ARRET
N° 1052
S.A.S. [6]
C/
CPAM DE [Localité 7] [Localité 4]
COUR D'APPEL D'AMIENS
2EME PROTECTION SOCIALE
ARRET DU 08 DECEMBRE 2022
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N° RG 21/02980 - N° Portalis DBV4-V-B7F-ID7W - N° registre 1ère instance : 21/00019
JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE EN DATE DU 01 juin 2021
PARTIES EN CAUSE :
APPELANT
S.A.S. [6] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté et plaidant par Me Quentin JOREL, avocat au barreau de LYON substituant Me Michaël RUIMY de la SELARL R & K AVOCATS, avocat au barreau de LYON, vestiaire : 1309
ET :
INTIME
CPAM DE [Localité 7] [Localité 4] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée et plaidant par Mme [E] [B] dûment mandatée
DEBATS :
A l'audience publique du 21 Juin 2022 devant Mme Elisabeth WABLE, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 08 Décembre 2022.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Mélanie MAUCLERE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme Elisabeth WABLE en a rendu compte à la Cour composée en outre de:
Mme Elisabeth WABLE, Président,
Mme Graziella HAUDUIN, Président,
et Monsieur Renaud DELOFFRE, Conseiller,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
PRONONCE :
Le 08 Décembre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Elisabeth WABLE, Président a signé la minute avec Mme Blanche THARAUD, Greffier.
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DECISION
Vu le jugement rendu le 1er juin 2021 par lequel le tribunal judiciaire de Lille, statuant dans le litige entre la société [6] (la société [5]) et la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 7]-[Localité 4] (la CPAM), a :
- dit que la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 7]-[Localité 4] a respecté le principe du contradictoire de la procédure ;
- dit que la décision du 1er septembre 2020 de la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 7]-[Localité 4] de prise en charge de l'accident de M. [G] [U] en date du 28 mai 2020 au titre de la législation sur les risques professionnelles est opposable à la société [6] ;
- débouté la société [6] de l'ensemble de ses demandes ;
- condamné la société [6] aux dépens.
Vu la notification du jugement à la société [6] le 3 juin 2021 et l'appel relevé par elle le 7 juin 2021.
Vu les conclusions visées le 21 juin 2022, soutenues oralement à l'audience, par lesquelles la société [6] prie la cour de :
- infirmer le jugement entrepris dans ses entières dispositions ;
- juger que la CPAM n'a pas respecté, lors de la procédure d'instruction, les dispositions de l'article R. 461-9 du code de la sécurité sociale, et n'a pas mis en 'uvre les délais dérogatoires prorogés fixés par l'ordonnance n° 2020-460 du 22 avril 2020 et modifiée par l'ordonnance n° 2020-737 du 17 juin 2020 pendant la période d'urgence sanitaire ;
- juger la décision de prise en charge de l'accident du 28 mai 2020 déclaré par M. [G] [U] inopposable à la société [6] ;
- condamner la CPAM aux entiers dépens de l'instance.
Vu les conclusions visées le 21 juin 2022, soutenues oralement à l'audience, par lesquelles la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 7] [Localité 4] prie la cour de :
- confirmer le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lille en date du 1er juin 2021 en toutes ses dispositions ;
- confirmer que l'accident dont fut victime M. [G] [U] doit être pris en charge au titre de la législation professionnelle ;
- dire opposable à la société la décision de prise en charge de l'accident survenu à M. [G] [U] le 28 mai 2020 au titre de la législation professionnelle ;
- débouter la société [6] de ses demandes, fins et conclusions ;
- condamner la société [6] aux éventuels frais et dépens de l'instance.
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SUR CE, LA COUR,
Le 29 mai 2020, la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 7]-[Localité 4] a été destinataire d'une déclaration d'accident du travail s'agissant d'un fait survenu le 28 mai 2020 au préjudice de M. [G] [U] , salarié en qualité de coffreur bancheur, dans les termes suivants : « Selon les dires de notre salarié, en aidant son collègue à soulever légèrement un fond de coffrage dans un banc de préfabrication, il aurait ressenti une douleur dans le dos ». Cette déclaration était assortie d'une lettre de réserves de l'employeur de M. [U], la société [6].
Le certificat médical initial du même jour joint à cette déclaration a constaté sur la personne de M. [G] [U] une « lombo sciatalgie gauche non paralysante ».
Après avoir diligenté une enquête administrative, la caisse primaire d'assurance maladie a notifié à la société [6] par courrier en date du 1er septembre 2020, une décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle, de l'accident survenu à M. [U] le 28 mai 2020.
Contestant l'opposabilité à son égard de cette prise en charge, la société [6] a saisi la commission de recours amiable puis, en l'absence de réponse dans le délai imparti, le pôle social du tribunal judiciaire de Lille qui a statué comme exposé.
La société [6] concut à l'infirmation de la décision déférée et à l'inopposabilité à son égard de la décision de prise en charge de l'accident déclaré par M. [U].
L'employeur soutient que la caisse a violé les dispositions dérogatoires applicables durant l'état d'urgence sanitaire dans le cadre de la procédure d'instruction, celle-ci n'ayant pas mis en oeuvre ni ne lui ayant notifié le délai dérogatoire prorogé de 10 jours pour remplir son questionnaire.
Il expose qu'en application des dispositions de l'ordonnance du 22 avril 2020 prolongeant les délais d'instruction qui expiraient entre le 12 mars 2020 et le 10 octobre 2020, il aurait dû bénéficier d'un délai de 30 jours pour renvoyer le questionnaire à la caisse primaire d'assurance maladie , que celle-ci ne lui ayant imparti qu'un délai de vingt jours pour ce faire, la caisse n'a pas respecté le principe du contradictoire dans l' instruction du dossier et que cette violation doit être sanctionnée par l'inopposabilité de la décision de prise en charge, peu important que l'employeur ait effectivement retourné le questionnaire avant l'expiration du délai de vingt jours.
Pour conclure à la confirmation de la décision déférée, la caisse rétorque que l'employeur, qui a répondu dans le délai de vingt jours et n'a fait état d'aucune difficulté pour compléter le questionnaire au cours de l'instruction ne peut se prévaloir d'un supposé grief tiré de l'absence de prorogation du délai pour compléter le questionnaire.
Elle indique que l'inopposabilité sanctionne exclusivement la méconnaissance du principe du contradictoire dans l'hypothèse où l'employeur n'aurait pas été en mesure de prendre connaissance du dossier et de faire valoir utilement ses observations pendant le délai règlementaire de 10 jours francs,délai qui a été respecté en l'espèce.
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* Sur le respect par la caisse primaire du principe du contradictoire au cours de l'instruction:
Aux termes de l'article R. 441-7 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue du décret n° 2019-356 du 23 avril 2019 applicable en l'espèce, la caisse dispose d'un délai de trente jours francs à compter de la date à laquelle elle dispose de la déclaration d'accident et du certificat médical initial prévu à l'article L. 441-6 soit pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident, soit engager des investigations lorsqu'elle l'estime nécessaire ou lorsqu'elle a reçu des réserves motivées émises par l'employeur.
L'article R. 441-8 du même code, dans sa rédaction issue du décret n° 2019-356 du 23 avril 2019, est rédigé ainsi :
« I. lorsque la caisse engage des investigations, elle dispose d'un délai de quatre-vingt-dix jours francs à compter de la date à laquelle elle dispose de la déclaration d'accident et du certificat médical initial pour statuer sur le caractère professionnel de l'accident.
Dans ce cas, la caisse adresse un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident à l'employeur ainsi qu'à la victime ou ses représentants, dans le délai de trente jours francs mentionné à l'article R. 441-7 et par tout moyen conférant date certaine à sa réception. Ce questionnaire est retourné dans un délai dans un délai de vingt jours francs à compter de sa date de réception. La caisse peut en outre recourir à une enquête complémentaire. En cas de décès de la victime, la caisse procède obligatoirement à une enquête, sans adresser de questionnaire préalable.
La caisse informe la victime ou ses représentants ainsi que l'employeur de la date d'expiration du délai prévu au premier alinéa lors de l'envoi du questionnaire ou, le cas échéant, lors de l'ouverture de l'enquête.
II. A l'issue de ses investigations et au plus tard soixante-dix jours francs à compter de la date à laquelle elle dispose de la déclaration d'accident et du certificat médical initial, la caisse met le dossier mentionné à l'article R. 441-14 à la disposition de la victime ou de ses représentants ainsi qu'à celle de l'employeur. Ceux-ci disposent d'un délai de dix jours francs pour le consulter et faire connaître leurs observations, qui sont annexées au dossier. Au terme de ce délai, la victime ou ses représentants et l'employeur peuvent consulter le dossier sans formuler d'observations.
La caisse informe la victime ou ses représentants et l'employeur des dates d'ouverture et de clôture de la période au cours de laquelle ils peuvent consulter le dossier ainsi que de celle au cours de laquelle ils peuvent formuler des observations, par tout moyen conférant date certaine à la réception de cette information et au plus tard dix jours francs avant le début de la période de consultation. »
L'ordonnance n° 2020-460 du 22 avril 2020, portant diverses mesures prises pour faire face à l'épidémie de covid-19, précise en son article 11, II, 4° que les délais pour répondre aux questionnaires sont prorogés, pour les accidents du travail et les maladies professionnelles, de dix jours.
Il en résulte que l'employeur disposait d'un délai de trente jours francs pour retourner à la caisse le questionnaire relatif à la déclaration d'accident du travail de son salarié.
En l'espèce, la caisse primaire d'assurance maladie a, par courrier du 16 juin 2020, transmis à l'employeur le questionnaire et précisé, en caractères gras et soulignés, qu'un délai de vingt jours lui était imparti à cette fin. Le courrier précise par ailleurs que l'employeur aura la possibilité de consulter le dossier et de formuler des observations du 13 au 24 août 2020, le dossier restant consultable passé cette date, et que la caisse rendra sa décision au plus tard le 2 septembre 2020.
Le questionnaire employeur produit en pièce n° 6 par la caisse comporte la mention « fait en ligne le 22/06/2020 », soit le jour même de sa réception selon l'accusé de réception qu'elle verse en pièce n° 3. Ces informations sont concordantes avec les mentions qui figurent sur le courrier du 16 juin 2020, produit par l'employeur (pièce n° 4), qui comporte un tampon « reçu 22 juin 2020 » et l'indication manuscrite « questionnaire complété le 22/06/2020 sur le site de la CPAM ».
Ni l'article R. 441-8 du code de la sécurité sociale, ni l'article 11 de l'ordonnance n° 2020-460 du 22 avril 2020 ne font obligation à la caisse de rappeler à l'employeur le délai règlementaire, eût-il été prorogé par voie d'ordonnance, dont il disposait pour retourner le questionnaire qui lui avait été adressé dans le cadre de l'instruction.
En outre, l'employeur, qui n'a rencontré aucune difficulté pour compléter le questionnaire dans le délai qui lui a été indiqué par la caisse dans son courrier du 16 juin 2020 ne peut, en conséquence et en l'absence de tout grief allégué ou établi , se prévaloir de l'absence de mention de la prorogation exceptionnelle du délai pour solliciter l'inopposabilité à son égard de la décision de prise en charge de l'accident du travail.
Il s'ensuit que le jugement déféré ayant déclaré opposable à l'employeur la décision de prise en charge litigieuse sera confirmé en toutes ses dispositions.
* Sur les dépens
Conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, la société [6], qui succombe, sera condamnée aux dépens.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort ;
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
DÉBOUTE la société [6] de ses demandes contraires ;
CONDAMNE la société [6] aux dépens d'appel.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,