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19/05/2022 | FRANCE | N°21/04108

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 5eme chambre prud'homale, 19 mai 2022, 21/04108


ARRET







[K]





C/



S.A.R.L. IMEO COMPIEGNE



























































copie exécutoire

le 19 mai 2022

à

Me Gilles

Me Bellaiche

MVN/MR



COUR D'APPEL D'AMIENS



5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE



ARRET DU 19 MAI 2022



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N° RG 21/04108 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IGDJ



JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE COMPIEGNE DU 12 JUILLET 2021 (référence dossier N° RG F 20/00037)



PARTIES EN CAUSE :



APPELANTE



Madame [Z] [K]

née le 20 Novembre 1988 à [Localité 3]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Adresse 2]
...

ARRET

[K]

C/

S.A.R.L. IMEO COMPIEGNE

copie exécutoire

le 19 mai 2022

à

Me Gilles

Me Bellaiche

MVN/MR

COUR D'APPEL D'AMIENS

5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE

ARRET DU 19 MAI 2022

*************************************************************

N° RG 21/04108 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IGDJ

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE COMPIEGNE DU 12 JUILLET 2021 (référence dossier N° RG F 20/00037)

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

Madame [Z] [K]

née le 20 Novembre 1988 à [Localité 3]

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Concluant par Me Jean-Marie GILLES de la SELEURL CABINET GILLES, avocat au barreau de PARIS

ET :

INTIMEE

S.A.R.L. IMEO COMPIEGNE agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège :

[Adresse 1]

[Adresse 1]

concluant par Me Jonathan BELLAICHE de la SELEURL GOLDWIN SOCIETE D'AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

DEBATS :

A l'audience publique du 31 mars 2022, devant Mme Marie VANHAECKE-NORET, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, l'affaire a été appelée.

Mme Marie VANHAECKE-NORET indique que l'arrêt sera prononcé le 19 mai 2022 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Malika RABHI

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Marie VANHAECKE-NORET en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :

Mme Corinne BOULOGNE, présidente de chambre,

Mme Fabienne BIDEAULT, conseillère,

Mme Marie VANHAECKE-NORET, conseillère,

qui en a délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 19 mai 2022, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Corinne BOULOGNE, Présidente de Chambre et Mme Malika RABHI, Greffière.

*

* *

DECISION :

Vu le jugement en date du 12 juillet 2021par lequel le conseil de prud'hommes de Compiègne, statuant dans le litige opposant Mme [Z] [K] (la salariée) à son ancien employeur, la société Imeo Compiègne (SARL), a débouté la salariée de l'ensemble de ses demandes, a condamné celle-ci à payer à la société une indemnité de 700 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Vu l'appel interjeté le 30 juillet 2021par voie électronique par Mme [K] à l'encontre de cette décision régulièrement notifiée le 26 juillet précédent ;

Vu la constitution d'avocat de la société Imeo Compiègne, intimée, effectuée par voie électronique le 20 août 2021;

Vu les conclusions notifiées par voie électronique le 2 mars 2022 par lesquelles la salariée appelante, soutenant que les dispositions légales sur la durée du travail lui sont applicables et qu'elle a effectué des heures supplémentaires qui ne lui ont pas été payées, exposant avoir subi un harcèlement moral et des voies de fait de la part de l'employeur, faisant valoir également que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité dès lors qu'elle a subi des conditions de travail qui ont gravement altéré son état de santé, soutenant que le licenciement est nul car consécutif à des faits de harcèlement moral, qu'à tout le moins il est dénué de cause réelle et sérieuse, opposant que la demande formulée pour la première fois en cause d'appel au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse est recevable par application des dispositions de l'article 565 du code de procédure civile, faisant valoir qu'elle n'a pas perçu les commissions afférentes aux dernières affaires qu'elle a traitées, que l'employeur en dépit d'une sommation de communiquer n'a pas produit la liste exhaustive des mandats qu'elle a signés ce qui justifie la demande en ce sens qu'elle formule devant la cour et qui contrairement à ce que soutenu par l'employeur est recevable, dénonçant également l'absence de versement par l'employeur de l'indemnité de clientèle, soutenant aussi que le solde de tout compte recèle des irrégularités qui n'ont pas été corrigées, sollicite l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes, l'a condamnée au paiement d'une indemnité au titre des frais irrépétibles exposés par l'employeur ainsi qu'aux dépens, prie la cour statuant à nouveau de dire recevable sa demande subsidiaire tendant à voir dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, de fixer la moyenne du salaire brut mensuel à 1909,80 euros, d'enjoindre à la société de produire la liste de l'ensemble des mandats qu'elle a signés et la rémunération afférente, cette demande étant recevable, de dire qu'elle a subi des agissements constitutifs de harcèlement moral et de voies de fait, de dire le licenciement prononcé nul, subsidiairement sans cause réelle et sérieuse, de condamner la société Imeo Compiègne à lui verser les sommes reprises au dispositif de ses conclusions à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral (1500 euros), de dommages et intérêts pour voies de fait (1500 euros), de dommages et intérêts pour licenciement nul et subsidiairement pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (10 000 euros), d'indemnité de préavis (3819,60 euros) et de congés payés y afférents (381,96 euros), d'indemnité de licenciement (557,02 euros), au titre du manquement à l'obligation de sécurité (800 euros), des heures supplémentaires (2763,80 euros) et des congés payés incidents (276,38 euros), de dommages et intérêts pour non-respect de la durée légale (1500 euros), prie aussi la cour de condamner la société Imeo Compiègne à lui payer les commissions lui restant acquises et les congés payés y afférents (mémoire), à lui verser la somme de 3500 euros à titre d'indemnité de clientèle, de dire que l'ensemble des condamnations porteront intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud'hommes, d'ordonner la remise des bulletins de salaire et documents de fin de contrat conformes comprenant la prime de 13ème mois proratisée et l'indemnité compensatrice de congés payés et ce sous astreinte, de débouter la société de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions, de condamner la société à lui verser une indemnité de 2500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ainsi qu'aux entiers dépens pour l'ensemble de la procédure ;

Vu les conclusions notifiées par voie électronique le 22 mars 2022 aux termes desquelles la société intimée, soulevant sur le fondement des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile l'irrecevabilité des demandes de la salariée au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que celle d'injonction de produire la liste des mandats qu'elle a signés et la rémunération afférente, réfutant les moyens et l'argumentation de la partie appelante, aux motifs notamment que la réglementation de la durée du travail n'est pas applicable à Mme [K] du fait de son statut de VRP, qu'en tout état de cause la salariée ne produit pas d'éléments suffisamment précis au soutien de sa demande de rappel d'heures supplémentaires et ne justifie pas que les heures prétendues étaient imposées par le travail demandé, la nature des tâches confiées ou effectuées à la demande de l'employeur, qu'elle n'a jamais commis de harcèlement moral ni voies de fait, qu'aucun manquement à son obligation de sécurité n'est démontré ni préjudice distinct de celui invoqué au soutien de la demande indemnitaire pour harcèlement moral infondé, que le licenciement n'est pas nul, que le licenciement est justifié pour faute grave, les faits reprochés étant non prescrits, établis et justifiant l'éviction immédiate de la salariée, que cette dernière ne justifie pas du préjudice allégué au soutien de la demande indemnitaire pour licenciement illégitime dans son principe et son étendue, que les calculs opérés relatifs aux indemnités de rupture sollicitées reposent sur un salaire de référence erroné, que les commissions ont été réglées dans leur intégralité, qu'ayant été licenciée pour faute grave, la salariée ne peut pas prétendre à une indemnité de clientèle, que le solde de tout compte est régulier et que la salariée a été déjà remplie de ses droits au titre des sommes qu'elle revendique, prie la cour in limine litis de dire irrecevables les demandes nouvelles de la salariée à savoir celles tendant à dire que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, à condamner la société à des dommages et intérêts sur ce fondement et à lui enjoindre de produire la liste de l'ensemble des mandats signés par Mme [K] et leur rémunération afférente, en tout état de cause de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de débouter la salariée de l'ensemble de ses demandes et la condamner au paiement d'une indemnité de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 23 mars 2022 renvoyant l'affaire pour être plaidée à l'audience du 31 mars suivant ;

Vu les conclusions transmises le 2 mars 2022 par l'appelante et le 22 mars 2022 par l'intimée auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d'appel ;

SUR CE, LA COUR

Mme [Z] [K], née en 1988, a été recrutée suivant contrat de travail à durée indéterminée par la société Imeo Compiègne à compter du 8 novembre 2018 en qualité de conseillère spécialisée en location statut VRP non cadre niveau E1, sa rémunération étant composée d'une partie fixe et de commissions.

La société Imeo Compiègne exploite sous l'enseigne 'Guy Hoquet' un fonds de commerce d'agence immobilière et elle applique la convention collective nationale de l'immobilier.

Un avenant a été conclu entre les parties le 1er octobre 2019.

Mme [K] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 13 janvier 2020 par lettre du 26 décembre précédent puis licenciée pour faute grave par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 30 janvier 2020, motivée comme suit :

'Nous vous avons convoqué à un entretien préalable en date du 26 décembre 2019 qui devait se tenir le mardi 13 janvier 2020 à 15 heures auquel vous ne vous êtes pas présentée.

Par la présente, nous vous notifions votre licenciement pour faute grave dont les motifs sont les suivants :

Nous vous reprochons d'avoir eu une intention de nuire à la société ce qui a été démontré.

En effet, nous avons été informés que vous teniez des propos désobligeants et dégradants à l' égard de la société et de vos collègues.

Vous avez en particulier indiqué souhaiter qu'un ancien agent commercial attaque la société en justice dans le but de voir l'entreprise fermer. Par ailleurs, vous avez tenu des propos malveillants à l'encontre de Madame [L] en affirmant vouloir l'évincer.

En outre, vous avez qualifié la compagne de l'un de vos collègues de « chienne de meuf» ce qui est tout bonnement inacceptable.

Une telle attitude de défiance envers votre entreprise et vos collègues ne saurait être tolérée au sein de notre société.

Lorsque nous vous avons informée, loin de présenter des excuses, vous avez reconnu les faits et répondu que nous devions supporter de tels propos estimant que cela ressortait d'une conversation privée et que nous ne pouvions pas y avoir accès. Nous n'avons effectivement pas accès à vos conversations privées qui nous ont été transmises par une tierce personne.

Dans ces conditions, nous avons eu accès à cette conversation de façon tout à fait légale.

Ces propos, comme vous pouvez l'imaginer, n'ont pas manqué de nous interpeller et de nous choquer et constituent la preuve de vos intentions malveillantes à l'égard de la société et de tous ceux qui y travaillent. Ils ne sauraient être tolérés dans notre société.

Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, votre maintien dans l'entreprise est impossible. Votre licenciement prend donc effet immédiatement, sans indemnité de préavis ni de licenciement.

Votre certificat de travail, votre solde de tout compte et votre attestation Pôle emploi vous seront adressés par courrier.

Vous pouvez faire une demande de précision des motifs du licenciement énoncés dans la présente lettre, dans les 15 jours suivant sa notification, par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé.

Nous avons la faculté d'y donner suite dans un délai de 15 jours après réception de votre demande, par lettre recommandée avec avis de réception ou remise contre récépissé. Nous pouvons également, le cas échéant et dans les mêmes formes, prendre l'initiative d'apporter des précisions à ces motifs dans un délai de 15 jours suivant la notification du licenciement.

(...)'».

Contestant la licéité de son licenciement, recherchant la reconnaissance d'un harcèlement moral et estimant ne pas avoir été remplie de ses droits au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail, Mme [Z] [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Compiègne, qui, statuant par jugement du 12 juillet 2021, dont appel, s'est prononcé comme indiqué précédemment.

Sur la fin de non recevoir soulevée par la société Imeo Compiègne

Invoquant les dispositions de l'article 564 du code de procédure civile, l'intimée fait valoir que sont irrecevables pour être nouvelles en cause d'appel les demandes suivantes :

- voir dire que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse,

- voir l'employeur condamné au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- voire enjoindre à la société de produire la liste de l'ensemble des mandats signés par Mme [K] et la rémunération afférente.

La salariée oppose que ces demandes tendent aux mêmes fins que celles formées en première instance et sont donc recevables par application des dispositions de l'article 565 du code de procédure civile.

Sur ce,

L'article 564 du code de procédure civile énonce 'A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait'.

L'article 565 du même code prévoit que 'Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent'.

Il est constant que les prétentions dont l'irrecevabilité est soulevée par la société n'ont pas été formulées en première instance.

Toutefois les demandes formées par la salariée au titre d'un licenciement nul puis d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse tendent à l'indemnisation des conséquences de son licenciement qu'elle estime injustifié ; dès lors ces demandes tendent aux mêmes fins de sorte que les prétentions au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse formées devant la cour à titre subsidiaire sont recevables.

Il en est de même de la demande avant dire droit en ce qu'elle vise à permettre à Mme [K] de préciser le quantum du rappel de commissions réclamé devant les premiers juges.

En conséquence la société doit être déboutée de sa fin de non-recevoir.

Les demandes rappelées précédemment seront déclarées recevables.

Sur les demandes relatives à l'exécution du contrat de travail

Sur les heures supplémentaires

Mme [K] expose qu'elle travaillait durant les heures d'ouverture de l'agence mais en plus et régulièrement en dehors et notamment avant 9 heures, durant sa pause déjeuner, tard le soir ainsi que les lundis censés être pourtant non travaillés. Elle indique fournir des éléments matériels non contredits par l'employeur qui ne justifie pas pour sa part des horaires effectivement réalisés. Elle indique qu'elle produit notamment les échanges de messages via l'application 'WhatsApp' qui selon elle démontrent qu'elle se tenait à la disposition de son employeur même en dehors des horaires d'ouverture de l'agence et parfois les jours fériés.

Elle soutient par ailleurs ne pas être concernée par l'avenant du 15 juin 2006 relatif au statut de négociateur immobilier de la convention collective nationale de l'immobilier, qu'en tout état de cause, même VRP, elle exerçait son activité sous le contrôle de l'employeur, sans disposer de liberté dans l'organisation de son temps de travail et était soumise à des horaires déterminés, que l'avenant du 1er octobre 2019 ne reprend d'ailleurs pas ce statut ce qui démontre qu'elle ne pouvait en relever compte tenu de la nature de son poste dès l'origine, qu'elle doit donc bénéficier des règles légales relatives à la durée du travail et notamment aux heures supplémentaires.

Elle fait valoir enfin que l'employeur savait qu'elle effectuait des heures supplémentaires.

La société oppose que l'avenant du 15 juin 2006 rappelle que le temps de travail du négociateur immobilier VRP n'est pas contrôlable et ne peut relever de la réglementation de la durée du travail, que la salariée était soumise au statut de VRP conformément à son contrat de travail, que son temps de travail n'était pas contrôlable et que les stipulations contractuelles excluent pour ce motif l'application des règles relatives à la durée du travail, qu'il n'est pas démontré qu'elle était soumise à des horaires déterminés et au contrôle constant de l'employeur sans liberté dans l'organisation de son temps de travail.

La société fait également valoir sur la preuve des heures supplémentaires, en substance que les éléments de la salariée ne sont pas suffisamment précis, qu'il s'agit d'un décompte établi informatiquement pour les besoins de la cause et comportant des erreurs, que les groupes Whatsapp n'avaient rien de professionnel, la salariée étant libre d'y participer et que les messages ne permettent pas de préjuger d'un travail effectif générant des heures supplémentaires. La société ajoute que Mme [K] ne démontre nullement que les heures dont elle sollicite le paiement auraient été imposées, demandées par l'employeur ou rendues nécessaires par la quantité et la nature des tâches à accomplir.

Sur ce,

Les Voyageurs Représentants Placiers dès lors qu'ils exercent leurs fonctions sans être astreints à un horaire précis et contrôlable en organisant librement leurs tournées et leur temps de travail ne sont pas soumis aux règles légales sur la durée du travail.

En l'espèce toutefois, il résulte des éléments de Mme [K] qu'elle prospectait les clients selon les instructions de son responsable et devait effectuer les rappels téléphoniques suivant les directives ainsi que respecter le planning des présences fixées par l'employeur (article 4 du contrat de travail), que son lieu de travail était fixé à l'agence de [Localité 3] où elle devait recevoir les prospects locataires ou bailleurs, que le contrat de travail lui faisait aussi obligation de tenir quotidiennement la direction informée de son programme de travail et plus particulièrement de ses éventuels déplacements et qu'elle était tenue d'assister aux jours, heures et endroits fixés par l'employeur aux réunions et rapports que celui-ci jugeait nécessaires.

L'ensemble de ces éléments permet de retenir que Mme [K], nonobstant les termes de l'accord du 15 juin 2006, n'avait effectivement aucune liberté dans l'organisation de son travail, était soumise à des horaires déterminés et placée constamment sous le contrôle de l'employeur lequel devait respecter les dispositions légales sur la durée du travail et plus particulièrement sur les heures supplémentaires.

Il apparaît en outre que l'avenant du 1er octobre 2019 a modifié le contrat de travail en son article 1er et prévoit notamment que la salariée est engagée en qualité de conseillère spécialisée en location catégorie employée E3 sans plus stipuler le statut de VRP ce qui tend à corroborer que dans les faits Mme [K] ne disposait pas dans l'exercice de ses fonctions de la liberté et de l'autonomie d'organisation inhérentes aux VRP non soumis aux règles de droit commun en matière de décompte du temps de travail, peu important la mention de 'représentant exclusif' sur les bulletins de paie.

Mme [K] peut donc se prévaloir des dispositions légales applicables aux heures supplémentaires.

Aux termes de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié'; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

En l'espèce, Mme [K] verse aux débats :

- un tableau récapitulatif à compter de la semaine 45 de l'année 2018 faisant figurer ses horaires quotidiens, la durée de travail hebdomadaire, le nombre d'heures supplémentaires pour chaque semaine et le cumul annuel des heures supplémentaires qu'elle dit avoir accomplies, tableau selon lequel elle a parfois travaillé six jours sur sept, à plusieurs reprises au-delà de 35 heures par semaine et jusqu'à 43 heures,

- de nombreux échanges horodatés sur trois groupes de discussion instantanée Whatsapp créés par l'employeur : 'les loups de Wall street', 'LOC' et 'CPE New' dont il résulte que l'employeur et les salariés communiquaient entre eux par ce biais notamment sur des sujets directement en rapport avec l'activité de la société, le contenu de certaines de ces discussions mettant en évidence que Mme [K] se trouvait alors en agence ou accomplissait des tâches relevant de ses fonctions (rédaction d'acte, accueil de clients, demandes de renseignements sur des tarifs et honoraires ou sur des biens par exemple) en dehors des horaires d'ouverture (à titre d'illustrations, le 25 janvier 2019 à 19h26, le 31 janvier 2019 entre 19h16 et 19h28, le 22 février 2019 entre 19h08 et 19h32, le 28 février 2019 à 19h54, le 31 octobre 2019 à 19h22, le 11 novembre 2019 où elle rend compte de ses dossiers en cours à son supérieur à la demande de ce dernier).

Mme [K], qui n'a pas à justifier de réclamations antérieures à la saisine de la juridiction prud'homale, produit ainsi des éléments qui sont suffisamment précis pour permettre à la société employeur d'y répondre utilement en versant ses propres éléments.

Au vu des éléments produits de part et d'autre, et sans qu'il soit besoin d'une mesure d'instruction, la cour a la conviction au sens du texte précité que Mme [K] a bien effectué des heures supplémentaires qui ne lui ont pas été payées.

Toutefois, si l'employeur ne justifie pas des horaires effectivement réalisés, il apporte des éléments contredisant pour partie ceux de la salariée. Ainsi il apparaît que la salariée n'a intégré deux des groupes de discussion qu'à la fin du mois de novembre 2018 et que le troisième n'a été crée qu'au cours de l'année 2019, or Mme [K] décompte des heures supplémentaires qui seraient des temps d'échanges Whatsapp dès la semaine 47 de l'année 2018. En outre, de très nombreuses discussions ne concernent pas directement Mme [K] et n'appelaient de sa part eu égard à leur contenu, ni réaction immédiate ni prestation de travail. Enfin, ponctuellement cette dernière a comptabilisé au soutien de sa demande des heures supplémentaires alors qu'elle était absente.

En conséquence, le volume d'heures supplémentaires non rémunérées ressort moindre que celui prétendu.

Dès lors, le jugement sera infirmé en ce qu'il a intégralement débouté la salariée mais le rappel de salaire et de congés payés y afférents sera limité à hauteur des sommes précisées au dispositif du présent arrêt étant relevé qu'il apparaît que ces heures supplémentaires étaient rendues nécessaires par la nature des tâches à accomplir et surtout que l'employeur ne pouvaient les ignorer eu égard à la petite taille de la structure de sorte qu'elles ont été accomplies à tout le moins avec son accord implicite.

Ces sommes, de nature salariale, seront assorties des intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation.

Sur la demande de dommages et intérêts

La salariée forme au dispositif de ses conclusions une demande d'indemnisation à hauteur de 1500 euros pour 'non-respect de la durée légale'.

Elle n'articule pas de moyen au soutien de cette demande dans le corps de ses conclusions.

Elle n'explicite pas son préjudice étant relevé qu'il n'apparaît au cours de la relation de travail ni dépassement des durées maximales de travail ni violation des repos minima.

Cette demande doit être rejetée.

Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

Sur les commissions

Mme [K] soutient ne pas avoir perçu les commissions afférentes aux dernières affaires qu'elle a traitées. Elle fait valoir que seule la liste exhaustive des mandats qu'elle a signés et la rémunération afférente serait de nature ou non à confirmer cette assertion. Elle sollicite donc qu'il soit enjoint à la société de produire ces éléments.

La société affirme que l'intégralité des commissions dues ont été réglées tel qu'il ressort des bulletins de paie.

Sur ce,

Il a été précédemment statué en faveur de la recevabilité des prétentions.

En revanche, selon l'article 146 du code de procédure civile, une mesure d'instruction ne peut être ordonnée sur un fait que si la partie qui l'allègue ne dispose pas d'éléments suffisants pour le prouver ; en aucun cas une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve.

Or la cour constate que Mme [K], qui n'indique pas la période précise pour laquelle elle n'aurait pas été remplie de ses droits et se borne à évoquer 'les dernières affaires qu'elle a traitées' sans les nommer ni fournir d'élément propre à les identifier et à en déterminer le nombre, ne présente aucun document ni élément rendant sa prétention plausible étant relevé qu'il résulte des bulletins de paie soumis à la cour qu'elle perçu au cours des trois derniers mois de la relation de travail des commissions pour un total de 672,25 euros.

Dans ces conditions, et par application des dispositions précédemment rappelées, la demande doit être rejetée.

Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

Sur les demandes de dommages et intérêts pour harcèlement moral et voies de fait

Mme [K] invoque une surcharge de travail et l'absence de paiement des heures supplémentaires.

Elle soutient en particulier avoir été victime de harcèlement moral et de voies de fait dans les semaines qui ont précédé son licenciement. Elle expose avoir été la cible de propos violents tenus par le gérant et son supérieur hiérarchique dans une discussion sur un groupe Whatsapp dont sont membres les autres collaborateurs de la société. Elle dénonce aussi un espionnage de sa messagerie personnelle, M. [V] ayant délibérément ouvert et lu une conversation privée s'étant tenue sur un groupe Messenger entre elle et deux de ses collègues Mme [B] et M. [N]. Elle rapporte avoir fait l'objet d'une pression extrêmement forte pour signer une rupture conventionnelle de la part de l'employeur qui s'est prévalu de la conversation personnelle à laquelle il avait eu accès de manière déloyale, que lorsqu'elle a refusé ce mode de rupture, M.[V] s'est emporté et a tapé du poing sur la table, qu'elle a été sommée de rendre son téléphone professionnel puis s'est vue interdire le 7 janvier 2020 l'accès à l'étage de l'agence ainsi qu'à sa session informatique dont le mot de passe avait été changé et ce alors même qu'aucune mise à pied conservatoire n'avait été notifiée. Elle fait valoir que ces faits ont eu de telles conséquences sur son état de santé qu'elle a bénéficié d'arrêts de travail à compter du 20 décembre 2019.

La société réfute tout harcèlement moral et toute voie de fait.

Sur ce,

Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Selon l'article L.1154-1 du même code, le salarié a la charge de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement et il incombe ensuite à la partie défenderesse de prouver que les faits qui lui sont imputés ne sont pas constitutifs de harcèlement et qu'ils sont justifiés par des éléments objectifs étrangers et à tout harcèlement.

Il résulte du premier de ces textes que les faits susceptibles de laisser présumer une situation de harcèlement moral au travail sont caractérisés, lorsqu'ils émanent de l'employeur, par des décisions, actes ou agissements répétés, révélateurs d'un abus d'autorité, ayant pour objet ou pour effet d'emporter une dégradation des conditions de travail du salarié dans des conditions susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Une situation de harcèlement moral se déduit ainsi essentiellement de la constatation d'une dégradation préjudiciable au salarié de ses conditions de travail consécutive à des agissements répétés de l'employeur révélateurs d'un exercice anormal et abusif par celui-ci de ses pouvoirs d'autorité, de direction, de contrôle et de sanction.

Dès lors qu'ils peuvent être mis en rapport avec une dégradation des conditions de travail, les certificats médicaux produits par le salarié figurent au nombre des éléments à prendre en considération pour apprécier l'existence d'une situation de harcèlement laquelle doit être appréciée globalement au regard de l'ensemble des éléments susceptibles de la caractériser.

En l'espèce, au soutien de ses dires, Mme [K] invoque et verse aux débats :

- plusieurs messages diffusés sur le groupe Whatsapp 'Les loups de Wallstreet' partagé par l'ensemble des collaborateurs de la société contenant les propos suivants 'Heureusement que l'on est plus au Moyen-âge (...) Au voleur on coupait la main (...) Au menteur on coupait la langue (...), au traître, la t... (...) Si toi aussi tu as connu une sacrée connasse qui a foutu un beau merdier dans ta vie partage ce panneau !! (...) Bon les trente minutes sont passées demain j'envoie les premiers scud orientés (...)',

- son courrier daté du 9 janvier 2020 adressé à la direction dans lequel elle reprend le déroulement des faits depuis le 19 décembre 2019, dénonce des pressions mises en oeuvre pour qu'elle accepte une rupture conventionnelle à la suite de propos qu'elle a échangés au cours d'une conversation privée avec Mme [B] et M. [N] et le fait d'avoir été privée le 20 décembre, puis encore le 7 janvier 2020 à l'issue de son arrêt maladie de ses outils de travail,

- plusieurs éléments médicaux notamment un certificat médical en date du 20 décembre 2019 selon lequel elle présente des 'raisons médicales justifiées pour s'absenter de son travail' et une prescription médicale du même jour pour un traitement par anxiolytiques et anti dépresseurs, un certificat médical du 7 janvier 2020 dont il ressort que l'état de santé de la salariée nécessite un nouvel arrêt et un courrier du même jour du Dr [X], médecin généraliste, dont il ressort que l'état de santé de Mme [K] nécessite un traitement lourd et se trouve en arrêt de travail prolongé en raison d'un syndrome anxio-dépressif avec insomnie.

La salariée présente ainsi des éléments qui pris et appréciés dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'une situation de harcèlement moral ; il appartient dès lors à l'employeur de démontrer que les faits sont objectivement justifiés par des éléments étrangers à tout harcèlement moral.

Ainsi que le fait valoir et en justifie la société, il apparaît que les propos échangés sur Whatsapp ne visent pas nommément Mme [K], que cette dernière dénonce essentiellement des faits concomitants à la procédure de licenciement disciplinaire et ne s'est plaint de harcèlement moral qu'après l'engagement de cette procédure, que le fait pour l'employeur de proposer à la salariée de manière insistante une rupture conventionnelle même dans un contexte où sont reprochés à cette dernière des fautes qu'elle conteste n'est pas constitutif en soi d'un harcèlement. La société apporte en outre suffisamment d'éléments permettant de démontrer que la conversation que la salariée considère comme privée est constituée en réalité, et en dépit de la formulation maladroite de la lettre de licenciement, de messages électroniques échangés au moyen de la messagerie instantanée Messenger associée à un compte Facebook professionnel installée sur l'outil informatique mis à sa disposition pour les besoins de son activité professionnelle non à partir d'une boîte à lettre électronique personnelle mais à partir de l'adresse 'guyhoquet.com'. Des éléments et explications non sérieusement contredites de l'employeur, il ressort que c'est en supprimant le compte Facebook professionnel de M. [N] avec qui ces messages avaient été échangés et qui avait quitté les effectifs de la société qu'il a découvert ceux-ci lesquels n'étaient pas identifiés comme privés ou personnels nonobstant la familiarité ou le caractère ironique de l'intitulé du groupe de discussion ('les alcooliques anonymes (surtout [Z])'), que dès lors l'espionnage invoqué est démenti de même que l'utilisation, pour accéder à cette conversation, d'un procédé déloyal et contraire aux droits et libertés de la salariée. Il apparaît aussi que la salariée n'a pas été interdite d'accès aux outils professionnels et à son lieu de travail mais a été placée en arrêt de travail à compter du 20 décembre 2019 puis de nouveau à compter du 7 janvier 2020.

Enfin si un rappel d'heures supplémentaires est dû par la société, leur nombre ne permet de caractériser une surcharge de travail procédant d'un usage anormal par l'employeur de son pouvoir de direction.

En conséquence, la société Imeo Compiègne contredit par ses éléments ceux de Mme [K] et démontre que les faits sont objectivement justifiés, étrangers à tout harcèlement moral.

Mme [K] n'invoque pas, au soutien de sa demande indemnitaire pour voies de fait, d'éléments ou d'agissements distincts de ceux présentés au soutien de ses prétentions au titre du harcèlement moral dont il vient d'être dit qu'il ne pouvait être tenu pour établi.

Il convient dès lors par confirmation du jugement entrepris de la débouter de ses demandes.

Sur la demande indemnitaire pour manquement à l'obligation de sécurité

Mme [K] fait valoir que l'obligation de sécurité n'est pas respectée dès lors que le salarié a subi une atteinte à sa santé ou sa sécurité au temps et au lieu de travail, que ceci est d'autant plus vrai lorsque la dégradation de l'état de santé résulte de faits de harcèlement moral. Elle soutient qu'en l'espèce, il est 'patent' que son état de santé s'est dégradé du fait de ses conditions de travail, altération qui est donc imputable à l'employeur.

Elle invoque et produit les messages whatsapp du 19 décembre 2019, son courrier de signalement du 9 janvier 2020 ainsi que les mêmes éléments médicaux que ceux fournis à l'appui de sa demande indemnitaire pour harcèlement moral.

La cour observe que Mme [K] n'invoque pas de faits ou d'éléments distincts de ceux précédemment allégués au soutien du harcèlement moral dont il a été précédemment dit qu'il ne pouvait être tenu pour établi, que le certificat médical du 12 février 2020, s'il confirme une altération de l'état de santé, met cette dégradation en relation avec le licenciement mais non avec les conditions de travail qui auraient préexisté à la rupture du contrat de travail, conditions de travail que le médecin n'a au demeurant pas personnellement constatées.

Dans ces conditions, au vu des éléments produits et des moyens débattus, aucun manquement de l'employeur à son obligation de sécurité n'est caractérisé.

Par confirmation du jugement entrepris, la demande doit être rejetée.

Sur les demandes relatives à la rupture du contrat de travail

Sur la licéité du licenciement

Il a été précédemment statué que les demandes de la salariée étaient recevables.

Cette dernière poursuit la nullité de son licenciement en faisant valoir qu'il est consécutif à des faits de harcèlement moral. Elle ajoute que la procédure de licenciement a été lente et qu'aucune mise à pied à titre conservatoire n'a été prononcée par l'employeur ce qui démontre aussi la nullité du licenciement.

Toutefois, en l'absence de harcèlement moral, il ne saurait être retenu que le licenciement de la salariée présente un lien avec un tel harcèlement.

En outre la longueur de la procédure disciplinaire et l'absence de mise à pied conservatoire préalable au licenciement ne sont pas des motifs de nullité du licenciement.

Mme [K] doit être débouté de ses demandes au titre d'un licenciement nul.

Sur la légitimité du licenciement

Il a été précédemment jugé que les demandes de la salariée au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse étaient recevables en cause d'appel.

Mme [K] soutient en substance qu'aucun des faits reprochés n'est daté et qu'en conséquence elle est en droit d'invoquer la prescription, qu'aucune faute grave n'est démontrée, qu'une telle faute est celle qui rend impossible la poursuite du contrat de travail même pendant le préavis, qu'en l'espèce l'absence de cause réelle et sérieuse résulte des délais séparant d'une part l'engagement de la procédure et l'entretien préalable et d'autre part l'entretien et la lettre de notification, l'absence de faute grave résultant aussi de l'absence de mise à pied conservatoire, que le contenu des messages dont l'employeur lui fait grief ne peut fonder un licenciement dès lors que ces messages étaient par nature personnels et couverts par le secret des correspondances, que les prétendus manquements reprochés par l'employeur ne sont pas suffisamment sérieux pour justifier un licenciement.

La société Imeo Compiègne oppose pour sa part que la datation des faits dans la lettre de licenciement n'est pas nécessaire et que la salariée n'a jamais sollicité de précision sur ce point ainsi que le lui permet le code du travail, que les faits ne sont pas prescrits. Elle soutient que les faits sont établis et traduisent une déloyauté à l'égard de l'entreprise voire une intention de lui nuire, qu'elle était légitime à consulter les messages dont sont extraits les propos reprochés, que s'il devait être considéré que ces éléments portent atteinte à la vie privée de la salariée, le droit à la preuve justifie leur production aux débats, indispensable pour établir la matérialité du grief, que le licenciement pour faute grave est justifié.

Sur ce,

La cour rappelle que l'absence de datation des faits ne rend pas le licenciement illégitime.

Il ressort des éléments du dossier que le grief énoncé dans la lettre de licenciement repose sur des faits dont l'employeur a eu connaissance en décembre 2019 soit moins de deux mois avant l'engagement de la procédure de licenciement le 26 de ce même mois de sorte que le grief n'est pas prescrit.

Il est de principe bien établi que la faute grave s'entend d'une faute d'une particulière gravité ayant pour conséquence d'interdire le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis ; les faits invoqués comme constitutifs de faute grave doivent par conséquent être sanctionnés dans un bref délai.

La preuve des faits constitutifs de faute grave incombe à l'employeur et à lui seul et il appartient au juge du contrat de travail d'apprécier au vu des éléments de preuve figurant au dossier si les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont établis, imputables au salarié, et s'ils ont revêtu un caractère de gravité suffisant pour justifier l'éviction immédiate du salarié de l'entreprise.

La cour rappelle qu'aucun texte n'oblige l'employeur à prendre une mesure conservatoire en cas d'engagement d'une procédure de licenciement motivée par une faute grave ni ne prévoit un délai maximal entre la convocation et l'entretien préalable. La cour constate que le licenciement a été notifié à la salarié moins d'un mois après la date de l'entretien préalable. La cour relève aussi que la procédure a été engagée le 26 décembre 2019 à raison de faits du même mois, que dans ces conditions l'employeur n'a pas tardé à se saisir du grief énoncé à l'appui du licenciement dans la lettre de rupture.

Il est reproché à la salariée d'avoir tenu des propos désobligeants et dégradants à l'égard de la société et de ses collègues et d'avoir indiqué souhaiter la fermeture de l'entreprise.

Les propos litigieux sont extraits d'une discussion entre la salariée et deux autres collaborateurs de la société via l'application de messagerie instantanée Messenger.

Il a été précédemment retenu comme étant établi par l'employeur, en dépit d'une formulation maladroite dans la lettre de notification de la rupture, que cette messagerie était associée à un compte Facebook et une adresse électronique professionnels, que les messages étaient échangés à l'aide de l'outil informatique mis à la disposition de la salariée pour les besoins de son travail, que la conversation n'était pas identifiée au surplus comme privée ou personnelle. Il est également établi que l'employeur avait découvert incidemment l'existence de la discussion en cause en voulant supprimer le compte professionnel Facebook et l'adresse électronique professionnelle du salarié avec lequel Mme [K] avait été en contact par ce biais.

La société verse aux débats les extraits de cette discussion au contenu sans rapport avec la vie privée de chacun des interlocuteurs mais émaillé de propos grossiers ou méprisants et insultants émanant notamment de Mme [K] sur certains de ses collègues à titre personnel (' Et [M] et sa chienne de meuf, je peux plus les voir', 'C'est des branleurs (...) Sa vieille laide qui fait la meuf choquer que tu soit plus là') et de critiques sur l'entreprise et sa direction. S'agissant plus particulièrement de la société, Mme [K], s'adressant à son collègue sur le point de quitter la société, écrit ' Ferme cette putain de boîte qu'avec [D] on reparte avec un petit licenciement économique'. La cour relève que Mme [K] ne conteste pas être l'auteur de ces propos litigieux rapportés dans la lettre de licenciement.

Si ces échanges sont caractéristiques d'un comportement irrespectueux et déloyal constitutif d'une cause réelle et sérieuse de licenciement, les faits ne revêtent pas un caractère de gravité suffisant pour rendre impossible le maintien de la salariée pendant la durée limitée du préavis.

En effet ces propos n'avaient pas vocation à être diffusés et les éléments de l'employeur ne témoignent pas d'échanges de ce type nourris et fréquents.

Dans ces circonstances, il convient d'écarter la qualification de faute grave, le licenciement étant néanmoins justifié pour cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce sens.

Mme [K] peut par conséquent prétendre au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, augmentée des congés payés afférents, ainsi qu'à une indemnité légale ou conventionnelle de licenciement.

Elle demande à la cour de lui allouer une indemnité compensatrice de deux mois de préavis calculée sur un salaire de 1909,80 euros.

La société conteste le montant de la demande en faisant valoir que la salariée se fonde sur un salaire erroné.

La cour rappelle que l'indemnité compensatrice de préavis est égale au salaire brut, assujetti au paiement par l'employeur des cotisations sociales, que le salarié aurait reçu s'il avait travaillé pendant la durée du préavis. Elle correspond aux salaires et avantages, y compris l'indemnité de congés payés, qu'aurait perçus le salarié s'il avait travaillé pendant cette période. Elle comprend tous les éléments constituant le salaire ou s'ajoutant à celui-ci : avantages en nature, gratifications et primes (dès lors qu'elles auraient été perçues pendant la durée du préavis).

Par ailleurs, le montant de l'indemnité doit être calculé en fonction de la durée de travail contractuellement prévue et seules les heures supplémentaires que le salarié aurait accomplies s'il avait travaillé doivent être prises en compte dans le calcul de l'indemnité.

En l'espèce, selon l'avenant du 1er octobre 2019, les parties ont convenu d'une a rémunération fixe de 20 506 euros brut sur 13 mois, hors prime d'ancienneté, soit une rémunération mensuelle de 1577,39 euros brut, qui inclut la prime de 13ème mois mensualisée, outre des commissions.

Eu égard aux bulletins de paie de l'intéressée, et par application des principes précédemment rappelés, le salaire devant servir d'assiette au calcul de l'indemnité compensatrice de préavis ressort à 1785,26 euros.

La salariée peut prétendre à une indemnité compensatrice de préavis de 3570,52 euros outre la somme de 357,05 euros au titre des congés payés y afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes.

Mme [K] demande à la cour de lui allouer la somme de 557,02 euros à titre d'indemnité légale de licenciement.

Il est constant qu'à la date de présentation de la lettre de notification du licenciement, elle justifiait d'une ancienneté d'au moins huit mois de sorte qu'elle peut prétendre au bénéfice des dispositions de l'article L.1234-9 du code du travail.

Les parties s'opposent sur le montant du salaire moyen à retenir comme base de calcul de l'indemnité de licenciement.

La cour rappelle que le salaire à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié soit la moyenne mensuelle des douze derniers mois précédant le licenciement soit le tiers des trois derniers mois auquel cas toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel versée au salarié pendant cette période n'est prise en compte que dans la limite d'un montant calculé à due proportion.

Le salaire de référence doit inclure tous les éléments de rémunération y compris les sommes versées au titre des congés payés, les primes et avantages perçus pendant la période de référence.

En l'espèce, par application de ces principes, il convient de retenir la moyenne des trois derniers mois de salaire précédant le licenciement, plus favorable à la salariée, ce salaire incluant la rémunération, les sommes versées au titre des congés payés, les commissions ; cette moyenne ressort à 1782,06 euros et non 1909,80 euros comme soutenu par la salariée laquelle comptabilise deux fois la prime de 13ème mois.

Eu égard à son ancienneté, elle peut donc prétendre à une indemnité de licenciement de 519,76 euros, somme qui doit être assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation.

Les demandes plus amples ou contraires, et en particulier la demande de Mme [K] tendant à ce que la moyenne de salaire brut mensuel soit fixée à la somme de 1909,80 euros, seront rejetées.

Enfin, le licenciement reposant sur une cause réelle et sérieuse, la demande de dommages et intérêts pour licenciement illégitime doit être rejetée.

Sur l'indemnité de clientèle

Rappelant que le contrat de travail lui octroie un statut de VRP et soutenant l'absence de faute grave, Mme [K] réclame sur le fondement des dispositions de l'article L.7313-13 du code du travail une indemnité de clientèle de 3500 euros.

La société Imeo Compiègne s'y oppose au motif principal que la salariée a été licenciée pour faute grave.

Sur ce,

L'article L.7313-13 du code du travail énonce 'En cas de rupture du contrat de travail à durée indéterminée par l'employeur, en l'absence de faute grave, le voyageur représentant ou placier a droit à une indemnité pour la part qui lui revient personnellement dans l'importance en nombre et en valeur de la clientèle apportée, créée ou développée par lui.

Le montant de cette indemnité de clientèle tient compte des rémunérations spéciales accordées en cours de contrat pour le même objet ainsi que des diminutions constatées dans la clientèle préexistante et imputables au salarié.

(...)'.

Le statut de VRP était en l'espèce stipulé au contrat de travail.

Il a été précédemment retenu que la faute grave devait être écartée.

Il résulte des dispositions pré-citées que l'indemnité de clientèle n'est due que s'il y a eu apport, création ou développement de la clientèle et s'il est constaté un préjudice résultant de la perte de cette clientèle.

Or Mme [K] n'allègue ni n'établit avoir personnellement créé ou développé une clientèle déjà existante, la cour relevant au vu des bulletins de paie de cette dernière une absence d'augmentation de ses commissions.

Pour ces motifs substitués à ceux des premiers juges, la demande doit être rejetée.

Sur la demande au titre du solde de tout compte

Mme [K] fait valoir que les sommes qui lui ont été réglées au titre du solde de tout compte, ne comprennent pas la prime de 13ème mois proratisée ni l'indemnité compensatrice de congés payés, que ces irrégularités n'ont pas été corrigées.

Elle demande dans le corps de ses conclusions qu'il soit ordonné à la société de lui verser les sommes correspondantes sous astreinte de 50 euros.

La cour observe toutefois que cette prétention n'est pas reprise et énoncée dans le dispositif des dernières conclusions de Mme [K].

Il convient dès lors de dire qu'il n'y a lieu à statuer dessus conformément à l'article 954 du code de procédure civile.

Sur la demande de remise de documents sous astreinte

Mme [K] sollicite la condamnation de la société Imeo Compiègne à lui remettre sous astreinte des bulletins de salaire et documents de fin de contrat conformes, comprenant la prime de 13 ème mois proratisée et l'indemnité compensatrice de congés payés sous astreinte.

Il a été précédemment retenu que la rémunération fixe de la salariée incluait la prime de 13ème mois dès lors aucune rectification des documents de fin de contrat n'a à être apportée.

En revanche, si l'indemnité de congés payés peut être versée en même temps que le salaire ce qui a été pratiqué en l'occurrence, encore faut il que le bulletin de paie et le solde de tout compte distinguent clairement la part de rémunération qui correspond au travail de celle qui correspond aux congés et précisent l'imputation de ces sommes sur un congé déterminé ; force est de constater au vu des documents produits, que tel n'est pas le cas en l'espèce, la salariée faisant justement remarquer que la ligne correspondant aux congés payés sur le bulletin de paie est toujours à zéro.

En conséquence, il convient d'ordonner à la société Imeo Compiègne de remettre à Mme [K] dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt les documents de fin de contrat (attestation Pôle emploi et solde de tout compte) et un bulletin de paie conformes au présent arrêt et faisant figurer la somme correspondant à l'indemnité de congés payés.

A ce stade de la procédure, le prononcé d'une astreinte n'est pas nécessaire pour garantir l'exécution de la décision.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Les dispositions de première instance seront infirmées.

Succombant partiellement en cause d'appel, la société Imeo Compiègne sera condamnée en application de l'article 700 du code de procédure civile à payer à Mme [K] une somme que l'équité commande de fixer à 1500 euros pour la procédure de première instance et d'appel.

Partie perdante, la société Imeo Compiègne sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort

Constate que la demande tendant au versement des sommes correspondant à la prime de 13ème mois et l'indemnité compensatrice de congés payés ne figurant pas sur le solde de tout compte n'est pas énoncée dans le dispositif des dernières conclusions de Madame [Z] [K] ;

Dit n'y avoir lieu à statuer sur cette demande ;

Dit recevables les demandes de Mme [Z] [K] au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et celle tendant à ce qu'il soit enjoint à la société Imeo Compiègne de produire la liste de l'ensemble des mandats signés par la salariée et la rémunération afférente ;

Confirme le jugement rendu le 12 juillet 2021 par le conseil de prud'hommes de Compiègne sauf

- en ce qu'il a débouté Mme [Z] [K] de sa demande de rappel d'heures supplémentaires et de congés payés y afférents,

- en ce qu'il a débouté Mme [Z] [K] de ses demandes d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis et d'indemnité légale de licenciement,

- en ce qu'il a débouté Mme [Z] [K] de sa demande de remise de documents,

- en ses dispositions au titre des frais irrépétibles et des dépens ;

L'infirme de ces chefs ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Dit le licenciement de Mme [Z] [K] prononcé par la société Imeo Compiègne justifié pour cause réelle et sérieuse ;

Ecarte la qualification de faute grave ;

Condamne la société Imeo Compiègne à payer à Mme [Z] [K] les sommes suivantes :

- 1917,50 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires au titre des années 2018 et 2019,

- 191,75 euros au titre des congés payés y afférents,

- 3570,52 à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 357,05 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

- 519,76 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;

Dit que ces sommes seront assorties des intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes ;

Ordonne à la société Imeo Compiègne de remettre à Mme [Z] [K] les documents de fin de contrat (attestation Pôle emploi et solde de tout compte) et un bulletin de paie conformes au présent arrêt et faisant figurer l'indemnité de congés payés dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt ;

Dit n'y avoir lieu à astreinte ;

Déboute Mme [Z] [K] de sa demande tendant à ce qu'il soit enjoint à la société Imeo Compiègne de produire la liste des mandats et la rémunération afférente ;

Condamne la société Imeo Compiègne à verser à Mme [Z] [K] la somme de 1500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance et l'appel ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires au présent arrêt ;

Condamne la société Imeo Compiègne aux dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 5eme chambre prud'homale
Numéro d'arrêt : 21/04108
Date de la décision : 19/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-19;21.04108 ?
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