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11/10/2022 | FRANCE | N°21/01983

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 11 octobre 2022, 21/01983


ARRET

N° 761





Société OPH DU NORD





C/



CPAM DE [Localité 6] [Localité 4]













COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 11 OCTOBRE 2022



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N° RG 21/01983 - N° Portalis DBV4-V-B7F-ICB6



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE (Pôle Social) EN DATE DU 18 mars 2021





PARTIES EN CAUSE :


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APPELANTE





L'OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT DU NORD (OPH DU NORD), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]





Représentée et plaidant par Me Xavier BONTO...

ARRET

N° 761

Société OPH DU NORD

C/

CPAM DE [Localité 6] [Localité 4]

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 11 OCTOBRE 2022

*************************************************************

N° RG 21/01983 - N° Portalis DBV4-V-B7F-ICB6

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE (Pôle Social) EN DATE DU 18 mars 2021

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

L'OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT DU NORD (OPH DU NORD), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée et plaidant par Me Xavier BONTOUX de la SAS FAYAN-ROUX, BONTOUX ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, vestiaire : 1134

ET :

INTIME

La CPAM DE [Localité 6] [Localité 4], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée et plaidant par Mme [F] [T] dûment mandatée

DEBATS :

A l'audience publique du 12 Mai 2022 devant Mme Véronique CORNILLE, Conseiller, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 11 Octobre 2022.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Mélanie MAUCLERE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Véronique CORNILLE en a rendu compte à la Cour composée en outre de:

Mme Jocelyne RUBANTEL, Président,

Mme Chantal MANTION, Président,

et Mme Véronique CORNILLE, Conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 11 Octobre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Jocelyne RUBANTEL, Président a signé la minute avec Mme Marie-Estelle CHAPON, Greffier.

*

* *

DECISION

Saisi le 26 juillet 2019 par l'Office Public de l'Habitat du Nord d'une contestation de la décision de rejet implicite de la commission de recours amiable de la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 6] [Localité 4] suite à la prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident du travail survenu le 4 décembre 2018 à son salarié, M. [X] [L], le tribunal judiciaire de Lille, pôle social, par jugement prononcé le 18 mars 2021 a :

- débouté l'Office Public de l'Habitat du Nord de ses demandes,

- déclaré opposable à la Office Public de l'Habitat du Nord la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de l'accident mortel survenu le 4 décembre 2018 à M. [X] [L],

- condamné l'Office Public de l'Habitat du Nord aux dépens.

L'Office Public de l'Habitat du Nord a, par courrier recommandé réceptionné au greffe le 16 avril 2021, interjeté appel de ce jugement.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 12 mai 2022.

Aux termes de ses conclusions visées par le greffe le 21 janvier 2022 soutenues oralement à l'audience, l'Office Public de l'Habitat du Nord demande à la cour de :

- infirmer le jugement dont appel,

- juger que l'accident déclaré par M. [L] résulte d'une cause totalement étrangère au travail,

- juger inopposable à son égard la décision de prise en charge de l'accident du 4 décembre 2018,

- ordonner avant dire droit une expertise médicale judiciaire sur pièces aux frais avancés de la CPAM ou l'employeur afin de se prononcer sur l'imputabilité de l'accident au travail, et désigner un expert avec mission de déterminer la cause des lésions dont M. [L] a été victime, dire si elles ont un lien avec son travail ou si elles résultent d'un état pathologique antérieur et/ou indépendant.

Il fait valoir que le travail n'a joué aucun rôle dans le malaise de son salarié qui a été retrouvé décédé assis sur sa chaise ; que malgré les éléments du dossier l'établissant, les premiers juges ont considéré qu'il n'était pas parvenu à renverser la présomption d'imputabilité ; que de plus, la cause du décès n'est pas déterminée sur un plan médical ; que la CPAM n'aurait pas du prendre l'accident en charge ; qu'elle n'a pas fait d'enquête, ni cherché à mettre en oeuvre une autopsie, alors que l'enquête du CHSCT révélait que le salarié devait nettoyer les halls mais qu'il ne l'avait pas fait de sorte qu'il n'avait fourni aucun effort physique.

Il considère qu'en menant une instruction incomplète, la CPAM l'a empêché de rapporterla preuve de l'existence d'une cause étrangère au travail et qu'en conséquence, la décision de prise en charge doit lui être déclarée inopposable.

Il ajoute que les éléments fournis sont suffisants à tout le moins pour ordonner une expertise ; que le tribunal a considéré à tort que le fait que le dossier médical de la victime soit entre les mains de sa famille empêchait une telle mesure ; qu'en effet, tout médecin peut se voir remettre les éléments médicaux des personnes.

Par conclusions visées par le greffe le 8 décembre 2021 soutenues oralement à l'audience, la CPAM demande à la cour de :

- la recevoir dans ses conclusions,

- confirmer le jugement entrepris,

- dire que la décision de prise en charge de l'accident mortel survenu à M. [L] est opposable à l'Office Public de l'Habitat du Nord,

- débouter l'Office Public de l'Habitat du Nord de ses demandes et le condamner aux dépens.

La CPAM se prévaut de la présomption d'imputabilité, le décès étant survenu au temps et au lieu du travail ; que le simple constat que M. [L] n'aurait pas nettoyé les halls des locaux ne suffit pas en l'absence de tout constat ou soin médical antérieur à démontrer que la cause du malaise mortel était totalement étrangère au travail. Elle rappelle que la journée de travail de la victime, qui occupait le poste de concierge, a débuté à 7h30 et que l'employeur ne justifie pas de l'activité de celle-ci jusqu'à l'appel passé à son épouse à 9h50.

Sur la demande d'expertise, elle indique qu'elle a diligenté une enquête menée contradictoirement avec audition de l'épouse de M. [L], de son collègue, de l'employeur ; qu'il ne peut lui être reproché de ne pas avoir diligenté une autopsie alors que selon l'article L. 442-4 du code de la sécurité sociale, celle-ci est pratiquée soit à la demande des ayants-droit, soit à la demande de la caisse si elle l'estime utile à la manifestation de la vérité ; qu'en l'occurence, le décès étant survenu au temps et au lieu du travail et aucune preuve d'une cause étrangère n'étant rapportée, elle disposait d'éléments suffisants pour prendre en charge l'accident.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs demandes et des moyens qui les fondent.

MOTIFS

Aux termes de l'article L 411-1 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise.

La présomption d'imputabilité est une présomption simple qui peut être combattue.

Pour ce faire, l'employeur qui conteste la nature professionnelle de la lésion survenue aux temps et lieu de travail doit démontrer qu'elle a une cause totalement étrangère au travail.

L'absence de preuve d'un lien de causalité entre l'accident de travail et le travail ne suffit pas à renverser la présomption d'imputabilité.

En l'espèce, M. [L], salarié de l'Office Public de l'Habitat du Nord depuis 2006 en tant qu'employé d'immeuble, a été victime d'un accident mortel dans les circonstances suivantes selon la déclaration d'accident du travail du 5 décembre 2018 : 'Nous avons retrouvé M. [L] décédé dans son local' le 4 décembre 2018 à 11h50. La déclaration d'accident mentionne qu'il commençait son travail à 8h15 et le certificat de décès qu'il est décédé de mort naturelle.

Il n'est pas contesté que le décès est survenu au temps et au lieu du travail vraisemblablement le 3 décembre 2018, de sorte que la présomption trouve à s'appliquer.

Il ressort en effet du dossier que M. [L] :

- a pris son poste le 3 décembre 2018 à 8h15 ;

- a appelé son épouse à 9h50 ;

- n'a pas été vu par son collègue lors de la pause de l'après-midi ;

- n'a pas téléphoné à son épouse en fin de journée comme à son habitude ;

- n'est pas rentré chez lui le soir ;

et que son épouse inquiète, s'est présentée le 4 décembre sur son lieu de travail et qu'avec un collègue, elle l'a découvert mort sur une chaise en fin de matinée.

Le décès a été constaté le 4 décembre 2018.

L'employeur reproche aux premiers juges de ne pas avoir admis qu'il établissait que le décès était sans lien avec le travail alors d'une part qu'ils ont relevé les éléments relatés ci-dessus et d'autre part qu'il est démontré l'absence de tout effort notable avant le décès, M. [L] ayant indiqué à son épouse qu'il allait se mettre à nettoyer les halls mais que ceux-ci n'ont pas été lavés ce jour-là comme l'indique le procès-verbal de la réunion du 11 décembre 2018 du CHSCT.

Or les premiers juges ont à juste titre retenu qu'entre l'appel téléphonique à 9h50 et la prise de poste, s'était écoulée plus d'1h30, et que l'employeur ne précisait pas la nature de l'activité de son salarié pendant cette période.

Par ailleurs, le fait que M. [L] n'ait pas nettoyé les halls des locaux comme il devait le faire dans l'après-midi ne suffit pas à démontrer que le décès est lié à une cause totalement étrangère au travail. L'activité de M. [L] ne se limitait pas au nettoyage des halls mais comportait d'autres tâches dont le nettoyage du local poubelle, des garages et parkings selon les déclarations de son collègue et de son épouse lors de l'enquête de la CPAM.

Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a dit que l'employeur ne renversait pas la présomption d'imputabilité au travail du décès de son salarié.

La décision de prise en charge est donc opposable à l'employeur.

Sur la demande subsidiaire d'expertise, l'Office Public de l'Habitat soutient que la CPAM a mené une instruction incomplète qui ne comportait pas d'autopsie et qu'elle l'empêche ainsi de rapporter la preuve d'une cause étrangère.

L'article R.441-11 III du code de la sécurité sociale dans sa version applicable, prévoit qu'en 'cas de réserves motivées de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie avant décision à l'employeur et à la vicitme un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des interessés. Une enquête est obligatoire en cas de décès.'.

En l'espèce, la CPAM a respecté ces dispositions en procédant à une enquête dont le rapport versé au dossier comporte l'audition de l'épouse de M. [L], de son collègue et de l'employeur. Ces éléments qui ne font ressortir aucun problème de santé particulier, lui permettaient de prendre en charge l'accident sans avoir recours à une autopsie, laquelle n'est pas obligatoire.

L'Office Public de l'Habitat ne peut donc arguer d'une instruction incomplète pour appuyer sa demande d'expertise. En outre, il ne fait état d'aucun élément de nature à constituer un commencement de preuve qui exclurait toute imputation au travail du décès.

Par conséquent, la demande d'expertise qui n'a pas pour objet de pallier la carence des parties, est rejetée.

Le jugement déféré mérite donc confirmation en toutes ses dispositions.

Conformément aux dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, l'appelante, partie succombante, doit être condamnée aux dépens de l'instance.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe, en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lille, pôle social, le 18 mars 2021,

Condamne l'Office Public de l'Habitat du Nord aux dépens de l'instance.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 21/01983
Date de la décision : 11/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-11;21.01983 ?
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