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15/09/2022 | FRANCE | N°20/05926

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 5eme chambre prud'homale, 15 septembre 2022, 20/05926


ARRET







[P]





C/



[S]

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA D'AMIENS



























































copie exécutoire

le 15/09/2022

à

Me SOUBEIGA

Me [S]

Selarl LEXAVOUE

CBO/IL/SF



COUR D'APPEL D'AMIENS



5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE



A

RRET DU 15 SEPTEMBRE 2022



*************************************************************

N° RG 20/05926 - N° Portalis DBV4-V-B7E-H5YH



JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'ABBEVILLE DU 15 OCTOBRE 2020 (référence dossier N° RG F 19/00078)



PARTIES EN CAUSE :



APPELANT



Monsieur [O] [P]

né le 07 Mai 1974 à [Localité 6] (GABON)
...

ARRET

[P]

C/

[S]

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA D'AMIENS

copie exécutoire

le 15/09/2022

à

Me SOUBEIGA

Me [S]

Selarl LEXAVOUE

CBO/IL/SF

COUR D'APPEL D'AMIENS

5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE

ARRET DU 15 SEPTEMBRE 2022

*************************************************************

N° RG 20/05926 - N° Portalis DBV4-V-B7E-H5YH

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'ABBEVILLE DU 15 OCTOBRE 2020 (référence dossier N° RG F 19/00078)

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur [O] [P]

né le 07 Mai 1974 à [Localité 6] (GABON)

de nationalité Gabonaise

[Adresse 2]

[Localité 4]

représenté et concluant par Me Paul SOUBEIGA, avocat au barreau d'AMIENS substitué par Me Mélodie PORTE, avocat au barreau D'AMIENS

ET :

INTIMEES

Madame [L] [S] ès qualités d' administrateur judiciaire de la SAS BODY ABBEVILLE FITNESS

[Adresse 1]

[Localité 4]

non constituée, non comparante

UNEDIC DELEGATION AGS CGEA D'AMIENS

[Adresse 3]

[Localité 5]

représentée et concluant par Me Hélène CAMIER de la SELARL LEXAVOUE AMIENS-DOUAI, avocat au barreau D'AMIENS

DEBATS :

A l'audience publique du 15 juin 2022, devant Madame Corinne BOULOGNE, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, l'affaire a été appelée.

Madame Corinne BOULOGNE indique que l'arrêt sera prononcé le 15 septembre 2022 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Isabelle LEROY

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Madame Corinne BOULOGNE en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :

Mme Corinne BOULOGNE, présidente de chambre,

Mme Fabienne BIDEAULT, conseillère,

Mme Marie VANHAECKE-NORET, conseillère,

qui en a délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 15 septembre 2022, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Corinne BOULOGNE, Présidente de Chambre et Mme Isabelle LEROY, Greffière.

*

* *

DECISION :

EXPOSE DU LITIGE

M. [P] a été embauché au terme d'un contrat à durée indéterminée, le 1er octobre 2018, par la société Body Abbeville fitness en qualité de coach sportif.

La société relève de la convention collective du sport et emploie moins de 11 salariés.

Par lettre remise en main propre le 8 février 2019, la société a notifié au salarié une mise à pied conservatoire et l'a convoqué pour un entretien préalable.

Par courrier en date du 25 février 2019, il a été licencié pour faute grave selon les termes suivants :

Nous faisons suite à l'entretien du 20 février 2019 auquel nous vous avions convoqué, auquel vous vous êtes présenté assisté d'un conseiller du salarié, et lors duquel nous vous avons fait part des faits suivants:

Alors que nous vous avons recruté le 1er octobre 2018 en qualité de coach sportif, et que vous disposez ce faisant d'une ancienneté toute relative, vous avez récemment multiplié les agissements fautifs dans le cadre de vos fonctions.

Tout d'abord, nous avons été destinataires à plusieurs reprises de plaintes de la part de nos adhérents, lesquels nous informaient que vous ne respectiez pas le thème des séances qui avaient été programmées, ceci avec des répercussions évidentes concernant la « crédibilité» de notre salle, puisque les adhérents qui se présentent pour une activité programmée doivent pouvoir en bénéficier.

Nous vous avons rappelé plusieurs fois à l'ordre concernant cette situation, et quant à la nécessité de respecter scrupuleusement le programme qui avait été établi, mais sans que vous teniez compte de ces consignes.

De la même manière, et à plusieurs reprises, vous avez refusé de préparer des « circuits training» pour nos adhérents, leur demandant de s'adresser à nos stagiaires, pourtant non habilités pour ce type de séance.

Nous avons ainsi dû vous rappeler que c'était notamment en raison de vos diplômes, qui vous permettent de proposer et superviser certains exercices sportifs, que nous vous avions recruté, et que vous ne pouviez ainsi vous décharger de ces séances sur vos stagiaires ... sans que vous ne preniez davantage en compte nos demandes.

Ces seuls faits, et votre refus persistant de vous conformer à nos instructions, justifiaient la rupture de nos relations contractuelles, mais vous deviez adopter récemment un comportement plus grave encore à l' encontre de notre associée, Madame [I] [C].

En effet; lors de votre recrutement, vous nous aviez soumis un planning pour vos

interventions, ceci en nous indiquant que la programmation proposée permettait à notre salle de s'adapter au mieux aux besoins de nos adhérents.

Nous étions ainsi convenus de répartir dans un premier temps vos horaires de travail

conformément au planning proposé, mais tout en vous précisant que cette répartition n'était que provisoire, et qu'un bilan serait entrepris en début d'année 2019, de sorte à fixer

« définitivement» la répartition de vos horaires sur la semaine.

Ayant ainsi relevé que la répartition de vos interventions n'était pas adaptée aux besoins de la clientèle, nous vous avions informé qu'un nouveau planning, élaboré par nos soins, ou serait remis au début du mois de février 2019.

Il était ainsi prévu que le 4 février 2019, Madame [C] vous reçoive en début d'après-midi dans le bureau de la Direction afin de vous exposer vos nouveaux horaires de travail, I entretien auquel vous vous présentiez à votre arrivée en salle, à 15 h 00, et alors même que

vous auriez dû dispenser un cours de coaching personnalisé à 14 h 00 ... sans vous soucier des I adhérents présents pour cette activité ...

Quoi qu'il en soit, tandis que vous preniez connaissance de vos horaires, et que Madame [C] vous exposait les choix de votre Direction, vous alliez soudainement l'interrompre en lui indiquant que vous refusiez de signer ce planning.

Et tandis que Madame [C] tentait de reprendre la parole, vous alliez vous emporter, vous pencher sur son bureau, à proximité de son visage, et refuser de l' écouter en criant violemment, à plusieurs reprises: «Tu m'écoutes! », «C'est moi qui parle » ... sans que Madame [C] ne réussisse à vous calmer.

Paniquée, et ne réussissant pas à vous faire entendre raison, Madame [C] était contrainte de chercher l'aide de notre Directeur, Monsieur [M], mais aussi d'un adhérent, Monsieur [H], qui seuls réussissaient à vous faire quitter le bureau de la Direction.

Lors de notre entretien, vous n'avez pas été en mesure d'apporter la moindre explication satisfaisante concernant votre comportement, et au-delà, avez clairement laissé paraître votre souhait de quitter nos effectifs.

Vous comprendrez alors qu'il est inenvisageable, au regard des faits exposés ci-dessus et de votre attitude, de vous maintenir au sein de nos effectifs, de sorte que nous nous voyons contraints de prononcer votre licenciement pour faute grave.

Vous cesserez ainsi de faire partie du personnel de notre société à compter du jour d'envoi de cette correspondance, étant précisé que votre période de mise à pied conservatoire ne vous sera pas rémunérée.

Par jugement du 19 septembre 2019, le tribunal de commerce d'Amiens a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de la société Body Abbeville fitness et a désigné Me [S] en qualité de mandataire liquidateur.

Par requête du 16 septembre 2019, M. [P] a saisi le conseil de prud'hommes d'Abbeville, qui par jugement du 15 octobre 2020, a :

- dit et jugé que la rupture était imputable à M. [P] ;

- dit et jugé que le licenciement de M. [P] reposait sur une cause réelle et sérieuse avec faute grave ;

- débouté M. [X] de l'intégralité de ses demandes ;

- condamné M. [X] aux entiers dépens.

Ce jugement a été notifié le 13 novembre 2020 à M. [P] qui en a relevé appel le 7 décembre 2020.

L'Unédic délégation AGS CGEA d'Amiens a constitué avocat le 22 janvier 2021.

Par dernières conclusions communiquées par voie électronique le 8 juillet 2021, M. [P] prie la cour de :

- le déclarer recevable et bien fondé en son appel ;

- infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions ;

Statuant de nouveau,

- fixer ses créances au passif de la liquidation judiciaire de la SAS Body Abbeville fitness comme suit sur la base d'un salaire moyen de 1 522,95 euros :

- 1 522,95 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- 1 522,95 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

- 152,29 euros au titre des congés payés y afférents ;

- 773,17 euros au titre de la mise à pied injustifiée du 9 au 25 février 2019 ;

- 77,32 euros au titre des congés payés y afférents ;

- 75,05 euros à titre de rappel de salaires ;

- 1 500 euros pour le préjudice résultant du caractère vexatoire du licenciement ;

- 1 500 euros de dommages-intérêts pour non-respect des conditions d'embauche :

- dire et juger les créances fixées au passif de la liquidation judiciaire de la SAS Body Abbeville fitness opposables à l'AGS-CGEA d'Amiens et au besoin, condamner l'AGS-CGEA d'Amiens à payer les créances ainsi fixées entre les mains du liquidateur judiciaire à charge pour ce dernier de les lui remettre ;

- voir ordonner la remise des bulletins de paie, du certificat de travail, de l'attestation Pôle Emploi conformes, sous astreinte de 400 euros par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la notification de la décision ;

- voir ordonner l'exécution provisoire sur le fondement de l'article R.1454-14 du code du travail ;

- fixer l'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile à la somme de 2 000 euros et les dépens ;

- débouter les intimées de toutes demandes contraires.

Par dernières conclusions communiquées par voie électronique le 30 août 2021, l'Unédic délégation AGS CGEA d'Amiens prie la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [P] de ses demandes de :

- rappel de salaire ;

- dommages et intérêts pour non-respect des conditions d'embauche ;

- lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte à l'appréciation de la cour sur l'absence de cause réelle sérieuse du licenciement ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [P] de sa demande de dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, au besoin par substitution de motif, si la cour considérait que le licenciement n'est pas causé ;

- statuer ce ce que de droit sur les demandes de rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire, ainsi qu'au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, et congés payés afférents, et n'y faire droit que dans la mesure où elles sont dûment justifiées ;

En tout état de cause,

- déclarer irrecevable la demande de fixation au passif de la somme de 1 500 euros au titre du préjudice résultant du caractère vexatoire du licenciement ;

- débouter M. [P] de sa demande de condamnation de l'AGS à verser les sommes fixées au passif au mandataire liquidateur ;

- débouter M. [P] de sa demande au titre de l'exécution provisoire ;

- dire qu'elle ne peut en aucun cas être condamnée et que sa garantie n'est due que dans le cadre de l'exécution du contrat de travail ;

- dire qu'elle ne peut en aucun cas garantir la somme sollicitée au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dire que sa garantie n'est également due, toutes créances avancées confondues pour le compte du salarié, que dans la limite des 3 plafonds définis notamment aux articles L.3253-17, D.3253-2 et D.3253-5 du code du travail et dans la limite des textes légaux définissant l'étendue et la mise en 'uvre de sa garantie (articles L.3253-8 à L.3253-13, L.3253-15 et L.3253-19 à 24 du code du travail) ;

- dire que par application des dispositions de l'article L.622-28 du code de commerce, le cours des intérêts a été interrompu à la date de l'ouverture de la procédure collective.

Me [S] ès qualités de mandataire liquidateur de la société Body Abbeville fitness n'a pas constitué avocat. Le présent arrêt est réputé contradictoire.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 juin 2022 et l'affaire fixée à l'audience de plaidoirie du 15 juin 2022.

MOTIFS

Sur le licenciement

M. [P] expose que l'employeur ne prouve pas les griefs qu'il invoque dans la lettre de licenciement alors qu'en matière de licenciement il supporte la charge de la preuve, qu'il conteste les violences invoquées par l'employeur, qu'il est surprenant qu'à la suite de celles-ci la directrice lui a laissé reprendre le travail le lendemain alors qu'en de telles circonstances son retour n'aurait pas été possible.

Il conteste les autres griefs qui ne sont pas plus établis par l'employeur, qu'au contraire il verse aux débats plusieurs attestations établissant la réalité de ses qualités professionnelles qui contredisent les assertions de la société Body Abbeville fitness.

L'Ags précise qu'elle ne dispose pas d'élément à l'appui de la faute grave invoquée et s'en remet à la sagesse de la cour.

Sur ce

Pour que le licenciement disciplinaire soit justifié, l'existence d'une faute avérée et imputable au salarié doit être caractérisée.

La faute grave s'entend d'une faute constitutive d'un manquement tel qu'il rend impossible la poursuite du contrat de travail et le maintien du salarié dans l'entreprise.

La preuve des faits constitutifs de faute grave incombe à l'employeur et à lui seul et il appartient au juge du contrat de travail d'apprécier au vu des éléments de preuve figurant au dossier si les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont établis, imputables au salarié, et s'ils ont revêtu un caractère de gravité suffisant pour justifier l'éviction immédiate du salarié de l'entreprise.

Selon l'article L. 1235-1 du code du travail, si un doute subsiste, il profite au salarié.

Est constitutive d'une faute grave la violence physique commise au temps et sur le lieu de travail qu'elle soit commise sur un collègue ou sur un client.

L'employeur vise plusieurs griefs, à savoir :

le non-respect des thèmes de séances de sport programmés

le refus de préparer les circuits training pour les adhérents

l'agression verbale de Mme [C] associée alors que le salarié était convoqué pour prendre connaissance d'un nouveau planning horaire qu'il a refusé de signer avant qu'il lui soit enjoint de quitter le bureau de la direction .

L'employeur qui supporte la charge de la preuve des griefs adressés au salarié ne produit aucune pièce pour établir la réalité des faits reprochés.

Le jugement doit donc être infirmé et la cour juge que le licenciement de M. [P] est sans cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences du licenciement

Sur la mise à pied conservatoire

M. [P] sollicite le paiement de la période de la mise à pied conservatoire injustifiée arguant que l'employeur n'a ordonné une telle mesure que 5 jours après les faits reprochés alors qu'aucun délai d'investigation n'était nécessaire, qu'en outre en prononçant une telle mesure le grief a fait l'objet d'une double sanction violant la règle de non bis in idem ; il conteste formellement le grief invoqué à l'appui de la mise à pied conservatoire.

L'Ags s'oppose à cette demande rétorquant que la mise à pied conservatoire n'est pas une sanction mais une mesure conservatoire dans l'attente de la décision de l'employeur, qu'en l'espèce elle a été notifiée 4 jours après le grief avec la convocation à l'entretien préalable sans que l'on puisse reproché à l'employeur une tardiveté

Sur ce

La mise à pied conservatoire n'est pas une sanction. Cette mesure permet à l'employeur qui la notifie de suspendre provisoirement l'activité d'un salarié dont la présence pourrait nuire à l'entreprise.

Cependant la retenue de salaire n'est justifiée qu'en cas de faute grave.

En l'espèce, le licenciement ayant été jugé sans cause réelle et sérieuse, la mise à pied conservatoire avec retenue de salaire n'est pas justifiée. 

La demande de M. [P] est donc bien fondée et il convient, par infirmation du jugement, de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société Body Abbeville fitness une somme de 773,17 euros au titre du rappel de salaire pour la mise à pied injustifiée outre 73,31 euros de congés payés afférents.

Sur les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

M. [P] sollicite la fixation à la liquidation de la société d'une somme correspondant à un mois de salaire à titre d'indemnité.

L'Ags réplique que le montant de l'indemnisation doit être compris entre 0 et 1 mois de salaire, que le salarié ne justifie pas de sa situation postérieurement au licenciement et ne peut donc prétendre à des dommages et intérêts.

Sur ce

Le licenciement de M. [P] étant sans cause réelle et sérieuse, il lui est dû des dommages et intérêts en application des dispositions de l'article L 1235-3 du code du travail.

Le salarié avait moins d'un an d'ancienneté puisqu'embauché le 1er octobre 2018 et licencié le 25 février 2019.

L'entreprise employant moins de 11 salariés, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail qui fixe le barème d'indemnisation applicable, les dommages et intérêts alloués pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ne peuvent être supérieurs à un mois de salaire.

Le salaire mensuel brut était de 1 522,95 euros pour un temps plein.

Si la jurisprudence est revenue sur la notion de préjudice nécessaire dans certaines hypothèses, tel n'est pas le cas s'agissant du préjudice causé par le licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération de M. [P] de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, la cour retient que l'indemnité à même de réparer intégralement le préjudice de M. [P] doit être évaluée à la somme de 1 522,95 euros qui sera fixée au passif de la liquidation judiciaire de la société.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a débouté M. [P] de toute indemnisation.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents

M. [P] sollicite qu'il soit fixé au passif une somme équivalente à un mois de salaire et ce par application de la convention nationale du sport.

L'Ags s'y oppose considérant que le licenciement est fondé.

Sur ce

Par application de l'article 4.4.3.2 de la convention nationale du sport prévoyant un préavis d'un mois, il convient de fixer au passif de la liquidation de la la société Body Abbeville fitness une somme de 1522,95 euros à payer à M. [P] au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre la somme de 152,29 euros au titre des congés payés sur préavis.

Sur la demande en dommages et intérêts en réparation du caractère vexatoire du licenciement

M. [P] sollicite l'indemnisation de ce préjudice faisant état des circonstances humiliantes pour lui d'avoir été réprimandé violemment par des cris de sa supérieure hiérarchique devant les adhérents du club et les collègues.

L'Ags soulève l'irrecevabilité de cette demande arguant qu'il s'agit d'une demande nouvelle en cause d'appel.

Sur ce

L'article 564 du code de procédure civile dispose que « à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les question de fait nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. »

La demande en dommages et intérêts en réparation du caractère vexatoire du licenciement est une prétention nouvelle qui n'avait pas été élevée en première instance. Elle est donc irrecevable.

Sur la demande en complément de salaire

M. [P] sollicite un complément de salaire exposant que le salaire qui lui a été versé ne respectait pas le taux horaire retenu par la convention collective pour le salaire du mois de février 2019.

L'Ags rétorque que le salaire conventionnel a été augmenté selon extension de l'avenant de la convention collective publié le 14 février 2019 si bien que l'employeur a respecté celui-ci.

Sur ce

La convention collective nationale applicable à la cause prévoyait au moment de l'embauche pour l'emploi de M. [P] un salaire conventionnel à 1 419,15 euros mensuels et a été augmenté à 1 447,53 euros par avenant du 26 juin 2018 avec effet au 1er janvier 2019.

Toutefois le salaire versé par l'employeur était fixé à 1 522,95 euros si bien que la revalorisation n'avait pas lieu d'être effectuée par l'employeur.

Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a débouté M. [P] de cette demande.

Sur la demande en dommages et intérêts pour non-respect des conditions d'embauche

M. [P] rapporte que l'employeur l'a rémunéré en méconnaissance des conditions de rémunération légales ou conventionnelles.

L'Ags s'oppose à cette demande indiquant que le fondement de cette demande n'est pas exposé alors que les conditions de l'embauche ne sont pas critiquées.

Sur ce

Le salarié n'explicite pas la faute commise par l'employeur dans l'application des conditions de rémunération légales ou conventionnelles ou des conditions d 'embauche. Le salaire versé en application de la convention collective n'était pas inférieur au minimum prévu par l'avenant du 26 juin 2018.

Faute d'articulation d'un moyen utile, la demande doit être rejetée et le jugement confirmé sur ce point.

Sur la remise des documents de fin de contrat et l'astreinte

M. [P] sollicite la condamnation de l'employeur à lui remettre des documents de fin de contrat sous astreinte de 400 euros par jour de retard à compter du 15eme jour suivant la notification de l'arrêt.

L'Ags s'oppose à l'astreinte soutenant qu'elle ne peut être condamnée et qu'il n'est pas justifié de la nécessité d'une telle mesure.

Sur ce

Il y a lieu d'enjoindre au liquidateur de de remettre à M. [P] les documents de fin de contrat conformes au présent arrêt. A ce stade aucune élément ne permet de considérer que le liquidateur n'exécutera pas spontanément cette remise de documents. La demande d'astreinte n'est donc pas nécessaire.

Sur la garantie de l'AGS et les intérêts

Il convient de dire le présent arrêt opposable à l'UNEDIC délégation AGS CGEA d'Amiens venant aux droits du CGEA d'Amiens et de rappeler que la garantie de l'AGS n'est due, toutes créances avancées pour le compte du salarié que dans la limite des plafonds définis notamment aux articles L.3253-17, D.3253-2 et D. 3253-5 du code du travail et dans la limite des textes légaux définissant l'étendue de sa garantie à savoir les articles L.3253-8 à L.3253-13, L.3253-15 et L.3253-19 à L.3253-24 du code du travail.

Le cours des intérêts au taux légal est interrompu par l'ouverture de la procédure collective.

Il convient également de dire que l'AGS ne garantit pas les sommes allouées en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Les dispositions du jugement entrepris sont infirmées sur les dépens.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge M. [P] les sommes qu'il a exposées pour l'ensemble de la procédure. La cour condamne Maître [S] ès qualités, qui succombe, à lui verser la somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour l'ensemble de la procédure.

Succombant pour l'essentiel Maître [S] ès qualités supportera les dépens de la l'ensemble de la procédure.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement et en dernier ressort, par arrêt mis à disposition du greffe

Dit irrecevable la demande nouvelle en réparation du préjudice résultant du caractère vexatoire du licenciement ;

Infirme le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Abbeville le 15 octobre 2020 sauf en ce qu'il a débouté M. [P] de ses demandes de rappel de salaires et aussi de dommages et intérêts pour non-respect des conditions d'embauche ;

Statuant de nouveau des chefs infirmés y ajoutant

Dit que le licenciement de M. [P] ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse ;

Fixe au passif de la liquidation judiciaire de la société Body Abbeville fitness les sommes suivantes :

- 1 522,95 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- 1 522,95 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

- 152,29 euros au titre des congés payés y afférents ;

- 773,17 euros au titre du rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied conservatoire injustifiée du 9 au 25 février 2019 ;

- 77,32 euros au titre des congés payés y afférents ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples et contraires ;

Condamne Maître [S] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Body Abbeville fitness à payer à M. [P] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance et d'appel ;

Condamne Maître [S] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Body Abbeville fitness aux dépens de la l'ensemble de la procédure.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 5eme chambre prud'homale
Numéro d'arrêt : 20/05926
Date de la décision : 15/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-15;20.05926 ?
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