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07/07/2022 | FRANCE | N°22/00018

France | France, Cour d'appel d'Amiens, Referes 1er pp, 07 juillet 2022, 22/00018


ORDONNANCE







du 07 Juillet 2022













A l'audience publique des référés tenue le 19 Mai 2022 par Madame Jocelyne RUBANTEL, Présidente de chambre déléguée par ordonnance de Madame la Première Présidente de la cour d'appel d'AMIENS en date du 23 mars 2022,



Assistée de Madame PILVOIX, Greffier.



Dans la cause enregistrée sous le N° RG 22/00018 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IKZL du rôle général.





ENTRE :



Monsieur [R] [B]

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[Adresse 1]



Assignant en référé suivant exploit de la SELARL BELLANGER - RICHARD, Huissier de Justice, en date du 7 Février 2022, d'un jugement rendu par le tribunal judiciaire de SOISSO...

ORDONNANCE

du 07 Juillet 2022

A l'audience publique des référés tenue le 19 Mai 2022 par Madame Jocelyne RUBANTEL, Présidente de chambre déléguée par ordonnance de Madame la Première Présidente de la cour d'appel d'AMIENS en date du 23 mars 2022,

Assistée de Madame PILVOIX, Greffier.

Dans la cause enregistrée sous le N° RG 22/00018 - N° Portalis DBV4-V-B7G-IKZL du rôle général.

ENTRE :

Monsieur [R] [B]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Assignant en référé suivant exploit de la SELARL BELLANGER - RICHARD, Huissier de Justice, en date du 7 Février 2022, d'un jugement rendu par le tribunal judiciaire de SOISSONS le 18 Mars 2021.

Représenté, concluant et plaidant par Maître [S], de la SCP FRISON et associés, avocats au barreau d'Amiens et ayant pour conseil, Maître FACCENDINI, avocat au barreau de Nice.

ET :

Monsieur [L] [E]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

DÉFENDEUR au référé.

Représenté, concluant par la SELARL LEXAVOUÉ, avocat postulant au barreau d'Amiens et plaidant par Maître [Y], substituant Maître COHEN-STEINER de la SELARL ATTIQUE AVOCATS, avocat au barreau de Paris.

Madame la Présidente après avoir constaté qu'il s'était écoulé un temps suffisant depuis l'assignation pour que la partie assignée puisse se défendre.

Après avoir entendu :

- en ses assignation et plaidoirie : Maître DUMOULIN, conseil de M. [B],

- en ses conclusions et plaidoirie : Maître LORANT, conseil de M. [E].

L'affaire a été mise en délibéré au 07 Juillet 2022 pour rendre l'ordonnance par mise à disposition au Greffe de la copie.

Au mois de septembre 2017, M. [L] [E] a vendu à M. [R] [B] une voiture de collection pour un prix de 140 000 €.

Le 11 septembre 2017, M. [B] a versé par virement bancaire la moitié du prix de vente au vendeur, soit 70 000 €.

Le 20 octobre 2017, M. [B] a pris possession de la voiture chez M. [E].

N'ayant pas perçu le versement des 70 000 € restants, M. [E] a adressé, le 26 décembre 2017, à M. [B] une mise en demeure de procéder au règlement.

Saisi par M. [E] par acte d'huissier du 4 avril 2018, d'une demande en paiement, le tribunal judiciaire de Soissons, par jugement rendu le 18 mars 2021, a notamment :

- débouté M. [B] de sa demande de résolution de la vente pour défaut de conformité du véhicule « Singer le Man 1934, châssis LM 14, immatriculation KV 9246 » ;

- débouté M. [B] de sa demande d'annulation de la vente pour erreur sur les qualités essentielles du véhicule ;

- confirmé la vente du véhicule par M. [E] à M. [B] ;

- condamné M. [B] à payer à M. [E] la somme de 70 000 € correspondant au solde du prix de vente du véhicule susvisé avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 26 décembre 2017 :

- débouté M. [E] de sa demande de dommages et intérêts ;

- ordonné la remise des documents suivants en original encore en sa possession par M. [E] à M. [B] dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent jugement, à savoir :

- « old registration book » ;

- diverses factures de restauration ;

- document V5 ;

- certificat du vintage sport club ;

- certificat ancien du MOT GB ;

- un historique contenant de nombreuses photographies d'époque et contemporaines ;

- un certificat de vente ;

- un reçu des sommes versées ;

- débouté M. [B] de ses demandes ;

- condamné M. [B] à payer à M. [E] la somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné M. [B] aux entiers dépens de l'instance ;

- ordonné l'exécution provisoire de ladite décision.

M. [B] a interjeté appel de ce jugement par déclaration d'appel en date du 28 juin 2021.

Par acte d'huissier du 7 février 2022, actualisé par conclusions du 8 avril 2022, M. [B] a fait assigner M. [E] devant Mme la première présidente de la cour d'appel d'Amiens, au visa des anciens articles 521 et 524 du code de procédure civile, aux fins de voir :

À titre principal,

- ordonner l'arrêt de l'exécution provisoire dont est assorti le jugement du tribunal judiciaire de Soissons du 18 mars 2021 ;

Subsidiairement,

- aménager l'exécution provisoire dudit jugement et voir ordonner la consignation par lui d'une somme suffisante pour garantir en principal, intérêts et frais, le montant des condamnations prononcées à son encontre par le jugement du tribunal judiciaire de Soissons du 18 mars 2021 ;

En toute occurrence,

- condamner M. [E] à lui verser la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [E] aux entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, M. [B] fait valoir que :

- le tribunal judiciaire de Soissons a méconnu l'article 12 du code de procédure civile dans la mesure où il n'a pas tranché sa demande tendant à voir condamner M. [E] à lui remettre l'original du « V5C », du « old registration book » et du « vintage sport-car club eligibility document » ;

- M. [E] n' a remis que la photocopie de ces trois documents ;

- le maintien de l'exécution provisoire aboutirait à ce qu'il soit contraint de s'acquitter intégralement du prix de vente du véhicule litigieux, sans être en possession des documents originaux qui font partie des documents indispensables afin qu'il puisse immatriculer ledit véhicule ;

- le véhicule est entreposé dans un garage depuis le 20 octobre 2017 ;

- M. [E] a laissé entendre par courriel du 31 octobre 2017 qu'il ne disposait plus de la somme de 70 000 € et qu'il ne pouvait plus lui restituer ladite somme ;

- dans le cas où il serait fait droit à la demande de résolution ou d'annulation de la vente, il risquerait de se heurter à l'incapacité financière de M. [E] de lui restituer la somme de 140 000 €.

Par conclusions en réplique des 9 mars et 17 mai 2022, M. [E] a demandé à Mme la première présidente de la cour d'appel d'Amiens de bien vouloir :

- débouter M. [B] de sa demande à titre principal d'arrêt de l'exécution provisoire du jugement rendu le 18 mars 2021 par le tribunal judiciaire de Soissons ;

- débouter M. [B] de sa demande formulée à titre subsidiaire de consignation des sommes qu'il a été condamné à verser à M. [L] [E] par le jugement rendu le 18 mars 2021 par le tribunal judiciaire de Soissons ;

- débouter M. [B] de ses demandes formulées au titre des articles 695 et suivants et 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [B] à verser à M. [E] la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [B] aux entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, M. [E] fait valoir que :

- M. [B] ne démontre pas que l'exécution provisoire de la décision serait susceptible d'entraîner pour lui des conséquences manifestement excessives ;

- les arguments ayant trait à la régularité et au bien-fondé de la décision des premiers juges sont inopérants ;

- seules doivent être prises en considération les facultés financières du débiteur et les facultés de remboursement du créancier ;

- M. [B] ne fait état d'aucune difficulté de trésorerie l'empêchant d'exécuter la décision dont il fait appel ;

- M. [B] échoue à démontrer que M. [E] ne disposerait pas des facultés de remboursement suffisantes en cas d'infirmation du jugement attaqué ;

- aucune circonstance ne justifie qu'il soit fait droit à la demande de consignation formulée à titre subsidiaire par M. [B].

À l'audience du 24 février 2022, l'affaire a été renvoyée au 19 mai 2022.

À l'audience du 19 mai 2022, M. [B] était représenté par Me [S] et M. [E] était représenté par Me [Y].

Me [S] a soutenu le risque de conséquences manifestement excessives au regard de l'absence de remise des documents, de l'impossibilité de restituer les 70 000 € déjà versés, et l'interrogation quant au lieu où demeure M. [E].

Le conseil de M. [B] a sollicité l'arrêt de l'exécution provisoire et, à titre subsidiaire, la consignation.

Me [Y] a fait valoir que les arguments sur les documents sont inopérants puisqu'ils ont déjà été remis.

Il a indiqué que M. [B] ne se prévaut pas de difficultés financières, et que M. [E] a réinvesti l'argent pour acheter une autre voiture. Le conseil de M. [E] a ajouté avoir produit des justificatifs sur les résidences de ce dernier.

Me [Y] a souligné l'absence de motifs légitimes s'agissant de la consignation, et a sollicité le débouté ainsi qu'une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'affaire a été mise en délibéré au 7 juillet 2022.

SUR CE,

Sur la demande d'arrêt de l'exécution provisoire,

En application de l'article 524 du code de procédure civile, dans sa version applicable au litige, lorsque l'exécution provisoire a été ordonnée, elle ne peut être arrêtée, en cas d'appel, par le premier président statuant en référé, que si elle est interdite par la loi ou si elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.

Les conséquences manifestement excessives justifiant l'arrêt de l'exécution provisoire s'apprécient par rapport aux facultés de paiement du débiteur et aux facultés de remboursement de la partie adverse en cas d'infirmation de la décision assortie de l'exécution provisoire.

Il incombe à la partie qui demande la suspension de l'exécution provisoire d'établir les conséquences manifestement excessives qu'elle risque d'entraîner.

Le risque de conséquences manifestement excessives suppose un préjudice irréparable et une situation irréversible en cas d'infirmation.

- Sur la violation de l'article 12 du code de procédure civile,

M. [B] soutient en l'espèce que le tribunal judiciaire de Soissons a méconnu l'article 12 du code de procédure civile dans la mesure où il n'a pas tranché sa demande tendant à voir condamner M. [E] à lui remettre l'original de trois documents.

Conformément à l'article 524 du code de procédure civile, « le premier président peut arrêter l'exécution provisoire de droit en cas de violation manifeste du principe du contradictoire ou de l'article 12 et lorsque l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ».

Il ressort toutefois du jugement dont appel que l'exécution provisoire a été ordonnée, de sorte qu'il ne s'agit pas d'une exécution provisoire de droit.

Le moyen tiré de la violation de l'article 12 du code de procédure civile doit en conséquence être écarté.

- Sur le risque de conséquences manifestement excessives,

M. [B] soutient également que l'exécution provisoire du jugement rendu le 18 mars 2021 par le tribunal judiciaire de Soissons risque d'entraîner pour lui des conséquences manifestement excessives.

Il développe en effet qu'il serait tenu de s'acquitter du paiement de la somme de 70 000 €, c'est à dire à s'acquitter intégralement du paiement du prix du véhicule sans pouvoir entamer de démarches pour l'immatriculer en France ou à [Localité 4], faute de posséder tous les documents nécessaires.

L'appelant fait en outre valoir que M. [E] dissimule son adresse et qu'il ne serait pas en mesure de le rembourser en cas de réformation dudit jugement.

M. [E] affirme quant à lui que M. [B] ne démontre pas que l'exécution provisoire de la décision serait susceptible d'entrainer des conséquences manifestement excessives à son égard en ce qu'il ne fait état d'aucune difficulté de trésorerie l'empêchant d'exécuter la décision dont il fait appel.

Il ajoute que l'appelant échoue à démontrer qu'il ne disposerait pas des facultés de remboursement suffisantes.

Il ressort des pièces du dossier que M. [B] ne produit aucun élément permettant d'évaluer sa situation financière et qu'il n'a, au surplus, pas fait état de difficultés matérielles lors des débats.

M. [B] ne saurait enfin justifier l'absence de faculté de remboursement de M. [E] par le simple fait que ce dernier ait « pris un engagement sur une autre voiture » (pièce n°25 du demandeur).

Dès lors, l'appelant échoue à démontrer d'une part, son incapacité à s'acquitter du montant de la condamnation et d'autre part, l'incapacité pour M. [L] de restituer les sommes versées au titre des condamnations en cas de réformation du jugement.

En l'absence d'éléments caractérisant le risque de conséquences manifestement excessives, il convient donc de débouter M. [B] de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement rendu le 18 mars 2021 par le tribunal judiciaire de Soissons.

Sur la demande d'aménagement de l'exécution provisoire,

En application de l'article 521 du code de procédure civile, « la partie condamnée au paiement de sommes autres que des aliments, des rentes indemnitaires ou des provisions peut éviter que l'exécution provisoire soit poursuivie en consignant, sur autorisation du juge, les espèces ou les valeurs suffisantes pour garantir, en principal, intérêts et frais, le montant de la condamnation ».

Rappel doit être fait de ce que,

- la possibilité d'aménagement de l'exécution provisoire prévue par cet article n'est pas subordonnée à la condition, prévue par l'article 524 du code de procédure civile, de l'existence de conditions manifestement excessives ;

- l'autorisation de consigner relève du pouvoir discrétionnaire de la première présidente ;

- il n'entre pas dans les pouvoirs de la première présidente d'apprécier la régularité ou le bien-fondé de la décision.

M. [B] sollicite à titre subsidiaire l'autorisation de consigner en principal, intérêts et frais, le montant des condamnations prononcées à son encontre par le jugement du tribunal judiciaire de Soissons du 18 mars 2021.

Il estime qu'existe un risque de défaut de remboursement de M. [E] qui pourrait être tenu de lui restituer la somme de 140 000 € en cas de réformation du jugement, et avance le fait que M. [E] n'a ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connu.

M [E] s'oppose à la demande de consignation, soulignant qu'aucune circonstance ne justifie qu'il y soit fait droit.

Il convient toutefois de constater que M. [E] ne produit au débat aucun élément permettant d'apprécier l'état de ses capacités financières, hormis un relevé de la taxe d'habitation et des taxes foncières pour 2021 (pièce n°5 du défendeur) ainsi qu'un relevé des mensualités versées par l'assurance retraite (pièce n°6 du défendeur).

En outre, si ces mêmes pièces établissent que M. [E] est propriétaire de sa résidence de [Localité 2] (02) et qu'il réside actuellement au Portugal, elles n'apportent aucune information quant à l'étendue de son patrimoine.

Au regard de l'insuffisance d'éléments versés au dossier par M. [E] et du montant des condamnations, la présente juridiction retient qu'il existe un risque de non-restitution des sommes en cas de réformation du jugement de première instance.

Il convient en conséquence de faire droit à la demande de consignation de la somme de 70 000 € entre les mains de la Caisse des dépôts et consignations en application de l'article 519 du code de procédure civile

Sur les dépens et frais irrépétibles,

M. [B] succombant à l'instance, supportera la charge des entiers dépens.

Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de M. [E] les frais irrépétibles qu'il a dû exposer pour les besoins de la présente instance, M. [B] doit en conséquence être condamné à lui verser la somme de 1 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement et contradictoirement,

DÉBOUTONS M. [R] [B] de sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire attachée au jugement rendu le 18 mars 2021 par le tribunal judiciaire de Soissons ;

AUTORISONS M. [R] [B] à consigner la somme de 70 000 € entre les mains de la Caisse des dépôts et consignations ;

CONDAMNONS M. [R] [B] à payer à M. [L] [E] la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNONS M. [R] [B] aux entiers dépens.

A l'audience du 07 Juillet 2022, l'ordonnance a été rendue par mise à disposition au Greffe et la minute a été signée par Mme RUBANTEL, Présidente et Mme PILVOIX, Greffier.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : Referes 1er pp
Numéro d'arrêt : 22/00018
Date de la décision : 07/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-07;22.00018 ?
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