ARRET
N° 184
S.A.S. [2]
C/
CARSAT AUVERGNE
COUR D'APPEL D'AMIENS
TARIFICATION
ARRET DU 07 OCTOBRE 2022
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N° RG 22/00360 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IKPX
Décision de la CARSAT AUVERGNE EN DATE DU 23 avril 2021
PARTIES EN CAUSE :
DEMANDEUR
La société [2] ( SAS ), prise en son établissement situé [Adresse 4], agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
(MP : Mme [J] [E] [T])
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par Me Anne-laure DENIZE de la SELEURL Anne-Laure Denize, avocat au barreau de PARIS
ET :
DÉFENDEUR
La CARSAT AUVERGNE, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Mme [O] [R] dûment mandatée
DÉBATS :
A l'audience publique du 01 Juillet 2022, devant Mme Jocelyne RUBANTEL, Président assisté de Monsieur [W] [S] et Madame Maud CHOQUENET, assesseurs, nommés par ordonnances rendues par Madame la Première Présidente de la Cour d'appel d'Amiens les 03 mars 2022, 07 mars 2022, 30 mars 2022 et 27 avril 2022.
Mme [H] [U] a avisé les parties que l'arrêt sera prononcé le 07 Octobre 2022 par mise à disposition au greffe de la copie dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme Audrey VANHUSE
PRONONCÉ :
Le 07 Octobre 2022, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Jocelyne RUBANTEL, Président et Mme Marie-Estelle CHAPON, Greffier.
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DECISION
Le 20 février 2019, Mme [T], salariée de la société [2], a complété une déclaration de maladie professionnelle pour une tendinopathie fissuraire de la coiffe des rotateurs de l'épaule gauche, pathologie prise en charge par la caisse primaire.
Les conséquence financières afférentes à celles-ci ont été imputées sur le compte employeur 2018 de la demanderesse.
Après réception de son taux de cotisation AT/MP 2021 et par courrier du 23 mars 2021, la société [2] a sollicité de la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail Auvergne (la CARSAT) le retrait de son compte employeur du coût de la maladie de sa salariée, demande que la caisse a rejetée par décision du 23 avril 2021.
Par acte d'huissier de justice délivré le 28 juin 2021 et visé par le greffe le 21 janvier 2022, la société [2] a fait assigner la CARSAT devant la cour d'appel d'Amiens à l'audience du 4 février 2022.
Après deux renvois, l'affaire a été appelée à l'audience du 1er juillet 2022.
Aux termes de son assignation, à laquelle elle s'est rapportée à l'audience, la société [2] demande à la cour de :
-'la déclarer recevable et bien fondée en son recours,
-'dire qu'elle a contesté annuellement ses taux de cotisation AT/MP 2020 et 2021,
-'constater que la CARSAT a, à tort, imputé sur le compte employeur 2018 le sinistre de Mme [T],
-'constater que son compte employeur 2019 sur lequel aurait dû être imputé le sinistre est désormais figé,
-'infirmer en conséquence la décision de la CARSAT en ce qu'elle a déclaré irrecevable son recours,
-'ordonner à la CARSAT de retirer des éléments de sa tarification le sinistre de Mme [T] de son compte employeur 2018 et de manière générale des éléments de sa tarification,
-'dire que la CARSAT devra recalculer dans un délai de 15 jours à compter de l'arrêt à intervenir ses taux de cotisation AT/MP 2020, 2021 et 2022,
-'condamner la CARSAT aux dépens.
Aux termes des dernières conclusions qu'elle a communiquées au greffe le 24 juin 2022 et auxquelles elle s'est rapportée à l'audience, la CARSAT demande à la cour de :
-'constater qu'elle a notifié à la société [2] ses taux de cotisation AT/MP 2020 et 2021 par courrier du 1er janvier 2020 et 1er janvier 2021,
-'constater que ce n'est que le 23 mars 2021 que la société [2] a formé un recours gracieux auprès d'elle,
-'constater que la société [2] n'a pas usé de sa voie de recours contentieuse dans le délai de 2 mois qui lui était imparti,
-'dire et juger que les taux de cotisation AT/MP 2020 et 2021 de la société [2] sont devenus définitifs et ne peuvent plus être contestés,
-'constater qu'elle a retiré du compte employeur de la société [2] les conséquences financières de la maladie professionnelle de Mme [T] et qu'elle l'en a informée par courrier du 9 juin 2022,
-'constater que le recours de la société [2] est sans objet concernant le taux de cotisation AT/MP 2022.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties s'agissant de la présentation plus complète de leurs demandes et des moyens qui les fondent.
MOTIFS
-'sur la demande de retrait du sinistre du compte employeur et de recalcul du taux de cotisation AT/MP 2022
En l'espèce, il ressort du courrier adressé à la société [2] le 9'juin'2022 que la CARSAT a retiré de son compte employeur la maladie professionnelle de Mme [T] et qu'elle a procédé au recalcul du taux 2022 impacté.
En conséquence, dès lors que la CARSAT y a fait droit en cours d'instance, il est constaté que les demandes de la société [2] relatives au retrait de son compte employeur du sinistre litigieux et au recalcul de son taux de cotisation AT/MP 2022 sont devenues sans objet.
-'sur la forclusion des taux AT/MP 2020 et 2021
A l'appui de sa demande d'irrecevabilité, la CARSAT soutient que les autres taux impactés par la maladie professionnelle de Mme [T], soit 2020 et 2021, étaient définitifs à la date de la contestation.
Elle expose qu'ils ont été notifiés à la société les 27 janvier 2020 et 6 janvier 2021 et qu'elle ne les a contestés que par courrier du 23 mars 2021.
La société [2] réplique qu'elle n'est pas forclose à contester ses taux de cotisation AT/MP 2020 et 2021.
Elle indique qu'elle a bien contesté son taux de cotisation AT/MP 2020 dans le délai de deux mois à compter de sa notification, qu'elle a expressément mentionné le sinistre de Mme [T] dans ses contestations. Elle ajoute avoir également contesté dans le délai de deux mois son taux de cotisation AT/MP 2021.
En vertu des dispositions de l'article R.142-1-A-III du code de la sécurité sociale, le délai de recours préalable et le délai de recours contentieux sont de deux mois à compter de la décision contestée. Ces délais sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision contestée ou, en cas de décision implicite, dans l'accusé de réception de la demande.
En l'espèce, la CARSAT expose qu'à la date du 22 mars 2021 la société [2] était forclose à contester ses taux 2020 et 2021 et produit aux débats deux documents «'preuve de la notification de la décision du taux de cotisation prévue à l'article D.242-6-22 du code de la sécurité sociale dans les conditions requises par l'article 5 de l'arrêté du 17'octobre'1995'» pour justifier de la date de notification des taux litigieux.
Il en ressort que la société [2] a accédé aux décisions de notification de ses taux 2020 et 2021 respectivement les 27 janvier 2020 et 6 janvier 2021.
Elle avait donc jusqu'aux 27 mars 2020 et 6 mars 2021 pour les contester.
La société ne discute pas ces éléments mais prétend simplement qu'elle a bien contesté ses taux dans le délai réglementaire de deux mois et produit à ce titre deux courriers datés des 21 février 2021, et réceptionné le 8 mars suivant, et 21 février 2020 sur lesquels elle s'appuie pour justifier de la recevabilité de sa contestation.
Il est relevé que dans ces deux courriers, la société [2] déclare conditionner la contestation du sinistre de Mme [T] à «'l'examen des prestations servies au titre d'autres sinistres durant la période triennale de référence, par l'analyse des prestations servies au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles ci-après, conduisant à la saisine de la commission de recours amiable de l'organisme de sécurité sociale concerné et/ou du tribunal du contentieux de l'incapacité'».
Si elle indique de manière similaire dans les deux courriers que «'la réglementation applicable en la matière n'a pas été respectée pour le sinistre suivant : [T] [J] [E] MP 30/07/18 », elle ne s'en explique pas et ne justifie nullement avoir saisi la commission de recours amiable de la caisse primaire ou le pôle social sur ce point.
Contrairement aux allégations de la société [2], la cour constate que ces courriers visaient simplement à informer la CARSAT qu'elle contesterait les éléments de tarification 2020 et 2021 relatifs au sinistre de Mme [T] sous réserve de leur examen par les commissions de recours amiable des caisses primaires ou les juridictions du contentieux général ou technique.
Elle ne justifie d'ailleurs pas en l'espèce d'une telle saisine ni qu'une décision d'inopposabilité à son égard soit intervenue.
Ainsi, les recours des 21 février 2020 et 2021 n'évoquaient pas la demande de retrait du compte employeur de la société [2] de la maladie de Mme [T].
En tout état de cause, le recours en l'espèce porte sur la demande de retrait du compte employeur de la société [2] des conséquences financières de la maladie professionnelle de Mme [T].
Cette demande a été formulée gracieusement pour la première fois par un courrier du 15'février 2021 qui n'a été adressé à la CARSAT que le 22'mars'2021, le cachet de la poste faisant foi, et réceptionné le 23'mars suivant.
La cour constate donc que la société [2], qui a introduit son recours gracieux après l'expiration du délai de deux mois suivant la notification de ses taux 2020 et 2021, était forclose à les contester à la date du 22 mars 2021.
La demande de la société [2] est donc irrecevable pour forclusion.
-'sur les dépens
Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
L'issue du litige commande de laisser à chacune des parties la charge de ses propres dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu publiquement par mise à disposition au greffe, après débats publics, en premier et dernier ressort,
Dit que la société [2] est forclose à contester ses taux de cotisation AT/MP 2020 et 2021,
Déclare en conséquence irrecevable sa demande de recalcul des taux de cotisation AT/MP 2020 et 2021 impactés par la maladie professionnelle de Mme [T],
Constate que par décision du 9 juin 2022, la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail Auvergne a retiré du compte employeur de la société [2] les incidences financières de la maladie professionnelle de Mme [T] et qu'elle a procédé au recalcul de son taux de cotisation AT/MP 2022,
Dit en conséquence que les demandes de retrait du compte employeur de la maladie de Mme [T] et de recalcul du taux de cotisation 2022 de la société [2] sont devenues dans objet,
Déboute la société [2] du surplus de ses demandes,
Dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.
Le Greffier,Le Président,