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23/05/2022 | FRANCE | N°21/00379

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 23 mai 2022, 21/00379


ARRET

N°323





CPAM DES FLANDRES





C/



Société RAMERY PROPRETE







CM





COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 23 MAI 2022



*************************************************************



N° RG 21/00379 - N° Portalis DBV4-V-B7F-H672



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE EN DATE DU 02 novembre 2020





PARTIES EN CAUSE :





APPELANT

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CPAM DES FLANDRES agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié en cette qualité audit siège

2 rue de la Batellerie

CS 94523

59386 DUNKERQUE CEDEX 1



Représentée et plaidant par Mme [V] [O] dûment mandatée











...

ARRET

N°323

CPAM DES FLANDRES

C/

Société RAMERY PROPRETE

CM

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 23 MAI 2022

*************************************************************

N° RG 21/00379 - N° Portalis DBV4-V-B7F-H672

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE EN DATE DU 02 novembre 2020

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

CPAM DES FLANDRES agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié en cette qualité audit siège

2 rue de la Batellerie

CS 94523

59386 DUNKERQUE CEDEX 1

Représentée et plaidant par Mme [V] [O] dûment mandatée

ET :

INTIMEE

Société RAMERY PROPRETE agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié en cette qualité audit siège

M.P. : M. [F] [U]

740 rue du Bac

59193 ERQUINGHEM LYS

Représentée et plaidant par Me LABRUGERE, avocat au barreau de LYON substituant Me Michaël RUIMY de la SELARL R & K AVOCATS, avocat au barreau de LYON

DEBATS :

A l'audience publique du 28 Février 2022 devant Mme Chantal MANTION, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 23 Mai 2022.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Vitalienne BALOCCO

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Chantal MANTION en a rendu compte à la Cour composée en outre de:

Madame Jocelyne RUBANTEL, Président,

Mme Chantal MANTION, Président,

et Mme Véronique CORNILLE, Conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 23 Mai 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Madame Jocelyne RUBANTEL, Président a signé la minute avec Mme Blanche THARAUD, Greffier.

*

* *

DECISION

Le 9 octobre 2018, M. [F] [U], employé en qualité d'agent qualifié de service par la société Ramery Propreté, a souscrit une déclaration de maladie professionnelle documentée par un certificat médical initial du 24 mars 2017 faisant état d'une tumeur primitive de l'épithélium urinaire vésical.

Au terme de l'enquête diligentée, et après saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région Tourcoing Hauts-de-France, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) des Flandres a pris en charge la pathologie déclarée selon décision du 12 avril 2019 au titre du tableau n° 16 bis des maladies professionnelles.

Saisi par la société Ramery Propreté le 27 septembre 2019 d'un recours formé contre la décision de la commission de recours amiable de la CPAM ayant rejeté sa contestation, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lille, devenu pôle social du tribunal judiciaire de Lille, par jugement prononcé le 2 novembre 2020, a :

- déclaré la décision de prise en charge de la CPAM des Flandres de la pathologie du 24 mars 2017 de M. [F] [U] au titre de la législation professionnelle, inopposable la SARLU Ramery Propreté ;

- invité la CPAM des Flandres à donner les informations utiles à la CARSAT compétente pour la rectification du taux de cotisations AT/MP de la SARLU Ramery Propreté ;

- condamné la CPAM des Flandres aux dépens.

La CPAM des Flandres a, par lettre recommandée du 7 janvier 2021, relevé appel auprès de la présente cour d'appel de ce jugement qui lui avait été notifié par courrier recommandé, dont elle avait accusé réception le 18 décembre 2020.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 28 février 2022.

Aux termes de ses conclusions visées par le greffe le jour de l'audience et soutenues oralement, la CPAM des Flandres prie la cour de :

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le pôle social du tribunal judiciaire de Lille du 2 novembre 2020 ;

- dire et juger que la CPAM des Flandres a respecté les dispositions de l'article D. 461-29 du code de la sécurité sociale ;

- dire et juger bien fondée la décision de prise en charge de la maladie professionnelle ;

- déclarer opposable à la société Ramery Propreté la décision de prise en charge du 12 avril 2019 relative à la maladie de M. [U] ;

- débouter la société Ramery Propreté de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner la société Ramery Propreté aux dépens.

Au soutien de ses demandes, elle expose que l'employeur se prévaut du défaut de transmission de l'avis du médecin du travail au CRRMP initialement saisi, alors qu'elle avait dûment sollicité cet avis, et qu'à défaut de réponse de la médecine du travail, elle s'est trouvée dans l'impossibilité matérielle de recueillir cet avis et par conséquent de le transmettre. Elle souligne que dans ces conditions, l'avis du CRRMP doit être considéré comme valablement exprimé.

Elle estime par ailleurs justifier du respect des conditions de prise en charge de la maladie déclarée par le salarié, telles que reprises au titre du tableau 16 Bis des maladies professionnelles.

Aux termes de ses conclusions visées par le greffe le jour de l'audience et soutenues oralement, la société Ramery Propreté prie la cour de :

- confirmer le jugement entrepris dans ses entières dispositions ;

En conséquence,

- juger que le principe du contradictoire n'a pas été respecté, le dossier transmis au CRRMP étant lacunaire en l'absence de l'avis motivé du médecin du travail ;

- juger inopposable à la société Ramery Propreté la décision de prise en charge du 12 avril 2019 de la maladie professionnelle déclarée par M. [U] ;

- condamner la CPAM aux entiers dépens de l'instance.

Elle fait valoir que le CRRMP Tourcoing Hauts-de-France a rendu un avis sans avoir reçu communication de l'avis du médecin du travail et fait valoir que la jurisprudence applicable à l'époque de la décision de prise en charge de la maladie, estimait que l'absence d'avis de la médecine du travail devait conduire à l'inopposabilité de la prise en charge de la pathologie. Elle retient par ailleurs que la caisse ne démontre pas avoir été dans l'impossibilité d'obtenir ledit avis.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des demandes et moyens des parties.

***

MOTIFS

Sur l'opposabilité de la décision de la caisse à l'employeur:

Selon les dispositions de l'article L. 461-1 est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau des maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.

Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.

La caisse doit alors recueillir l'avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.

Selon les dispositions de l'article D. 461-29 du code de la sécurité sociale, le dossier constitué par la caisse doit comprendre :

1° Les éléments d'investigation éventuellement recueillis par la caisse après la saisine du comité en application de l'article R. 461-10,

2° Les observations et éléments éventuellement produits par la victime ou ses représentants et l'employeur en application de l'article R. 461-10 ;

3° Un avis motivé du médecin du travail de la ou des entreprises où la victime a été employée portant notamment sur la maladie et la réalité de l'exposition de celle-ci à un risque professionnel présent dans cette ou ces entreprises éventuellement demandé par la caisse en application du II de l'article R. 461-9 et qui lui est alors fourni dans un délai d'un mois ;

4° Un rapport circonstancié du ou des employeurs de la victime décrivant notamment chaque poste de travail détenu par celle-ci depuis son entrée dans l'entreprise et permettant d'apprécier les conditions d'exposition de la victime à un risque professionnel éventuellement demandé par la caisse en application du II de l'article R 461-9 et qui lui est alors fourni dans un délai d'un mois ;

5° Le rapport établi par les services du contrôle médical de la caisse primaire d'assurance maladie indiquant, le cas échéant, le taux d'incapacité permanente de la victime.

La communication du dossier s'effectue dans les conditions définies à l'article R. 441-14 en ce qui concerne les pièces mentionnées aux 1°, 2° et 4° du présent article.

L'avis motivé du médecin du travail et le rapport établi par les services du contrôle médical mentionnés aux 3° et 5° du présent article sont communicables de plein droit à la victime et ses ayants droit. Ils ne sont communicables à l'employeur que par l'intermédiaire d'un praticien désigné à cet effet par la victime ou, à défaut, par ses ayants droit. Ce praticien prend connaissance du contenu de ces documents et ne peut en faire état, avec l'accord de la victime ou, à défaut, de ses ayants droit, que dans le respect des règles de déontologie.

Seules les conclusions administratives auxquelles ces documents ont pu aboutir sont communicables de plein droit à son employeur.

Il est par ailleurs constant que le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles peut valablement exprimer l'avis servant à fonder la décision de la caisse, dès lors que cette dernière démontre qu'il lui était matériellement impossible d'obtenir l'avis du médecin du travail.

A contrario, l'absence de l'avis du médecin du travail dans le dossier constitué par la caisse préalablement à sa transmission au comité est de nature à justifier l'inopposabilité de la décision de prise en charge à l'égard de l'employeur, dès lors qu'il n'est pas justifié de cette impossibilité.

En l'espèce, la caisse ayant constaté à l'issue de l'enquête administrative que la condition tenant à la liste limitative des travaux du tableau 16 bis n'était par remplie, a saisi le CRRMP Tourcoing Hauts-de-France qui s'est prononcé sans que figure parmi les pièces soumises à son appréciation l'avis du médecin du travail.

Il résulte de l'examen des pièces des parties que l'employeur a désigné son médecin du travail dans le cadre du questionnaire qui lui a été transmis par la caisse, le docteur [T] [D] à Coudekerque-Branche.

Si la société retient que la caisse ne justifie ni du courrier de demande d'avis à ce médecin du travail, ni de la preuve de son envoi, il ressort toutefois des éléments versés aux débats par la caisse que le docteur [D], atteste le 14 janvier 2022 avoir été destinataire du courrier daté du 27 décembre 2018, sollicitant son avis, avant transmission du dossier au CRRMP.

Il apparait par ailleurs que si l'avis du CRRMP Tourcoing Hauts-de-France du 10 avril 2019 mentionne que le dossier qui lui a été transmis par la CPAM ne comprenait pas l'avis motivé du médecin du travail, la motivation du comité fait toutefois mention des éléments suivants : « L'avis du médecin a été demandé le 27.12.2018. ».

Ainsi, la caisse justifiant avoir été dans l'impossibilité de transmettre l'avis du médecin du travail, il convient dès lors d'infirmer le jugement de première instance, en ce qu'il a déclaré inopposable à la société Ramery Propreté la décision du 12 avril 2019 de prise en charge de la maladie professionnelle de M. [F] [U], au motif de la carence de la caisse dans la justification de l'impossibilité d'obtenir l'avis du médecin du travail avant transmission au CRRMP.

Sur l'origine professionnelle de la maladie :

Selon l'article L. 461-1 alinéas 2, 3 et 5 du code de la sécurité sociale, est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.

Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime.

Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.

Il résulte des dispositions des articles L. 461-1 et R. 142-17-2 que, lorsque la maladie déclarée ne remplit pas les conditions d'un tableau de maladies professionnelles et que la caisse a suivi l'avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, il incombe à la juridiction, avant de statuer sur le bien-fondé de la demande de prise en charge de la maladie professionnelle, de recueillir l'avis d'un autre comité régional.

En l'espèce, M. [F] [U] a déclaré une pathologie relevant du tableau n° 16 Bis, soit une tumeur primitive de l'épithélium urinaire (vessie, voies excrétrices supérieures) confirmée par examen histopathologique ou cytopathologique, laquelle a fait l'objet d'une décision du 12 avril 2019 prenant en charge, aux termes d'une instruction, au titre de la législation sur les risques professionnels la pathologie déclarée par l'assuré après avis de CRRMP.

La caisse sollicite au stade d'appel que la présente cour statue sur le bien-fondé de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle.

En l'absence de saisine d'un second CRRMP et conformément aux dispositions de l'article R. 142-17-2 du code de la sécurité sociale, telles que susvisées, il incombe à la cour de recueillir préalablement l'avis d'un autre comité régional avant de se prononcer sur le caractère professionnel de la pathologie .

Partant, il y a lieu de réserver les dépens et de surseoir à statuer dans l'attente de l'avis à intervenir du comité régional précité.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par arrêt rendu contradictoirement par mise à disposition au greffe,

Dit non fondé le moyen d'inopposabilité soutenu par la société Ramery Propreté ;

Infirme le jugement entrepris ;

Avant dire droit,

Désigne le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles Nord-Est afin de recueillir son avis sur la question de savoir si la maladie déclarée par M. [F] [U] peut être reconnue d'origine professionnelle ;

Dit que l'affaire sera rappelée à l'audience du 23 janvier 2023 à 13h30 ;

Dit que la notification aux parties de l'arrêt vaut convocation à cette audience ;

Réserve les dépens.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 21/00379
Date de la décision : 23/05/2022
Sens de l'arrêt : Renvoi

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-23;21.00379 ?
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