ARRET
N° 52
[O]
C/
MDPH DU NORD
COUR D'APPEL D'AMIENS
2EME PROTECTION SOCIALE
ARRET DU 12 JANVIER 2023
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N° RG 20/00191 - N° Portalis DBV4-V-B7E-HTPE - N° registre 1ère instance : 19/00566
JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE - POLE SOCIAL - DE VALENCIENNES EN DATE DU 20 décembre 2019
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE
Madame [C] [O]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par Me Véronique SOUFFLET, avocat au barreau d'AMIENS substituant Me Fabrice CHIVOT de la SELARL CHIVOT-SOUFFLET, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 92
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/006839 du 01/09/2022 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de AMIENS)
ET :
INTIME
MDPH DU NORD agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Adresse 5]
[Localité 4]
Non représentée
Convoquée par lettre simple le 18 mai 2022 suite à l'audience du 17 mai 2022
DEBATS :
A l'audience publique du 29 Septembre 2022 devant Mme Véronique CORNILLE, conseiller, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 12 Janvier 2023.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Marie-Estelle CHAPON
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme Véronique CORNILLE en a rendu compte à la Cour composée en outre de:
Mme Jocelyne RUBANTEL, Président de chambre,
Mme Chantal MANTION, Président,
et Mme Véronique CORNILLE, Conseiller,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
PRONONCE :
Le 12 Janvier 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Jocelyne RUBANTEL, Président a signé la minute avec Mme Blanche THARAUD, Greffier.
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DECISION
Le 16 octobre 2019, Mme [O] a sollicité de la Maison départementale des personnes handicapées du Nord (ci-après la MDPH) le bénéfice de l'allocation aux adultes handicapés (AAH).
Par une décision du 21 janvier 2020, la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées a rejeté la demande au motif d'un taux d'incapacité inférieur à 50%.
Saisi par Mme [O] dont le recours administratif préalable a été rejeté, le tribunal de grande instance de Valenciennes, pôle social, a, par jugement du 20 décembre 2019 :
- débouté Mme [O] de sa demande, - condamné Mme [O] aux dépens.
Par courrier recommandé expédié le 13 janvier 2020, Mme [O] a interjeté appel du jugement.
Par une ordonnance du 18 janvier 2021, la cour a ordonné une mesure de consultation sur pièces et désigné à cet effet le docteur [F].
Le docteur [F] a rendu un avis le 8 janvier 2022 et conclut que le taux d'incapacité permanente partielle est inférieur à 80%.
Les parties ont été convoquées à l'audience du 17 mai 2022, date à laquelle l'affaire a été renvoyée au 29 septembre 2022.
Par conclusions visées par le greffe le 29 septembre 2022 soutenues oralement à l'audience, Mme [O] demande à la cour de :
- dire son appel recevable et bien fondé,
- infirmer le jugement entrepris,
Statuant à nouveau,
- dire qu'à la date du 20 juillet 2018, elle ouvrait droit au bénéfice de l'allocation aux adultes handicapés dans la mesure où son taux d'incapacité était compris entre 50 et 79% et qu'elle connaissait une restriction substantielle et durable d'accès à un emploi,
- lui accorder le bénéfice de l'allocation aux adultes handicapés à compter du 20 juillet 2018.
Elle fait essentiellement valoir que la fibromyalgie dont elle souffre associée à un état dépressif sévère constituent des facteurs personnels restreignant substantiellement et durablement son accès à l'emploi.
Elle soutient que le tribunal a effectué une appréciation erronée de sa situation en considérant qu'elle ne présentait pas de restriction substantielle et durable à l'emploi alors d'une part que le médecin désigné par lui a constaté la réalité de ses traitements depuis des années pour des douleurs lombaires, cervicales, d'épaule ayant conduit à poser le diagnostic de fibromyalgie, outre un syndrome dépressif, et que d'autre part, le médecin traitant a indiqué que les traitements prescrits pour lutter contre les douleurs avait des effets secondaires sur sa mémoire et sa vitalité et qu'associé aux antidépresseurs, ils réduisaient sa capacité de travail. Elle développe que le médecin consultant a émis un jugement de valeur en considérant que le fait de travailler serait un facteur susceptible d'améliorer son état de santé et qu'il n'a pas expliqué en quoi elle pourrait travailler et surmonter sa restriction d'accès à l'emploi ; que le simple fait d'affirmer que travailler serait bon pour elle n'y suffit pas ; qu'elle ne peut plus exercer le métier d'auxiliaire de vie pour lequel elle est formée ; qu'elle ne peut pas exercer un métier debout, ni un métier mettant son corps à l'épreuve ; qu'elle ne peut pas rester assise trop longtemps ; que son périmètre de marche est limité.
La MDPH du Nord, régulièrement convoquée, est absente et non représentée. Elle a adressé des pièces par courrier reçu au greffe le 9 mars 2022.
Il convient de rappeler que la procédure étant orale devant la cour, les pièces adressées par courrier ne sont pas recevables.
MOTIFS
En vertu des dispositions combinées des articles L. 821-1 et D. 821-1 du code de la sécurité sociale, pour prétendre au bénéfice de l'allocation aux adultes handicapés (AAH), la personne handicapée doit justifier d'un taux d'incapacité permanente d'au moins 80%.
Toutefois, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du même code, ' l'AAH est également versée à toute personne qui remplit l'ensemble des conditions suivantes :
1° Son incapacité permanente, sans atteindre le pourcentage fixé par le décret prévu au premier alinéa de l'article L. 821-1 [80 %], est supérieure ou égale à un pourcentage fixé par décret [50 %] ;
2° La commission mentionnée à l'article L. 146-9 du code de l'action sociale et des familles lui reconnaît, compte tenu de son handicap, une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi, précisée par décret. (...) ».
Le guide barème pour l'évaluation des déficiences et incapacités des personnes handicapées, codifié à l'annexe 2-4 du code de l'action sociale et des familles définit la reconnaissance d'un taux d'incapacité de 80% comme étant une incapacité sévère entravant de façon majeure la vie quotidienne et entraînant une perte d'autonomie pour les actes de la vie courante.
Selon l''article D.821-1-2 du code de la sécurité sociale, « Pour l'application des dispositions du 2° de l'article L. 821-2, la restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi subie par une personne handicapée qui demande à bénéficier de l'allocation aux adultes handicapés est appréciée ainsi qu'il suit :
1° La restriction est substantielle lorsque le demandeur rencontre, du fait de son handicap même, des difficultés importantes d'accès à l'emploi. A cet effet, sont à prendre en considération :
a) Les déficiences à l'origine du handicap ;
b) Les limitations d'activités résultant directement de ces mêmes déficiences;
c) Les contraintes liées aux traitements et prises en charge thérapeutiques induits par le handicap ;
d) Les troubles qui peuvent aggraver ces déficiences et ces limitations d'activités.
Pour apprécier si les difficultés importantes d'accès à l'emploi sont liées au handicap, elles sont comparées à la situation d'une personne sans handicap qui présente par ailleurs les mêmes caractéristiques en matière d'accès à l'emploi.
2° La restriction pour l'accès à l'emploi est dépourvue d'un caractère substantiel lorsqu'elle peut être surmontée par le demandeur au regard :
a) Soit des réponses apportées aux besoins de compensation mentionnés à l'article L.114-1-1 du code de l'action sociale et des familles qui permettent de faciliter l'accès à l'emploi sans constituer des charges disproportionnées pour la personne handicapée ;
b) Soit des réponses susceptibles d'être apportées aux besoins d'aménagement du poste de travail de la personne handicapée par tout employeur au titre des obligations d'emploi des handicapés sans constituer pour lui des charges disproportionnées ;
c) Soit des potentialités d'adaptation dans le cadre d'une situation de travail.
3° La restriction est durable dès lors qu'elle est d'une durée prévisible d'au moins un an à compter du dépôt de la demande d'allocation aux adultes handicapés, même si la situation médicale du demandeur n'est pas stabilisée. La restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi est reconnue pour une durée de un à cinq ans.
4° Pour l'application du présent article, l'emploi auquel la personne handicapée pourrait accéder s'entend d'une activité professionnelle lui conférant les avantages reconnus aux travailleurs par la législation du travail et de la sécurité sociale.
5° Sont compatibles avec la reconnaissance d'une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi :
a) L'activité à caractère professionnel exercée en milieu protégé par un demandeur admis au bénéfice de la rémunération garantie mentionnée à l'article L. 243-4 du code de l'action sociale et des familles ;
b) L'activité professionnelle en milieu ordinaire de travail pour une durée de travail inférieure à un mi-temps, dès lors que cette limitation du temps de travail résulte exclusivement des effets du handicap du demandeur ;
c) Le suivi d'une formation professionnelle spécifique ou de droit commun, y compris rémunérée, résultant ou non d'une décision d'orientation prise par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées mentionnée à l'article L. 241-5 du code de l'action sociale et des familles. »
En l'espèce, le tribunal a rejeté la demande formée le 17 juillet 2018 par Mme [O], née le 29 janvier 1973, aide soignante, en se fondant sur le rapport du docteur [K], médecin consultant dont il ressort que : 'Mme [O] a travaillé pendant 13 ans jusqu'en 2005, a suivi des formations qui n'ont pas débouché sur un emploi. Elle est traitée depuis des années pour des douleurs lombaires, des douleurs cervicales, des douleurs d'épaules qui ont fait porter un diagnostic de fibromyalgie d'autant qu'il existe un syndrome dépressif. Des médicaments prescrits pour lutter contre les douleurs sont des médicaments à tendance asthéniante avec des effets secondaires sur la mémoire et la vitalité si bien que l'association des douleurs qui sont traitées par ces médicaments, l'association des antidépresseurs réduit certes les capacités de travail. Pour autant, il est préférable dans l'état de fibromyalgie de conserver une activité professionnelle, activité qui est également contestée par les malades qui s'estiment incapables de produire cet effort.
Effectivement, on est donc dans un taux compris entre 50 et 79% avec une capacité de travail qui est certes diminuée mais qui pourrait à mon sens, favoriser une réinsertion et une amélioration de la santé'.
Le tribunal a retenu que la restriction substantielle et durable à l'emploi n'était pas caractérisée.
Le docteur [F], médecin consultant de la cour indique : 'Mme [O] a fait une demande d'AAH pour une fibromyalgie invalidante est un syndrome dépressif. L'analyse de l'ensemble des pièces médicales versées au dossier conduit à retenir que les séquelles constatées à la date de la demande sont responsables d'un taux d'incapacité partielle permanente strictement inférieur à 80%.'
En l'état du taux d'incapacité inférieur à 80%, la demande de Mme [O] s'inscrit dans le cadre de l'article L.821-2 du code de la sécurité sociale.
Le litige porte donc sur la restriction substantielle et durable à l'emploi.
Si le médecin consultant de la cour ne s'est pas prononcé sur ce point, il appartient à Mme [O] de prouver les faits nécessaires au succès de ses prétentions.
Pour ce faire, Mme [O] verse aux débats plusieurs certificats émanant de son rhumatologue, le docteur [E], entre le 24 mai 2016 et le 19 juin 2018 relatant les traitements réalisés pour sa fibromyalgie (par médicaments, inflitrations, séances de kinésithérapie, orientation vers le centre anti douleurs), notant la persistance de douleurs chroniques invalidantes pour la vie quotidienne et conseillant la pratique de la marche, du yoga, ainsi que le certificat médical du médecin traitant joint à la demande mentionnant un état dépressif associé à la fibromyalgie.
Toutefois, ces pièces ne permettent pas d'établir une restriction substantielle et durable à l'emploi et ne sont pas en contradiction avec l'analyse du médecin consultant du tribunal, qui fait état certes d'une réduction des capacités de travail en raison de la maladie et des traitements mais qui n'exclut pas une activité professionnelle adaptée et à temps partiel.
Ainsi, le tribunal en a justement déduit que Mme [O] ne présente pas de restriction substantielle et durable d'accès à l'emploi.
Le jugement est confirmé.
Mme [O] qui succombe est condamnée aux dépens de l'appel conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par décision réputée contradictoire rendue en dernier ressort par mise à disposition au greffe,
Déboute Mme [O] de ses demandes,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Condamne Mme [O] aux dépens de l'appel.
Le Greffier, Le Président,