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13/02/2023 | FRANCE | N°20/05232

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 13 février 2023, 20/05232


ARRET

N° 179





CIPAV





C/



[B]













COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 13 FEVRIER 2023



*************************************************************



N° RG 20/05232 - N° Portalis DBV4-V-B7E-H4OQ - N° registre 1ère instance : 18/01125



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BEAUVAIS EN DATE DU 17 septembre 2020





PARTIES EN CAUSE :





APPEL

ANTE





CIPAV agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 3]





Représentée par Me Gaelle DEFER, avocat au barreau de BEAUVAIS substituant Me Stéphanie PAILLER de ...

ARRET

N° 179

CIPAV

C/

[B]

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 13 FEVRIER 2023

*************************************************************

N° RG 20/05232 - N° Portalis DBV4-V-B7E-H4OQ - N° registre 1ère instance : 18/01125

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BEAUVAIS EN DATE DU 17 septembre 2020

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

CIPAV agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Gaelle DEFER, avocat au barreau de BEAUVAIS substituant Me Stéphanie PAILLER de la SELEURL CABINET STEPHANIE PAILLER AVOCAT, avocat au barreau de PARIS

ET :

INTIME

Monsieur [Z] [B]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Elisabeth LEONARD LE PIVERT de la SELARL LEONARD-LE PIVERT ELISABETH, avocat au barreau de COMPIEGNE

DEBATS :

A l'audience publique du 07 Novembre 2022 devant Monsieur Renaud DELOFFRE, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 13 Février 2023.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Marie-Estelle CHAPON

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Monsieur Renaud DELOFFRE en a rendu compte à la Cour composée en outre de:

Mme Elisabeth WABLE, Président,

Mme Graziella HAUDUIN, Président,

et Monsieur Renaud DELOFFRE, Conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 13 Février 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Elisabeth WABLE, Président a signé la minute avec Mme Blanche THARAUD, Greffier.

*

* *

DECISION

Le 9 avril 2018, Monsieur [Z] [B] a saisi la commission de recours amiable de la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse (la Caisse) d'une contestation relative à la régularisation du montant des cotisations sociales dues pour l'année 2016, d'une part, et d'une demande de liquidation de ses droits à retraite au 1er juillet 2016, d'autre part.

Par contrainte du 16 avril 2018, la Caisse a entendu procéder au recouvrement de la somme de 10.564,99 euros relatif aux cotisations et majorations de retard dues au titre de l'année 2016.

La contrainte a été signifiée à domicile par acte du 3 mai 2018.

Par lettre recommandée adressée au secrétariat le 15 mai 2018, Monsieur [Z] [B] a porté ses contestations devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Oise.

À compter du 1er janvier 2019, la procédure en cours devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Oise a été transférée en l'état au tribunal de grande instance de Beauvais en application des articles 12 et 114 de la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016.

À compter du 1er janvier 2020, en application de la loi n°2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, le tribunal de grande instance se dénomme tribunal judiciaire.

Par jugement du 17 septembre 2020, le Tribunal a décidé ce qui suit :

DÉCLARE irrecevable la demande de Monsieur [Z] [B] relative à la liquidation de sa retraite de base et de sa retraite complémentaire ;

DÉCLARE recevables les demandes de Monsieur [Z] [B] relatives aux dommages-intérêts sollicités et au litige portant sur la régularisation des cotisations sociales de 2016 ;

DÉCLARE fondée l'opposition de Monsieur [Z] [B] ;

DIT que la contrainte du 16 avril 2018 émise par la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse est nulle ;

DIT que les frais de signification de cette contrainte doivent être supportés par la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse ;

DIT que la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse doit procéder à la régularisation des cotisations sociales appelées au titre de l'année 2016 et du crédit de 559 euros ainsi dégagé au bénéfice de Monsieur [Z] [B] ;

CONDAMNE la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse à payer à Monsieur [Z] [B] la somme de 10.000 (DIX-MILLE) euros en réparation de son préjudice financier

CONDAMNE la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse à payer à Monsieur [Z] [B] la somme de 5.000 (CINQ-MILLE) euros en réparation de son préjudice moral ;

CONDAMNE la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse à payer à Monsieur [Z] [B] la somme de 2.000 ( DEUX-MILLE) euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE les autres demandes plus amples ou contraires ;

DIT que la présente décision est exécutoire à titre provisoire ;

Notifié à la CIPAV le 5 octobre 2020, ce jugement a fait l'objet d'un appel limité de cette dernière par courrier recommandé avec accusé de réception de son avocat expédié au greffe de la Cour le 21 octobre 2020.

Cet appel porte sur les dispositions suivantes du jugement déféré :

DÉCLARE recevables les demandes de Monsieur [Z] [B] relatives aux dommages-intérêts sollicités et au litige portant sur la régularisation des cotisations sociales de 2016 ;

DÉCLARE fondée l'opposition de Monsieur [Z] [B] ;

DIT que la contrainte du 16 avril 2018 émise par la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse est nulle ;

DIT que les frais de signification de cette contrainte doivent être supportés par la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse ;

DIT que la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse doit procéder à la régularisation des cotisations sociales appelées au titre de l'année 2016 et du crédit de 559 euros ainsi dégagé au bénéfice de Monsieur [Z] [B] ;

CONDAMNE la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse à payer à Monsieur [Z] [B] la somme de 10.000 (DIX-MILLE) euros en réparation de son préjudice financier

CONDAMNE la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse à payer à Monsieur [Z] [B] la somme de 5.000 (CINQ-MILLE) euros en réparation de son préjudice moral ;

CONDAMNE la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse à payer à Monsieur [Z] [B] la somme de 2.000 ( DEUX-MILLE) euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE les autres demandes plus amples ou contraires ;

DIT que la présente décision est exécutoire à titre provisoire ;

Par conclusions reçues par le greffe le 3 novembre 2022 et soutenues oralement par avocat, l'appelante demande à la Cour de :

INFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a :

DECLARE recevables les demandes relatives aux dommages et intérêts

CONDAMNE la CIPAV à régler à Monsieur [B] la somme de 10.000 € en réparation de son préjudice financier ,

CONDAMNE la CIPAV à régler à Monsieur [B] la somme de 5.000 € en réparation de son préjudice moral ,

CONDAMNE La CIPAV a régler à Monsieur [B] la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du CPC

Et en conséquence,

CONDAMNER Monsieur [B] à régler à la C.I.P.A.V. la somme de 500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

DEBOUTER Monsieur [B] de l'ensemble de ses demandes

CONFIRMER le jugement pour le surplus

CONDAMNER Monsieur [B] au paiement des frais de recouvrement, conformément aux articles R. 133-6 du Code de la Sécurité Sociale et 8 du décret du 12 décembre 1996.

Elle fait valoir à titre principal que les cotisations de retraite de base et complémentaire ont bien été régularisées, que la contrainte de 2016 est soldée, que la demande de liquidation de la retraite est irrecevable compte tenu de la saisine prématurée de la commission de recours amiable, que les demandes de dommages et intérêts sont également irrecevables puisqu'elles sont en lien avec la demande de liquidation.

Elle fait valoir à titre subsidiaire que la pension a été versée rétroactivement de sorte que l'adhérent n'a subi aucun préjudice, qu'elle fournit le détail du calcul des cotisations faisant l'objet de la contrainte et des encaissements.

Par conclusions visées par le greffe le 7 novembre 2022 et soutenues oralement par avocat, l'intimé demande à la Cour de :

DIRE ET JUGER Monsieur [Z] [B] recevable et bien-fondé dans son opposition ainsi que dans ses demandes de condamnation à l'encontre de la C I PAV.

En conséquence :

CONFIRMER en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 17 Septembre 2020 par le Tribunal Judiciaire de BEAUVAIS,

CONDAMNER la CIPAV à verser à Monsieur [Z] [B] la somme de 3.000,00 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile. CONDAMNER la CIPAV aux entiers dépens.

Il fait valoir qu'il y avait lieu d'annuler la contrainte, compte tenu de ce qu'il avait saisi la commission de recours amiable avant sa délivrance, qu'il était à jour de ses cotisations pour la retraite de base, que la cotisation complémentaire était de 1277 € et qu'il était fondé à en obtenir la réduction de 100 % compte tenu de ce que ses revenus étaient inférieurs à 5884 €, que le retard du paiement de la retraite pendant plus de quatre ans justifie le dédommagement sollicité.

MOTIFS DE L'ARRET.

SUR L'ETENDUE DE LA SAISINE DE LA COUR.

Attendu qu'il résulte de l'article 561 du nouveau Code de procédure civile que l'effet dévolutif de l'appel permet à un plaideur de soumettre son litige à la cour d'appel pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit.

Que l'article 562 du même Code apporte une limite à cet effet dévolutif en disposant que l'appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément ou implicitement et de ceux qui en dépendent et que la dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

Que l'article 933 du code de procédure civile, dans sa rédaction modifiée par le décret n°2017-891 du 6 mai 2017, dispose que la déclaration d'appel comporte les mentions prescrites par l'article 58, qu'elle désigne le jugement dont il est fait appel, précise les chefs du jugement critiqués auquel l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible, et mentionne, le cas échéant, le nom et l'adresse du représentant de l'appelant devant la cour. Elle est accompagnée de la copie de la décision.

Qu'il résulte des textes précités qu'après avoir interjeté un appel général ou même un appel limité , les parties peuvent limiter celui-ci par conclusions, ce qui ne défère alors à la cour d'appel que la partie critiquée du jugement et limite d'autant l'effet dévolutif ( en ce sens 2e Civ., 13 juillet 1999, pourvoi n° 97-21.130, Bulletin civil 1999, II, n° 134 ; 2e Civ., 7 mars 2002, pourvoi n° 00-16.240, Bulletin civil 2002, II, n° 32 ; 2e Civ., 10 février 2000, pourvoi n° 98-10.713 ; 1re Civ., 14 décembre 2004, pourvoi n° 02-14.937, 02-16.372 décidant qu'un chef non critiqué d'un jugement est devenu définitif / en sens totalement contraire l'ouvrage «  guide du procès civil en appel » Lexis Nexis 2018 n° 774 et suivants qui estime que la portée de l'appel est déterminée par l'acte d'appel et non par les conclusions et que la Cour est saisie de l'intégralité des dispositions appelées mais ne peut que considérer que l'appel n'est pas soutenu à l'égard des chefs non contestés et confirmer en conséquence ces derniers/ A noter dans ce sens: 2e Civ., 24 juin 2004, pourvoi n° 02-11.160, Bull., 2004, II, n° 309 retenant que «  la déclaration d'appel ne contenait aucune limitation de sorte que l'appel ne pouvait pas être limité par les conclusions, la cour d'appel, même si elle ne devait examiner que les seules critiques contenues dans ces conclusions et ne pouvait, pour le surplus, que confirmer la décision attaquée, a violé les textes susvisés »/ A rapprocher : 3e Civ., 13 juin 2007, pourvoi n° 06-11.784, Bull. 2007, III, n° 103 qui retient que le tribunal ayant fixé la créance de la SCI à l'égard des époux [V] et ordonné une mesure d'instruction, la cour d'appel, qui a relevé que la SCI avait formé appel général dans sa déclaration et en a exactement déduit que la dévolution s'était opérée pour le tout, même si par la suite elle n'avait critiqué que certains chefs de la décision attaquée, a justement déclaré l'appel de la SCI recevable).

Qu'il résulte enfin des mêmes textes que l'appel limité ne peut être étendu par les conclusions de l'appelant ( en ce sens 2 Civ. ; 4 mars 2021 pourvoi n° 19-25.291 ; 1re Civ., 22 juin 1999, pourvoi n° 97-15.225, Bull. 1999, I, n° 206 ; 3e Civ., 7 juin 1989, pourvoi n° 87-18.527, Bulletin 1989 III N° 127 ) et que la dévolution résultant de l'appel limité ne peut être élargie que par un appel incident ou un appel provoqué ( en ce sens 2e Civ., 13 octobre 2016, pourvoi n° 15-21.973, Bull. 2016, II, n° 223 ; soc., 28 novembre 2000, n 98-42.999 ; Civ 3ème 15 mai 2002 pourvoi n° 99-10.507 P soc., 4 mars 2008, n 06-45.221 ; soc., 5 juillet 2005, o o n 03-44.366). 2 civ., 29 mai 1979, pourvoi n 78-10.263, Bull. 1979, II, n 160 ).

Attendu qu'en l'espèce l'appel de la CIPAV ne porte pas sur les dispositions du jugement déféré déclarant irrecevable la demande de Monsieur [B] relative à la liquidation de sa retraite de base et de sa retraite complémentaire et déclarant recevable sa demande relative au litige portant sur la régularisation des cotisations sociales de 2016.

Que l'appel incident de Monsieur [B] ne porte pas non plus sur les dispositions précitées.

Qu'il s'ensuit que la Cour n'est pas saisie de ces dispositions.

Attendu en outre que dans ses conclusions soutenues à l'audience, la CIPAV semble réduire la portée de son appel puisqu'elle demande à la Cour de :

INFIRMER le jugement entrepris en ce qu'il a :

DECLARE recevables les demandes relatives aux dommages et intérêts

CONDAMNE la CIPAV à régler à Monsieur [B] la somme de 10.000 € en réparation de son préjudice financier ,

CONDAMNE la CIPAV à régler à Monsieur [B] la somme de 5.000 € en réparation de son préjudice moral ,

CONDAMNE La CIPAV a régler à Monsieur [B] la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du CPC

Et en conséquence,

CONDAMNER Monsieur [B] à régler à la C.I.P.A.V. la somme de 500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

DEBOUTER Monsieur [B] de l'ensemble de ses demandes

CONFIRMER le jugement pour le surplus

CONDAMNER Monsieur [B] au paiement des frais de recouvrement, conformément aux articles R. 133-6 du Code de la Sécurité Sociale et 8 du décret du 12 décembre 1996.

Qu'il résulte clairement du dispositif des conclusions de la CIPAV qu'il ne défère pas à la Cour les dispositions du jugement déclarant fondée l'opposition de Monsieur [Z] [B] et disant que la contrainte du 16 avril 2018 émise par la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse est nulle.

Que cependant, la Cour est saisie en procédure orale tant du dispositif que des motifs des conclusions soutenues à l'audience ( en ce sens 2e Civ 14 septembre 2006 N° 05-16.634 dont il résulte de la majeure qu'en matière de procédure orale , les conclusions écrites d'une partie, réitérées verbalement à l'audience, saisissent valablement le juge qui est tenu de répondre à l'ensemble des demandes qui y sont contenues et non pas seulement à celles qu'exprime le dispositif/ Egalement 2e Civ., 10 mars 2022, pourvoi n° 20-14.495).

Attendu qu'en page 12 de ses conclusions soutenues à l'audience, après avoir développé ses moyens au soutien de cette demande, la CIPAV demande à la Cour de dire que le défaut de régularisation des cotisations sur la contrainte ne peut entraîner la nullité de cette dernière.

Qu'il s'ensuit que la caisse n'a pas réduit la portée de son appel par ses dernières conclusions et que les dispositions du jugement déféré annulant la contrainte litigieuse sont déférées à la Cour.

Que par contre ne lui sont pas déférées les dispositions du jugement déclarant fondée l'opposition de Monsieur [B] et que la Cour n'en est donc pas saisie.

SUR LA FIN DE NON-RECEVOIR OPPOSEE PAR LA CIPAV A LA DEMANDE DE MONSIEUR [B] EN LIQUIDATION DE SA RETRAITE ET DE SA DEMANDE EN DOMMAGE ET INTERETS.

Vu l'article R. 142-1 du code de la sécurité sociale ;

Attendu selon ce texte, que si la procédure de sécurité sociale comporte, en principe, une saisine préalable de la commission de recours amiable dont l'omission constitue une fin de non-recevoir qui peut être soulevée en tout état de cause, les actions en dommages-intérêts engagées contre les organismes de sécurité sociale échappent à cette règle ( 2e Civ., 3 février 2011, pourvoi n° 10-10.357, Bull. 2011, II, n° 27 ; 2e Civ., 7 juillet 2016, pourvoi n° 15-21.370 ; 2e Civ., 20 juin 2019, pourvoi n° 16-10.043)

Qu'il résulte de ce qui précède que l'action en dommages et intérêts engagée par Monsieur [B] devant le Tribunal pour obtenir réparation du caractère tardif du versement de ses retraites de base et complémentaire n'avait pas à être précédée d'une saisine préalable de la commission de recours amiable de la caisse, peu important le lien éventuel allégué par la CIPAV entre la demande de liquidation et la demande de dommages et intérêts présentées par Monsieur [B].

Que c'est donc à très juste titre que les premiers juges ont déclaré recevable la demande de dommages et intérêts ce qui justifie la confirmation des dispositions en ce sens du jugement déféré.

Attendu que la Cour n'étant saisie d'aucun appel incident de Monsieur [B] portant sur les dispositions du jugement déféré déclarant irrecevable sa demande en liquidation de sa retraite, la demande de la CIPAV sollicitant le rejet de cette demande, figurant dans les motifs de ses écritures soutenues à l'audience, apparaît totalement sans objet ce qui en justifie qu'elle en soit déboutée.

SUR LA DEMANDE DE PRONONCE DE LA NULLITE DE LA CONTRAINTE LITIGIEUSE ;

Attendu qu'à l'appui de sa demande en nullité de la contrainte litigieuse Monsieur [B] consacre des développements laconiques en page 6 de ses conclusions soutenues à l'audience où il fait en substance valoir que la décision de refus de régularisation des cotisations de Monsieur [B] sur une base réelle intervenu par courrier de la CIPAV du 23 février 2018 avait fait l'objet d'un recours amiable auprès de la commission de recours amiable préalablement à la notification de la contrainte, ce dont il semble possible de déduire qu'il a entendu faire valoir que la saisine de la commission de recours amiable de l'organisme rendrait irrecevable la délivrance d'une contrainte tant que cette commission n'a pas rejeté le recours.

Attendu cependant qu'il résulte des articles R. 133-3 et R. 142-1 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige, que les organismes de recouvrement du régime général conservent la possibilité de décerner une contrainte nonobstant la saisine de la commission de recours amiable ( 2e Civ., 1 décembre 2022, pourvoi n° 21-17.379).

Que le moyen de Monsieur [B] de nullité de la contrainte litigieuse tiré de la saisine préalable de la commission de recours amiable de la CIPAV manque donc en droit ce dont il résulte qu'il convient de le débouter de sa demande d'annulation de la contrainte litigieuse pour vice de forme.

Attendu qu'il résulte de l'article 472 du Code de procédure civile qu'en appel, si l'intimé ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, mais le juge ne fait droit aux prétentions et moyens de l'appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés et qu'aux termes de l'article 954, dernier alinéa du même Code la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.

Attendu qu'en l'espèce il n'apparaît pas que Monsieur [B], qui demande la confirmation du jugement, ait énoncé de nouveaux moyens en cause d'appel.

Qu'il s'ensuit qu'il est réputé s'approprier les motifs du premier juge.

Attendu qu'aux termes de l'article L131-6-2 du Code de la sécurité sociale dans sa version en vigueur du 01 janvier 2015 au 14 juin 2018 résultant de la loi n°2014-626 du 18 juin 2014 - art. 25 :

Les cotisations des travailleurs indépendants non agricoles ne relevant pas du régime prévu à l'article L. 133-6-8 sont dues annuellement. Leurs taux respectifs sont fixés par décret.

Elles sont calculées, à titre provisionnel, sur la base du revenu d'activité de l'avant-dernière année. Pour les deux premières années d'activité, les cotisations provisionnelles sont calculées sur la base d'un revenu forfaitaire fixé par décret après consultation des conseils d'administration des organismes de sécurité sociale concernés.

Lorsque le revenu d'activité de la dernière année écoulée est définitivement connu, les cotisations provisionnelles, à l'exception de celles dues au titre de la première année d'activité, sont recalculées sur la base de ce revenu.

Lorsque le revenu d'activité de l'année au titre de laquelle elles sont dues est définitivement connu, les cotisations font l'objet d'une régularisation sur la base de ce revenu.

Qu'aux termes du décret n°79-263 du 21 mars 1979 relatif au régime d'assurance invalidité-décès des architectes, agréès en architecture, ingénieurs, techniciens, experts et conseils dans sa rédaction applicable :

Le régime d'assurance invalidité-décès institué par l'article 1er est financé par des cotisations dont les personnes mentionnées à l'article 1er sont obligatoirement redevables en sus de la cotisation du régime d'assurance vieillesse de base des professions libérales prévu au livre VI, titre IV, du code de la sécurité sociale et de la cotisation du régime d'assurance vieillesse complémentaire institué par le décret susvisé du 21 mars 1979.

Les conjoints collaborateurs des personnes mentionnées à l'article 1er cotisent à titre obligatoire audit régime d'assurance invalidité-décès et bénéficient de ses avantages.

Ces cotisations sont versées à la section professionnelle mentionnée à l'article 1er dans les mêmes formes et conditions que la cotisation du régime d'assurance vieillesse de base.

Que l'article D. 642-6, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale, prévoyait, jusqu'à son abrogation par le décret no2017-1894 du 30 décembre 2017 applicable aux cotisations et aux contributions de sécurité sociale dues au titre des périodes courant à compter du 1er janvier 2018 que « ne font pas l'objet de la régularisation prévue au troisième alinéa de l'article L. 642-2 ( devenu L.131-6-2 ) les cotisations des assurés qui, l'année au cours de laquelle la régularisation aurait dû être opérée par une section professionnelle, soit n'exercent aucune activité relevant de ladite section, soit ont fait liquider leurs droits à pension de retraite de base »

Attendu qu'il résulte du troisième alinéa de l'article L.131-6-2 précité du Code de la sécurité sociale dont les dispositions se suffisent à elle-mêmes et du décret n°79-263 du 21 mars 1979 que ces textes font obstacle à l'application des dispositions de l'article D.242-6 précitées tant en ce qui concerne les cotisations dues au titre du régime d'assurance vieillesse de base que celles dues au titre du régime d'assurance vieillesse complémentaire et du régime d'invalidité-décès et qu'il y a donc lieu de recalculer les cotisations provisionnelles, à l'exception de celles dues au titre de la première année d'activité, sur la base du revenu d'activité de la dernière année écoulée lorsque ce revenu a été porté à la connaissance de l'organisme ( en ce sens, en application du texte de l'article L.642-2 alinéa 3 du Code de la sécurité sociale pour l'essentiel repris par celui de l'article L.131-6-2 alinéa 3 du même Code 2e Civ., 2 juin 2022, pourvoi n° 20-22.853 ; 2e Civ., 8 juillet 2021, pourvoi n° 20-13.334 portant plus spécifiquement sur les cotisations dues au titre du régime complémentaire et du régime d'invalidité décès  ; 2e Civ., 25 janvier 2018, pourvoi n° 17-11.343 ; 2e Civ., 27 novembre 2014, pourvoi n° 13-19.495 2e Civ., 15 juin 2017, pourvoi n° 16-21.372, Bull. 2017, II, n° 138: 2e Civ., 27 novembre 2014, pourvoi n° 13-21.932 ; 2e Civ., 27 novembre 2014, pourvoi n° 13-19.495 2e Civ., 27 novembre 2014, pourvoi n° 13-21.556, Bull. 2014, II, n° 239.

Attendu ensuite que l'erreur d'un organisme social n'est pas créatrice de droits sauf lorsque la décision erronée présente un caractère définitif faisant obstacle à sa rectification.

Qu'il s'ensuit que l'éventuelle erreur contenue dans un courrier d'appel de cotisations ou un relevé de situation ne présentant pas le caractère d'une décision notifiée et encore moins d'une décision définitive ne peut créer aucun droit au profit du cotisant.

Attendu qu'il résulte des articles R.243.18 et R.243-20 dans leurs rédactions applicables que les majorations de retard sont dues pour toutes les cotisations non acquittées à la date limite de leur exigibilité, peu important que leur montant fasse l'objet d'une diminution judiciaire ou par voie de régularisation, que les majorations tant de 5% que de 0,4 % ne peuvent faire l'objet d'une remise totale ou partielle par le juge que si l'organisme ou, en fonction du montant des majorations en cause, sa commission de recours amiable ont été préalablement saisis et si la bonne foi du redevable est établie, que la majoration de retard de 5 % mentionnée à l'article R. 243-18 peut faire l'objet d'une remise après règlement de la totalité des cotisations ayant donné lieu à application de la majoration et que la majoration complémentaire de 0,4 % par mois ou fraction de mois de retard peut faire l'objet d'une remise lorsque les cotisations ont été acquittées dans le délai de 30 jours qui suit la date limite d'exigibilité ou à titre exceptionnel en cas d'événements présentant un caractère irrésistible et extérieur.

Attendu enfin que si les contraintes sont soumises aux nullité des actes de procédure ( a contrario 2e Civ., 18 septembre 2014, pourvoi n° 13-17.867 Cass. ass. plén.,7 avril 2006, n° 04-30.353, bull. ass. plén., 4), elles ne sont, comme tous les actes de procédure, susceptibles d'encourir une nullité de fond que pour les causes limitativement énumérées à l'article 117 du Code de procédure civile ce dont il résulte que le seul fait que tout ou partie des causes d'une contrainte ne soient pas due ne saurait entraîner sa nullité mais la priver seulement de tout effet pour sa partie non fondée ( en ce sens que les causes de nullité énumérées à l'article 117 du Code de procédure civile sont limitatives la jurisprudence citée au fascicule 600-55 du jurisclasseur de procédure civile sur la nullité des actes de procédure. ' Irrégularités de fond Date du fascicule : 23 Mai 2022 Date de la dernière mise à jour : 15 Septembre 2022 par [S] [I] actualisé par [F] [N] - Professeur à l'université de [Localité 5]).

Attendu que la contrainte litigieuse du 16 avril 2018 porte sur une somme totale de 2085 € au titre des tranches 1 et 2 du régime de base outre 142,33 € au titre des majorations correspondant à la tranche 2, sur une somme de 7888 € au titre de la retraite complémentaire et sur une somme de 867,66 € au titre des majorations correspondantes aux cotisations de retraite complémentaire.

Attendu que la CIPAV a calculé dans la contrainte le montant des cotisations réclamées à Monsieur [B] en refusant d'effectuer la régularisation des cotisations 2016 de ce dernier en fonction de ses revenus réellement perçus par lui en 2016 et ce au motif manquant en droit tiré de l'application des dispositions de l'article D.242-6 du Code de la sécurité sociale et de la fin d'affiliation de l'intéressé au 30 juin 2016.

Que pourtant, elle a dans ses conclusions soutenues à l'audience ( page 8 ) recalculé les cotisations du régime de base de Monsieur [B] en fonction de ses revenus déclarés pour 2016, ce qui l'amène à réclamer finalement des cotisations d'un montant de 448 € à ce titre.

Que de même, après avoir expliqué qu'elle ne pouvait faire autrement que de réclamer les cotisations de la retraite complémentaire sur le revenu de l'année N-1, elle calcule ces dernières en fonction du revenu réel de l'intéressé en page 11 de ses écritures ce qui donne une somme de 607 €, compte tenu de la proratisation à la date de la radiation.

Attendu que le revenu déclaré par Monsieur [B] pour 2016, dont il est établi par de nombreux courriers de Monsieur [B] et notamment un courrier du 10 octobre 2017 reçu par elle le 16 octobre 2017 que la CIPAV en a eu connaissance bien avant la délivrance de la contrainte ce qu'elle ne conteste d'ailleurs pas, s'établit à la somme de 2581 €.

Attendu qu'au terme des articles L.642-1 et D.642-4 du Code de la sécurité sociale dans leurs rédactions applicables, le montant de la cotisation annuelle ne peut être calculé sur une assiette inférieure à 11,5% de la valeur annuelle du plafond de la sécurité sociale en vigueur au 1er janvier de l'année au titre de laquelle la cotisation annuelle est due tandis que pour les assurés dont la durée d'affiliation est d'au moins 90 jours au cours de l'année considérée la valeur du plafond n'est pas réduite au prorata de la période d'affiliation.

Qu'ayant été affilié plus de 90 jours en 2016 ( sa cessation d'activité étant intervenue au 30 juin 2016) et ayant déclaré un revenu de 2581 €, Monsieur [B] était donc redevable d'une cotisation minimale de 448 € au titre de l'assurance vieillesse de base pour 2016.

Attendu que le montant de la cotisation de la retraite complémentaire doit également être calculé en fonction des revenus 2016 déclarés par Monsieur [B].

Qu'il résulte du décret du 29 décembre 2015 que pour des revenus inférieurs à 26580 € d'un adhérent ressortissant comme Monsieur [B] de la classe A , la cotisation est fixée pour 2016 à 1214 €.

Attendu qu'aux termes de l'article 3.7 des statuts de la CIPAV le montant de la cotisation complémentaire doit être calculé au prorata de la durée de la période d'activité sur l'année en cas de cessation totale et effective de l'activité.

Que Monsieur [B] ayant cessé son activité au 30 juin 2016, il était donc redevable de la somme de 607 € au titre de la retraite complémentaire, sans qu'il puisse solliciter la réduction de cette somme en application de l'article 3.12 des statuts de la CIPAV, faute d'avoir formulé une telle demande dans le délai de forclusion de trois mois suivant l'exigibilité de la cotisation.

Qu'il résulte de tout ce qui précède qu'à la date de la délivrance de la contrainte il était dû par Monsieur [B] au titre des cotisations pour 2016 la somme de 448 € au titre du régime de base et celle de 607 € au titre de la retraite complémentaire tandis qu'il lui était réclamé une somme de 142,33 € au titre des majorations de retard sur la tranche 2 et une somme de 867,66 € au titre des majorations de retard sur les cotisations complémentaires et qu'il devait le paiement de ces majorations tant qu'il n'en avait pas sollicité et obtenu la remise auprès de l'organisme ou du juge.

Que les sommes dues au titre du commandement litigieux s'établissaient donc au total à la somme de 2064,99 €.

Attendu qu'il convenait de déduire des sommes réclamées par la contrainte la somme de 455 € apparaissant sur la contrainte au titre des acomptes versés.

Que par contre, contrairement à ce qu'a retenu le Tribunal, la CIPAV n'avait aucunement reconnu avoir perçu une somme de 1235 € avant la date d'émission de la mise en demeure, la seule discordance entre les appels de cotisations résultant des courriers du 18 novembre 2016 et du 20 octobre 2018 n'impliquant aucunement que la CIPAV ait reconnu avoir perçu des sommes correspondant à la différence de celles réclamées dans ces appels de cotisations.

Que cependant, la CIPAV a reconnu en page 11 de ses écritures d'appel avoir perçu le règlement d'une somme totale de 1690 € dont fait état Monsieur [B] dans ses écritures puisqu'elle indique que ce montant avait été déduit avant la délivrance de la contrainte des cotisations dues au titre du régime de base à hauteur de 1589 € et 25 € et de la cotisation invalidité décès à hauteur de 76 €.

Que c'est donc finalement une somme totale de 1690 € qu'il convient de déduire des montants dus en cotisations au titre de la contrainte et réclamés au titre des majorations, laquelle somme correspond d'ailleurs aux règlements déduits par le Tribunal des montants dus puisqu'elle correspond à l'addition des deux sommes de 1235 € et 455 € prises en compte par les premiers juges au titre des règlements de Monsieur [B].

Qu'il restait donc dû par ce dernier au titre des causes du commandement la somme de 374,99 € en cotisations et majorations .

Attendu que la liste des nullités de fond de l'article 117 du code de procédure civile étant limitative et ne comportant que le défaut de capacité d'ester en justice, le défaut de pouvoir d'une partie ou d'une personne figurant au procès comme représentant soit d'une personne morale soit d'une personne atteinte d'une incapacité d'exercice et le défaut de capacité ou de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice, les premiers juges ne pouvaient à bon droit prononcer la nullité de la contrainte à raison de l'absence de justification de ses causes, étant au surplus rappelé que la contrainte était bien-fondée à hauteur d'une somme de 374,99 €

Qu'il convient en conséquence, réformant le jugement du chef de l'annulation de la contrainte litigieuse, de dire que la contrainte n'avait été délivrée à bon droit que pour recouvrement d'une somme de 374,99 € en cotisations et majorations et qu'elle ne pouvait produire aucun effet pour le surplus des sommes réclamées de ces chefs.

Attendu que les majorations de retard réclamées par la CIPAV dans la contrainte ayant été annulées par cette dernière ( page 13 de ses écritures), ce qui représente une somme de 1009,99 €, il convient de dire que la contrainte ne peut plus produire aucun effet et qu'il est dû par la CIPAV la somme de 635 € à Monsieur [B].

Que ce dernier sollicitant la confirmation du jugement déféré ayant notamment condamné la CIPAV à la régularisation d'un crédit de 559 € au bénéfice de Monsieur [B] et la CIPAV ne prouvant aucunement avoir procédé au remboursement du trop versé par ce dernier, il convient, dans les limites de la demande, de confirmer le jugement de ce chef.

Attendu qu'aux termes de l'article R.133-6 du Code de la sécurité sociale les frais de signification de la contrainte et de tous actes de procédure nécessaires à son exécution sont la charge du débiteur sauf lorsque l'opposition a été jugée fondée ;

Attendu qu'en l'espèce les causes de la contrainte s'établissant à 10564,99 € et l'opposition de Monsieur [B] étant infondée à hauteur de la somme de 374,99 € et fondée pour le surplus, soit 10190 €, il convient de confirmer le jugement déféré en ses dispositions faisant supporter les frais de signification de la contrainte à la CIPAV à l'exception d'une somme de 7,73 € qu'il convient de faire supporter à Monsieur [B] au titre du prorata des frais par rapport aux sommes effectivement dues lors de la notification de la contrainte.

SUR L'ACTION EN RESPONSABILITE ENGAGEE PAR MONSIEUR [B] A L'ENCONTRE DE LA CIPAV.

Attendu qu'il résulte clairement des écritures de l'intimé que son action en dommages et intérêts dirigée contre la CIPAV porte sur deux chefs de préjudices bien distincts, à savoir une demande en dommages et intérêts à hauteur de 10 000 € au titre du préjudice financier que le retard de versement de ses retraites lui aurait occasionné et une action en dommages et intérêts à hauteur de 5000 € au titre des procédures abusives diligentées à son encontre par la CIPAV.

Que cette dernière action, fondée sur l'abus de droit, n'a donc rien à voir avec sa demande d'indemnisation au titre de la responsabilité de droit commun des organismes de sécurité sociale et fera l'objet de développements spécifiques ultérieurs.

Attendu que les organismes de sécurité sociale sont soumis aux règles de droit commun de la responsabilité extra-contractuelle issues de l'article 1382 du code civil, devenu 1240 du même code ( en ce sens Soc, 12 juillet 1995, pourvoi no93-12.196 , Bull V no 242 mettant fin à la jurisprudence antérieure selon laquelle il était traditionnellement jugé que la responsabilité d'un organisme de sécurité sociale ne pouvait être engagée qu'en cas d'erreur grossière ou lorsqu'il causait un préjudice anormal), la condamnation de l'organisme étant comme il se doit subordonnée à la démonstration d'une faute, d' un préjudice et d'un lien de causalité entre la faute et le préjudice et les juges du fond disposant d'un pouvoir souverain d'appréciation du préjudice et du lien de causalité ( Cass. soc. 29 mars 2001 no 99-18.098, Cass. 2e civ. 13 mai 2003 no 01-21.423 ; 14 décembre 2004 no 03-30.617) sous le contrôle la Cour de Cassation en ce qui concerne la caractérisation par eux de la faute retenue à l'encontre de l'organisme de sécurité sociale .

Attendu qu'en ce qui concerne la retraite de base devant être servie par la CIPAV il est prévu par l'article R.643-6 du Code de la sécurité sociale que son entrée en jouissance est fixée au premier jour du trimestre civil qui suit la demande de l'intéressé ce dont il résulte, le texte ne pouvant se voir ajouter par l'organisme des conditions qu'il ne prévoit pas, qu'il n'est pas possible à ce dernier d'en refuser la liquidation si des cotisations sont impayées.

Qu'il résulte par contre de l'article 3.16 des statuts de la Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d'assurance vieillesse, la liquidation de la pension du régime de retraite complémentaire des personnes affiliées à cette caisse ne peut être effectuée avant que la totalité des cotisations et majorations échues, au titre des années antérieures à l'entrée en jouissance de la pension , ne soit acquittée et en cas de paiement tardif la date d'effet de la retraite est reportée au premier jour du mois suivant la régularisation ( 2e Civ., 26 mai 2016, pourvoi n° 14-26.614 ; 2e Civ., 12 novembre 2020, pourvoi n° 19-11.150 / et s'agissant des prestations invalidité décès en application de l'article 4-10 des statuts notamment 2e Civ., 31 mai 2018, pourvoi n° 16-21.770 et également dans le même sens 2e Civ., 17 décembre 2009, pourvoi n° 08-21.942 et 2e Civ., 14 mars 2013, pourvoi n° 12-15.250).

Attendu qu'en ce qui concerne la demande de retraite présentée par Monsieur [B] il est établi par le courrier de la CIPAV du 17 mai 2017 produit par ce dernier en pièce n° 15 qu'elle a été déposée en date du 23 mai 2016 et que l'organisme a invité l'intéressé à redéposer un dossier une fois le compte de cotisations régularisé auprès de l'huissier chargé du recouvrement de ces dernières.

Attendu que la CIPAV justifie par la production des notifications correspondantes avoir liquidé la pension de retraite de base de Monsieur [B] le 23 mars 2021 avec effet rétroactif au 1er juillet 2016 et sa pension de retraite complémentaire le 23 mars 2021 avec prise d'effet à la date du 1er octobre 2017.

Attendu qu'en ce qui concerne la retraite de base, elle aurait dû être liquidée à la date du 1er jour du trimestre civil suivant la demande de Monsieur [B] à savoir à la date du 1er juillet 2016 et non le 23 mars 2021.

Que cette liquidation de la retraite 4 ans et pratiquement 8 mois après la date à laquelle elle aurait dû intervenir est totalement contraire aux textes et présente un caractère fautif.

Attendu qu'en ce qui concerne la pension du régime de retraite complémentaire, il n'est aucunement justifié par Monsieur [B] de la date à laquelle la CIPAV a procédé à l'annulation des majorations de retard dont il restait redevable au titre de l'année 2016, la CIPAV se contenant pour sa part d'indiquer qu'elle a procédé à l'annulation de ces majorations mais sans fournir d'autres précisions ni justificatifs.

Que Monsieur [B] n'établissant pas la date à laquelle la totalité des cotisations et majorations dont il était redevable ont été acquittés, il s'ensuit qu'il ne prouve pas que la CIPAV ait liquidé tardivement sa retraite complémentaire, c'est-à-dire à une date postérieure au premier jour du mois suivant la régularisation de la totalité des sommes dues.

Attendu que la faute de la CIPAV est caractérisée en ce qui concerne la retraite de base de l'intimé, versée avec plus de quatre ans de demi de retard.

Que cette situation en soi extrêmement préjudiciable l'a été d'autant plus que Monsieur [B] justifie avoir subi une diminution sensible de ses revenus du fait de son départ en retraite courant 2016 puisqu'il a déclaré au titre de ses revenus 2015, avant cessation d'activité, un revenu imposable de 190416 € et que son revenu imposable des années suivantes a fortement diminué, comme en témoigne son avis d'imposition 2019 faisant apparaitre un revenu fiscal de 101884 € pour 2018.

Que Monsieur [B] s'est donc trouvé confronté à une diminution sensible de ses revenus pendant quatre ans et demi en partie par la faute de la CIPAV, ce qui lui a occasionné des difficultés de trésorerie dont témoigne l'échéancier de règlement sollicité par lui par courrier du 1er décembre 2016 à l'étude d'huissier chargée du recouvrement de la contrainte du 29 novembre 2016 et accepté par cette dernière par courrier du 6 décembre 2016.

Que les conséquences de ce retard de liquidation de la pension de l'intéressé pendant un peu plus de quatre ans et demi doivent être indemnisées par l'octroi d'une somme de 10 000 € de dommages et intérêts ce qui justifie la confirmation des dispositions du jugement déféré de ce chef.

SUR LA DEMANDE EN DOMMAGES ET INTERETS POUR PROCEDURES ABUSIVES PRESENTEE PAR MONSIEUR [B].

Attendu qu'il résulte de l'article 1382 du Code Civil que l'octroi de dommages-intérêts pour procédure abusive n'est pas subordonné à l'existence d'une faute dolosive ou équipollente au dol mais suppose seulement que soit caractérisée une faute ayant fait dégénérer en abus le droit d'agir en justice ou l'exercice des voies de recours ( Cf not . Ch. Mixte, 11 mars 2005, no 02-41.371) et que ne caractérisent pas une telle faute les motivations qui se bornent à affirmer que l'action intentée, ou la défense à cette action, était téméraire, malicieuse ou manifestement dilatoire sans faire apparaître les éléments constitutifs d'une évidente mauvaise foi, l'absence manifeste de tout fondement, la multiplication des procédures engagées, le caractère malveillant de l'action ( en ce sens par exemple 3e Civ., 30 juin 2021, pourvoi n° 20-12.317 qui casse l'arrêt ayant prononcé une amende civile à l'encontre de tiers-opposants au motif que la clarté du litige aurait dû les conduire à prendre conscience de leur absence de droit et ayant prononcé des dommages et intérêts pour procédure abusive au motif que les victimes de cette dernière auraient subi un réel préjudice du fait de l'action sans fondement qui a retardé pour eux la possibilité de jouir paisiblement de leur propriété) mais que constitue par contre un abus de droit justifiant le prononcé d'une amende civile ou une condamnation à des dommages et intérêts pour procédure abusive le fait pour une partie d'avoir engagé une action dont elle n'a jamais justifié du bien fondé et dont elle ne pouvait ignorer le caractère infondé tant en fait qu'en droit (2e Civ., 18 mai 2017, pourvoi no 16-18.083 / Egalement 2e Civ., 22 octobre 2020, pourvoi n° 19-21.854 qui rejette un pourvoi dirigé contre un arrêt ayant prononcé une condamnation à une amende civile à l'encontre d'un appelant motivée par le fait que l'argumentation au fond de l'appelante était fondée sur des arrêts anciens de la Cour de Cassation allant dans le sens de sa thèse en passant sous silence ceux ayant retenu le caractère décennal dans des affaires analogues, et d'autre part, que la motivation du jugement était claire et précise, de sorte que l'appel apparaissait à la fois abusif et dilatoire en ce qu'il retardait d'autant l'issue de la procédure / Egalement 2e Civ., 5 janvier 2023, pourvoi n° 21-17.182 dont il résulte que la Cour d'Appel a caractérisé la faute ayant fait dégénérer en abus l'exercice par la partie de son droit d'appel en relevant que l'appel interjeté portait sur un jugement de condamnation à 157 € lequel et sa notification mentionnaient très clairement qu'il était rendu en dernier ressort et n'était susceptible que d'un pourvoi en cassation et en relevant l'inutilité des fins de non recevoir soulevées en première instance et la validité de la contrainte.

Attendu que si Monsieur [B] n'invoque aucun fait au soutien de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive, il n'apparaît pas qu'il ait énoncé de nouveaux moyens en cause d'appel, ce dont il résulte, compte tenu de ce qu'il sollicite la confirmation du jugement déféré, qu'il est réputé s'approprier les motifs des premiers juges.

Attendu que ces derniers ont relevé que la caisse, après avoir rappelé que les dispositions de l'article D.642-6 du Code de la sécurité sociale n'étaient pas applicables, avait adopté une pratique illégale quant à la détermination de l'assiette applicable au paiement des cotisations sociales puis qu'elle s'était également égarée dans la détermination du régime applicable à la liquidation des droits de retraite de son assuré et qu'invitée à plusieurs reprises par Monsieur [B] à régulariser sa situation, elle avait persévéré dans l'application d'une pratique non conforme au droit de la sécurité sociale.

Attendu cependant que ces motifs ne sont susceptibles de caractériser l'existence d'une procédure abusive qu'en ce qui concerne la revendication par la CIPAV jusqu'à une date récente du paiement des causes intégrales de la contrainte et son refus de régularisation des cotisations 2016 de l'intimé sur la base de ses revenus réels.

Qu'en effet aucune demande recevable n'ayant été introduite contre le refus de régulariser la situation de Monsieur [B] en ce qui concerne la liquidation de ses retraites, il s'ensuit que la CIPAV ne peut avoir opposé aucune résistance abusive à une demande de Monsieur [B] de ce chef, la seule résistance de la CIPAV à ce titre ayant à juste titre porté sur la recevabilité de la demande, faute de saisine préalable de la commission de recours amiable, et ne pouvant en conséquence revêtir un caractère abusif.

Attendu que la Cour entend faire sien le motif des premiers juges tiré de l'application abusive par la CIPAV de l'article D.242-6 du Code de la sécurité sociale et insister en outre sur le fait que la CIPAV était parfaitement informée par la jurisprudence constante de la Cour de Cassation dès 2014 de l'inapplicabilité de l'article D.642-6 et donc du caractère illégal de son refus de régulariser les cotisations dues au titre de l'année 2016 au vu des revenus réels 2016 de Monsieur [B], illégalité qu'elle a d'ailleurs fini par reconnaître en recalculant les cotisations sur la base de la bonne assiette.

Qu'il sera ajouté que la CIPAV s'est également opposé de manière abusive en première instance puis en cause d'appel à la recevabilité de la demande de dommages et intérêts présentée par ce dernier au motif manquant totalement en droit et présenté manifestement de mauvaise foi que cette demande aurait un lien, qu'elle n'explicite aucunement, avec la demande de liquidation de la retraite de l'intéressé, alors qu'il résulte de manière constante des textes et de la jurisprudence constante de la Cour de Cassation en faisant application que les actions en dommages et intérêt dirigées contre les organismes de sécurité sociale ne sont pas soumises à la formalité de la saisine préalable de leur commission de recours amiable.

Attendu qu'il résulte de ce qui précède que la CIPAV a bien diligenté une procédure abusive à l'encontre de Monsieur [B] en lui réclamant des sommes manifestement indues à la suite de son refus de recalculer ses cotisations en fonction de son revenu réel puis en s'opposant en première instance puis en cause d'appel à la recevabilité de ses demandes indemnitaires et ce de manière totalement contraire au droit positif existant depuis de très nombreuses années ce qu'elle ne pouvait méconnaître.

Qu'il convient dans ces conditions, pour les motifs qui précèdent, de confirmer les dispositions du jugement déféré condamnant l'appelante à verser à Monsieur [B] une somme de 5000 € au titre de son préjudice moral.

SUR LE PRONONCE D'UNE AMENDE CIVILE.

Attendu qu'aux termes de l'article 32-1 du code de procédure civile :

« Celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10 000 €, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés ».

Attendu que la Cour entend réitérer dans les présents développements les motifs indiqués ci-dessus caractérisant l'abus de droit auquel s'est livré la CIPAV en rappelant en premier lieu que cette dernière était parfaitement informée par la jurisprudence constante de la Cour de Cassation dès 2014 de l'inapplicabilité de l'article D.642-6 et donc du caractère illégal de son refus de régulariser les cotisations dues au titre de l'année 2016 au vu des revenus réels 2016 de Monsieur [B], illégalité qu'elle a d'ailleurs fini par reconnaître en recalculant les cotisations sur la base de la bonne assiette, et qu'elle a néanmoins persisté à réclamer des cotisations calculées de manière contraire aux textes, pour finalement reconnaître en fin de procédure le bien-fondé des revendications de l'intimé de ce chef, et en rappelant en second lieu que la CIPAV s'est également opposée de manière abusive en cause d'appel à la recevabilité de la demande de dommages et intérêts présentée par ce dernier au motif manquant totalement en droit et présenté manifestement de mauvaise foi que cette demande aurait un lien, qu'elle n'explicite aucunement, avec la demande de liquidation de la retraite de l'intéressé, alors qu'il résulte de manière constante des textes et de la jurisprudence constante de la Cour de Cassation en faisant application que les actions en dommages et intérêt dirigées contre les organismes de sécurité sociale ne sont pas soumises à la formalité de la saisine préalable de leur commission de recours amiable.

Que cette action a la fois abusive et dilatoire de la CIPAV justifie le prononcé à son encontre d'une amende civile de 5000 €.

SUR LES DEPENS ET LES FRAIS NON REPETIBLES.

Attendu que la CIPAV succombant en l'essentiel de ses prétentions, il convient de confirmer les dispositions du jugement déféré relatives aux dépens et aux frais non répétibles et, y ajoutant, de condamner la CIPAV aux dépens d'appel et à verser à Monsieur [B] une somme supplémentaire de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS.

La Cour, statuant dans les limites de l'appel par arrêt contradictoire rendu en audience publique par sa mise à disposition au greffe,

Rejette la fin de non-recevoir opposée par la CIPAV à la demande de Monsieur [B] en liquidation de sa retraite et à sa demande en dommage et intérêts.

Réforme le jugement déféré en ses dispositions disant que la contrainte du 16 avril 2018 est nulle et modifie la formulation de celles mettant les frais de sa signification à la charge de la CIPAV en indiquant que Monsieur [B] est redevable à la CIPAV au titre de l'article R.133-6 du Code de la sécurité sociale de la somme de 7,73 €, le surplus des frais étant à la charge de l'organisme.

Déboute Monsieur [B] de sa demande d'annulation de la contrainte du 16 avril 2018 et dit que cette dernière n'a été délivrée à bon droit que pour recouvrement d'une somme de 374,99 € en cotisations et majorations et qu'elle ne pouvait produire aucun effet pour le surplus des sommes réclamées de ces chefs.

Dit que compte tenu de l'annulation ultérieure par la CIPAV des majorations figurant aux causes du commandement litigieux, la contrainte litigieuse ne peut plus produire aucun effet.

Confirme le jugement pour le surplus de ses dispositions déférées.

Et y ajoutant,

Condamne la CIPAV à une amende civile de 5000 € et à régler à Monsieur [B] une somme supplémentaire de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

Condamne la CIPAV aux dépens d'appel.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 20/05232
Date de la décision : 13/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-13;20.05232 ?
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