ARRET
N°293
[U]
C/
CPAM [Localité 6] [Localité 4]
COUR D'APPEL D'AMIENS
2EME PROTECTION SOCIALE
ARRET DU 16 MARS 2023
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N° RG 21/04912 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IHVX - N° registre 1ère instance : 20/00184
JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE DOUAI EN DATE DU 06 septembre 2021
PARTIES EN CAUSE :
APPELANT
Monsieur [L] [U]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me Patrick LEDIEU de la SCP LECOMPTE LEDIEU, avocat au barreau de CAMBRAI
ET :
INTIME
CPAM [Localité 6] [Localité 4] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représentée par Mme [K] [R] dûment mandatée
DEBATS :
A l'audience publique du 06 Décembre 2022 devant Mme Graziella HAUDUIN, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 16 Mars 2023.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Myriam EL JAGHNOUNI
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme Graziella HAUDUIN en a rendu compte à la Cour composée en outre de:
Mme Elisabeth WABLE, Président,
Mme Graziella HAUDUIN, Président,
et Monsieur Renaud DELOFFRE, Conseiller,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
PRONONCE :
Le 16 Mars 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Graziella HAUDUIN, Président a signé la minute avec Mme Blanche THARAUD, Greffier.
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DECISION
Vu le jugement en date du 6 septembre 2021, auquel il convient de se référer pour l'exposé des faits, procédure et prétentions initiales des parties, par lequel le pôle social du tribunal judiciaire de Douai, statuant sur le recours de M. [L] [U] à l'encontre de la décision de rejet de la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de [Localité 6] [Localité 4] de sa contestation de refus de prise en charge de l'accident dont il a été victime le 18 octobre 2019, a :
- rejeté la demande de M. [L] [U] tenant à la prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident survenu le 18 octobre 2019,
- condamné M. [L] [U] aux éventuels dépens,
- Rejeté la demande formulée par la caisse au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu l'appel interjeté le 12 octobre 2021 par M. [L] [U] de cette décision qui lui a été notifiée le 22 septembre précédent.
Vu les conclusions visées par le greffe le 6 décembre 2022 et soutenues oralement à l'audience par lesquelles M. [U] demande à la cour de :
- réformer la décision entreprise,
- dire et juger que l'accident du travail dont il a été victime le 18 octobre 2019 doit être pris en charge au titre « accident du travail » par application de législation professionnelle par la CPAM de [Localité 6] [Localité 4],
- dire et juger que la CPAM de [Localité 6] [Localité 4] devra en tirer toutes les conséquences de droit,
- condamner la CPAM de [Localité 6] [Localité 4] à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la CPAM de [Localité 6] [Localité 4] aux entiers frais et dépens.
Vu les conclusions visées par le greffe le 6 décembre 2022 et soutenues oralement à l'audience par lesquelles la CPAM de [Localité 6] [Localité 4] demande à la cour de :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de Douai le 6 septembre 2021,
- dit n'y avoir lieu à la prise en charge, au titre de la législation sur les risques professionnels, de l'accident du 18 octobre 2019,
- débouter M. [U] de l'ensemble de ses demandes,
- condamner M. [U] aux entiers dépens d'instance,
- condamner M. [U] au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR CE, LA COUR :
Le 18 octobre 2019, M. [L] [U], salarié de la société [E] en qualité de serrurier-soudeur a souffert d'un « lumbago avec sciatique gauche suite à un mouvement brusque en soulevant une charge lourde » suivant certificat médical initial du même jour.
La société [E] a effectué une déclaration d'accident du travail, le 21 octobre 2019, mentionnant : « il débitait des tubes en acier ' selon le certificat, car aucun témoin, mouvement brusque en soulevant une charge lourde » et assortie de réserves jointes faisant état de propos injurieux proférés par le salarié envers M. [E], le gérant, qui lui a alors demandé de rentrer chez lui en lui précisant verbalement qu'il le mettait à pied suite aux propos injurieux, du refus de M. [U] de partir tout en continuant à proférer des menaces, du fait que le salarié est resté dans l'atelier, qu'à 8h51 il l'a informé par SMS avoir des douleurs dans le dos, continuer à travail pour ensuite par SMS lui dire partir en ambulance à l'hôpital.
La CPAM de [Localité 6] [Localité 4] a diligenté une enquête et a, par courrier du 16 décembre 2019, notifié à l'assuré sa décision de refus de prise en charge de l'accident au titre de la législation professionnelle.
Contestant cette décision, M. [U] a saisi la commission de recours amiable, laquelle a rendu une décision de rejet le 18 mars 2020, puis la juridiction de la sécurité sociale le 10 juillet 2020, laquelle a statué comme exposé précédemment.
M. [U] fait valoir que l'argumentation de la partie adverse sur le prononcé d'une mise à pied n'est étayée par aucun document, pas plus que le contexte conflictuel invoqué par la caisse.
Il indique que la fiche bilan du SAMU démontre que le lieu d'intervention est l'atelier [E] et ajoute que l'attestation de passage établie par le centre hospitalier de [Localité 4] et la facture de l'ambulance démontrent une prise en charge par le service des urgences le jour de l'accident.
La CPAM soutient que les propos de l'assuré ne sont corroborés par aucun élément objectif si ce n'est le certificat médical initial établi le jour même qui demeure insuffisant pour démontrer que l'accident allégué se serait produit par le fait ou à l'occasion du travail, qu'il n'y a pas de témoin et que l'assuré ayant été mis à pied verbalement avant l'accident, son contrat était dès lors suspendu en sorte qu'il ne se trouvait plus sous la subordination de son employeur.
2. Aux termes de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, qu'elle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée, ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprises.
Ainsi, constitue un accident du travail tout fait précis survenu soudainement au cours ou à l'occasion du travail et qui est à l'origine d'une lésion corporelle.
Il appartient au salarié qui allègue avoir été victime d'un accident du travail d'établir, autrement que par ses seules affirmations, les circonstances de l'accident et son caractère professionnel.
Il résulte également de ces dispositions une présomption d'imputabilité pour tout accident survenu au temps et au lieu de travail.
Par ailleurs, pour renverser la présomption d'imputabilité prévue à l'article L. 411-1, il doit être démontré que l'accident a une cause totalement étrangère à l'activité professionnelle de la victime.
En l'espèce, il ressort des pièces produites et des débats que le 21 octobre 2019, la société [E] a adressé à la caisse primaire d'assurance maladie une déclaration d'accident du travail relative à un accident concernant M. [L] [U], survenu le 18 octobre 2019 à 08h51, et documentée par un certificat médical initial établi le 18 octobre 2019 par le docteur [P] faisant état d'un lumbago avec sciatique gauche suite à un mouvement brusque en soulevant une charge lourde.
S'il est acquis qu'il n'y a eu aucun témoin du fait accidentel,il convient de relever toutefois que M. [U] indique dans le questionnaire assuré avoir informé son employeur de son accident le jour même à 8h51 et que cette allégation est confirmée par l'employeur tant dans le questionnaire employeur complété dans le cadre de l'instruction de la caisse que dans le courrier de réserves qu'il a établi.
De plus, le salarié produit une facture de l'ambulance mentionnant un trajet aller le 18 octobre 2019 vers le [Adresse 2] avec un départ à 9h44 et une arrivée au centre hospitalier à 10h14 et une fiche bilan du Samu faisant état d'une intervention au « [Adresse 2] » suite à un appel passé à 9h20 pour des douleurs lombaires concernant le patient [L] [U].
Le certificat médical initial établi le 18 octobre 2019, soit le jour du fait accidentel déclaré, corrobore parfaitement les déclarations de M. [U] puisqu'il constate l'existence d'un lumbago.
Il est également produit par M. [U] une attestation de passage établie par le centre hospitalier de [Localité 4] confirmant une prise en charge au service d'urgence le 18 octobre 2019 entre 10h08 et 10h57 pour des soins.
La déclaration d'accident du travail mentionne des horaires de travail de 7h30 à 12h30 et de 13h30 à 15h30. Le fait accidentel étant survenu à 8h51, il en découle que la condition de survenance d'un accident au temps de travail est remplie.
Ces éléments permettent de démontrer l'existence d'une lésion survenue au temps et au lieu du travail permettant à l'assuré de bénéficier de la présomption d'imputabilité.
La CPAM soulève que l'assuré aurait été mis à pied verbalement par son employeur et qu'il ne se trouvait donc plus sous la subordination de son employeur au moment du fait accidentel, ce qui ne lui permet pas de remplir les conditions prévues à l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale.
Elle produit en ce sens le questionnaire employeur complété par M. [E] qui indique avoir mis à pied à titre conservatoire M. [U] une heure avant le fait accidentel et précisant avoir envoyé un courrier recommandé en ce sens. Il indique également avoir demandé au stagiaire présent pour assister le salarié de rentrer chez lui suite à la mise à pied.
Au contraire, M. [U] produit une attestation de M. [X] [F], stagiaire de la société [E] au moment des faits, qui indique ne pas avoir été témoin d'une quelconque altercation et avoir été appelé par M. [E] à 8h pour lui dire de rentrer chez lui faute de travail à lui donner pour la journée.
En outre, le fait que M. [U] n'ait pas mentionné le nom de M. [F] dans le cadre de l'instruction du dossier est sans incidence sur le caractère probant de cet écrit.
La CPAM ne produit aucun élément de nature à démontrer que la mise à pied, à la supposer établie, est antérieure au fait accidentel.
Il ressort donc de l'ensemble de ces éléments que l'accident, survenu au temps et au lieu de travail, est établi et qu'aucun élément ne permet de renverser la présomption édictée par l'article L.411-1 du code de la sécurité sociale.
En conséquence, par infirmation de la décision déférée, l'accident du 18 octobre 2019 dont a été victime M. [U] doit être pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels.
2. La CPAM de [Localité 6] [Localité 4], qui succombe, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, déboutée de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamnée sur ce fondement à payer à M. [U] la somme de 800 euros.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort, par mise à disposition au greffe,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Dit que l'accident dont M. [L] [U] a été victime le 18 octobre 2019 doit être pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels,
Condamne la CPAM de [Localité 6] [Localité 4] à verser à M. [L] [U] la somme de 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toutes autres demandes,
Condamne la CPAM de [Localité 6] [Localité 4] aux dépens.
Le Greffier, Le Président,