ARRET
N°944
[H]
C/
MDPH DU NORD
COUR D'APPEL D'AMIENS
2EME PROTECTION SOCIALE
ARRET DU 24 NOVEMBRE 2022
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N° RG 20/04304 - N° Portalis DBV4-V-B7E-H236 - N° registre 1ère instance : 19/02687
JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE EN DATE DU 08 juillet 2020
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE
Madame [V] [H]
[Adresse 1]
[Adresse 6]
[Localité 4]
Représentée et plaidant par Me HAUDIQUET, avocat au barreau de DUNKERQUE susbstituant Me David BROUWER de la SCP MOUGEL - BROUWER - HAUDIQUET, avocat au barreau de DUNKERQUE
ET :
INTIMÉE
La MDPH DU NORD agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Adresse 5]
[Localité 3]
Non comparante, non représentée
Convoquée par lettre recommandée le 15 février 2022 dont l'accusé de réception a été signé le 18 février 2022
DEBATS :
A l'audience publique du 09 Juin 2022 devant Mme Elisabeth WABLE, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 24 Novembre 2022.
GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme Blanche THARAUD
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme Elisabeth WABLE en a rendu compte à la Cour composée en outre de :
Mme Elisabeth WABLE, Président de chambre,
Mme Graziella HAUDUIN, Président,
et Monsieur Renaud DELOFFRE, Conseiller,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
PRONONCE :
Le 24 Novembre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Elisabeth WABLE, Président a signé la minute avec Mme Mélanie MAUCLERE, Greffier placé.
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DECISION
Vu le jugement rendu le 8 juillet 2020, par lequel le Pôle social du Tribunal judiciaire de Lille, statuant dans le litige opposant Madame [V] [H] à la Maison Départementale des Personnes Handicapées du Nord (MDPH du Nord ), a :
- ordonné la jonction des instances enregistrées sous les n°s 19/02687,19/02705, et 19/03255 sous le numéro unique 19/02687
- déclaré recevable la demande de Madame [V] [H],
- dit que sous réserve des conditions administratives exigées, Madame [V] [H] est en droit de percevoir le complément de 3 ème catégorie de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé du 1er septembre 2019 au 31 août 2021,
-condamné la Maison Départementale des Personnes Handicapées du Nord (MDPH du Nord) aux dépens,
Vu l'appel relevé le 27 juillet 2020 par Madame [V] [H],
Vu l'ordonnance rendue le 6 octobre 2021 par le magistrat chargé d'instruire l'affaire, ordonnant une mesure de consultation sur pièces confiée au Docteur [F] [W] et le rapport déposé par celui-ci le 1er décembre 2021,
Vu les conclusions visées par le greffe le 9 juin 2022, soutenues oralement à l'audience, par lesquelles Madame [V] [H] prie la cour de :
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a fixé le complément de 3 ème catégorie de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé du 1er septembre 2019 au 31 août 2021,
- dire et juger Madame [V] [H] recevable et bien fondée en ses demandes,
-dire que Madame [V] [H] devait bénéficier du complément d'allocations de 4 ème catégorie du 1er septembre 2019 au 31 août 2021,
Parconséquent,
- condamner la Maison Départementale des Personnes Handicapées du Nord (MDPH du Nord)à verser à Madame [V] [H] un rappel d'allocations correspondant à la différence entre l'allocation perçue et l'allocation prévue pour le complément d'AAEH de catégorie 4 pour la période allant du 1 er septembre 2019 au 31 août 2O21,
- condamner la MDPH du Nord à verser à Madame [V] [H] la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- condamner la MDPH du Nord aux entiers dépens,
Vu la non représentation à l'audience de la Maison Départementale des Personnes Handicapées du Nord , bien que régulièrement convoquée à l'audience par courrier recommandé avec avis de réception du 18 février 2022,
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SUR CE LA COUR,
Madame [V] [H] a formé le 6 décembre 2018 auprès de la Maison Départementale des Personnes Handicapées du Nord une demande d'allocation d'éducation d'enfant handicapé et de complément de 4ème catégorie concernant son enfant [D] vivant à son domicile, né le 13 février 2006, outre une demande de remboursement d'achat de véhicule.
Cette demande a fait l'objet d'un accord par la MDPH du Nord le 28 mai 2019 , s'agissant de l'allocation d'éducation d'enfant handicapé, accordée pour un taux compris entre 50 et 79% pour la période du 1er septembre 2019 au 31 août 2021.
Un auxiliaire de vie scolaire individualisé a en outre été accordé au bénéfice de l'enfant , ainsi qu'une orientation de l'enfant vers le SESSAD pour la période du 1er septembre 2019 au 31 août 2021.
La demande de complément d'allocation de 4eme catégorie a été rejetée motif pris d'une évolution favorable de l'autonomie de l'enfant.
Contestant ce refus, Madame [V] [H] a saisi le Pôle social du Tribunal judiciaire de Lille de trois recours identiques.
Par jugement dont appel, le Pôle social du Tribunal judiciaire de Lille a ordonné la jonction des recours et statué comme indiqué précédemment.
Madame [V] [H] conclut à l'infirmation du jugement déféré et au bénéfice, avec toutes conséquences, du complément de 4 eme catégorie pour l'enfant [D] pour la période du 1er septembre 2019 au 31 août 2021.
Elle estime que les premiers juges ont inexactement considéré qu'[D] connaissait une évolution favorable , fruit de l'investissement de sa mère et du suivi à temps plein par un AVSI, qui aurait entraîné une réduction des contraintes de sa mère .
Elle souligne avoir obtenu le bénéfice de l'allocation de 4ème catégorie jusqu'au 28 février 2026 suivant jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lille du 22 octobre 2021, et qu'il est ainsi impossible de prétendre que la situation de l'enfant connaîtrait une évolution favorable.
Elle précise que sa situation esr inchangée, qu'elle est toujours célibataire et élève seule ses deux enfants dont [D] qui souffre de la maladie justifiant sa reconnaissance d'enfant handicapé, que celui-ci était scolarisé durant la période en cause en 4ème, qu'il bénéficait d'un accompagnement au collège où il est scolarisé pour 12h par semaine dans le cadre d'une AVS et por 2h dans le cadre d'une assistante du service du SESSAD, qu'il ne peut manger à la cantine à midi compte tenu de ses troubles hypersensoriels, qu'elle-même est obligée d'être toujours présente pour son fils, qu'elle accompagne en outre dans le cadre des loisirs indispensables à sa socialisation.
Elle ajoute que cette situation nécessité un budget pour les loisirs et le matériel éducatif de l'enfant, qu'elle suit la scolarité de son fils et assume l'ensemble des devoirs et leçons à la maison, que la situation de l'enfant ne s'est pas améliorée, que les conséquences de la suppression du complément de catégorie 4 de l'AEEH sont dramatiques puisqu'elle a du vendre son automobile qu'elle ne pouvait plus financer, et qu'elle doit être en permanence aux côtés de son fils et ne peut retravailler.
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*Sur le bénéfice du complément de catégorie 4 de l'allocation déducation d'enfant handicapé (AEEH)
Aux termes des articles L541-1 et R541-1 du code de la sécurité sociale, un complément d'allocation est accordé pour l'enfant atteint d'un handicap dont la nature ou la gravité exige des dépenses particulièrement coûteuses ou nécessite le recours fréquent à l'aide d'une tierce personne. Son montant varie suivant l'importance des dépenses supplémentaires engagées ou la permanence de l'aide nécessaire.
Aux termes de l'article R541-2 du code de la sécurité sociale, pour la détermination du montant du complément d'allocation d'éducation de l'enfant handicapé, l'enfant handicapé est classé, par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, au moyen d'un guide d'évaluation défini par arrêté, dans une des six catégories prévues ci-dessous. L'importance du recours à une tierce personne prévu à l'article L541-1 est appréciée par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées au regard de la nature ou de la gravité du handicap de l'enfant en prenant en compte, sur justificatifs produits par les intéressés, la réduction d'activité professionnelle d'un ou des parents ou sa cessation ou la renonciation à exercer une telle activité et la durée du recours à une tierce personne rémunérée :
1° Est classé dans la 1ère catégorie l'enfant dont le handicap entraîne, par sa nature ou sa gravité, des dépenses égales ou supérieures à un montant fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale, du budget et de l'agriculture.
2° Est classé dans la 2ème catégorie l'enfant dont le handicap contraint l'un des parents à exercer une activité professionnelle à temps partiel réduite d'au moins 20 % par rapport à une activité à temps plein ou exige le recours à une tierce personne rémunérée pendant une durée au moins équivalente à huit heures par semaine ou entraîne des dépenses égales ou supérieures à un montant fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale, du budget et de l'agriculture.
3° Est classé dans la 3ème catégorie l'enfant dont le handicap, soit :
a) Contraint l'un des parents à exercer une activité professionnelle à temps partiel réduite d'au moins 50 % par rapport à une activité à temps plein ou l'oblige à recourir à une tierce personne rémunérée pendant une durée au moins équivalente à vingt heures par semaine';
b) Contraint l'un des parents à exercer une activité professionnelle à temps partiel réduite d'au moins 20 % par rapport à une activité à temps plein ou exige le recours à une tierce personne rémunérée pendant une durée au moins équivalente à huit heures par semaine et entraîne d'autres dépenses égales ou supérieures à un montant fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale, du budget et de l'agriculture ;
c) Entraîne, par sa nature ou sa gravité, des dépenses égales ou supérieures à un montant fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale, du budget et de l'agriculture ;
4° Est classé dans la 4ème catégorie l'enfant dont le handicap, soit :
a) Contraint l'un des parents à n'exercer aucune activité professionnelle ou exige le recours à une tierce personne rémunérée à temps plein ;
b) D'une part, contraint l'un des parents à exercer une activité professionnelle à temps partiel réduite d'au moins 50 % par rapport à une activité à temps plein ou exige le recours à une tierce personne rémunérée pendant une durée au moins équivalente à vingt heures par semaine et, d'autre part, entraîne des dépenses égales ou supérieures à un montant fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale, du budget et de l'agriculture ;
c) D'une part, contraint l'un des parents à exercer une activité professionnelle à temps partiel réduite d'au moins 20 % par rapport à une activité à temps plein ou exige le recours à une tierce personne rémunérée pendant une durée au moins équivalente à huit heures par semaine et, d'autre part, entraîne des dépenses égales ou supérieures à un montant fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale, du budget et de l'agriculture ;
d) Entraîne, par sa nature ou sa gravité, des dépenses égales ou supérieures à un montant fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale, du budget et de l'agriculture.
5° Est classé dans la 5ème catégorie l'enfant dont le handicap contraint l'un des parents à n'exercer aucune activité professionnelle ou à recourir à une tierce personne rémunérée à temps plein et entraîne des dépenses égales ou supérieures à un montant fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la sécurité sociale, du budget et de l'agriculture.
6° Est classé en 6ème catégorie l'enfant dont le handicap, d'une part, contraint l'un des parents à n'exercer aucune activité professionnelle ou exige le recours à une tierce personne rémunérée à temps plein et, d'autre part, dont l'état impose des contraintes permanentes de surveillance et de soins à la charge de la famille; en cas notamment de prise en charge de l'enfant en externat ou en semi-internat par un établissement d'éducation spéciale, la permanence des contraintes de surveillance et de soins à la charge de la famille est définie par arrêté, en tenant compte des sujétions qui pèsent sur la famille en dehors des heures passées par l'enfant en établissement. Pour l'application du présent article, l'activité à temps plein doit être entendue comme l'activité exercée conformément à la durée légale ou à la durée équivalente du travail.
En l'espèce, il ressort des pièces versées au dossier que l'enfant [D] présente une personnalité pathologique inscrite dans le spectre autistique et que l'enfant bénéficie de suivis orthophonique et psychologique.
Si l'autonomie personnelle de l'enfant semble être globalement préservée, elle nécessite cependant l'intervention de la maman, la vie sociale de l'enfant étant perturbée avec une incapacité de maîtrise des déplacements par les transports en commun.
La socialisation est difficile avec peu de relations sociales tant scolaires qu'extra scolaires.
Le jugement rendu le 22 octobre 2021 par le pôle social du tribunal judiciaire de Lille, a accordé le complément de catégorie 4 de l'AEEH à Madame [V] [H] jusqu'au 28 février 2026, en se référant à l'avis du médecin consultant qu'il avait désigné, lequel avait indiqué: «'Vis à vis de la question qui est posée de la présence nécessaire de la maman toute la journée, celle-ci ne pouvant pas exercer d'activité professionnelle,l'expert se prononce à partir de l'interrogatoire de la maman et sur les données de celle-ci;il s'agit de la protection d'une personnalité qui n'est pas autonome socialement, qui se met en danger dans la condition de la solitude et c'est sûr qu'actuelement le maintien d'une présence constante maternelle est souhaitable'».
Aux termes de son avis en date du 1 er décembre 2021, le Docteur [W], médecin consultant désigné par la cour dans la présente instance indique quant à lui :'«' Les documents fournis ne montrent pas d'évolution notable entre 2020 et 2021. Il n'y a donc pas de raison que ce qui a été accordé en 2021 ne soit pas accordé en 2020.'»
En considération de l'avis clair du médecin consultant précité, non remis en cause, et des pièces versées au dossier, il est suffisamment établi que durant la période litigieuse,une présence maternelle constante était nécessaire pour l'enfant [D], cette situation contraignant Madame [V] [H] à n'exercer aucune activité professionnelle.
Par suite et par infirmation de la décision déférée, la cour dira que Madame [V] [H] devait bénéficier du complément d'allocations de 4 ème catégorie de l'AEEH du 1 er septembre 2019 au 31 août 2021, et condamnera la Maison Départementale des Personnes Handicapées du Nord (MDPH du Nord)à verser à Madame [V] [H] un rappel d'allocations correspondant à la différence entre l'allocation perçue et l'allocation prévue pour le complément d'AAEH de catégorie 4 pour la période allant du 1 er septembre 2019 au 31 août 2O21.
*Sur les dépens
Succombant intégralement en ses prétentions et étant donc partie perdante, il convient de condamner la Maison Départementale des Personnes Handicapées du Nord (MDPH du Nord) aux dépens d'appel en application de l'article 696 du code de procédure civile.
* Sur l'article 700 du code de procédure civile
Il serait inéquitable de laisser à la charge de Madame [V] [H] l'ensemble des frais irrépétibles exposés en appel.
La Maison Départementale des Personnes Handicapées du Nord (MDPH du Nord) sera condamnée à lui verser une somme de 1500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel.
Le surplus des demandes faites sur ce fondement sera rejeté.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, statuant par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME le jugement déféré en ce qu'il a accordé à Madame [V] [H] un complément de 3 ème catégorie de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé du 1er septembre 2019 au 31 août 2021 concernant l'enfant [D],
STATUANT à nouveau de ce chef et Y AJOUTANT,
DIT que Madame [V] [H] devait bénéficier du complément d'allocation de 4 ème catégorie de l'AEEH du 1er septembre 2019 au 31 août 2021 concernant l'enfant [D],
CONDAMNE la Maison Départementale des Personnes Handicapées du Nord (MDPH du Nord) à payer à Madame [V] [H] un rappel d'allocations correspondant à la différence entre l'allocation perçue et l'allocation prévue pour le complément d'AAEH de catégorie 4 pour la période allant du 1er septembre 2019 au 31 août 2O21,
CONFIRME la décision déférée pour le surplus,
CONDAMNE la Maison Départementale des Personnes Handicapées du Nord (MDPH du Nord) aux dépens d'appel,
CONDAMNE la Maison Départementale des Personnes Handicapées du Nord (MDPH du Nord) à payer à Madame [V] [H] une somme de 1500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel.
Le Greffier, Le Président,