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07/10/2022 | FRANCE | N°22/00356

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Tarification, 07 octobre 2022, 22/00356


ARRET

N° 182





S.A.S. [2]





C/



CARSAT BOURGOGNE ET FRANCHE COMTE













COUR D'APPEL D'AMIENS



TARIFICATION





ARRET DU 07 OCTOBRE 2022



*************************************************************



N° RG 22/00356 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IKPS



Décision de la CARSAT BOURGOGNE-FRANCHE COMTE en date du 06 mai 2021





PARTIES EN CAUSE :





DEMANDEUR





La société [2] ( SAS), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

( salarié : M. [X] [T])

[Adresse 3]

[Adresse 3]





Représentée et plaidant par Me Anne-laure DENIZE de la SELEURL Anne-Laure Deni...

ARRET

N° 182

S.A.S. [2]

C/

CARSAT BOURGOGNE ET FRANCHE COMTE

COUR D'APPEL D'AMIENS

TARIFICATION

ARRET DU 07 OCTOBRE 2022

*************************************************************

N° RG 22/00356 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IKPS

Décision de la CARSAT BOURGOGNE-FRANCHE COMTE en date du 06 mai 2021

PARTIES EN CAUSE :

DEMANDEUR

La société [2] ( SAS), agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

( salarié : M. [X] [T])

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée et plaidant par Me Anne-laure DENIZE de la SELEURL Anne-Laure Denize, avocat au barreau de PARIS

ET :

DÉFENDEUR

La CARSAT BOURGOGNE ET FRANCHE COMTE, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée et plaidant par Mme [R] [U] dûment mandatée

DÉBATS :

A l'audience publique du 01 Juillet 2022, devant Mme Jocelyne RUBANTEL, Président assisté de Monsieur [Z] [P] et Madame Maud CHOQUENET, assesseurs, nommés par ordonnances rendues par Madame la Première Présidente de la Cour d'appel d'Amiens les 03 mars 2022, 07 mars 2022, 30 mars 2022 et 27 avril 2022.

Mme [W] [N] a avisé les parties que l'arrêt sera prononcé le 07 Octobre 2022 par mise à disposition au greffe de la copie dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme Audrey VANHUSE

PRONONCÉ :

Le 07 Octobre 2022, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Jocelyne RUBANTEL, Président et Mme Marie-Estelle CHAPON, Greffier.

*

* *

DECISION

Le 26 mars 2019 M. [T], salarié de la société [2], a complété deux déclarations de maladies professionnelles pour des syndromes du canal carpien droit et gauche, pathologies prises en charge par la caisse primaire au titre du tableau n°'57 et à effet du 30 novembre 2018.

Les incidences financières de ces pathologies ont été imputées sur le compte employeur 2018 de la société [2], impactant ses taux de cotisation AT/MP 2020, 2021 et 2022.

Par courrier daté du 15 février 2021, la société [2] a sollicité auprès de la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail Bourgogne et Franche-Comté (la CARSAT) le retrait des maladies de M. [T] de son compte employeur, demande que la caisse a rejetée par décision du 6 mai 2021.

Contestant ce rejet, par acte d'huissier de justice délivré le 6 juillet 2021 et visé par le greffe le 31 janvier 2022, la société [2] a fait assigner la CARSAT devant la cour d'appel d'Amiens à l'audience du 4 février 2022.

Après deux renvois, l'affaire a été appelée à l'audience du 1er juillet 2022.

Aux termes de son assignation, soutenue oralement à l'audience, la société [2] demande à la cour de :

-'la déclarer recevable et bien fondée en son recours,

-'dire qu'elle a contesté annuellement ses taux de cotisation AT/MP des exercices 2020 et 2021,

-'constater que la CARSAT a imputé de manière infondée sur son compte employeur 2018 les maladies de M. [T],

-'constater que son compte employeur 2019 sur lequel auraient dû être imputées les deux maladies est désormais figé,

-'infirmer la décision de la CARSAT en ce qu'elle a déclaré irrecevable son recours,

-'ordonner à la CARSAT de retirer des éléments de sa tarification les maladies de M.'[T],

-'dire que la CARSAT devra recalculer dans un délai de 15 jours à compter de l'arrêt à intervenir le taux de cotisation AT/MP des exercices 2020, 2021 et celui à venir de l'exercice 2022,

-'condamner la CARSAT aux dépens.

Par dernières conclusions communiquées au greffe le 20 juin 2022 et soutenues oralement à l'audience, la CARSAT demande à la cour de :

-'constater que la société [2] a accédé à la décision de notification de son taux de cotisation AT/MP 2020 le 10 janvier 2020,

-'constater que la société [2] a accédé à la décision de notification de son taux de cotisation AT/MP 2021 le 6 janvier 2021,

-'constater que chacune de ces notifications faisait mention des voies et délais de recours,

-'constater que ce n'est que par courrier posté le 22 mars 2021 que la société [2] a formé un recours gracieux sollicitant le retrait de son compte employeur 2018 des conséquences financières des maladies professionnelles déclarées par M.'[T] le 26'mars'2019,

-'constater que la société [2] n'a pas contesté les notifications de ses taux 2020 et 2021 dans les délais impartis par l'article R.142-1-A-III,

-'dire et juger que les taux de cotisation AT/MP 2020 et 2021 sont devenus définitifs,

-'constater qu'elle a recalculé le taux de cotisation AT/MP 2022 de la société le 20'avril'2022,

-'déclarer irrecevable et rejeter le recours de la société tendant au recalcul de ses taux de cotisation AT/MP 2020 et 2021.

Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties s'agissant de la présentation plus complète de leurs demandes et des moyens qui les fondent.

MOTIFS

-'sur la demande de retrait du compte employeur et de recalcul du taux de cotisation AT/MP 2022

En l'espèce, il ressort du courrier adressé à la société [2] le 24'avril'2022 que la CARSAT a retiré le sinistre litigieux de son compte employeur et qu'elle a procédé au recalcul du taux 2022 impacté.

En conséquence, dès lors que la CARSAT y a fait droit en cours d'instance, il est constaté que les demandes de la société [2] relatives au retrait de son compte employeur des sinistres litigieux et au recalcul de son taux de cotisation AT/MP 2022 sont devenues sans objet.

-'sur la forclusion des taux AT/MP 2020 et 2021

La CARSAT soulève la forclusion de la contestation par la demanderesse des deux autres taux impactés par les maladies litigieuses, soit 2020 et 2021, et soutient que le recours employeur doit être introduit dans un délai de deux mois à compter de la date de réception de la notification de son taux de cotisation AT/MP.

Elle indique que la société n'a contesté ses taux AT/MP 2020 (notifié le 10 janvier 2020) et 2021 (notifié le 6 janvier 2021) que par un courrier adressé en recommandé le 22'mars'2021 et conclut à l'irrecevabilité du recours.

Elle ajoute que les recours conservatoires introduits par la société [2] les 21'février'2020 et 21 février 2021, par lesquels elle se contentait d'indiquer à la CARSAT que des litiges étaient en cours devant les CRA des caisses primaires et devant les juridictions du contentieux général s'agissant de plusieurs sinistres dont ceux de M.'[T], ne sauraient remettre en cause l'irrecevabilité pour forclusion de sa présente contestation. Elle argue qu'en vertu de l'article R.142-1-A, l'ensemble des motifs de contestation d'un taux doit être présenté à l'intérieur du délai préfix de deux mois.

Elle indique que considérer qu'une demande hors délai n'est pas nouvelle, et est donc recevable, au motif qu'elle vise une fin similaire à une demande antérieure, présentée dans les délais, mais sur des motifs juridiques différents, est une position fermement combattue par la cour de cassation.

Elle expose que le taux AT/MP intègre diverses données de natures différentes, que faute de contestation dans le délai de deux mois il devient définitif et que ces données ne peuvent plus être remises en cause si elles n'ont pas été contestées dans le délai réglementaire. Elle ajoute que le principe de sécurité juridique serait gravement fragilisé si la simple contestation dans les délais d'une partie des éléments du taux permettait de ne pas faire courir le délai de forclusion à l'égard des autres données de calcul.

Elle soutient qu'en l'espèce la demanderesse s'est bornée, dans ses recours conservatoires, à indiquer que des litiges étaient en cours devant les juridictions du contentieux général s'agissant des maladies de M. [T] et qu'elle tendait à obtenir de la CARSAT qu'en cas de succès devant l'une de ces juridictions, l'ensemble de la tarification concernée soit rectifiée.

Elle conclut qu'en aucun cas, dans ses recours conservatoires, la demanderesse a sollicité le retrait des maladies de M. [T] de son compte employeur alors même qu'elle l'a fait dans son recours gracieux du 22 mars 2021.

La société réplique qu'elle a bien contesté ses taux de cotisation AT/MP dans le délai de deux mois à compter de leurs notifications.

Elle ajoute que du fait des règles de tarification les sinistres de M. [T], inscrits de manière infondée sur le compte employeur 2018, impactent ses taux 2020, 2021 et 2022, qu'elle justifie avoir contesté ses taux en visant le sinistre de M. [T] et que, par conséquent, la CARSAT était insusceptible de considérer qu'elle était forclose.

En vertu des dispositions de l'article R.142-1-A-III du code de la sécurité sociale, le délai de recours préalable et le délai de recours contentieux sont de deux mois à compter de la décision contestée. Ces délais sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision contestée ou, en cas de décision implicite, dans l'accusé de réception de la demande.

En l'espèce la CARSAT expose qu'à la date du 22 mars 2021 la société [2] était forclose à contester ses taux 2020 et 2021 et produit aux débats deux documents «'preuve de la notification de la décision du taux de cotisation prévue à l'article D.242-6-22 du code de la sécurité sociale dans les conditions requises par l'article 5 de l'arrêté du 17'octobre'1995'» pour justifier de la date de notification des taux litigieux.

Il en ressort que la société [2] a accédé aux décisions de notification de ses taux 2020 et 2021 respectivement les 10 janvier 2020 et 6 janvier 2021.

Elle avait donc jusqu'aux 10 mars 2020 et 6 mars 2021 pour les contester.

La société [2] ne discute pas ces éléments mais prétend simplement qu'elle a bien contesté ses taux dans le délai réglementaire de deux mois et produit à ce titre deux courriers datés des 21 février 2021, et réceptionné le 8 mars suivant, et 21'février'2020, et réceptionné le 3 mars suivant, sur lesquels elle s'appuie pour justifier de la recevabilité de sa contestation.

Il est relevé que, dans ces deux courriers, la société [2] déclare conditionner la contestation des sinistres de M. [T] à «'l'examen des prestations servies au titre d'autres sinistres durant la période triennale de référence, par l'analyse des prestations servies au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles ci-après, conduisant à la saisine de la commission de recours amiable de l'organisme de sécurité sociale concerné et/ou du tribunal du contentieux de l'incapacité'».

Si elle indique de manière similaire dans les deux courriers que «'la réglementation applicable en la matière n'a pas été respectée pour le sinistre suivant : [T] [X] MP 30/11/18'», elle ne s'en explique toutefois pas et ne justifie nullement avoir saisi la commission de recours amiable de la caisse primaire ou le pôle social sur ce point.

Contrairement aux allégations de la société [2], la cour constate que ces courriers visaient simplement à informer la CARSAT qu'elle contesterait les éléments de tarification 2020 et 2021 relatifs aux sinistres de M. [T] sous réserve de leur examen par les commissions de recours amiable des caisses primaires ou les juridictions du contentieux général ou technique.

Elle ne justifie d'ailleurs pas en l'espèce d'une telle saisine ni qu'une décision d'inopposabilité à son égard soit intervenue.

Ainsi, les recours des 21 février 2020 et 2021 n'évoquaient pas la demande de retrait du compte employeur de la société [2] des maladies professionnelles de M.'[T].

En tout état de cause, le recours en l'espèce porte sur la demande de retrait du compte employeur de la société [2] des deux maladies professionnelles de M.'[T].

Cette demande a été formulée gracieusement pour la première fois par un courrier du 15'février 2021 qui n'a été adressé à la CARSAT que le 22 mars 2021 et réceptionné le 23'mars suivant, cette dernière produisant aux débats l'enveloppe dudit recours sur laquelle figure le cachet de la poste. La société ne conteste pas non plus ces éléments.

La cour constate donc que la société [2], qui a introduit son recours gracieux après l'expiration du délai de deux mois suivant les notifications de ses taux 2020 et 2021, était forclose à les contester à la date du 22 mars 2021.

La demande de la société [2] est donc irrecevable pour forclusion.

-'sur les dépens

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

L'issue du litige commande de laisser à chacune des parties la charge de ses propres dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu publiquement par mise à disposition au greffe, après débats publics, en premier et dernier ressort,

Déclare sans objet la contestation du taux de cotisation AT/MP 2022,

Dit que la société [2] est forclose à contester ses taux de cotisation AT/MP 2020 et 2021,

Déclare en conséquence irrecevable sa demande de recalcul des taux de cotisation AT/MP 2020 et 2021 impactés par les maladies professionnelles de M. [T],

Constate que par décision du 24 avril 2022, la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail Bourgogne et Franche-Comté a retiré du compte employeur de la société [2] les incidences financières des maladies professionnelles de M. [T] du 30'novembre'2018 et qu'elle a procédé au recalcul de son taux de cotisation AT/MP 2022,

Dit en conséquence que les demandes de retrait du compte employeur des maladies de M. [T] et de recalcul du taux de cotisation 2022 de la société [2] sont devenues dans objet,

Déboute la société [2] du surplus de ses demandes,

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Tarification
Numéro d'arrêt : 22/00356
Date de la décision : 07/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-07;22.00356 ?
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