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07/07/2022 | FRANCE | N°22/00059

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Referes 1er pp, 07 juillet 2022, 22/00059


ORDONNANCE







du 07 Juillet 2022













A l'audience publique des référés tenue le 19 Mai 2022 par Madame Jocelyne RUBANTEL, Présidente de chambre déléguée par ordonnance de Madame la Première Présidente de la cour d'appel d'AMIENS en date du 23 mars 2022,



Assistée de Madame PILVOIX, Greffier.



Dans la cause enregistrée sous le N° RG 22/00059 - N° Portalis DBV4-V-B7G-INQ6 du rôle général.





ENTRE :



Monsieur [P] [X]

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Assignant en référé suivant exploit de la SELARL JURIJUST, Huissier de Justice, en date du 21 Avril 2022, d'une ordonnance de référé rendue par le Président du tribunal judi...

ORDONNANCE

du 07 Juillet 2022

A l'audience publique des référés tenue le 19 Mai 2022 par Madame Jocelyne RUBANTEL, Présidente de chambre déléguée par ordonnance de Madame la Première Présidente de la cour d'appel d'AMIENS en date du 23 mars 2022,

Assistée de Madame PILVOIX, Greffier.

Dans la cause enregistrée sous le N° RG 22/00059 - N° Portalis DBV4-V-B7G-INQ6 du rôle général.

ENTRE :

Monsieur [P] [X]

[Adresse 6]

[Localité 3]

Assignant en référé suivant exploit de la SELARL JURIJUST, Huissier de Justice, en date du 21 Avril 2022, d'une ordonnance de référé rendue par le Président du tribunal judiciaire de Beauvais le 17 Mars 2022.

Représenté, concluant par la SELARL LEXAVOUÉ, avocat postulant au barreau d'Amiens et plaidant par Maître SALMON de la SELARL BERTHAUD et associés, avocat au barreau de Beauvais.

ET :

Madame [A] [B] épouse [W]

Monsieur [H] [W]

[Adresse 2]

[Localité 4]

DÉFENDEURS au référé.

Représentés, concluant et plaidant par Maître WADIER, avocat au barreau d'Amiens.

Madame la Présidente après avoir constaté qu'il s'était écoulé un temps suffisant depuis l'assignation pour que la partie assignée puisse se défendre.

Après avoir entendu :

- en ses assignation et plaidoirie : Maître SALMON, conseil de M. [X],

- en ses conclusions et plaidoirie : Maître WADIER, conseil des époux [W].

L'affaire a été mise en délibéré au 07 Juillet 2022 pour rendre l'ordonnance par mise à disposition au Greffe de la copie.

Les époux [W] ont acquis le 15 janvier 2020 auprès de M. [S] et Mme [N], un immeuble à usage d'habitation situé au [Adresse 1]), sur la parcelle cadastrée AB N°[Cadastre 5] contigüe à celle des époux [X] situé au numéro 9 de la rue précitée.

Un désaccord est né sur la position d'une salle de bain appartenant, selon l'acte de vente, aux époux [W] mais érigée sur une parcelle dont M. [X] revendique la propriété. Ce dernier a détruit la partie de la salle de bain qui empièterait sur son terrain.

Saisi par les époux [W] par acte d'huissier en date du 4 novembre 2021, d'une demande tendant à voir condamner solidairement sous astreinte les époux [X] à la remise en état de ladite salle de bain, le président du tribunal judiciaire de Beauvais, statuant en référé, par jugement rendu le 17 mars 2022, a :

- ordonné la jonction des instances ouvertes sous les numéros RG 21/00218 et 22/00024, sous le plus ancien de ces numéros, soit le RG N°21/00218 ;

- mis hors de la cause Mme [V] [Z] (ancienne épouse de M. [X]) ;

- condamné M. [X] à procéder, sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter de l'écoulement d'un délai d'un mois suivant la signification de l'ordonnance et pour une durée de trois mois, à la remise en état de la partie de l'immeuble des époux [W] qu'il avait détruite, conformément à l'acte authentique du 15 janvier dressé par Me [U] [J] ainsi que du procès-verbal Me [I] [E], huissier de justice, du 8 janvier 2021 ;

- réservé à la juridiction des référés le pouvoir de liquider l'astreinte ;

- condamné M. [X] à payer aux époux [W] la somme de 1 500 € à titre de provision à valoir sur la liquidation de leur préjudice de jouissance ;

- ordonné une expertise ;

- condamné M. [X] aux dépens ;

- condamné M. [X] à verser aux époux [W] la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

M. [X] a relevé appel de ce jugement par déclaration d'appel en date du 13 avril 2022.

Par acte d'huissier du 21 avril 2022, M. [X] a fait assigner les époux [W] devant Mme la première présidente de la cour d'appel d'Amiens, au visa de l'article 514-3 du Code de procédure civile, aux fins de voir :

- ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire de l'ordonnance rendue le 17 mars 2022 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Beauvais dans l'attente de l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens à intervenir s'agissant des dispositions pour lesquelles ladite Cour est saisie ;

- condamné les époux [W] aux entiers dépens de l'instance.

Au soutien de ses prétentions, il fait valoir que :

- il existe des moyens sérieux d'annulation ou de réformation du jugement dont appel dans la mesure où les époux [W] se sont fondés en première instance sur l'existence d'un trouble manifestement illicite sans démontrer, d'une part, l'existence de ce trouble et, d'autre part, que ce dernier était manifestement illicite ;

- l'exécution du jugement entrepris entrainerait des conséquences manifestement excessives dans la mesure où la reconstruction de la salle de bain litigieuse ruinerait nécessairement l'intérêt de l'appel.

Par conclusions en réponse du 10 mai 2022, les époux [W] ont demandé à Mme la première présidente de la cour d'appel d'Amiens de bien vouloir :

- les accueillir en l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions ;

- juger M. [X] irrecevable et mal fondé en sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire attachée à l'ordonnance rendue par le tribunal judiciaire de Beauvais le 17 mars 2021 ;

- débouter M. [X] de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires ;

- condamner M. [X] à leur verser la somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- condamner M. [X] aux entiers dépens de l'instance.

Au soutien de leurs demandes, les époux [W] font valoir que :

- M. [X] n'a jamais évoqué l'exécution provisoire, ni fait de demandes ou observations à ce titre en première instance ;

- l'appelant ne démontre pas l'existence de moyens sérieux de réformation, ni que le premier juge ne se serait pas fondé sur l'existence d'un trouble manifestement illicite ;

- le juge des référés est compétent pour statuer sur une atteinte au droit de propriété en ce qu'il constitue un trouble manifestement illicite ;

- la destruction de la pièce litigieuse constitue une voie de fait et une atteinte au droit de propriété ;

- la qualité de propriétaire de M. [X] est contestée ;

- l'appelant ne pouvait s'approprier la portion de terrain sans entreprendre les démarches aux fins de déterminer la limite séparative des propriétés ;

- M. [X] ne démontre pas que l'exécution provisoire entrainerait des conséquences manifestement excessives en ce que la réparation de la salle de bain n'entraînerait pas un anéantissement définitif de ses éventuels droits et qu'il ne démontre aucune conséquence dommageable concernant les condamnations financières ;

- l'appelant ne démontre pas un risque d'insolvabilité des époux ;

- M. [X] ne démontre pas l'existence de conséquences manifestement excessives révélées postérieurement à la décision critiquée.

À l'audience du 28 avril 2022, l'affaire a été renvoyée à l'audience du 19 mai 2022.

À l'audience du 19 mai 2022, M. [X] était représenté par Me [Y] et les époux [W] étaient représentés par Me Wadier.

L'affaire a été mise en délibéré au 7 juillet 2022.

SUR CE,

Sur le droit applicable,

En application de l'article 514-3 du Code de procédure civile, en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. Celles-ci sont appréciées au regard de la situation du débiteur de l'obligation compte tenu de ses facultés de paiement et au regard des facultés de remboursement du créancier de l'obligation.

La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.

En cas d'opposition, le juge qui a rendu la décision peut, d'office ou à la demande d'une partie, arrêter l'exécution provisoire de droit lorsqu'elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

Les époux [W] soutiennent in limine litis l'irrecevabilité de la demande, au visa de l'alinéa 2 de l'article 514 du Code de procédure civile ci-dessus énoncé.

Ils font valoir que M. [X] n'a formulé aucune observation sur l'exécution provisoire devant le juge des référés, alors que l'exécution provisoire est pourtant de droit, et que les conséquences manifestement excessives dont il se prévaut ne se sont pas révélées postérieurement à la décision de première instance.

M. [X] oppose que l'exécution provisoire de droit ne peut être écartée par le juge des référés, comme prévu par l'article 514-1 du Code de procédure civile, de sorte qu'elle ne pouvait ni être sollicitée par le demandeur ni faire l'objet d'observations du défendeur.

L'article 514-1 du code de procédure civile, applicable aux faits de la cause s'agissant d'une instance en référé introduite devant la juridiction du premier degré postérieurement au 1er janvier 2020, prévoit que le juge peut écarter l'exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s'il estime qu'elle est incompatible avec la nature de l'affaire. Il statue, d'office ou à la demande d'une partie, par décision spécialement motivée.

Toutefois, aux termes des dispositions de l'alinéa 3 de ce texte, par exception, le juge ne peut écarter l'exécution provisoire de droit lorsqu'il statue en référé.

Il en résulte que la partie défenderesse en première instance ne pouvait utilement présenter des observations à la formation de référés sur l'exécution provisoire, que la juridiction ne pouvait écarter.

Ainsi, le défaut d'observations déposées en première instance sur l'exécution provisoire ne peut être opposée à M. [X], et sa demande n'encourt pas l'irrecevabilité soulevée.

Sur la demande de suspension des mesures provisoires de droit par M. [X],

L'article 514-3 du Code de procédure civile exige, dès lors, la réunion de deux conditions cumulatives, soit la preuve de moyens sérieux de réformation ou d'annulation de la décision entreprise et celle de conséquences manifestement excessives attachées à l'exécution du jugement.

Sur les moyens sérieux de réformation ou d'annulation de la décision,

M. [X] soutient que les époux [W] n'ont pas apporté la preuve d'un trouble manifestement illicite dans la mesure où le logement n'était pas habité au moment de la destruction de la salle de bain et qu'il existait un doute sérieux sur la propriété de celle-ci.

En tout état de cause, M. [X] ne peut soutenir que le trouble manifestement illicite n'est pas caractérisé dès lors que, pris d'un doute sur la propriété de la salle de bain litigieuse, il n'a pas effectué les démarches légales afin de contester la propriété de ladite salle de bain mais a détruit, de son propre chef, sans autorisation, la pièce dont l'acte de propriété mentionne les époux [W] comme uniques propriétaires. Il a ainsi causé un trouble certain au droit de propriété des époux [W] que le juge de première instance, dans son appréciation souveraine des faits qui lui étaient soumis, a parfaitement qualifié.

En conséquence, les arguments soulevés au titre des moyens sérieux de réformation ou d'annulation de la décision seront jugés inopérants.

Sur les conséquences manifestement excessives,

M. [X] fait valoir que sa condamnation, sous astreinte, à la remise en état de l'immeuble, priverait l'appel de sa substance. Il ajoute que le montant de l'astreinte pourrait lui coûter 7 500 € jusqu'à l'appel.

En tout état de cause, M. [X] ne peut sérieusement se prévaloir du montant de l'astreinte comme constitutif de conséquences manifestement excessives dans la mesure où il refuserait sciemment d'exécuter la décision de première instance. Cet argument sera donc rejeté.

Quant au fait que l'exécution de la décision viderait l'appel de sa substance, il appartiendra à M. [X], en cause d'appel et en cas de réformation de la décision, de demander le remboursement des frais avancés. Cet argument sera également rejeté.

Sur les frais irrépétibles et les dépens,

M. [X], succombant à l'instance, sera condamné aux entiers dépens. Pour la même raison, il sera condamné à payer aux époux [W] la somme de 800 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement et contradictoirement,

DECLARONS l'appel de M. [P] [X] recevable ;

DEBOUTONS M. [P] [X] de sa demande de suspension des mesures provisoires de droit attachées au jugement rendu 17 mars 2022 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Beauvais ;

REJETONS ses demandes plus amples ou contraires ;

CONDAMNONS M. [P] [X] à payer à [H] [W] et [A] [B] épouse [W] la somme de 800 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNONS M. [P] [X] aux entiers dépens.

A l'audience du 07 Juillet 2022, l'ordonnance a été rendue par mise à disposition au Greffe et la minute a été signée par Mme RUBANTEL, Présidente et Mme PILVOIX, Greffier.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Referes 1er pp
Numéro d'arrêt : 22/00059
Date de la décision : 07/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-07;22.00059 ?
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