ARRET
N° 472
[O]
C/
MDPH DU NORD
COUR D'APPEL D'AMIENS
2EME PROTECTION SOCIALE
ARRET DU 23 JUIN 2022
*************************************************************
N° RG 21/01940 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IB7A
JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE (Pôle Social) EN DATE DU 08 mars 2021
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE
Madame [D] [O]
52/11 rue d'Arcole
59000 LILLE
Représentée et plaidant par Me Jérôme POLLET, avocat au barreau de LILLE, vestiaire : 0366
ET :
INTIME
La MDPH DU NORD, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
21 rue de la Toison d'Or
CS 30351
59669 VILLENEUVE D'ASCQ CEDEX
Convoquée à l'audience par lettre recommandée en date du 05 Novembre 2021 dont l'accusé de réception a été tamponnée le 10 Novembre 2021
Non comparante, non représentée
DEBATS :
A l'audience publique du 28 Mars 2022 devant Madame Jocelyne RUBANTEL, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 23 Juin 2022.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Marie-Estelle CHAPON
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Madame Jocelyne RUBANTEL en a rendu compte à la Cour composée en outre de:
Madame Jocelyne RUBANTEL, Président de chambre,
Mme Chantal MANTION, Président,
et Mme Véronique CORNILLE, Conseiller,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
PRONONCE :
Le 23 Juin 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Madame Jocelyne RUBANTEL, Président a signé la minute avec Mme Marie-Estelle CHAPON, Greffier.
*
* *
DECISION
Le 1er août 2019, Mme [D] [O] a sollicité de la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) du Nord le renouvellement de l'allocation aux adultes handicapés qui lui avait été octroyée du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2019.
Consécutivement à la décision rendue par la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées le 21 novembre 2019, la MDPH du Nord a, par courrier du 3 décembre 2019, informé Mme [D] [O] du rejet de sa demande au motif qu'elle présentait un taux d'incapacité égal ou supérieur à 50% et inférieur à 80% sans restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi.
Mme [D] [O] a formé un recours gracieux puis contentieux de cette décision.
Par jugement en date du 8 mars 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Lille a :
- déclaré recevable la demande de Mme [D] [O],
- rejeté la demande d'allocation adultes handicapés de Mme [D] [O],
- condamné Mme [D] [O] aux dépens.
Par courrier recommandé expédié le 9 avril 2021, Mme [D] [O] a interjeté appel du jugement qui lui avait été notifié par courrier expédié le 8 mars 2021.
Les parties ont été convoquées à l'audience du 28 mars 2022.
Par conclusions reçues le 28 mars 2022, Mme [D] [O] demande à la cour de :
- la déclarer recevable et bien fondée en son appel,
En conséquence, y faisant droit,
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et :
A titre principal:
- désigner tel expert psychiatrique qu'il plaira, avec pour mission de dire si elle présentait toujours une restriction substantielle et durable à l'accès à l'emploi entre fin 2019 et début 2020, dans le cadre de sa demande de renouvellement de l'allocation adulte handicapé,
Subsidiairement, dans l'hypothèse où la cour n'entendrait pas désigner expert :
- dire qu'elle justifie pleinement des certificats médicaux attestant de la poursuite de ses soins sur le plan psychiatrique et constater que son état de de santé est demeuré inchangé par rapport à la période précédente au cours de laquelle la MDPH du Nord lui avait déjà accordé l'allocation adulte handicapé. - lui accorder en conséquence le renouvellement de l'allocation adulte handicapé à compter du 1er janvier 2020 et ce pour une durée de cinq années.
En tout état de cause,
- débouter la MDPH du Nord de toutes autres demandes, fins et conclusions contraires,
- condamner la MDPH du Nord à l'ensemble des frais et dépens de la présente procédure ainsi que de ceux de première instance.
Elle fait valoir qu'elle a été bénéficiaire de l'allocation adulte handicapé du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2019, la MDPH du Nord lui reconnaissant alors un taux d'incapacité évalué entre 50% et 79%, ainsi que l'existence d'une restriction substantielle et durable à l'accès à l'emploi.
Elle soutient que son état de santé est inchangé depuis sa demande initiale d'attribution de l'allocation et qu'elle en justifie au travers des pièces médicales et des attestations qu'elle verse aux débats. Elle précise que ces justificatifs apportent a minima un commencement de preuve justifiant la mise en 'uvre d'une expertise psychiatrique, ayant pour mission de déterminer si ses troubles psychiques caractérisent une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi.
La MDPH du Nord, régulièrement convoquée, est absente et non représentée.
MOTIFS
En application des articles L. 821-1, D. 821-1 du code de la sécurité sociale, peut prétendre à l'attribution de l'allocation aux adultes handicapés, toute personne qui présente, à la date de la demande, un taux d'incapacité permanente au moins égal à 80%, par référence au guide barème réglementaire.
Selon les articles L. 821-2 et D. 821-1 (2ème alinéa) du même code, si le taux d'incapacité permanente est compris entre 50 et 79 %, l'allocation aux adultes handicapés peut être attribuée à toute personne qui présente une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi (RSDAE) d'une durée minimale d'un an à compter de la demande et sans que son état soit nécessairement stabilisé.
Le taux d'incapacité permanente est apprécié suivant le guide barème figurant à l'annexe 2-4 (article R. 241-2 du code de l'action sociale et des familles). Un taux d'au moins 80% correspond à des déficiences graves entraînant une entrave majeure dans la vie quotidienne de la personne avec une atteinte à son autonomie individuelle de la personne.
En l'espèce, dans sa décision de rejet de la prestation, la MDPH indique que la situation de Mme [D] [O], dont le taux d'incapacité est compris entre 50 et 79%, ne permet pas de conclure qu'elle rencontre une restriction substantielle et durable à l'emploi 'après prise en compte des conséquences professionnelles liées à votre situation de handicap, ainsi que des éléments pouvant les limiter (aménagements du poste de travail, adaptations des conditions de travail ou toute autre aide dont la mise en place pourrait être envisagée).
Il y a lieu de rappeler que dans sa précédente décision, la MDPH avait retenu que Mme [D] [O] présentait une restriction substantielle et durable à l'emploi compte tenu de son handicap.
Mme [D] [O] s'est vu reconnaître la qualité de travailleur handicapé du 22 novembre 2019 au 14 juin 2022.
L'avis du médecin consultant du tribunal a mis en exergue les éléments suivants :
'Mme [O] aurait fait en 2017 un accident ischémique postérieur sylvien qui déterminait des troubles de l'équilibre. Le compte rendu de l'IRM de 2017 ne montre en fait pas de lésion évidente et d'ailleurs un scanner de 2019 est sans aucune anomalie. Mme [O] ajoute qu'à ces troubles physiques existent des troubles psychiques faits d'angoisses, de peur de mourir qui ont été traités effectivement à partir de 2017 par des antidépresseurs et des anxyolitiques et l'on retrouve trace de prescriptions au-delà de novembre 2020 alors que plusieurs prescriptions de son médecin traitant en 2019 ne font pas état de traitement anti-dépresseur. Il existe effectivement et en permanence un traitement antiagrégant plaquettaire et un traitement anti-hypertenseur. Je n'ai que des déclarations personnelles mais je n 'ai pas la preuve de l'existence de la persistance de la prescription d'anti-dépresseur et d'anxyiolitique durant la période où la demande de renouvellement a été faite et s'agissant de troubles d'angoisses j'estime que je ne suis pas suffisamment compétent pour déterminer si ces simples troubles sont capables à eux seuls de déterminer une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi. En ce qui concerne le physique, c'est-à-dire l'hypertension artérielle et les troubles neurologiques, ils ont disparu sous l'effet du traitement.'
Le tribunal a entériné l'avis du médecin consultant après avoir écarté la demande d'expertise au motif que Mme [D] [O] ne justifiait d'aucun élément pouvant étayer les problémes psychologiques allégués.
Pour contester le jugement du tribunal, Mme [D] [O] verse aux débats une attestation du 6 mars 2020 du Dr [Y] [P], médecin généralise, laquelle certifie que l'état de santé de Mme [O] est inchangé depuis 2017, période à laquelle sont apparus ses troubles. Elle justifie d'un suivi par le Dr [N] [K], psychiatre au centre médico-psychologique (CMP) de Lille (attestation du Dr [N] [K], convocations au CMP de mars 2019, avril et mai 2020, prescriptions du Dr [N] [K] du 19 septembre 2019). Figure également au dossier un certificat du Dr [Y] [P] dans lequel le médecin atteste que l'état de santé de Mme [D] [O] est incompatible avec une activité professionnelle.
Il apparait ainsi une difficulté d'ordre médicale, auquel le médecin consultant désigné par le tribunal n'a pas été en mesure de répondre, de sorte qu'il convient d'ordonner pour la parfaite information de la cour, avant dire droit, une mesure de consultation médicale sur pièces, dans les conditions précisées au dispositif.
Les dépens seront réservés.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant par arrêt réputé contradictoire rendu en audience publique par sa mise à disposition au greffe et ne pouvant faire l'objet d'un recours indépendamment de la décision sur le fond,
Avant dire droit au fond,
Ordonne en application de l'article R. 142-16 du code de la sécurité sociale une mesure de consultation sur pièces,
Commet à cet effet le Dr [Z] [U] Psychiatre, Centre Hospitalier d'Abbeville - 43 rue de l'Isle, 80142 ABBEVILLE Cedex- avec pour mission de:
- prendre connaissance des pièces figurant dans les dossiers remis à la cour par les parties,
se faire remettre par la MDPH du Nord en application de l'article R. 142-16-3 du code de la sécurité sociale l'intégralité du rapport médical mentionné à l'article L. 142-6 du même code et du rapport mentionné au premier alinéa de l'article L. 142-10 ou l'ensemble des éléments ou informations à caractère secret au sens du deuxième alinéa de l'article L. 142-10 ayant fondé sa décision,
dire si, à la date de la demande de renouvellement de l'allocation adulte handicapé, soit le 1er août 2019, les troubles psychiques évoqués par Mme [D] [O] répondaient aux critères de restriction substantielle et durable à l'accès l'emploi, tels que mentionnés aux articles L. 821-2 et D. 821-1 du code de la sécurité sociale, appréciée selon les dispositions de l'annexe 2-4 de ce code,
Dit que la cause sera à nouveau évoquée à l'audience du 03 Avril 2023 à 13h30.
Dit que la notification du présent arrêt vaudra convocation des parties à l'audience de réouverture des débats.
Réserve les dépens.
Le Greffier,Le Président,