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02/02/2023 | FRANCE | N°22/01075

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 5eme chambre prud'homale, 02 février 2023, 22/01075


ARRET







[E] [Y]





C/



S.A. TRANSDEV CAP



























































copie exécutoire

le 02 février 2023

à

Me Daimé

Me Leroy

CB/MR/SF



COUR D'APPEL D'AMIENS



5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE



ARRET DU 02 FEVRIER 2023



****************

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N° RG 22/01075 - N° Portalis DBV4-V-B7G-ILZY



JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE COMPIEGNE DU 14 FEVRIER 2022 (référence dossier N° RG 21/00074)



PARTIES EN CAUSE :



APPELANT



Monsieur [G] [E] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 2]



Représenté et concluant par Me Aurelien DAIME, avocat au...

ARRET

[E] [Y]

C/

S.A. TRANSDEV CAP

copie exécutoire

le 02 février 2023

à

Me Daimé

Me Leroy

CB/MR/SF

COUR D'APPEL D'AMIENS

5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE

ARRET DU 02 FEVRIER 2023

*************************************************************

N° RG 22/01075 - N° Portalis DBV4-V-B7G-ILZY

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE COMPIEGNE DU 14 FEVRIER 2022 (référence dossier N° RG 21/00074)

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur [G] [E] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté et concluant par Me Aurelien DAIME, avocat au barreau de COMPIEGNE

ET :

INTIMEE

S.A. TRANSDEV CAP agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège :

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée, concluant et plaidant par Me Nathalie LEROY de la SELARL 25RUEGOUNOD, avocat au barreau de LILLE substituée par Me Agathe SAUVAGE, avocat au barreau de LILLE

DEBATS :

A l'audience publique du 01 décembre 2022, devant Madame Corinne BOULOGNE, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, l'affaire a été appelée.

Madame Corinne BOULOGNE indique que l'arrêt sera prononcé le 02 février 2023 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Malika RABHI

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Madame Corinne BOULOGNE en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :

Mme Corinne BOULOGNE, présidente de chambre,

Mme Caroline PACHTER-WALD, présidente de chambre,

Mme Eva GIUDICELLI, conseillère,

qui en a délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 02 février 2023, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Corinne BOULOGNE, Présidente de Chambre et Mme Malika RABHI, Greffière.

*

* *

DECISION :

M. [E] [Y] a été embauché par la société Transdev Cap à compter du 1er janvier 2018, par contrat de travail à durée indéterminée avec reprise d'ancienneté au 2 mai 2012, en qualité de conducteur receveur.

M. [E] [Y] a été victime d'un accident du travail le 4 février 2019 et a été placé en arrêt de travail à compter de cette date.

Le 28 septembre 2020, il a été déclaré inapte à son poste de travail par le médecin du travail avec possibilité de reclassement dans un poste sans conduite, ni manutention de charges.

Le 30 novembre 2020, la société Transdev Cap a proposé deux postes de reclassement au salarié, qui les a refusés par courrier du 7 décembre 2020.

Par courrier du 10 décembre 2020, le salarié a été convoqué par son employeur à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement pour inaptitude d'origine professionnelle.

Le 21 décembre 2020, le salarié a été licencié pour inaptitude d'origine professionnelle et impossibilité de reclassement.

Contestant la légitimité de son licenciement, il a saisi le conseil de prud'hommes de Compiègne le 29 avril 2021, lequel a rendu un jugement le 14 février 2022 aux termes duquel il a :

- dit que le licenciement de M. [E] [Y] était fondé sur une cause réelle et sérieuse ;

- débouté M. [E] [Y] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- condamné M. [E] [Y] au paiement de la somme de 50 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [E] [Y], qui est régulièrement appelant de ce jugement, par ses dernières conclusions remises par RPVA le 25 mars 2022, demande à la cour de :

- le dire recevable et bien fondé en toutes ses demandes ;

- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Compiègne du 14 février 2022, en ce qu'il a dit que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse, en ce qu'il l'a condamné à payer à la société Transdev Cap la somme de 50 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et l'a débouté de ses demandes ;

Statuant à nouveau,

- dire et juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- condamner la société Transdev Cap à lui payer la somme de 25 000 euros nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L.1226-15 du code du travail ;

- condamner la société Transdev Cap à lui verser la somme de 4 000 euros nets au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Transdev Cap à la remise des documents de fin de contrat de travail conformes à la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document ;

- condamner la société Transdev Cap aux entiers dépens ;

- condamner la société Transdev Cap aux intérêts au taux légal à compter de la saisine ;

- ordonner la capitalisation des intérêts ;

- débouter la société Transdev Cap de ses demandes reconventionnelles.

Par conclusions remises par RPVA le 22 juin 2022, la société Transdev Cap demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Compiègne en date du 4 février 2022 en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

- condamner M. [E] [Y] au paiement de la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 23 novembre 2022 et l'affaire fixée à l'audience de plaidoirie du 1er décembre 2022.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé aux dernières conclusions susvisées.

MOTIFS

1/ Sur le licenciement pour inaptitude

M. [E] [Y] soutient que le licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement prononcé à son encontre ne repose sur aucune cause réelle et sérieuse dès lors que les motifs s'opposant au reclassement n'ont été mentionnés pour la première fois qu'à l'occasion de l'envoi de la lettre de licenciement et non préalablement à la procédure de licenciement elle-même. Par ailleurs, il expose que l'employeur a manqué à son obligation de reclassement en ce qu'il ne démontre pas que les postes qui lui ont été proposés étaient les seuls disponibles, et se prévaut notamment de l'existence d'un poste d'agent d'exploitation qui était situé à une distance raisonnable de son domicile lorsque son licenciement a été prononcé. Il fait grief aux propositions de l'employeur de ne pas avoir été présentées loyalement compte-tenu du délai de réflexion trop court qui lui a été consenti pour y répondre. Il ajoute que les registres des effectifs versés aux débats par l'employeur sont incomplets et occultent les possibilités de reclassement dans la région. De même, il affirme que son employeur est défaillant dans la démonstration de ses recherches de reclassement au sein du groupe en dépit de ses nombreuses filiales sur le territoire national, et qui ont été interrogées aux termes d'un courriel type ne mentionnant pas les caractéristiques de l'emploi qu'il occupait, sa formation, et son expérience.

La société Transdev Cap réplique que le salarié ne saurait prospérer en son argumentation tendant à dire qu'il n'a pas été informé des motifs s'opposant à son reclassement préalablement à la procédure de licenciement dès lors que celui-ci a expressément refusé les deux postes qui lui étaient proposés. Sur la procédure de reclassement, l'employeur soutient avoir loyalement recherché un poste auprès des filiales du groupe par l'envoi d'un courriel auquel était annexé une fiche descriptive précisant l'emploi occupé par le salarié, sa formation et son expérience professionnelle. S'agissant du poste d'agent d'exploitation alors disponible, l'employeur précise, à l'aune de la fiche de poste qu'il verse aux débats, que celui-ci impliquait de remplacer les conducteurs absents de sorte qu'il ne satisfaisait pas aux limitations posées par le médecin du travail.

Sur ce,

Conformément à l'article L.1226-10 du code du travail, lorsque le salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Cette proposition prend en compte, après avis du comité économique et social, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.

Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce.

L'article L.1226-12 du même code prévoit que lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement.

L'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans l'emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l'emploi.

L'obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l'employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10, en prenant en compte l'avis et les indications du médecin du travail.

En application de ces dispositions, l'employeur a l'obligation de faire connaître au salarié, par écrit, les motifs qui s'opposent au reclassement, lorsqu'il est dans l'impossibilité de lui proposer un autre emploi. Il n'est toutefois pas tenu de cette obligation lorsqu'il a proposé au salarié, qui l'a refusé, un emploi, dans les conditions prévues à l'article L. 1226-10 du code du travail.

La présomption instituée par ce texte ne joue que si l'employeur a proposé au salarié, loyalement, en tenant compte des préconisations et indications du médecin du travail, un autre emploi approprié à ses capacités, aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.

En l'espèce, il est acquis que M. [E] [Y] a été victime d'un accident du travail le 4 février 2019 et qu'à la suite d'un arrêt de travail, le médecin du travail, par avis d'inaptitude du 28 septembre 2020, l'a déclaré inapte à son poste de conducteur receveur avec possibilité de reclassement dans un poste sans conduite, ni manutention de charges.

Il est également établi que sur les dix postes identifiés par l'employeur, le CSE de l'entreprise, lors de sa réunion extraordinaire du 26 novembre 2020, s'est prononcé favorablement sur la proposition de deux postes pour le reclassement du salarié.

Il n'est pas discuté par les parties que ces deux propositions de reclassement étaient appropriées à ses capacités et conformes aux recommandations de la médecine du travail.

Des propositions de reclassement ont été faites au salarié par courrier du 30 novembre 2020, il est observé que M. [E] [Y] les a refusées par courrier du 7 décembre 2020.

Il s'en suit que l'employeur, informé du refus du salarié de donner suite aux propositions de reclassement, n'était pas tenu d'informer celui-ci des motifs qui s'opposaient au reclassement préalablement à la procédure de licenciement.

S'agissant du caractère loyal des propositions réalisées par l'employeur, la cour observe que le salarié, sans préciser la raison pour laquelle il estime que le délai de réflexion d'une semaine pour se prononcer sur les offres de reclassement était insuffisant, a pourtant été en mesure d'y répondre dans le délai qui lui était imparti.

De même, la circonstance selon laquelle il existait un emploi vacant lors de son licenciement pour un poste d'agent d'exploitation transport sur le site de [Localité 4] ne saurait remettre en cause la loyauté des propositions de reclassement de l'employeur dès lors que ce poste impliquait des missions de conduite contraires aux préconisations du médecin du travail et qu'il n'avait pas, en conséquence, à lui être proposé.

Alors que l'obligation de reclassement ne relève pas d'une obligation de résultat mais d'une obligation de moyen renforcée excluant toute contrainte liée à la création d'un poste nouveau sans réelle utilité ou encore incompatible avec le bon fonctionnement de l'entreprise, l'argumentation soutenue par M. [E] [Y] tendant à dire que la société Transdev Cap pouvait avoir recours à des contrats de remplacement pour les missions de conduite n'apparait pas pertinente.

De surcroît, aucun élément ne permet d'établir le caractère incomplet du registre des entrées présenté par l'employeur pour la période concomitante au licenciement de M. [E] [Y], étant précisé que les effectifs sont répartis entre l'activité urbaine et inter-urbaine et non en fonction des sites d'activité.

Enfin, l'employeur justifie devant la cour de l'ampleur de ses recherches pour le reclassement de M. [E] [Y] au niveau national et notamment de l'envoi d'un courriel le 19 octobre 2020 à l'ensemble des entités du groupe Transdev auquel était jointe une fiche descriptive individuelle précisant l'emploi qu'il occupait, sa formation et son expérience professionnelle.

Ainsi, à l'aune de l'ensemble des éléments exposés, il est établi que l'employeur a été en mesure de proposer loyalement un autre emploi conforme aux recommandations de la médecine du travail et approprié aux capacités de M. [E] [Y] en vue de son reclassement, de sorte qu'il doit être présumé avoir satisfait à son obligation de reclassement en application de l'article L.1226-12 du code du travail.

Au contraire, M. [E] [Y] n'apporte aucun élément utile permettant de juger que l'employeur a méconnu son obligation de reclassement.

Dès lors, le jugement entrepris est confirmé en ce qu'il a dit que le licenciement de M. [E] [Y] était fondé sur une cause réelle et sérieuse et l'a débouté de ses demandes indemnitaires.

2/ Sur les frais irrépétibles et les dépens de l'instance

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la société Transdev Cap les frais irrépétibles qu'elle a exposés en appel. Elle est déboutée de sa demande sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il convient de condamner M. [E] [Y], succombant aux dépens de l'ensemble de la procédure et de le débouter de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement et en dernier ressort ;

Confirme le jugement rendu le 14 février 2022 par le conseil de prud'hommes de Compiègne en ses dispositions soumises à la cour,

Y ajoutant,

Déboute la société Transdev Cap de sa demande sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Déboute M. [E] [Y] de sa demande faite sur ce même fondement,

Condamne M. [E] [Y] aux dépens de l'ensemble de la procédure.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 5eme chambre prud'homale
Numéro d'arrêt : 22/01075
Date de la décision : 02/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-02;22.01075 ?
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