ARRET
N° 1054
[M] [R]
C/
CPAM DE L'OISE
COUR D'APPEL D'AMIENS
2EME PROTECTION SOCIALE
ARRET DU 08 DECEMBRE 2022
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N° RG 21/03038 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IECS - N° registre 1ère instance : 18/1397
JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BEAUVAIS EN DATE DU 29 avril 2021
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE
Madame [B] [M] [R]
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée et plaidant par Me Marion COINTE, avocat au barreau d'AMIENS, vestiaire : 33
ET :
INTIME
CPAM DE L'OISE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée et plaidant par Mme [P] [L] dûment mandatée
DEBATS :
A l'audience publique du 21 Juin 2022 devant Mme Elisabeth WABLE, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 08 Décembre 2022.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Mélanie MAUCLERE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme Elisabeth WABLE en a rendu compte à la Cour composée en outre de:
Mme Elisabeth WABLE, Président,
Mme Graziella HAUDUIN, Président,
et Monsieur Renaud DELOFFRE, Conseiller,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
PRONONCE :
Le 08 Décembre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Elisabeth WABLE, Président a signé la minute avec Mme Blanche THARAUD, Greffier.
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DECISION
Vu le jugement rendu le 29 avril 2021 par lequel le pôle social du tribunal judiciaire de Beauvais, statuant dans le litige opposant Madame [W] [M] [R] à la CPAM de l'Oise, a:
- débouté Madame [W] [M] [R] de son recours,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
- condamné Madame [W] [M] [R] aux dépens de l'instance,
Vu la notification du jugement à Madame [W] [M] [R] le 11 mai 2021 et l'appel relevé par celle-ci le 5 juin 2021,
Vu les concluions visées le 21 juin 2022 , soutenues oralement à l'audience, par lesquelles Madame [W] [M] [R] prie la cour de:
- infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
- qualifier d'accident du travail la chute de Madame [W] [M] [R] le 6 mars 2017,
- juger que l'accident de Madame [W] [M] [R] survenu le 6 mars 2017 doit être pris en charge dans le cadre de la législation relative aux risques professionnels,
- statuer ce que de droit sur les dépens,
Vu les observations orales à l'audience par lesquelles Madame [W] [M] [R] , par son conseil à l'audience, sollicite en outre une somme de 350 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Vu les conclusions visées le 15 juin 2022 , soutenues oralement à l'audience, par lesquelles la CPAM de l'Oise prie la cour de:
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Madame [W] [M] [R] de sa demande de reconnaissance du caractère professionnel pour les faits qui seraient survenus le 6 mars 2017,
- débouter Madame [W] [M] [R] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
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SUR CE LA COUR,
Le 14 mars 2017, la société [5] a déclaré un accident de trajet survenu le 6 mars 2017 au préjudice de Madame [W] [M] [R], salariée en qualité d'agent d'entretien dans les termes suivants: « date de l'accident: 6 mars 2017 à 13h30 ... lieu de l'accident: gare SNCF de [Localité 4]... activité de la victime lors de l'accident: retour au domicile..nature de l'accident: glissade dans le marche-pied du train ..siège des lésions: contusion genou droit ...nature des lésions : contusion... ».
Un certificat médical initial en date du 6 mars 2017 a diagnostiqué une contusion du genou droit sur la personne de Madame [W] [M] [R].
Après instruction du dossier et par courrier en date du 30 juin 2017, la CPAM de l'Oise a notifié à Madame [W] [M] [R] une décision de refus de prise en charge de l'accident déclaré au motif que la preuve que l'accident déclaré se soit produit pendant le trajet aller ou retour du travail n'était pas rapportée.
Contestant cette décision, Madame [W] [M] [R] a saisi la commission de recours amiable, puis la juridiction de la sécurité sociale.
Par jugement dont appel, le pôle social du tribunal judiciaire de Beauvais a statué comme indiqué précédemment.
Madame [W] [M] [R] conclut à l'infirmation du jugement déféré et à la prise en charge de l'accident déclaré au titre de la législation sur les risques professionnels.
Elle expose que ses activités professionnelles s'effectuaient principalement à [Localité 7] et en région parisienne , que pour ce faire elle se rendait sur ses différents lieux de travil au moyen des transports en commun, et que le 6 mars 2017, vers 13 heures, alors qu'elle descendait du train en gare de [Localité 4] pour regagner son domicile, elle a glissé sur le marchepied, ce qui a entraîné sa chute et une contusion du genou droit.
Elle précise qu'elle a immédiatement ressenti une vive douleur, s'est rendue aux urgences de l'hopital de [Localité 4], et a prévenu son employeur par téléphone de sa chute.
Elle souligne que Monsieur [Y] [C] a attesté en sa faveur comme ayant été présent le jour de la chute en cause, qu'âgée de 59 ans, elle a décrit avec cohérence et précision qu'elle était chargée et ne marchait pas rapidement le jour des faits.
Elle oppose que le fait qu'elle n'ait pas rempli la case « témoin » dans le formulaire renseigné ne signifie pas qu'elle a menti, alors qu'elle ne parle pas le français correctement et qu'elle ne pouvait imaginer que cette absence de mention serait déterminante.
La CPAM de l'Oise conclut à la confirmation du jugement déféré et au rejet des demandes de Madame [W] [M] [R].
Elle soutient à titre principal que la preuve d'un fait accidentel survenu sur le trajet du travail n'est pas rapportée et que la présomption d'imputabilité n'est pas applicable.
Elle indique que ce n'est que le 14 mars 2017 que l'employeur a établi une déclaration d'accident de trajet-travail, en indiquant que Madame [W] [M] [R] avait été victime d'une chute le 6 mars 2017 et que cet accident n'a été connu de lui le 13 mars 2017.
Elle observe que Madame [W] [M] [R] n'avait jamais fait mention de l'existence de témoins dans le cadre de l'instruction du dossier mais ne l'a fait que dans le cadre du recours devant la commission de recours amiable, que l'attestation de Monsieur [C] n'est pas conforme aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile et n'est pas recevable.
A titre subsidiaire, la CPAM de l'Oise oppose que Madame [W] [M] [R] a nécessairement dû interrompre son trajet compte tenu de la durée anormale de celui-ci, l'assurée étant censée prendre le tain de 11h50 à la gare du [6] et non celui de 12h34, et que son recours doit dès lors être rejeté.
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*Sur le caractère professionnel de l'accident déclaré:
Aux termes de l'article L 411-1 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée, ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise.
Constitue un accident du travail tout fait précis survenu soudainement au cours ou à l'occasion du travail et qui est à l'origine d'une lésion corporelle
Une violente douleur peut constituer un accident du travail si elle survient pendant le travail.
Il appartient au salarié qui allègue avoir été victime d'un accident du travail d'établir autrement que par ses seules affirmations les circonstances de l'accident et son caractère professionnel.
Par ailleurs, pour renverser la présomption d'imputabilité prévue à l'article L 411-1 , l'employeur doit nécessairement démontrer que l'accident a une cause totalement étrangère à l'activité professionnelle de la victime.
En outre et aux termes de l'article L 411-2 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident de trajet celui survenu pendant le trajet d'aller et de retour entre :
la résidence principale, une résidence secondaire présentant un caractère de stabilité ou tout autre lieu où le travailleur se rend de façon habituelle pour des motifs d'ordre familial et le lieu du travail
le lieu du travail et le restaurant, la cantine ou, d'une manière plus générale, le lieu où le travailleur prend habituellement ses repas, et dans la mesure où le parcours n'a pas été interrompu ou détourné par un motif dicté par l'intérêt personnel et étranger aux nécessités essentielles de la vie courante ou indépendante de l'emploi.
En l'espèce, Madame [W] [M] [R] produit aux débats un courrier rédigé par Monsieur [Y] [C] ainsi rédigé: « '. lettre de témoignage ' Je soussigné M [C] [Y] ...avoir bien assisté à la glissade de Madame [M] [R] lors de sa descente du train... je me désigne comme témoin afin de pouvoir éclaircir cette situation ; Je reste à votre disposition pour toute question... ».
Si le courrier précité ne satisfait pas en effet aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile, il constitue cependant un commencement de preuve recevable , les dispositions en cause n'étant pas prescrites à peine de nullité.
En outre, le fait que Madame [W] [M] [R] n'ait pas mentionné le nom de Monsieur [Y] [C] dans le cadre de l'instruction du dossier est sans incidence sur le caractère probant de cet écrit.
Par ailleurs, la cour relève que le certificat médical initial établi le 6 mars 2017, soit le jour du fait accidentel déclaré , corrobore parfaitement les déclarations de Madame [W] [M] [R] puisqu'il constate l'existence d'une contusion du genou droit.
Enfin, la caisse n'établit par aucun élément que l'interessée aurait interrompu ou détourné son trajet travail-domicile pour un motif dicté par l'intérêt personnel, l'écart horaire allégué étant minime .
Par voie de conséquence,et par infirmation de la décision déférée , la cour dit que la preuve est suffisamment rapportée par Madame [W] [M] [R] d'un accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail et que l'accident déclaré comme étant survenu le 6 mars 2017 doit être pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels.
*Sur l'article 700 du code de procédure civile:
Il serait inéquitable de laisser à la charge de Madame [W] [M] [R] l'ensemble des frais irrépétibles exposés en appel.
La CPAM de l'Oise sera condamnée à lui verser une somme de 350 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel.
*Sur les dépens:
Le décret n°2018-928 du 29 octobre 2018 (article 11) ayant abrogé l'article R.144-10 alinéa 1 du code de la sécurité sociale qui disposait que la procédure était gratuite et sans frais, il y a lieu de mettre les dépens de la procédure de première instance d'appel à la charge de la partie perdante , conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME la décision déférée dans toutes ses dispositions,
DIT que l'accident déclaré par Madame [W] [M] [R] comme étant survenu le 6 mars 2017 doit être pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels.
Y AJOUTANT,
CONDAMNE la CPAM de l'Oise aux dépens de première instance et d'appel
CONDAMNE la CPAM de l'Oise à payer à Madame [W] [M] [R] une somme de 350 euros sur le fondemant de l'article 700 du code de procédure civile,
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
Le Greffier, Le Président,