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21/07/2022 | FRANCE | N°22/00061

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Referes 1er pp, 21 juillet 2022, 22/00061


ORDONNANCE







du 21 Juillet 2022













A l'audience publique des référés tenue le 09 Juin 2022 par Mme BERTOUX, Président de chambre délégué par ordonnance de Mme la Première Présidente de la Cour d'Appel d'AMIENS en date du 13 décembre 2021,



Assistée de Madame PILVOIX, Greffier.



Dans la cause enregistrée sous le N° RG 22/00061 - N° Portalis DBV4-V-B7G-INU5 du rôle général.





ENTRE :



Madame [S] [F]

[Adresse 1]

[Localit

é 4]



Assignant en référé suivant exploit de la SAS CG2M, Huissier de Justice, en date du 19 Avril 2022, d'un jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance d'Amiens le 13 Novembre 2019.



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ORDONNANCE

du 21 Juillet 2022

A l'audience publique des référés tenue le 09 Juin 2022 par Mme BERTOUX, Président de chambre délégué par ordonnance de Mme la Première Présidente de la Cour d'Appel d'AMIENS en date du 13 décembre 2021,

Assistée de Madame PILVOIX, Greffier.

Dans la cause enregistrée sous le N° RG 22/00061 - N° Portalis DBV4-V-B7G-INU5 du rôle général.

ENTRE :

Madame [S] [F]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Assignant en référé suivant exploit de la SAS CG2M, Huissier de Justice, en date du 19 Avril 2022, d'un jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance d'Amiens le 13 Novembre 2019.

Représentée, concluant et plaidant par Maître [Z], avocat au barreau d'Amiens.

ET :

S.C.I. TIFETOINE

[Adresse 2]

[Localité 3]

DÉFENDERESSE au référé.

Représentée, concluant par Maître BENITAH, avocat postulant au barreau d'Amiens et plaidant par Maître TREGUIER, avocat au barreau de Rouen.

Madame la Présidente après avoir constaté qu'il s'était écoulé un temps suffisant depuis l'assignation pour que la partie assignée puisse se défendre.

Après avoir entendu :

- en ses assignation et plaidoirie : Maître EHORA, conseil de Mme [F],

- en ses conclusions et plaidoirie : Maître TREGUIER, conseil de la SCI Tifetoine.

L'affaire a été mise en délibéré au 21 Juillet 2022 pour rendre l'ordonnance par mise à disposition au Greffe de la copie.

Par acte du 20 mai 2015, la SCI Tifetoine a donné à bail à la SAS les Halles du Frais des locaux à usage commercial à Longueau (80330) pour un loyer annuel de 60 000 € TTC payable d'avance avec ses accessoires les premiers janvier, avril, juillet et octobre de chaque année, et ce, pour une durée de 29 ans, soit du 27 mars 2015 au 26 mars 2034.

Dans le même acte, Mme [F] s'est engagée comme caution solidaire du paiement des loyers et des charges, frais et taxes ainsi que de l'exécution des conditions du bail pour la durée de celui-ci.

La SAS les Halles du Frais ayant cessé de payer les loyers et la taxe foncière, la SCI Tifetoine a saisi le juge de l'exécution, lequel par ordonnance du 4 mai 2017 l'a autorisée à pratiquer une saisie conservatoire de 18 124 € correspondant aux loyers des mois d'avril, mai et juin 2017 (dont 3 124 € de taxe foncière).

Saisi sur assignation de la SCI Tifetoine, le juge des référés du tribunal de grande instance d'Amiens a condamné la SAS les Halles du Frais et Mme [F], par ordonnance du 23 août 2017, à payer à la société Tifetoine une provision de 15 000 € en deniers ou quittance au titre des loyers du bail commercial de juillet à septembre 2017.

Par exploit d'huissier du 28 juin 2017, la SCI Tifetoine a fait assigner la SAS Les Halles du Frais devant le tribunal de grande instance d'Amiens aux fins de paiement et de réparation de ses préjudices.

La SAS Les Halles du Frais a quitté les lieux le 27 avril 2018.

Par ordonnance du 16 mai 2018, le juge de la mise en état a condamné la SAS Les Halles du Frais à payer à la SCI Tifetoine une provision de 15 000€ correspondant au loyer des mois d'octobre, novembre et décembre 2017, une provision de 15 000 € correspondant au loyer des mois de janvier, février et mars 2018 et une provision de 3 146 € correspondant à la taxe foncière exigible à la charge de la défenderesse.

Par ordonnance du 15 octobre 2018, le juge de la mise en état a condamné la SAS Les Halles du Frais à payer à la bailleresse une provision de 3 750 € correspondant au mois d'avril 2018 au prorata exigible et payable d'avance selon les termes du bail.

Il l'a également condamnée par provision à payer à la société Tifetoine la somme de 1 048,60 € correspondant au montant de la taxe foncière exigible au prorata à la charge de la SAS Les Halles du Frais.

Le 5 octobre 2018, la SAS Les Halles du Frais a été placée en liquidation judiciaire et la SELARL [Y] désigné en qualité de liquidateur.

Saisi par la SCI Tifetoine par acte d'huissier en date du 25 avril 2019, d'une demande tendant à voir condamner Mme [F] à payer diverses sommes en sa qualité de caution solidaire, le tribunal de grande instance d'Amiens, par jugement réputé contradictoire rendu le 13 novembre 2019, a :

- condamné Mme [F] à payer à la SCI Tifetoine et fixé au passif de la procédure collective de la SAS Les Halles du Frais la somme de 5 498,60 € correspondant au loyer d'avril 2018 au prorata des 27 jours occupés et à la taxe foncière exigible au prorata et mise à la charge de la SAS Les Halles du Frais à titre de provision par l'ordonnance du juge de la mise en état du 15 octobre 2018;

- condamné Mme [F] à payer à la SCI Tifetoine et fixé au passif de la procédure collective de la SAS Les Halles du Frais la somme de 33 946 € correspondant au loyer des mois d'octobre, novembre et décembre 2017, de janvier, février et mars 2018 et à la taxe foncière exigible et mise à la charge de la SAS Les Halles du Frais à titre de provision par l'ordonnance du juge de la mise en état du 16 mai 2018 ;

- condamné Mme [F] à payer à la SCI Tifetoine et fixé au passif de la procédure collective de la SAS Les Halles du Frais la somme de 18 124 € correspondant au loyer des mois d'avril, mai et juin 2017 et de la taxe foncière 2016 ;

- condamné Mme [F] à payer à la SCI Tifetoine et fixé au passif de la procédure collective de la SAS Les Halles du Frais la somme de 24 550,75 € TTC à titre de dommages et intérêts pour les travaux de remise en état liées aux travaux effectués sans autorisation et aux dégradations locatives ;

- condamné Mme [F] à payer à la SCI Tifetoine la somme de 700 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Me [Y], ès-qualités de liquidateur de la SAS Les Halles du Frais aux dépens qui comprendront le coût du procès-verbal d'huissier du 28 mars 2017 et tout acte prévu par l'article 695 du code de procédure civile et qui pourront être recouvrés directement par Me Treguier conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

- ordonné l'exécution provisoire de la décision ;

- rejeté toute demande plus ample.

Mme [F] a relevé appel de ce jugement par déclaration d'appel en date du 23 décembre 2019.

Par acte d'huissier du 19 avril 2022, Mme [F] a fait assigner la SCI Tifetoine devant Mme la première présidente de la cour d'appel d'Amiens, au visa des articles 524 et 526 anciens du Code de procédure civile et l'article L.722-5 du Code de la consommation, aux fins de voir :

- ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement rendu le 13 novembre 2019 par le tribunal de grande instance d'Amiens ;

- ordonner la réinscription de l'affaire opposant Mme [F] à la SCI Tifetoine, autrefois inscrite sous le n°RG 19/08610, puis n°RG 21/00858, au rang des affaires en cours de la cour d'appel d'Amiens ;

- en tout état de cause, condamner la SCI Tifetoine à régler la somme de 1 500€ à Mme [F] au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamner la SCI Tifetoine aux entiers dépens ;

- débouter la SCI Tifetoine de toute demande plus ample ou contraire.

Au soutien de ses prétentions, elle fait valoir que l'exécution provisoire attachée au jugement entrepris est interdite par la loi dans la mesure où :

- la créance de la SCI Tifetoine figure sur la liste des créances retenues par la commission de surendettement, elle ne peut donc plus être exécutée ;

- le plan de surendettement n'est pas encore applicable ;

- l'exécution provisoire du jugement critiqué se heurte aux dispositions du Code de la consommation qui interdisent au débiteur de régler ses créances antérieures autre qu'alimentaires ;

- l'arrêt de l'exécution provisoire justifie la réinscription du dossier puisqu'il n'est plus possible de faire obstacle à la poursuite de son droit d'appel en l'absence d'exécution provisoire de la décision critiquée.

Par conclusions du 8 juin 2022, la SCI Tifetoine demande à Mme la première présidente de la cour d'appel d'Amiens de bien vouloir':

- recevoir les présentes écritures, les dire fondées';

En conséquence,

- rejeter toutes les demandes, fins et conclusions de Mme [F] épouse [R] tendant à la réinscription du dossier enrôlé sous le numéro RG 21/00858';

En tout état de cause,

- condamner Mme [F] épouse [R] à régler à la SCI Tifetoine la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de Me Gaëtan Treguier';

- condamner Mme [F] épouse [R] aux entiers dépens de l'incident.

Au soutien de ses demandes, la SCI Tifetoine fait valoir que':

- Mme [F] ne saurait contester son engagement à caution alors qu'elle ne l'a jamais fait, ni soutenir qu'elle ignorait la situation';

- cette dernière n'a jamais exécuté la décision assortie de l'exécution provisoire';

- l'appelante fait mystère de sa situation personnelle mais dispose d'un actif supérieur au passif';

- Mme [F] a déposé un dossier de surendettement pour paralyser le droit à recouvrement de la SCI Tifetoine';

- l'adoption du plan reste subordonnée à son exécution.

À l'audience du 9 juin 2022, Mme [F] était représentée par Me [Z] qui a été entendu en sa plaidoirie et la SCI Tifetoine était représentée par Me Terguier qui a été entendu en sa plaidoirie.

L'affaire a été mise en délibéré au 21 juillet 2022.

SUR CE,

Sur la demande d'arrêt de l'exécution provisoire

L'article 524 du Code de procédure civile dans sa version applicable à l'espèce, dispose que «'Lorsque l'exécution provisoire a été ordonnée, elle ne peut être arrêtée, en cas d'appel, que par le premier président et dans les cas suivants :

1° Si elle est interdite par la loi ;

2° Si elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ; dans ce dernier cas, le premier président peut aussi prendre les mesures prévues aux'articles 517 à 522.

Le même pouvoir appartient, en cas d'opposition, au juge qui a rendu la décision.

Lorsque l'exécution provisoire est de droit, le premier président peut prendre les mesures prévues au deuxième alinéa de'l'article 521'et à'l'article 522.

Le premier président peut arrêter l'exécution provisoire de droit en cas de violation manifeste du principe du contradictoire ou de'l'article 12 et lorsque l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.'»

L'article L.722-5 du code de la consommation énonce que «'La suspension et l'interdiction des procédures d'exécution diligentées à l'encontre des biens du débiteur emportent interdiction pour celui-ci de faire tout acte qui aggraverait son insolvabilité, de payer, en tout ou partie, une créance autre qu'alimentaire, y compris les découverts mentionnés aux 10° et 11° de l'article L. 311-1, née antérieurement à la suspension ou à l'interdiction, de désintéresser les cautions qui acquitteraient des créances nées antérieurement à la suspension ou à l'interdiction, de faire un acte de disposition étranger à la gestion normale du patrimoine ; elles emportent aussi interdiction de prendre toute garantie ou sûreté.

Le débiteur peut toutefois saisir le juge des contentieux de la protection afin qu'il l'autorise à accomplir l'un des actes mentionnés au premier alinéa. L'interdiction mentionnée au même premier alinéa ne s'applique pas aux créances locatives lorsqu'une décision judiciaire a accordé des délais de paiement au débiteur en application des V et VI de l'article 24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 82-1290 du 23 décembre 1986.'

Mme [F] soutient que l'exécution provisoire ordonnée dans la décision dont appel est interdite par la loi dans la mesure où elle fait l'objet d'une procédure de surendettement ; que l'exécution provisoire attachée au jugement critiqué se heurte aux dispositions ci-dessus qui interdisent au débiteur de régler ses créances antérieures autres qu'alimentaires.

En l'espèce, il ressort des pièces versées aux débats que la commission de surendettement des particuliers de la Somme a, le 17 novembre 2020, déclaré recevable la procédure de surendettement de Mme [S] [R], soit postérieurement au jugement dont appel en date du 13 novembre 2019, de sorte que c'est à bon droit que le tribunal a prononcé l'exécutoire provisoire laquelle n'était pas interdite par les dispositions de l'article L.722-5 du code de la consommation.

En revanche, en application des dispositions de l'article L.722-5 du code de la consommation, les procédures d'exécution diligentées en vertu du jugement dont appel sont suspendues de plein droit durant la procédure de surendettement, et ce sans qu'il soit besoin d'ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire.

Il convient, en conséquence, de débouter Mme [F] de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire.

Sur la demande de réinscription au rôle,

L'article 524 du code de procédure civile, dans sa version applicable à l'espèce, dispose que : «'Le premier président ou le conseiller de la mise en état autorise, sauf s'il constate la péremption, la réinscription de l'affaire au rôle de la cour sur justification de l'exécution de la décision attaquée.'»

Or, l'article 524 énoncé ci-dessus exige la justification de l'exécution de la décision attaquée auprès du magistrat qui l'a ordonnée, soit en l'espèce le conseiller de la mise en état, par ordonnance en date du 05 novembre 2020 dans le l'affaire enregistrée au répertoire général sous le n°19/8610.

Il y a lieu, également d'observer, que dans l'affaire enrôlée sous le n°RG,21/858, le conseiller de la mise en état a donné acte à Mme [F] qu'elle ne prétend plis à la réinscription et que donc cette dernière demeure radiée dans les termes de l'ordonnance du 5 novembre 2020.

De plus, il ressort du projet de plan de surendettement versé aux débats établi par la commission de surendettement en date du 21 janvier 2021 que Mme [F] doit s'acquitter de la créance de la SCI Tiftoine par versement d'une mensualité de 68,17 € pendant 24 mois, avec cette précision que le plan est établi sur 24 mois afin de permettre la vente du bien immobilier.

Par ailleurs, le juge des contentieux de la protection, saisi par ladite commission d'une demande de vérification de la créance de la SCI Tifetoine en raison de la contestation élevée par Mme [F], a , par jugement du11 janvier 2022, fixé celle-ci à la procédure de surendettement de Mme [F] à hauteur de 80.524,30 € en maintenant l'état détaillé des dettes dressé par la commission, et renvoyé le dossier à ladite commission pour poursuite de l'examen de la situation de surendettement de Mme [F] [R].

La SCI Tifetoine soutient ne pas encore avoir reçu de paiement de la part de Mme [F], sans être contredite sur ce point.

Il convient, dans ces conditions, de débouter Mme [F] de sa demande de réinscription au rôle de l'affaire inscrite sous le n°RG.19/8610 et sous le n°20/858.

Sur les frais irrépétibles et les dépens,

Mme [F] succombant à l'instance sera condamnée aux entiers dépens. Pour la même raison, elle sera condamnée à payer à la SCI Tifetoine la somme de 1 500 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Statuant contradictoirement, par ordonnance rendue par mise à disposition au greffe,

DEBOUTONS Mme [S] [F] de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement rendu par le tribunal de grande instance d'AMIENS le 13 novembre 2019 ;

DEBOUTONS Mme [S] [F] de sa demande de réinscription au rôle de l'affaire inscrite au répertoire général sous le n°19/8610 et sous le n°20/858.

CONDAMNONS Mme [S] [F] à payer à la SCI Tifetoine la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNONS Mme [S] [F] aux entiers dépens.

A l'audience du 21 Juillet 2022, l'ordonnance a été rendue par mise à disposition au Greffe et la minute a été signée par Mme BERTOUX, Présidente et Mme PILVOIX, Greffier.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Referes 1er pp
Numéro d'arrêt : 22/00061
Date de la décision : 21/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-21;22.00061 ?
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