ARRET
N°921
CPAM DES FLANDRES
C/
[Z]
COUR D'APPEL D'AMIENS
2EME PROTECTION SOCIALE
ARRET DU 17 NOVEMBRE 2022
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N° RG 21/02878 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IDZD
JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE (Pôle Social) EN DATE DU 11 mai 2021
PARTIES EN CAUSE :
APPELANT
La CPAM DES FLANDRES, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 2]
Représentée et plaidant par Mme [U] [I] dûment mandatée
ET :
INTIME
Monsieur [L] [Z]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Assisté et plaidant par Me Laetitia BEREZIG de la SCP BROCHARD-BEDIER ET BEREZIG, avocat au barreau d'AMIENS
DEBATS :
A l'audience publique du 20 Juin 2022 devant Mme Graziella HAUDUIN, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 17 Novembre 2022.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Blanche THARAUD
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme Graziella HAUDUIN en a rendu compte à la Cour composée en outre de:
Mme Elisabeth WABLE, Président,
Mme Graziella HAUDUIN, Président,
et Monsieur Renaud DELOFFRE, Conseiller,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
PRONONCE :
Le 17 Novembre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Graziella HAUDUIN, Président a signé la minute avec Mme Marie-Estelle CHAPON, Greffier.
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DECISION
Vu le jugement en date du 11 mai 2021, auquel il convient de se référer pour l'exposé des faits, procédure et prétentions initiales des parties par lequel le pôle social du tribunal judiciaire de Lille, statuant sur le recours de M. [L] [Z] à l'encontre de la caisse primaire d'assurance maladie (la CPAM) des Flandres, a :
- dit que la maladie déclarée par M. [L] [Z] sur la base d'un certificat médical initial du 21 novembre 2017 est d'origine professionnelle,
- ordonné la prise en charge au titre des risques professionnels de la maladie au titre du tableau n°57 A des maladies professionnelles, déclarée par M. [L] [Z] sur la base d'un certificat médical initial du 21 novembre 2017,
- renvoyé le dossier à la caisse primaire pour la liquidation des droits de M. [L] [Z],
- condamné la caisse primaire aux dépens.
Vu l'appel interjeté le 28 mai 2021 par la CPAM des Flandres de cette décision qui lui a été notifiée le 19 mai précédent.
Vu les conclusions visées le 20 juin 2022, soutenues oralement à l'audience, par lesquelles la CPAM des Flandres demande à la cour de :
- infirmer en toutes ses dispositions le jugement,
- dire et juger que M. [Z] ne rapporte pas la preuve qu'il effectue les travaux visés dans la liste limitative du tableau n°57 A, relative à la tendinopathie chronique de l'épaule, dans le cadre de son activité professionnelle,
- entériner les avis du CRRMP [Localité 6] Hauts-de-France et du CRRMP Grand Est, parfaitement concordants et motivés,
- dire et juger l'absence de lien direct entre la maladie déclarée par M. [Z] et son activité professionnelle,
- débouter M. [Z] de l'ensemble de ses demandes,
- le condamner aux dépens.
Vu les conclusions visées le 13 juin 2022, soutenues oralement à l'audience, par lesquelles M. [L] [Z] demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions et de condamner la caisse à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.
SUR CE, LA COUR :
M. [L] [Z], salarié en qualité de chauffeur routier au sein de la société [5], a transmis à la CPAM des Flandres une déclaration de maladie professionnelle au titre du tableau n°57A des maladies professionnelles pour une « tendinopathie coiffe rotateur épaule gauche-arthropathie acromio-claviculaire gauche » sur la base d'un certificat médical initial du 21 novembre 2017.
L'instruction diligentée par la caisse a permis de constater que la condition tenant à la liste limitative des travaux fixée au tableau n°57 A n'était pas remplie, de sorte que le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) de [Localité 6]-Hauts de France a été saisi et par avis du 26 septembre 2018 a estimé qu'il n'existait pas de lien direct et essentiel entre l'affection déclarée par le salarié et son activité professionnelle.
Par courrier en date du 6 juillet 2018, la caisse a donc notifié à M. [Z] son refus de prendre en charge la pathologie déclarée.
Contestant ce refus, M. [Z] a saisi la commission de recours amiable qui a rejeté le 7 décembre 2018 sa contestation, puis le 20 février 2019 le pôle social du tribunal judiciaire de Lille, lequel, par un premier jugement du 26 novembre 2019, a désigné avant-dire-droit pour avis le CRRMP du Grand Est.
Le 5 octobre 2020, ce deuxième comité a également rendu un avis défavorable.
La maladie telle qu'elle est désignée dans les tableaux de maladies professionnelles est celle définie par les éléments de description et les critères d'appréciation fixés par chacun de ces tableaux.
Le tableau n°57 A des maladies professionnelles vise plus particulièrement la maladie de l'épaule, pour M. [Z], il s'agit de la tendinopathie chronique non rompue non calcifiante de la coiffe des rotateurs de l'épaule gauche, et comprend une liste limitative des travaux susceptibles de provoquer la maladie, soit ceux « comportant des mouvements ou le maintien de l'épaule sans soutien en abduction :
- avec un angle supérieur ou égal à 60° pendant au moins deux heures par jour en cumulé
ou
- avec un angle supérieur ou égal à 90° pendant au moins une heure par jour en cumulé. »
Pour ordonner à la CPAM des Flandres de prendre en charge la tendinopathie déclarée, les premiers juges ont, par le jugement dont appel, considéré, malgré les deux avis négatifs des CRRMP saisis, le premier relevant l'« absence de caractérisation d'une contrainte gestuelle, spécifique et répétée en abduction de l'épaule » et le second concluant à « des contraintes pour les épaules qui restent ponctuelles et dont la fréquence a diminué à compter de 2015 avec le passage à la conduite de super lourds » et avec « une exposition insuffisante pour expliquer l'apparition de la pathologie », qu'il existait cependant un lien direct et essentiel entre la maladie et le travail, au vu notamment des déclarations de la salarié corroborées par des attestations de plusieurs collègues de travail occupant le même poste et que les contraintes exercées sur les épaules étaient répétitives par leurs fréquence et durée à l'occasion de non seulement de la manipulation des manivelles, du hayon, des volets de remorque et du chargement et du déchargement des marchandises, mais encore à l'occasion de la montée et de la descente du camion et de la remorque comme le précisent MM. [J], [R] et [C], aussi salariés de la société [5], et sont ainsi suffisantes à expliquer l'apparition de la pathologie.
S'il ressort des pièces versées par la caisse qu'ont été pris en charge au titre de la législation professionnelle des accidents du travail survenus antérieurement les 4 février 2014 et 27 janvier 2015 et puis postérieurement les 19 février 2019 et 6 février 2021, tous relatifs au même siège de lésion, soit l'épaule gauche et avec pour trois d'entre eux pour la même pathologie, soit une tendinopathie, cela ne peut priver un salarié de voir reconnaître son droit à la reconnaissance d'une maladie relative au même siège et à sa prise en charge au titre de la législation professionnelle, ni de l'obliger à faire une nouvelle déclaration au titre d'une rechute.
Il convient au demeurant de constater que dans la chronologie médicale agrafée à la notification de la décision de la MDPH du Nord du 10 février 2020 de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé RQTH (pièce N°15 produite par l'intimé), il est fait état des diverses lésions en rapport avec les deux accidents du travail de 2014 2015 et de l'apparition sur l'IRM du 13 février 2017 de signes de tendinopathie de l'infra épineux en sus des lésions du sus-épineux gauche déjà pris en charge au titre d'accident du travail .
La cour considère ainsi, au vu des éléments produits aux débats, que M. [Z] rapporte la preuve que les activités qu'il exerçait dans le cadre de son métier de chauffeur l'ont directement et essentiellement exposé au risque de la maladie déclarée, si bien que le jugement entrepris sera confirmé en toutes ses dispositions.
La CPAM des Flandres, appelante qui succombe, sera condamnée aux dépens d'appel et à verser à M. [Z] une indemnité de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire, en dernier ressort, par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Déboute la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres de l'ensemble de ses demandes,
Condamne la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres aux dépens d'appel et à verser à M. [L] [Z] une indemnité de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,