettre à la salariée les bulletins de paie d'août 2020 au jour de la résiliation, ainsi que les documents de fin d'emploi réguliers et ce sous astreinte de 200 euros par jour de retard passé 8 jours après la décision à intervenir,
Sur les sommes dues au titre de l'exécution du contrat de travail :
- condamner l'employeur à payer le complément de salaire dû au titre des indemnités complémentaires conventionnelles soit, sauf à parfaire au jour de la décision à intervenir, la somme de 7 832,54 euros outre la somme de 1 000 euros pour résistance abusive et injustifiée,
- condamner l'employeur au paiement d'une somme de 800 euros à titre de dommages et intérêts en raison du préjudice subi du fait de l'absence de mutuelle,
- le tout avec intérêts légaux capitalisés après une année entière,
- pour l'exécution provisoire de droit fixer la rémunération moyenne à la somme de 2 321,64 euros,
- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir au-delà de l'exécution provisoire de droit,
- confirmer la décision entreprise sur l'article 700 alloué au titre de la procédure de première instance et condamner l'employeur au paiement d'une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux éventuels dépens pour la procédure d'appel.
Il est renvoyé aux conclusions des parties pour le détail de leur argumentation.
Par demande d'observations écrites du 1er février 2023, transmise aux conseils des parties, il a été demandé à la société de justifier du paiement à la salariée des sommes visées dans les états récapitulatifs de la MSA du 6 octobre 2021 et 6 janvier 2022.
La société a transmis via le RPVA deux pièces pour ce faire le 13 février 2023 ; Mme [J] a formé des observations et transmis deux pièces via le RPVA le 17 février 2023.
EXPOSE DES MOTIFS
Au préalable, il convient de constater qu'en mentionnant dans son dispositif «dit et juge que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse sans faute lourde» alors qu'il indique dans la motivation «la résiliation judiciaire s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse», le conseil de prud'hommes a commis une erreur matérielle qu'il convient de rectifier d'office.
1/ Sur les sommes réclamées au titre de l'exécution du contrat de travail
1-1/ sur la demande au titre de l'obligation de maintien du salaire
L'employeur soutient que la salariée a été remplie de ses droits à ce titre au cours de la procédure.
Mme [X] maintient sa demande en paiement et dommages et intérêts au titre des indemnités complémentaires conventionnelles.
L'article 54 B) I de la convention collective des exploitations agricoles de polyculture-élevage et entreprises de travaux agricoles du département de la Somme prévoit :
Le versement d'indemnités journalières complémentaires, en cas d'arrêt de travail pour maladie ou accident de la vie privée, est soumis à une double condition d'ancienneté du salarié correspondant à deux mois d'ancienneté dans l'entreprise et six dans la profession à la date de l'arrêt de travail.
Ces indemnités journalières complémentaires sont versées à compter :
-du 8ème jour d'arrêt de travail, en cas de maladie ou d'accident de la vie privée de sorte que l'indemnisation globale perçue par le salarié (indemnisation MSA comprise) soit égale à 90 % du salaire brut du salarié, et ce tant que dure le versement des indemnités journalières légales.
En l'espèce, il est constant que Mme [X] est en arrêt-maladie depuis le 3 juin 2020.
Il n'est pas contesté qu'elle remplit les conditions prévues par le texte précité pour bénéficier du versement par l'employeur d'indemnités journalières complémentaires et que ce dernier a été régulièrement informé de cet arrêt-maladie.
Or, il ressort de l'attestation de la MSA du 13 février 2023 qu'elle a perçu l'intégralité des indemnitaires journalières, part obligatoire et part complémentaire, pour la période du 3 juin 2020 au 27 janvier 2023.
Etant remplie de ses droits, elle ne saurait obtenir condamnation de l'employeur à ce titre.
Il convient donc d'infirmer le jugement entrepris de ce chef.
La salariée ayant maintenu sa demande en paiement alors qu'elle se savait remplie de ses droits depuis le 30 juillet 2021, sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive est également rejetée par confirmation du jugement entrepris.
1-2 sur la demande au titre de l'absence d'adhésion à la mutuelle de l'entreprise
L'employeur fait valoir qu'il appartenait à la salariée, assistante de direction-secrétaire comptable, de mettre en place les contrats frais santé des salariés, en ce compris celui la concernant, que cette question n'a été soulevée par cette dernière qu'en juillet 2020, plusieurs mois après son embauche, et que le nécessaire a finalement été fait avant la saisine du conseil de prud'hommes.
Mme [X] répond qu'il incombait à l'employeur de lui faire remplir une adhésion ou un refus d'adhésion dès son embauche, ou à tout le moins à compter de sa réclamation de juin 2020, la régularisation après plusieurs mois de relance n'étant pas de nature à l'exonérer de sa responsabilité.
En application des dispositions de l'article L.911-7 du code de la sécurité sociale, toutes les entreprises du secteur privé doivent être en mesure d'offrir à leurs salariés une couverture minimale obligatoire en matière de remboursement des frais de santé.
En l'espèce, il est constant que Mme [X] n'a finalement obtenu de l'employeur les documents permettant son adhésion à la mutuelle de l'entreprise qu'en février 2021 après plusieurs relances à ce sujet en juillet 2020.
Bien que la salariée bénéficiait déjà d'une mutuelle souscrite à titre personnel, il incombait à son employeur de la mettre en situation d'opter pour la mutuelle de l'entreprise, ce qu'elle a fait en mars 2021, en veillant à recueillir son adhésion ou sa demande de dispense dès son embauche, sans que les fonctions de Mme [X] constituent un motif d'exonération de la responsabilité de la société Les Touquet plants Côte d'Opale.
Or, non seulement le nécessaire n'a pas été fait lors de l'embauche, mais l'employeur n'a répondu à la demande de la salariée de juillet 2020 qu'en février 2021 pour s'étonner de la situation.
Cette négligence fautive qui a retardé l'adhésion de la salariée à la mutuelle de l'entreprise pendant près de 18 mois justifie la condamnation de l'employeur à lui verser 800 euros de dommages et intérêts comme justement apprécié par les premiers juges.
1-3/ sur la demande au titre du manquement à l'obligation de sécurité et à l'obligation d'exécuter le contrat de travail de bonne foi
Mme [X] fait valoir qu'en lui confiant des tâches qui n'étaient pas prévues au contrat de travail, notamment de comptabilité et concernant d'autres sociétés, de façon parfaitement désorganisée et dans des proportions considérables, ce qui a provoqué des problèmes de santé, l'employeur a manqué à son obligation de sécurité et à son obligation d'exécuter le contrat de bonne foi.
L'employeur réplique qu'elle a été embauchée en qualité d'assistante de direction ' secrétaire comptable et qu'elle ne démontre aucunement une dégradation de ses conditions de travail.
L'article 9 du code de procédure civile dispose qu'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
Pour engager la responsabilité contractuelle de l'employeur, le salarié doit prouver l'existence d'une faute de ce dernier, d'un préjudice et d'un lien de causalité entre les deux.
En l'espèce, si l'absence de production d'un contrat de travail signé par les parties conduit à retenir l'emploi visé dans les bulletins de paie d'assistante de direction seulement, et que l'attestation de Mme [K], comptable externe, mentionne des tâches à accomplir pour plusieurs sociétés, aucun élément probant ne permet de faire un lien entre l'arrêt-maladie de Mme [X] et ses conditions de travail, cette dernière ne démontrant l'existence d'aucun autre préjudice lié aux tâches qu'elle devait exécuter.
Par ailleurs, bien que Mme [X] justifie de nombreux courriels et courriers, y compris de la part de son assureur de protection juridique, aux termes desquels elle formule diverses réclamations auprès de son employeur dans le cadre de son arrêt-maladie, aucun ne dénonce les faits de désorganisation et de surcharge de travail qu'elle lui reproche dans le cadre de la présente procédure et pour lesquels elle ne produit aucune pièce spécifique.
La preuve d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité ayant causé un préjudice à la salariée n'est donc pas rapportée.
Au vu de ces éléments, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les «autres demandes» de Mme [X], incluant nécessairement la demande de dommages et intérêts formée à ce titre.
2/ Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail
Au soutien de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, Mme [X] invoque le non-respect des dispositions conventionnelles relatives au maintien du salaire, le non-respect des dispositions légales et conventionnelles sur la mutuelle d'entreprise, et l'exécution de mauvaise foi du contrat de travail.
L'employeur conteste ces manquements, précisant que la salariée n'a pu bénéficier des indemnités conventionnelles complémentaires dans le cadre de son arrêt de travail qu'en raison d'une carence de la MSA dans l'affiliation des salariés-non cadres de l'entreprise alors que de son côté elle avait envoyé tous les documents requis.
Il oppose, à tout le moins, l'ancienneté des griefs et la régularisation du paiement des indemnités journalières complémentaires et de l'adhésion à la mutuelle de l'entreprise dénotant un manque de gravité.
Lorsque les manquements de l'employeur à ses obligations légales, conventionnelles ou contractuelles sont établis, ont revêtu une gravité suffisante et empêchent la poursuite du contrat de travail, la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail doit être accueillie.
Les périodes de maladie ou d'accident du travail visées par l'article L.1226-1 du code du travail ouvrent droit à une obligation de maintien de salaire, à la charge de l'employeur uniquement, si le salarié remplit certaines conditions, en particulier en matière d'ancienneté et de prise en charge par la Sécurité sociale.
En l'espèce, bien que Mme [X] se trouve en arrêt-maladie depuis le 3 juin 2020, aucun des bulletins de salaire produits ne mentionnent le versement d'indemnités journalières complémentaires afin de garantir le maintien du salaire auquel il a été rappelé qu'elle avait droit.
S'agissant d'une obligation légale, déclinée au niveau conventionnel, l'employeur devait veiller à la mise en place du maintien du salaire sans pouvoir se retrancher derrière un éventuel dysfonctionnement de la MSA, que le courriel du 4 octobre 2021 versé à ce sujet ne démontre d'ailleurs pas.
Ce seul manquement contractuel, qui a privé la salariée d'une part de sa rémunération déjà réduite du fait de son arrêt-maladie est suffisamment grave pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur, sans qu'il apparaisse nécessaire d'examiner les autres griefs.
Le jugement entrepris est donc confirmé de ce chef, la résiliation judiciaire prenant effet au jour de l'arrêt.
3/ Sur les conséquences pécuniaires de la résiliation judiciaire du contrat de travail
La résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur produit tous les effets attachés à un licenciement prononcé sans cause réelle et sérieuse ou nul avec effet à la date de la décision définitive si le contrat de travail est toujours en cours d'exécution.
Mme [X] peut donc prétendre aux indemnités de rupture et à des dommages et intérêts tels que prévus par l'article L.1235-3 du code du travail, étant précisé que le conseil de prud'hommes a omis de statuer sur l'indemnité légale de licenciement.
Au vu de la demande de la salariée, l'indemnité légale de licenciement est fixée à 918,98 euros.
Aucune des parties ne contestant spécifiquement les sommes accordées au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, le jugement est confirmé de ces chefs.
Compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à la salariée, de son âge, de son ancienneté dans l'entreprise (3 ans) et de l'effectif de celle-ci, la cour confirme la somme allouée par le conseil de prud'hommes à titre de dommages et intérêts pour résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
4/ Sur les demandes accessoires
Les bulletins de paie et documents de fin de contrat conformes à la présente décision devront être remis à Mme [X] dans le mois de sa notification, sans que le prononcé d'une astreinte apparaisse justifié.
La capitalisation des intérêts dus pour une année entière est ordonnée.
Le pourvoi n'étant pas suspensif, la demande d'exécution provisoire est sans objet.
L'employeur succombant principalement, les dépens d'appel sont mis à sa charge et le jugement entrepris est confirmé quant aux dépens et frais irrépétibles.
L'équité commande de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles engagés en appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
rectifie le jugement du 24 mai 2022 en ce qu'il y a lieu de supprimer la phrase «dit et juge que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse sans faute lourde» dans le dispositif,
confirme le jugement du 24 mai 2022 en ses dispositions soumises à la cour, sauf en ce qu'il a condamné la société Les Touquet plants Côte d'Opale à payer à Mme [Z] [X] 7 832,54 euros brut au titre des indemnités complémentaires conventionnelles,
statuant à nouveau et y ajoutant,
prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail à compter du jour du prononcé de l'arrêt,
condamne la société Les Touquet plants Côte d'Opale à payer à Mme [Z] [X] 918,98 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,
ordonne la capitalisation des intérêts dus pour une année entière,
ordonne à la société Les Touquet plants Côte d'Opale de remettre à Mme [Z] [X] les bulletins de paie et documents de fin de contrat conformes à la présente décision, dans le mois de sa notification,
rejette le surplus des demandes,
condamne la société Les Touquet plants Côte d'Opale aux dépens d'appel.
LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.