La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/05/2022 | FRANCE | N°21/05047

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 5eme chambre prud'homale, 19 mai 2022, 21/05047


ARRET







[U]





C/



Fondation FONDATION SAVART





































































copie exécutoire

le 19 mai 2022

à

Me Delgenes

Me Fabing

CB/MR/SF



COUR D'APPEL D'AMIENS



5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE



ARRET DU 19

MAI 2022



*************************************************************

N° RG 21/05047 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IH7I



JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE SOISSONS DU 15 SEPTEMBRE 2021 (référence dossier N° RG 21/00016)



PARTIES EN CAUSE :



APPELANT



Monsieur [P] [U]

né le 12 Avril 1967 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[...

ARRET

[U]

C/

Fondation FONDATION SAVART

copie exécutoire

le 19 mai 2022

à

Me Delgenes

Me Fabing

CB/MR/SF

COUR D'APPEL D'AMIENS

5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE

ARRET DU 19 MAI 2022

*************************************************************

N° RG 21/05047 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IH7I

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE SOISSONS DU 15 SEPTEMBRE 2021 (référence dossier N° RG 21/00016)

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur [P] [U]

né le 12 Avril 1967 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 2]

représenté par Me Stéphanie THUILLIER de la SCP FRISON ET ASSOCIÉS, avocat au barreau D'AMIENS, avocat postulant

concluant par Me Richard DELGENES de la SCP DELGENES VAUCOIS JUSTINE DELGENES, avocat au barreau D'ARDENNES

ET :

INTIMEE

FONDATION SAVART

[Adresse 3]

[Localité 1]

concluant par Me Stéphane FABING, avocat au barreau de SAINT-QUENTIN

DEBATS :

A l'audience publique du 10 mars 2022, devant Madame Corinne BOULOGNE, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, l'affaire a été appelée.

Madame Corinne BOULOGNE indique que l'arrêt sera prononcé le 19 mai 2022 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Malika RABHI

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Madame Corinne BOULOGNE en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :

Mme Corinne BOULOGNE, présidente de chambre,

Mme Fabienne BIDEAULT, conseillère,

Mme Marie VANHAECKE-NORET, conseillère,

qui en a délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 19 mai 2022, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Corinne BOULOGNE, Présidente de Chambre et Mme Malika RABHI, Greffière.

*

* *

DECISION :

EXPOSE DU LITIGE

M. [U] a été embauché le 2 mai 2017 par la Fondation Savart, en qualité d'agent technique supérieur.

La convention collective applicable est celle des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966.

La fondation compte un effectif de 240 salariés répartis sur plusieurs établissements.

Par avis du 6 février 2020, le salarié a été déclaré inapte par le médecin du travail.

M. [U] a saisi le conseil de prud'hommes dans sa forme des référés, aux fins de contester cet avis d'inaptitude.

Par ordonnance du 8 septembre 2020, le conseil de prud'hommes s'est dit incompétent pour statuer sur cette demande, considérant que la demande portait non pas sur une contestation de l'état médical mais sur les fonctions exercées par le salarié.

L'employeur a proposé un poste de reclassement de surveillant de nuit, conformément aux prescriptions du médecin du travail, que le salarié refusera.

Le 4 juin 2020, M. [U] a été convoqué à un entretien préalable à son licenciement.

Par courrier en date du 23 juin 2020, le salarié a été licencié pour impossibilité de reclassement suite à une inaptitude d'origine non professionnelle.

Par requête du 19 février 2021, M. [U] a saisi le conseil des prud'hommes de Soissons, qui par jugement du 15 septembre 2021, a :

- débouté M. [U] de ses demandes d'annulation de l'avis d'inaptitude et de substitution de l'avis d'inaptitude en avis d'aptitude. L'affaire ayant déjà été jugée sous la forme des référés nous le renvoyons au jugement prononcé par le conseil de prud'hommes de Laon le 8 septembre 2020 ;

- dit qu'il n'y avait pas lieu de confier une mesure d'instruction au médecin inspecteur du travail en raison de l'incompétence de la formation ;

- dit que le licenciement pour impossibilité de reclassement suite à une inaptitude d'origine non professionnelle était fondé ;

- débouté M. [U] de l'intégralité de ses demandes ;

- dit que chaque partie conservait la charge de ses propres dépens.

- débouté l'association Fondation Savart, prise en la personne de son représentant légal de sa demande d'article 700 du code de procédure civile.

Ce jugement a été notifié le 22 septembre 2021 à M. [U] qui en a relevé appel le 19 octobre 2021.

La Fondation Savart a constitué avocat le 4 novembre 2021.

Par dernières conclusions communiquées par voie électronique le 10 décembre 2021, M. [U] prie la cour de :

- le déclarer recevable et bien-fondé en son appel ;

- constater que la décision du conseil de prud'hommes de Laon du 8 septembre 2020 ne l'a pas débouté de cette demande mais le conseil de prud'hommes de Laon s'est déclaré incompétent ;

- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Soissons du 15 septembre 2021 en ce qu'il l'a débouté de cette demande d'annulation de l'avis d'inaptitude et de substitution de l'avis d'inaptitude en avis d'aptitude estimant que l'affaire avait déjà été jugée sous la forme des référés par jugement du conseil des prud'hommes de Laon du 8 septembre 2020 ;

- annuler l'avis d'inaptitude du médecin du travail du 6 février 2020 ;

- substituer un avis d'aptitude avec les réserves suivantes :

- pas de port de charges supérieures à 15 kgs

- pas de flexion-rotation du tronc de façon répétée

- éviter les nombreux déplacements

- pas de travail accroupi ou agenouillé

- pas de montée-descente échelles, peut monter sur un escabeau

- confier toute mesure d'instruction au médecin inspecteur du travail territorialement compétent pour l'éclairer sur les questions de fait relevant de sa compétence quant à son inaptitude ou non à son poste de travail ;

- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Soissons du 15 septembre 2021 en ce qu'il l'a débouté de sa demande de requalification du licenciement pour impossibilité de reclassement prononcé par lettre du 23 juin 2020 suite à une inaptitude d'origine non professionnelle en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- requalifier le licenciement prononcé par lettre du 23 juin 2020 suite à une inaptitude d'origine non professionnelle en licenciement sans cause réelle et sérieuse ou pour absence d'inaptitude ou pour non-respect de l'obligation loyale et sérieuse de recherche de reclassement, ce ou pour défaut de consultation régulière du Conseil Social et Economique, ou pour défaut de recherche complète ou pour absence de proposition d'un contrat à durée déterminée ;

- condamner la Fondation Savart à lui payer :

- 4 258,46 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis

- 425,85 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis sur congés payés

- 8 516,92 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du licenciement sans cause

réelle et sérieuse

En tout état de cause,

- condamner la fondation Savart à lui payer 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la fondation Savart aux entiers dépens de l'instance.

Par dernières conclusions communiquées par voie électronique le 21 janvier 2022, la Fondation Savart prie la cour de :

- dire et juger M. [U] mal-fondé en ses fins, moyens et prétentions ;

- dire et juger n'y avoir lieu à l'annulation de l'avis d'inaptitude ou sa substitution par un avis d'aptitude ;

- dire et juger le licenciement de M. [U] bienfondé ;

- confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Soissons le 15 septembre 2021 sauf en ce qu'il a dit que chaque partie conservait la charge de ses propres dépens et l'a débouté de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [U] au paiement d'une indemnité de 2 000 euros à valoir sur les frais et honoraires non compris dans lesdits dépens en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- le condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

MOTIFS

Sur l'avis d'inaptitude

M. [U] conteste l'avis d'inaptitude, estimant que le médecin du travail s'est égaré en évaluant ses capacités physiques au regard d'un poste de travail d'agent d'entretien, qu'il apparaît ainsi de l'avis d'inaptitude qu'il occupe un poste d'agent technique supérieur qui consiste à veiller au travail effectué par d'autres agents ; que la convention collective applicable détaille les tâches du responsable des activités techniques professionnelles du service éloignées du descriptif qui en fait par l'employeur.

Il argue que le témoignage du directeur du foyer doit être écarté car se substituant à l'employeur il doit être considéré comme une preuve faite à soi-même et que de surcroît il n'était pas en poste lorsque lui même travaillait.

Il détaille ses activités, précisant que les restrictions prévues par le médecin du travail étaient respectées, aucune de ses tâches n'entrant en opposition avec elles, qu'il verse aux débats un certificat médical de son médecin traitant qui affirme qu'il est apte à poursuivre son travail en évitant le port de charges d'un poids supérieur à 15 kilos.

Enfin il fait valoir que le conseil des prud'hommes l'a débouté de sa demande d'annulation d'avis inaptitude en se fondant sur la précédente ordonnance en référé mais que celle ci ne l'avait pas débouté mais que le conseil des prud'hommes s'était déclaré incompétent.

La Fondation Savart réplique que le médecin du travail est tenu d'apprécier l'aptitude d'un salarié non pas au regard du titre de poste apparaissant sur son bulletin de paie ou sur son contrat de travail mais au regard des fonctions réellement exercées ; que la notion d'agent technique supérieur renvoie à la classification et à un niveau hiérarchique et le titre d'agent d'entretien permet d'apprécier l'affectation du salarié au service entretien, que s'il coordonne le travail, il l'effectue également.

Elle rapporte que le médecin a interrogé le salarié sur les tâches réellement effectuées et les a prises en compte pour prendre la décision sur l'avis d'inaptitude, que celles-ci ne correspondent pas au descriptif qu'en fait le salarié qui n'étant ni cadre ni agent de maitrise, effectue bien des missions d'exécution telles que détaillées par le directeur du foyer qui peut en témoigner, la preuve en matière prud'hommale étant libre.

Elle relève que les missions telles que reprises par le salarié prouvent que les restrictions du médecin du travail ne pouvaient être respectées, que l'avis du médecin traitant ne saurait contrevenir à celui du médecin du travail ; qu'enfin seul le conseil des prud'hommes pouvait substituer l'avis d'inaptitude à un avis d'aptitude, ce qu'il a refusé de faire.

Sur ce

Attendu que selon l'article R.4624-31 du code du travail, le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude médicale du salarié à son poste de travail que s'il a réalisé 1° une étude de ce poste, 2° une étude des conditions de travail dans l'entreprise, 3° deux examens médicaux de l'intéressé espacés de deux semaines, accompagnés, le cas échéant, des examens complémentaires ; que par exception, l'avis d'inaptitude peut être délivré en un seul examen lorsque premièrement le maintien du salarié à son poste de travail entraîne un danger immédiat pour sa santé ou sa sécurité ou celles des tiers ou lorsqu'un examen de pré-reprise a eu lieu dans un délai de trente jours au plus.

Le médecin du travail a rendu un avis d'inaptitude dans les termes suivants : «pas de port de charges supérieures à 15 kilos. Pas de flexion-rotation du tronc de façon répétée. Eviter les nombreux déplacements. Pas de travail accroupi ou agenouillé. Pas de montée descente d'échelles, peut monter sur un marche pied. Pourrait occuper un poste administratif. Pourrait occuper un poste de surveillant de nuit. Pourrait faire une formation.»

En application des dispositions de l'article L4624-7 du code du travail, M. [U] avait saisi le conseil de prud'hommes selon la procédure accélérée au fond (appelée procédure « en la forme des référés » jusqu'au 1er janvier 2020), d'une contestation de l'avis d'inaptitude rendu en vertu de l'article L4624-4.

Cependant, par ordonnance rendue le 8 septembre 2020, le conseil des prud'hommes s'est dit incompétent puisque la demande du salarié ne portait pas sur une contestation de nature médicale mais sur les fonctions effectuées par l'intéressé au sein du foyer qui avaient été retenues par le médecin du travail pour fonder sa décision.

M. [U] n'a pas relevé appel de cette ordonnance.

M. [U] exerçait les fonction d'agent technique supérieur, qualification reprise par le contrat de travail.

Le compte rendu de l'entretien annuel daté du 8 février 2018 reprend les missions qui sont confiées au salarié, à savoir :

- toujours présent sur le terrain, il seconde le responsable de l'équipe d'entretien

- il veille à l'entretien et à la maintenance des bâtiments, des installations électriques, sanitaires, thermiques et du matériel, y compris des véhicules

- il vérifie la bonne prise en compte des consignes de sécurité du délai et de la qualité

- il veille à l'application des normes, directives et règlements, notamment en matière de sécurité

- il participe à plusieurs tâches administratives : élaboration de devis, vérification des bons de commande.

La preuve en matière prud'homale étant libre, le directeur du foyer peut témoigner et même s'il n'était pas présent lorsque M. [U] travaillait, il connaît les missions exercées à ce poste, une autre personne ayant du être embauchée pour le remplacer.

L'employeur détaille les tâches, qui sont des tâches d'exécution, telles effectuer des travaux de nettoyage, d'entretien et de remise en état des locaux, remettre en état par changement de pièces suivants schémas, plans ou consignes, remplir les bacs à sels des adoucisseurs d'eau, dont il est justifié par des factures qu'ils pèsent 25 kilos, entretenir les machines à laver, contrôler des blocs secours pour lesquels il est nécessaire de monter sur des échelles, qu'il en est de même pour l'entretien des filtres des ordinateurs, assurer le contrôle des canalisations en partie basse qui nécessitent de s'agenouiller ou de s'accroupir, contrôler les installations électriques y compris le remplacement des luminaires et des prises de courant, ce qui nécessite de monter et descendre d'une échelle et de s'accroupir ou s'agenouiller, décharger des produits lessiviels de 20 kilos, installer du nouveau mobilier, décharger en déchetterie, assurer le suivi et l'entretien des véhicules.

Par ailleurs, le médecin du travail rend son avis sur l'aptitude après une étude du poste occupé et des entretiens à la fois avec le salarié et l'employeur. Le médecin a nécessairement pris en compte les déclarations du salarié.

Le salarié liste aussi ses tâches qu'il réalisait au sein du foyer : si la mise en 'uvre de certaines sont contestées notamment sur l'utilisation possible d'un escabeau et non d'une échelle, le fait est que le médecin du travail a restreint la montée et la descente, n'autorisant que l'utilisation d'un marche-pied ; par ailleurs si en cas de pannes des sociétés extérieures intervenaient sur le matériel, la maintenance au quotidien était assurée par M. [U] et ses collègues.

C'est en vain que le salarié argue du certificat médical de son médecin traitant puisque d'une part seul l'avis du médecin du travail est exigé pour évaluer l'état d'aptitude au travail et que d'autre part le salarié n'avait pas contesté devant le conseil des prud'hommes en référés la nature des restrictions ayant amené à l'inaptitude mais seulement la nature des tâches effectuées.

Au regard de ces éléments la cour, par confirmation du jugement, déboute M. [U] de sa contestation de l'avis d'inaptitude.

Sur la légitimité du licenciement pour inaptitude

M. [U] sollicite de la cour qu'elle juge le licenciement sans cause réelle et sérieuse soutenant que l'employeur a failli dans son obligation de reclassement.

Il argue qu'il n'est pas produit aux débats l'avis du conseil social et économique, que la fondation ne justifie pas des recherches au sein des autres établissements qu'elle gère, qu'il prouve qu'un poste de surveillant de nuit a été proposé à une autre personne alors que ce poste était compatible avec son état de santé et que quand bien même il s'agissait d'un contrat à durée déterminée, il lui appartenait d'accepter ou de refuser une telle offre.

La Fondation Savart rétorque qu'elle a tenté de reclasser le salarié, qu'elle justifie du compte rendu du conseil social et économique, qu'aucune permutation de poste n'était possible et que l'aménagement du poste du fait des restrictions était inenvisageable, le seul poste disponible en interne était celui de surveillant de nuit à temps partiel. Elle objecte qu'une personne a été embauchée dans un autre foyer, les contraintes de ce poste étaient incompatibles avec les restrictions du médecin du travail, alors que celui qu'elle lui a proposé respectait celles-ci mais que le salarié l'a refusé.

Sur ce

Il n'est pas contesté que le licenciement est consécutif à une inaptitude d'origine non-professionnelle.

Bien que reposant sur une inaptitude physique régulièrement constatée par le médecin du travail, le licenciement ne sera légitime que pour autant que l'employeur aura préalablement satisfait à l'obligation de reclassement mise à sa charge par l'article L.1226-2 du code du travail qui dispose dans sa rédaction applicable au présent litige :

L'article L 1226-2 du code du travail « Lorsque le salarié victime d'une maladie ou d'un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce.

Cette proposition prend en compte, après avis du comité social et économique lorsqu'il existe, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail. »

Ainsi définie, l'obligation de reclassement des salariés physiquement inaptes mise à la charge de l'employeur s'analyse en une obligation de moyen renforcée, dont le périmètre s'étend à l'ensemble des sociétés du même secteur d'activité avec lesquelles l'entreprise entretient des liens ou compose un groupe, dont la localisation et l'organisation permettent la permutation de tout ou partie du personnel, et il appartient à l'employeur, débiteur de cette obligation, de démontrer par des éléments objectifs qu'il y a satisfait et que le reclassement de la salarié par le biais de l'une des mesures prévues par la loi s'est avéré impossible, soit en raison du refus d'acceptation par le salarié d'un poste de reclassement adapté à ses capacités et conforme aux prescriptions du médecin du travail, soit en considération de l'impossibilité de reclassement à laquelle il se serait trouvé confronté.

Selon l'article L 1226-2-1 modifié par la loi du 8 août 2016, l'employeur peut rompre le contrat de travail s'il justifie du refus par le salarié de la proposition d'un poste répondant aux conditions de l'article L 1226-2. L'obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l'employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l'article L 1226-2, en prenant en compte l'avis et les indications du médecin du travail dés lors que la proposition procède d'une recherche loyale et sérieuse de reclassement.

L'employeur produit aux débats le courrier de convocations du conseil social et économique du 11 mai 2020 auquel était adjoint l'ordre du jour faisant apparaitre la consultation et l'examen du reclassement de M. [U] après l'avis d'inaptitude du 29 avril 2020, le procès-verbal de la réunion qui s'est tenue le 18 mai 2020 sur le reclassement de l'intéressé.

La cour observe que l'employeur produit aux débats les courriers de recherche de reclassement auprès des dix établissements ou structures dépendant de la fondation et les courriers de ceux-ci indiquant qu'aucun poste respectant les préconisations du médecin du travail n'était disponible, les seuls disponibles ne correspondant pas aux compétences du salarié ( psychiatre, éducateur sportif ou moniteur d'atelier).

La cour rappelle que l'employeur n'est pas tenu d'assurer une formation initiale dans le cadre du reclassement.

L'employeur produit en outre le registre du personnel et il n'apparaît pas de poste disponible au moment du licenciement, compatible avec les restrictions du médecin du travail sauf un seul de veilleur de nuit.

M. [U] produit aux débats le témoignage de M. [S] qui atteste avoir été embauché en qualité de surveillant de nuit en contrat à durée déterminée du 18 mai au 4 août 2020 au FAM à [Localité 1].

M.[C], Directeur d'établissement indique que la fonction de surveillant de nuit en contrat à durée déterminée du 18 mai au 4 août 2020 au FAM à [Localité 1] impliquait de surveiller des bâtiments en faisant une ronde toutes les heures sur une distance de 1200 mètres et en empruntant des escaliers de 45 marches.

Par cette attestation circonstanciées l'employeur démontre que ce poste était incompatible avec l'état de santé et les restrictions du médecin du travail et ne pouvait être proposé au salarié comme poste de reclassement.

La fondation justifie en outre qu'un poste de surveillant de nuit à temps partiel a été trouvé à l'institut médico-professionnel de [Localité 5] et a été proposé au salarié par courrier du 19 mai 2020 ; M. [I], directeur de l'IMPRO atteste que ce poste devait s'exercer sur un pavillon de plein pied, sans escalier et avec peu de déplacement. Par la production de cette attestation l'employeur établit que cette proposition de poste était compatible avec les capacités restantes du salarié, en ce que les tâches n'impliquaient pas de postures interdites par le médecin du travail.

M. [U] l'a refusé le 25 mai 2020, considérant qu'il était trop éloigné de son domicile et qu'il entrainait une perte de salaire.

Pour autant la cour relève qu'il a pas motivé son refus par des raisons médicales et qu'il ne conteste pas sérieusement que ce poste était conforme aux préconisations du médecin du travail.

Dans ces conditions il n'appartenait pas à l'employeur d'interroger de nouveau le médecin du travail.

Ainsi il est justifié de recherches de reclassement exhaustives de la part de l'employeur recherches qui ont permis d'identifier un seul poste disponible, celui de veilleur de nuit respectant les préconisations du médecin du travail, à savoir un poste sans port de charges supérieures à 15 kilos, sans nécessité de flexion-rotation du tronc de façon répétée sans nombreux déplacements, un travail non accroupi ou agenouillé, de montée descente d'échelles, poste que le salarié a refusé,

L'employeur démontre l'impossibilité de reclassement.

En conséquence, le licenciement pour inaptitude est fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Le salarié, par confirmation du jugement, doit être débouté de sa demande .

Sur les frais irrépétibles et les dépens

La cour confirme le jugement en ce qu'il a laissé à la charge de chacune des parties la charge de ses propres dépens et sur le débouté de l'association Fondation Savart de sa demande sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [U] succombant en appel est condamné aux dépens d'appel.

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais qu'elles ont exposés pour la présente procédure d'appel. Elles sont déboutées de leurs demandes respectives sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant contradictoirement et en dernier ressort, par arrêt mis à disposition au greffe

Confirme le jugement rendu par le Conseil des Prud'hommes de Soissons le 15 septembre 2021 en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant

Déboute les parties de leurs demandes respectives sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel ;

Rejette toutes autres demandes plus amples et contraires ;

Condamne M. [U] aux dépens d'appel.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 5eme chambre prud'homale
Numéro d'arrêt : 21/05047
Date de la décision : 19/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-19;21.05047 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award