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19/05/2022 | FRANCE | N°21/02786

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 5eme chambre prud'homale, 19 mai 2022, 21/02786


ARRET







[J]





C/



Association [Localité 7]

S.A. SPQR ADMINISTRATEUR PROVISOIRE



























































copie exécutoire

le 19 mai 2022

à

Me Crépin

Me Brochard

MVN/MR/BG



COUR D'APPEL D'AMIENS



5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE



ARRET DU

19 MAI 2022



*************************************************************

N° RG 21/02786 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IDSS



JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'ABBEVILLE DU 10 MAI 2021 (référence dossier N° RG 20/00037)



PARTIES EN CAUSE :



APPELANTE



Madame [X] [J]

née le 24 Février 1971 à [Localité 9]

de nationalité Fran...

ARRET

[J]

C/

Association [Localité 7]

S.A. SPQR ADMINISTRATEUR PROVISOIRE

copie exécutoire

le 19 mai 2022

à

Me Crépin

Me Brochard

MVN/MR/BG

COUR D'APPEL D'AMIENS

5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE

ARRET DU 19 MAI 2022

*************************************************************

N° RG 21/02786 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IDSS

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'ABBEVILLE DU 10 MAI 2021 (référence dossier N° RG 20/00037)

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

Madame [X] [J]

née le 24 Février 1971 à [Localité 9]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 5]

représentée, concluant et plaidant par Me Jérôme CREPIN de la SCP CREPIN-FONTAINE, avocat au barreau d'AMIENS substitué par Me Elisabeth NOUBLANCHE VEYER, avocat au barreau d'AMIENS

ET :

INTIMEES

Association [Localité 7]

[Adresse 6]

[Localité 4]

représentée Me Hervé SELOSSE-BOUVET, avocat au barreau d'AMIENS, avocat postulant

concluant et plaidant par Me Christian BROCHARD de la SCP AGUERA AVOCATS, avocat au barreau de LYON substitué par Me Vincent MOULIN de la SCP AGUERA AVOCATS, avocat au barreau de LYON

S.A. SPQR ADMINISTRATEUR PROVISOIRE

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée Me Hervé SELOSSE-BOUVET, avocat au barreau d'AMIENS, avocat postulant

concluant et plaidant par Me Christian BROCHARD de la SCP AGUERA AVOCATS, avocat au barreau de LYON substitué par Me Vincent MOULIN de la SCP AGUERA AVOCATS, avocat au barreau de LYON.

DEBATS :

A l'audience publique du 31 mars 2022, devant Mme Marie VANHAECKE-NORET, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, ont été entendus :

- Mme [R] [D] en son rapport,

- les avocats en leurs conclusions et plaidoiries respectives.

Mme [R] [D] indique que l'arrêt sera prononcé le 19 mai 2022 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Malika RABHI

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme [R] [D] en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :

Mme Corinne BOULOGNE, présidente de chambre,

Mme Fabienne BIDEAULT, conseillère,

Mme Marie VANHAECKE-NORET, conseillère,

qui en a délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 19 mai 2022, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Corinne BOULOGNE, Présidente de Chambre et Mme Malika RABHI, Greffière.

*

* *

DECISION :

Vu le jugement en date du 10 mai 2021 par lequel le conseil de prud'hommes d'Abbeville, statuant dans le litige opposant Mme [X] [J] (la salariée) à son ancien employeur l'association [Localité 7] et à la société SPQR administrateur provisoire, a dit que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, a condamné l'association à verser à la salariée la somme de 3900 euros net à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure, condamné Mme [J] à payer à l'association la somme de 2000 euros net au titre de l'article 700 du code de procédure civile, dit que chaque partie conserve la charge de ses propres dépens ;

Vu l'appel interjeté le 27 mai 2021 par Mme [X] [J] à l'encontre de cette décision qui lui a été notifiée le 18 mai précédent ;

Vu la constitution d'avocat de l'association [Localité 7] et la société SPQR ès qualités d'administrateur provisoire, intimées, effectuée par voie électronique le 22 juin 2021 ;

Vu les conclusions notifiées par voie électronique le 24 janvier 2021 par lesquelles la salariée appelante, soulevant que la faute invoquée au soutien de son licenciement est prescrite, faisant valoir que les faits reprochés tels qu'énoncés au sein de la lettre de licenciement ne sont pas établis, exposant que la procédure de licenciement n'a pas été respectée et que son licenciement a été vexatoire et brutal, soutenant avoir été victime de harcèlement moral au travail, sollicite l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a dit que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et l'a condamnée au paiement d'une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, prie la cour in limine litis de constater que l'employeur est irrecevable comme prescrit à invoquer la faute grave, sur le fond de constater que la faute grave n'est pas établie et que le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse, de condamner l'association à lui payer les sommes reprises au dispositif de ses conclusions à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (35130 euros brut), de dommages et intérêts pour non respect de la procédure (3903 euros), d'indemnité légale de licenciement (8783 euros), de préavis (7806 euros), de congés payés sur préavis (780,60 euros) de rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied conservatoire (3 359,93 euros), de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire (25 000 euros), de dommages et intérêts pour harcèlement moral (25 000 euros), d'indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile (3000 euros) ainsi qu'aux dépens ;

Vu les conclusions notifiées par voie électronique le 8 mars 2022 aux termes desquelles l'association [Localité 7] représentée par la société SPQR en sa qualité d'adminsitrateur provisoire, intimée et appelante incidente, réfutant les moyens et arguments de la partie adverse aux motifs notamment qu'elle n'a eu une connaissance pleine et entière des faits au plus tôt que le 13 décembre 2019 soit moins de deux mois avant l'engagement de la procédure de licenciement, que les faits reprochés à Mme [J] sont matériellement établis et non contredits par les éléments de la salariée, qu'ils cont constitutifs d'une faute grave, subsidiairement qu'il n'est pas justifié du préjudice allégué au soutien de la demande indemnitaire pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, qu'il n'est pas démontré que le licenciement a été entouré de circonstances vexatoires ou brutales, que le harcèlement moral allégué n'est pas matérialisé, soutenant que la salariée ne démontre pas de préjudice fondé sur le bref délai entre sa convocation à entretien préalable et la tenue du dit entretien et indiquant l'absence de cumul entre l'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement qui ne peut être supérieure à un mois de salaire et la réparation du licenciement illégitime, prie la cour pour sa part la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a dit le licenciement justifié et la faute grave fondée, débouté Mme [J] de ses demandes afférentes au licenciement, débouté Mme [J] de ses demandes accessoires relatives aux dommages et intérêts pour licenciement vexatoire et pour harcèlement moral, condamné la salariée au paiement de la somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, subsidiairement si la cour venait à infirmer le jugement en considérant que le licenciement est dépouvu de cause réelle et sérieuse de réduire les demandes de Mme [J] à de plus justes proportions, d'infirmer la jugement entrepris en ce qu'il a considéré que la procédure de licenciement n'était pas régulière et en ce qu'il l'a condamnée au versement de dommages et intérêts d'un montant de 3900 euros net, de constater que Mme [J] ne démontre pas l'irrégularité de procédure et le préjudice en résultant et en conséquence débouter Mme [J] de sa demande afférente, subsidiairement de réduire les prétentions à de plus justes proportions, en tout état de cause de condamner Mme [J] au paiement de la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en sus de la condamnation prononcée en première instance ainsi qu'aux dépens de l'instance et de l'appel ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 23 mars 2022 renvoyant l'affaire pour être plaidée à l'audience du 31 mars suivant ;

Vu les dernières conclusions transmises le 24 janvier 2022 par l'appelante et le 8 mars 2022 par l'intimée auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d'appel ;

SUR CE LA COUR

Mme [X] [J], née en 1971, a été recrutée suivant contrat de travail à durée indéterminée à compter du 17 janvier 2011 en qualité d'éducatrice spécialisée assumant les fonctions de coordinatrice au sein de la maison d'enfants à caractère social par l'association [Localité 7].

La relation de travail était régie par la convention collective nationale des établissements pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966.

Mme [J] a évolué dans ses fonctions et suivant avenant prenant effet au 1er septembre 2017, elle a été promue chef de service éducatif moyennant un salaire brut mensuel de 3 684,80 euros.

L'association [Localité 7], propriétaire de l'abbaye du même nom et de ses jardins, développe plusieurs activités constituées en trois pôles.

Elle accueille des enfants, adolescents et jeunes adultes au sein de plusieurs structures : une Maison d'enfants à caractère social (MECS) qui reçoit des mineurs au titre de la protection de l'enfance où la salariée exrçait ses fonctions et des Instituts thérapeutiques éducatifs et pédagogiques (ITEP).

Elle assure des services d'aide, de maintien et de soins infirmiers à domicile aux personnes âgées et personnes malades et handicapées.

Elle assure enfin des prestations culturelles et hôtelières autour de l'abbaye.

L'association emploie plus de 50 salariés.

En lien avec une enquête administrative diligentée à la suite d'un signalement d'agressions et d'atteintes sexuelles mettant en cause un jeune accueilli à la MECS, une enquête pénale et de graves difficultés financières, les autorités de contrôle ont décidé le placement de l'association sous administration provisoire le 17 juin 2019, la société SPQR prise en la personne de M. [W] a été nommée en cette qualité le 17 décembre 2019 prenant ainsi le relais du premier administrateur provisoire M. [L].

Mme [J] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 2 janvier 2020, mise à pied à titre conservatoire, et licenciée pour faute grave suivant lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 21 janvier 2020, motivée comme suit :

' Nous vous faisons suite par la présente à l'entretien préalable qui s'est tenu ce 2 janvier 2020 au siège de l'Association [Localité 7], entretien au cours duquel il vous a été exposé les raisons pour lesquelles nous étions amenés à envisager une sanction disciplinaire à votre endroit pouvant aller jusqu'à votre licenciement.

Vous étiez assistée lors de cet entretien par Monsieur [A].

Nous vous rappelons ci-après les raisons de l'engagement de cette procédure:

Vous êtes entrée au service de l' Association [Localité 7], selon contrat de travail à durée indéterminée, à effet du 17 janvier 2011 en qualité d'éducatrice spécialisée assumant les fonctions de coordinatrice.

Dans le dernier état des choses et depuis le 1 septembre 2017, vous occupez la fonction de Chef de Service Educatif au sein de la MECS ([Adresse 8] sous la hiérarchie directe de la Directrice de la MECS.

Vous êtes ainsi plus spécialement chargée de l'encadrement et de la coordination des structures « classes passerelles» « Calypso» « Alizée » et des personnels qui y sont attachés (éducateurs et autres services d'intendance).

De par la spécificité des missions confiées à la MECS, il est attendu des Chefs de service un comportement exemplaire et fédérateur vis-à-vis des équipes dont ils ont la charge, mais aussi des autres chefs de service et ce pour la bonne cohésion de chacun des établissements dépendant de ladite MECS.

Pour autant, et après plusieurs alertes dont le traitement a été retardé au regard des difficultés structurelles et financières auxquelles est confrontée l'Association [Localité 7] et qui a justifié son placement sous Administration provisoire au mois de juin 2019 par les autorités de tutelle, la Direction Générale a une nouvelle fois été interpellée par l'une de vos collègues, Chef de Service Educatif au sein de la MECS, le 8 octobre 2019 au regard de votre comportement parfaitement inadapté et comme étant qualifié d'agressif et confinant au harcèlement moral et managérial générant une dégradation avérée des conditions de travail de nombre de membres de votre service, mais également de plusieurs de vos collègues aboutissant à des situations de souffrance au travail caractérisées (situations sur lesquelles nous avons été interpellés en parallèle par le médecin du travail).

Cette alerte de votre collègue, Chef de service, devait également être notifiée au CSE le 10 octobre 2019.

Concernant plus particulièrement votre collègue Chef de Service, celle-ci sera également reçue par le médecin du travail, le 17 décembre 2019, date à laquelle le médecin du travail constatait que son état de santé était incompatible avec la poursuite de son travail à son poste.

II ressort des entretiens qui ont pu être tenus avec cette dernière que son travail et sa collaboration avec vous sont devenus « impossibles» vous trouvant à l'origine de multiples dysfonctionnements ayant un impact sur le personnel et, a fortiori, sur l'accompagnement des enfants accueillis au sein de l'établissement, le tout étant totalement contraire à son éthique, se sentant totalement impuissante à enrayer cette spirale inacceptable et qu'elle n'était plus en mesure de supporter.

Votre collègue devait encore faire état d'un comportement managérial totalement inadapté vis-à-vis des personnels placés sous votre autorité, et dans le cadre de vos interventions auprès des enfants placés auprès de la MECS.

Mais aussi de :

- propos insultants et agressifs, non seulement à l'endroit de divers membres de ses équipes mais également de ses collègues de travail au sein de la MECS,

- de comportements dévalorisants de votre part,

- de rétention inadmissible d'informations quant aux situations éducatives et d'agissements solitaires, sans aucune concertation préalable, perturbant gravement la mise en 'uvre et l'élaboration des projets éducatifs.

Elle devait encore se plaindre de réactions verbales, voire physiques particulièrement violentes à l'endroit de certains des enfants de la MECS, contraires à toutes règles éthiques et déontologiques, le tout étant renforcé par un climat de terreur au sein de la MECS, nombre de collaborateurs « n'osant pas parler » craignant de votre part des représailles.

II était encore fustigé des débordements managériaux parfaitement inadaptés quant à la place que doit tenir chacun des éducateurs, semant ainsi la confusion et la discorde dans les rôles et missions de chacun des membres de votre service mais aussi dans d'autres services.

Entretemps, et compte tenu de la situation, un CSE extraordinaire s'est tenu le 18 octobre 2019.

En cette occasion, trois membres de la CSSCT seront désignés pour procéder à une enquête, et ce au regard de l'alerte parvenue au CSE le 10 octobre 2019.

Les conclusions de cette enquête ont été restituées au CSE le 13 décembre 2019, et celles-ci s'avèrent particulièrement édifiantes, mais également et surtout alarmantes quant aux conditions dans lesquelles vous exercez vos fonctions depuis de nombreux mois avec semble-t-il et malheureusement une bienveillance pour le moins regrettable de votre supérieure hiérarchique dont vous avez manifestement usé, mais aussi abusé.

Les membres du CSE ont entendu divers professionnels travaillant avec vous au quotidien, soit des collègues directs ou d'autres services, soit des collaborateurs sous votre lien de subordination.

Dans ce cadre, certains ont estimé devoir requérir en l'état l'anonymat, craignant de votre part des représailles eu égard au contexte dans lequel ces derniers évoluent depuis de nombreux mois sous votre hiérarchie ou à votre contact.

Il résulte des témoignages recueillis:

- un management totalement inadapté et sans concertation, agressif et méprisant,

- un manque de discernement professionnel avéré et une absence totale de reconnaissance des capacités et rôle de chacun au sein de votre service,

- des comportements et des propos régulièrement blessants, voire même menaçants envers vos collègues et vos équipes.

Les critiques ouvertes et acerbes vis-à-vis de vos collègues et des membres de vos équipes s'avèrent être légions et de même de multiples jugements de valeur auxquels vous pouvez vous abandonner dévalorisant totalement votre fonction: « c'est un branquignole », «elle est nulle », « qu'il se casse », « c'est un vrai c. », « elle est payée à rien faire », etc.

De multiples collègues du service salariés de la MECS font état d'un mal-être professionnel et psychologique face à vos agissements sortant largement du cadre des prérogatives attachées à vos fonctions.

Et lorsque certains prennent sur eux et tentent de s'opposer à des décisions unilatérales et non concertées et qui leur apparaissent totalement injustifiées de votre part, ces derniers voient systématiquement leurs conditions de travail se dégrader.

Les collègues sous votre hiérarchie dénoncent encore un manque total de discernement professionnel, des propos dénigrants envers les professionnels alliés à un manque total d'objectivité dans la gestion des conflits, et vous reprochent également un manque de discrétion quant aux situations personnelles de chacun, comme par exemple en révélant publiquement l'origine de tel ou tel arrêt de travail des membres du service.

Toutes et tous dénoncent de multiples pressions et un management par l'intimidation et la volonté de diviser pour « mieux régner» qui ne peuvent que contribuer au mal-être et à la souffrance au travail constatés au sein de la MECS et nuire de ce fait gravement à l'accompagnement des enfants et à leur bien-être.

La CSSCT a ainsi réclamé, au vu de cette situation, une réaction immédiate et un positionnement ferme des nouvelles Administration provisoire et Présidence de l'Association [Localité 7].

Dans ce même cadre, nous avons également été interpellés depuis la mi-décembre par plusieurs salariés de la MECS dénonçant le climat anxiogène et délétère qui y règne notamment en raison de votre comportement.

Ces derniers ont également estimé devoir faire état de leur résignation au regard d'un état de fait selon lequel vous vous considéreriez comme « intouchable ».

Néanmoins, de multiples paroles se sont libérées ces dernières semaines et celles-ci ne font que confirmer les termes de l'alerte qui est parvenue à la Direction Générale et au CSE à la mi-octobre dernier et qui a donné lieu à l'enquête de la CSSCT et dont les conclusions ont été portées à la connaissance du CSE le 13 décembre dernier ainsi qu'à l'inaptitude temporaire de votre collègue de travail qui témoigne d'une souffrance au travail mettant en danger sa santé.

Bon nombre de vos collègues confirment que votre management et vos agissements répétés et totalement inappropriés placent en difficulté et en situation de souffrance au travail, beaucoup de salariés de la MECS et nuisent à leur travail.

Beaucoup sont témoins ou victimes de propos non-professionnels de votre part, bien souvent outranciers tenus à l'encontre de vos subordonnés, regrettant visiblement que vous n'hésitiez pas régulièrement à remettre en cause dans des conditions parfaitement subjectives les qualités professionnelles de chacun et déplorant vivement votre incapacité à vous remettre en cause.

Ils nous disent ne plus supporter votre comportement agressif et la violence verbale avec laquelle vous menez vos équipes ou entretenez vos rapports professionnels avec vos collègues, mais aussi les tensions vives que génère un tel comportement au sein de la MECS.

Beaucoup encore se positionnent désormais systématiquement sur la défensive, souffrent d'une absence totale de dialogue de votre part et mettent ainsi en exergue un cadre de travail insécurisé nuisant au bon fonctionnement du service et à un encadrement serein et bienveillant des enfants qui doit pourtant constituer la priorité de tout Chef de service éducatif et menacent de quitter l'Association lorsque d'autres vont jusqu'à démissionner.

Ils considèrent ainsi que :

- la désinformation ou encore l'absence totale d'information et de communication de votre part sur les dossiers en cours,

- les propos désobligeants, les claquements de portes, l'agressivité,

- le dénigrement,

rendent désormais difficile, voire impossible, un travail efficace et serein de la MECS et notamment de votre service.

II s'avère enfin que lorsque certaines de vos collègues, Chef de service, tentent d'intercéder auprès de vous afin d'apaiser certaines situations, tout en vous invitant à modérer vos propos à l'endroit de certains de vos collaborateurs, ces derniers essuient systématiquement une fin de non-recevoir, voire un nouveau comportement agressif et méprisant de votre part.

Au cours de notre entretien de ce 2 janvier 2020, vous vous êtes contentée pour l'essentiel de nier « en bloc» les faits ci-dessus rapportés, et de mettre sur le compte des difficultés structurelles de la MECS les propos rapportés.

Pour autant, les difficultés structurelles de la MECS sont une chose, et il n'a jamais été dans l'intention de qui que ce soit de vous les imputer.

Cependant, et alors que ces difficultés justifient au plus fort que les membres du personnel d'encadrement veillent plus particulièrement à la cohésion des équipes de la MECS, votre comportement managérial met à mal la réalisation de cet objectif ainsi que la cohésion et la sérénité légitimement revendiquées par les personnels de la MECS dans le cadre de l'exercice de leur fonction.

Vous avez cru devoir ajouter que votre « franc parler» était connu de tous.

Mais là encore, en aucun cas ce « franc parler» ne saurait justifier, à défaut de légitimer, de tels comportements managériaux et autres attitudes et propos méprisants et agressifs à l'endroit de vos équipes, ou encore de vos collègues de travail qui ne peuvent que contribuer à un climat « délétère» au sein de la MECS.

En tout état de cause, nous regrettons vivement que vous n'ayez pas jugé nécessaire de vous remettre en cause à un quelque moment que ce soit au cours de notre entretien de ce 2 janvier 2020, ni même de vous soucier des multiples situations de souffrance au travail caractérisées qui ont été mises en exergue par l'enquête des membres du CSE, mais également par plusieurs manifestations spontanées de divers membres de la MECS dépassant désormais leur sentiment de crainte de représailles.

En conséquence, et après réflexion, nous considérons que la poursuite de vos relations contractuelles avec l'Association [Localité 7] s'avère rendue impossible par les constats opérés depuis la mi-décembre 2019.

Nous nous voyons en conséquence dans l'obligation de vous notifier par la présente votre licenciement pour faute grave, nos relations ne pouvant se poursuivre même pendant le temps d'un préavis.

Nous vous confirmons par ailleurs la mise à pied à titre conservatoire qui vous avait été notifiée à compter du 30 décembre 2019 et ce pour la durée de la procédure.

Cette période, jusqu'à la notification de votre licenciement ne sera donc pas rémunérée.

L'envoi de la présente lettre recommandée marquera la rupture définitive de votre contrat de travail.

(...)'.

Contestant la régularité et la légitimité du licenciement, recherchant la reconnaissance d'un harcèlement moral et estimant ne pas avoir été remplie de ses droits au titre de la rupture du contrat de travail, Mme [X] [J] a saisi le conseil de prud'hommes d'Abbeville qui par jugement du 10 mai 2021, dont appel, s'est prononcé comme indiqué précédemment.

Sur la demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral

Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Selon l'article L.1154-1 du même code, le salarié a la charge de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement et il incombe ensuite à la partie défenderesse de prouver que les faits qui lui sont imputés ne sont pas constitutifs de harcèlement et qu'ils sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il résulte du premier de ces textes que les faits susceptibles de laisser présumer une situation de harcèlement moral au travail sont caractérisés, lorsqu'ils émanent de l'employeur, par des décisions, actes ou agissements répétés, révélateurs d'un abus d'autorité, ayant pour objet ou pour effet d'emporter une dégradation des conditions de travail du salarié dans des conditions susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Une situation de harcèlement moral se déduit ainsi essentiellement de la constatation d'une dégradation préjudiciable au salarié de ses conditions de travail consécutive à des agissements répétés de l'employeur révélateurs d'un exercice anormal et abusif par celui-ci de ses pouvoirs d'autorité, de direction, de contrôle et de sanction.

Dès lors qu'ils peuvent être mis en rapport avec une dégradation des conditions de travail, les certificats médicaux produits par la salariée figurent au nombre des éléments à prendre en considération pour apprécier l'existence d'une situation de harcèlement laquelle doit être appréciée globalement au regard de l'ensemble des éléments susceptibles de la caractériser.

Mme [J] expose avoir souffert d'un contexte de travail difficile ayant été contrainte à compter de janvier 2019 de multiplier les fonctions pour pallier les absences successives et simultanées de deux chefs de service et de la directrice de la MECS placées en arrêt pour maladie.

Elle soutient que ses conditions de travail se sont significativement dégradées à compter de l'été 2019 avec l'arrivée d'un administrateur provisoire qui a été l'occasion pour certaines personnes de régler d'anciennes querelles internes et ce à son détriment, que c'est essentiellement sur les déclarations contestables d'une autre chef de service, Mme [H], que le directeur général a cherché à multiplier les griefs à son encontre jusqu'à engager finalement la procédure de licenciement. Elle rapporte qu'elle a subi une procédure disciplinaire injustifiée qui a abouti à un avertissement, procédure engagée alors qu'elle était absente, qu'elle a été placée en arrêt de travail du 31 juillet au 11 septembre 2019 en lien avec ses conditions de travail soulignant à cet égard que la décision de non-prise en charge par la sécurité sociale au titre de la législation sur les risques professionnels est sans incidence sur l'indépendance dont dispose le juge prud'homal pour apprécier si les éléments constitutifs du harcèlement moral au sens de l'article L.1152-1 du code du travail sont réunis. Elle relate qu'en son absence des propos diffamants ont été tenus à son encontre lors notamment de réunions de cadres, qu'elle a été mise à l'écart de la prise de décision à son retour et a été placée dans l'impossibilité de s'expliquer et de dialoguer avec la cadre dont émanait principalement les dénonciations ainsi qu'avec le directeur général, que dans ces circonstances et compte tenu de la passivité de la direction qui contribuait à alimenter une ambiance délétère, elle a exercé son droit d'alerte en octobre 2019 qui a été considéré comme justifié par le CSSCT. Elle dénonce les conditions dans lesquelles ont été diligentées un audit, commandé par la direction, puis l'enquête du CSSCT notamment en ce qu'elle n'a pas été entendue dans sa version.

Au soutien de ses dires, Mme [J] invoque et produit notamment :

- l'avertissement notifié le 27 août 2019 suite à un entretien préalable fixé au 29 juillet précédent la sanctionnant pour avoir participé à une réunion avec un partenaire institutionnel sans accord de la hiérarchie et sans délégation et avoir au cours de ladite réunion accepté l'accueil d'urgence de trois enfants mettant ainsi la hiérarchie et les équipes devant le fait accompli,

- le témoignage établi par Mme [K], salariée de l'association, dans le cadre de l'enquête menée par la caisse primaire d'assurance maladie ensuite de la déclaration d'accident du travail du 31 juillet 2019, qui indique avoir constaté son désarroi et son angoisse ainsi que des signes d'épuisement chez elle, en lien avec cette procédure disciplinaire,

- son courrier du 11 septembre 2019 contestant le bien fondé de l'avertissement aux motifs qu'elle avait été avertie de la réunion par l'assistante de direction de l'association ce qui laissait supposer que la direction en était informée et que ses décisions, outre qu'elles étaient justifiées, entraient dans son champ de compétence et ses missions, soulignant à cet égard que la directrice de la MECS ainsi que ses deux collègues chefs de service étaient alors en arrêt pour maladie,

- le courrier de l'employeur accusant réception de cette correspondance,

- le compte-rendu d'une réunion de l'équipe de direction de la MECS s'étant tenue le 18 septembre 2019 au cours de laquelle son management a été mis en cause par Mme [H], cadre chef de service éducatif, qui a évoqué le mal-être de certains salariés placés sous son autorité et ce alors qu'elle était absente,

- le compte rendu de la réunion de direction en date du 1er octobre 2019 dont il résulte qu'elle a souhaité en vain échanger dans ce cadre avec sa collègue Mme [H] à la suite des propos de cette dernière et que le temps de réunion envisagé par le directeur général sur les difficultés de management n'avait pas encore été programmée,

- l'attestation de M. [E], administrateur provisoire adjoint du 18 juin au 18 décembre 2019 décrivant une ambiance pesante et confictuelle au sein de la direction de la MECS alimentée par les interventions du directeur général, dénonçant le caractère subjectif et partial de l'audit diligenté à l'insu de l'administration provisoire sans que celle-ci ni la direction de la MECS ne soient auditionnées, indiquant que le rapport de l'administrateur provisoire déposé en décembre 2019 dénonçait des tentatives de destabilisation et d'éviction de Mme [J] et de Mme [B] [L], directrice de la MECS, et l'absence s'agissant de la première de réelles preuves du harcèlement qui lui était reproché, considérant enfin que l'enquête du CSSCT a été orchestrée par le directeur général qui cherchait à évincer la salariée,

- le courrier du 10 octobre 2019 contresigné par une élue du personnel notifiant à l'employeur qu'elle déclenche une alerte en raison d'un danger grave et imminent pour sa santé et la demande écrite de l'élue sollicitant une réunion extraordinaire du CSE,

- les courriels adressés à l'inspection du travail et à l'administration provisoire suite à cette alerte stigmatisant des carences du directeur général,

- l'attestation de Mme [B] [L] qui confirme que la salariée a assuré seule la gestion de la structure lors de son absence et de celles des deux autres chefs de service, ce qui témoigne de la confiance qui lui était alors accordée et indique avoir constaté à compter de juillet 2019 la dégradation des conditions de travail de l'intéressée, invoquant à cet égard la volonté du directeur général de nuire à la réputation de cette dernière et de chercher un prétexte pour se séparer d'elle,

- des éléments médicaux contemporains des faits dénoncés et notamment un certificat d'arrêt de travail pour accident du travail en date du 31 juillet 2019 et ses deux prolongations, une alerte pour souffrance au travail adressé par le médecin du travail à l'employeur le 9 octobre 2019 après l'avoir reçue en consultation le même jour.

La salariée présente ainsi des éléments de fait qui, pris et appréciés dans leur ensemble, sont de nature à laisser supposer l'existence d'une situation de harcèlement moral en présence de laquelle l'employeur se doit d'établir que les comportements et faits qui lui sont reprochés étaient justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement moral.

Des éléments versés par l'association [Localité 7], il ressort qu'entre juin et septembre 2019, la direction a été saisie successivement de plusieurs courriers et rapports écrits de salariés remettant en cause de manière factuelle le comportement au travail, les décisions et méthodes de management de Mme [J] tant à leur égard qu'à l'égard d'autres salariés. Il apparaît que divers incidents impliquant la salariée lui ont été ainsi remontés, l'un de ces incidents ayant fait l'objet le 13 juin 2019 d'un signalement la mettant personnellement en cause sur le registre des accidents du travail.

La situation individuelle du salarié concerné a été abordée en réunion du CSE le 19 juillet 2019 à l'initiative d'un membre élu en présence de l'administrateur provisoire.

Il est aussi justifié de la tenue d'une réunion extraordinaire du CSE le 18 octobre 2019 en présence du médecin du travail à la suite du courrier de Mme [H] du 8 octobre précédent -dénonçant auprès du directeur général et des membres du CSE des comportements inadaptés de Mme [J] et l'inertie de la directrice de la MECS Mme [L] interpellée en vain à plusieurs reprises- et de l'alerte simultanée de Mme [J] (les 9 et 10 octobre) sur sa situation.

Dans ce contexte, tenu d'une obligation de sécurité, il incombait à l'employeur informé de risques pesant sur la santé et la sécurité de plusieurs salariés de prendre des mesures. Il résulte du procès-verbal de cette réunion que c'est ainsi qu'il a été décidé de confier à trois représentants du personnel membres du comité de santé, sécurité et des conditions de travail (CSSCT), dont l'indépendance à l'égard de l'employeur n'est pas sérieusement contestée, le soin d'enquêter sur la souffrance au travail des salariés ce dont l'inspecteur du travail a été informé. Il ressort du compte-rendu de cette enquête et du procès-verbal de réunion du 13 décembre 2020 que les investigations du CSSCT ont porté tant sur les faits dénoncés par certains à l'encontre de Mme [J] que sur la justification du droit d'alerte qu'elle avait exercé ce qui dément qu'elle ait fait l'objet d'un traitement partial. Il apparaît que le CSSCT, qui n'a pas relevé l'existence d'agissements de harcèlement moral la concernant, a considéré que son droit d'alerte était justifié dans la mesure où elle se trouvait sous pression au travail du fait des accusations portées à son encontre, accusations dont la sincérité n'a toutefois pas été remise en cause par le CSSCT. Il s'avère en outre que ce dernier a été chargé le 16 décembre 2019 en accord avec le médecin et l'inspection du travail d'un complément d'enquête aux fins notamment de procéder à de nouvelles auditions ce qui témoigne d'une volonté de l'employeur de procéder à des investigations exhaustives et contradictoires étant relevé que contrairement à ce que laisse entendre la salariée elle a été reçue par le directeur général le 10 octobre 2019, immédiatement après son alerte, en présence d'une représentante du personnel.

Il est produit aussi le rapport du cabinet Aegist dont il ressort que l'audit contesté a été commandé par l'association avant le placement sous administration provisoire, que la directrice Mme [L] a pu être rencontrée avant son arrêt de travail, que la directrice par interim de la MECS Mme [C] a été associée à la synthèse des travaux, que cet audit n'a pas pour objet de cibler la salariée mais dresse à partir des entretiens menés avec 13 collaborateurs des constats dont certains (climat social tendu, crainte sur l'avenir de la MECS dans un contexte difficile, management sous tension) sont confortés par les autres éléments du dossier.

Au vu de la fiche de poste versée aux débats, il apparaît que le remplacement du directeur en l'absence de ce dernier fait partie des missions d'un chef de service éducatif. Dans un contexte d'absentéisme chronique l'accroissement de la charge de travail n'a pas concerné uniquement la salariée qui a pu être épaulée en outre par Mme [C] dont il apparaît qu'elle a exercé l'interim de la direction de la MECS quelque temps.

S'agissant de la procédure disciplinaire engagée durant l'été 2019, au vu des mentions figurant sur le bulletin de paie produit aux débats par l'association, il apparaît tout d'abord que Mme [J] n'était pas en congés ni absente pour maladie lorsqu'elle a été convoquée par lettre du 12 juillet 2019 à l'entretien préalable à sanction.Les éléments de l'employeur confirment que la décision d'accueil en urgence d'enfants a été prise par la salariée de manière unilatérale, sans anticipation des difficultés ni communication avec l'équipe éducative ce qui a été soulevé par certains salariés comme M. [P] qui s'est ému de ces méthodes au vu notamment des retentissements envisageables sur les enfants déjà accueillis ; son courrier est versé aux débats par l'association. Dans ces conditions, l'avertissement apparaît matériellement fondé. La cour observe que c'est à propos de M. [P] qu'un signalement a été effectué le 13 juin 2019 sur le registre des accidents du travail, ce salarié disant avoir été invectivé par Mme [J] en public après qu'il ait fait part de son désaccord et ses réserves sur cet accueil.

La cour retient aussi, au vu de l'attestation de suivi produite, que le médecin du travail à l'issue de l'arrêt prescrit initialement le 31 juillet 2019 a conclu à l'aptitude de la salariée à l'issue de la visite de reprise du 17 septembre suivant sans aménagement ni réserve particulière.

Enfin, l'alerte qu'il a adressé à l'association le 9 octobre 2019 concernant Mme [J] et les préconisations qu'il a alors formulées ont été suivies d'effets, l'employeur ayant procédé conformément à sa demande à une évaluation individuelle et collective afin de mettre en place des actions correctives en saisissant le CSSCT et sur la base de laquelle notamment le licenciement sera prononcé.

En conséquence de ces développements, au vu des moyens débattus et des éléments produits, l'employeur établit que les décisions et faits dénoncés sont objectivement justifiés et étrangers à tout harcèlement moral.

Il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [J] de sa demande.

Sur le licenciement

Sur la légitimité du licenciement

Mme [J] soulève que la faute reprochée est prescrite.

Elle fait valoir que les faits allégués étaient connus depuis plus de deux mois soit depuis le mois de juillet 2019 tel que cela ressort des procès verbaux du CSE et des réunions de cadres.

L'intimée oppose que les représentants de l'association [Localité 7] n'ont eu pleinement connaissance des faits que le 13 décembre 2019 au plus tôt et qu'aucune prescription n'est encourue dès lors que la procédure a été engagée le 27 décembre 2019.

Sur ce,

Aux termes de l'article L.1332-4 du code du travail aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales ; sous cette réserve, le licenciement disciplinaire prononcé à raison de faits connus de plus de deux mois par l'employeur est sans cause réelle et sérieuse.

La connaissance des faits par l'employeur s'entend de l'information exacte de la réalité, de la nature et de l'ampleur des faits reprochés au salarié.

Au vu des éléments produits en cause d'appel, c'est à juste titre que les premiers juges ont retenu que les faits reprochés n'étaient pas prescrits.

En effet si l'association a été informée au cours de l'été 2019 de difficultés relationnelles entre Mme [J] et certains salariés, ce n'est qu'à compter de la restitution le 13 décembre 2019 des résultats de l'enquête confiée au CSSCT qu'elle a eu connaissance des faits dans des conditions lui permettant d'engager la procédure de licenciement, la cour observant en outre que la lettre de notification évoque des éléments postérieurs à cette restitution et notamment la visite médicale de sa collègue Mme [H] du 17 décembre 2019.

Dès lors, la procédure ayant été engagée par la convocation de Mme [J] à un entretien préalable datée du 27 décembre 2019 remise en main propre le 30 décembre suivant, la prescription invoquée n'est pas acquise.

Le licenciement n'est pas dénué de cause réelle et sérieuse sur ce fondement.

Sur le fond, la salariée fait valoir que le harcèlement moral qui lui est en substance reproché n'est pas établi par l'employeur auquel incombe la charge de la preuve.

Elle conteste les faits, soutient que l'employeur s'est contenté dans la lettre de licenciement d'asséner des généralités, expose que c'est l'exercice de son droit d'alerte qui a amené la direction a donné du crédit aux rumeurs de harcèlement moral, que les faits sont démentis par son parcours professionnel, l'absence de tout incident de cet ordre jusqu'à l'été 2019 ainsi que par les nombreux témoignages favorables de personnes ayant travaillé sous sa direction.

L'association intimée rétorque que les faits sont matériellement établis, invoque notamment à cet égard les premières alertes concernant les méthodes managériales de Mme [J], la multiplication de témoignages, le signalement de Mme [H], les résultats de l'enquête du CSSCT, la persistance des risques pesant sur la santé d'autres salariés mis en évidence après les constats du CSSCT et l'existence de nouveaux témoignages. Elle oppose que la chronologie des faits contredit le lien prétendu entre l'alerte de la salariée et son licenciement et que cette dernière tente de renverser l'élément causal en prétendant avoir été victime elle-même de faits portant atteinte à sa santé.

Sur ce,

Aux termes de l'article L.1232-6 du code du travail, la lettre de licenciement comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur.

En l'espèce, la lettre de licenciement telle que précédemment reproduite évoque des faits matériellement vérifiables et satisfait ainsi à l'exigence de motivation étant relevé que la salariée qui prétend que la lettre ne contient que des généralités n'a pas saisi l'employeur d'une demande de précision des motifs, la mention de ce droit figurant in fine dans la lettre de notification de la rupture du contrat de travail.

Il est de principe que la faute grave s'entend d'une faute d'une particulière gravité ayant pour conséquence d'interdire le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis ; les faits invoqués comme constitutifs de faute grave doivent par conséquent être sanctionnés dans un bref délai

La preuve des faits constitutifs de faute grave incombe à l'employeur et à lui seul et il appartient au juge du contrat de travail d'apprécier au vu des éléments de preuve figurant au dossier si les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont établis, imputables au salarié, et s'ils ont revêtu un caractère de gravité suffisant pour justifier l'éviction immédiate du salarié de l'entreprise.

En l'espèce, aux termes de la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige et lie le juge et les parties, il est reproché à la salarié

- un management inadapté, solitaire, sans objectivité ni concertation ou remise en question ainsi que des propos violents, blessants ou déningrants sur certains salariés, qui nuisent au bon fonctionnement des équipes, créent des tensions et engendrent de la souffrance chez ses subordonnés et ses collègues,

- des réactions violentes à l'endroit de certains des enfants pris en charge à la MECS.

Sur le premier grief

L'employeur produit notamment aux débats :

- l'extrait du registre des accidents du travail sur lequel il a été inscrit le 13 juin 2019 que la salariée a invectivé M. [P], éducateur spécialisé, en salle de réunion, lorsque ce dernier lui a fait part de son désaccord sur l'accueil d'un enfant, avec la précision que cet incident fait suite à un 'passif de harcèlement et d'intimidation' de la part de Mme [J] ;

- un écrit d'une des psychologues, Mme [I], établi en juillet 2019, intitulé 'état des lieux d'une pénibilité morale dans le cadre professionnel' qui évoque un climat délétère pour nombre de salariés, dont elle-même, imputable selon elle au positionnement de Mme [J] et à ses propos 'limite outranciers' et dans lequel elle rapporte des propos disqualifiant son travail notamment en réunion ;

- un signalement adressé à la directrice de la MECS en septembre 2019 par une infirmière, Mme [Y], relatif à un incident remontant au mois d'avril précédent et impliquant Mme [J], décrivant un manque d'objectivité de cette dernière dans le traitement d'un différend, une absence de soutien de la salariée tout en lui reprochant d'avoir sollicité l'aide d'une autre cadre en ces termes 'c'est quoi ces manières de passer par pierre paul jacques pour régler le problème' ;

- un écrit établi le 14 juin 2019 transmis à la directrice de la MECS le 23 septembre suivant par l'assistante de direction Mme [F] dénonçant une série de comportements dont ses fonctions lui ont permis d'être témoin : absence de communication de Mme [J] sur les dossiers en cours voire rétention d'information ce qui a été particulièrement problématique lorsqu'elle s'est trouvée seule membre de l'équipe de direction présente en juin 2019 et qui a nécessité l'intervention du directeur général, propos désobligeants et insultants tenus sur des collaborateurs en public dont la teneur est rapportée ('elle est nulle', 'dès qu'il a un pet de travers il se met en arrêt', 'c'est un vrai connard', 'elle est payée à rien foutre' entre autres), manifestations d'agressivité disproportionnées ; Mme [F] indique avoir reçu les confidences de plusieurs salariés qui lui ont exprimé leur souffrance et leur crainte d'éventuelles représailles s'ils venaient à se plaindre de leurs conditions de travail ;

- l'écrit établi le 8 octobre 2019 par Mme [H], chef de service, à l'attention du directeur général et des membres du CSE les alertant sur sa propre souffrance au travail sur laquelle elle a en vain alerté depuis plusieurs années la directrice de la MECS Mme [L], souffrance imputable aux comportements agressifs de Mme [J] et au 'harcèlement moral et managérial' exercé par cette dernière, ainsi que sur ses abus d'autorité sur les autres salariés victimes de critiques dévalorisantes et d'absence totale de reconnaissance ;

- un courrier du 23 octobre 2017 adressé à Mme [L] dans lequel Mme [H] se plaignait déjà de l'agressivité de Mme [J] et indiquait que pour s'en protéger elle communiquait avec elle par mail dès que la situation le permettait;

- un autre courrier de Mme [H] remis au directeur général le 16 décembre 2019 dans lequel elle évoque que ses conditions de travail sont de plus en plus complexes, le compte-rendu de son entretien du 17 décembre relatant de nombreux dysfonctionnements et des débordements, la passivité de la direction de la MECS, le fait que les salariés n'osent pas parler ouvertement, l'attestation de suivi dans laquelle le médecin du travail constate que l' état de santé de Mme [H] est incompatible avec la poursuite du travail ;

- un second écrit de Mme [I] du 19 décembre 2019 confirmant les termes de son premier rapport ;

- un courrier du 20 décembre 2019 de Mme [Z], chef de service éducatif recrutée en CDD à compter du 29 juillet 2019 dans lequel elle entend dénoncer des 'dérives managériales' de Mme [J], faisant le constat dès son arrivée de comportements non professionnels illustrés de manière concrète ; ainsi rapporte t'elle que le 31 juillet 2019 alors qu'elle fait part à l'intéressée de difficultés avec une maîtesse de maison, cette dernière répond 'je vais la dégommer celle-là, on lui répète toujours la même chose', que certains salariés n'osent plus solliciter Mme [J] craignant ses réactions, que d'autres ont alerté mais n'ont reçu aucune réponse de la part de l'institution, que Mme [J] prend des décisions concernant la prise en charge des jeunes accueillis sans respecter la procédure institutionnelle, que les tensions s'intensifient, que Mme [J] sollicite des attestations auprès de salariés, témoignant ainsi de faits récents ;

- un courriel d'un représentant du personnel du 21 octobre 2019 adressé à l'administrateur provisoire relayant des propos que lui ont tenus plusieurs salariés sur Mme [J], la peur qu'elle inspire à certains et le sentiment partagé par beaucoup qu'elle serait intouchable,

- le compte-rendu de l'enquête du CSSCT qui a été restitué le 13 décembre 2019 qui, après un rappel du contexte et de la chronologie des faits, conclut d'une part que Mme [J] agit seule sans concertation, exerce une forte pression et de l'initimidation sur ses collègues et les équipes, tient des propos qualifiés d' 'inacceptables' et d'autre part l'absence de positionnement de Mme [L], directrice de la MECS, qui a laissé cette situation s'installer.

Il résulte de ces éléments concordants contemporains des faits reprochés et émanant de différentes sources, que le comportement de Mme [J] à l'égard de ses collègues et de ses subordonnés tel que stigmatisé dans la lettre de licenciement a été dénoncé par plusieurs salariés, à divers degrés de la hiérarchie, arrivés parfois récemment dans la structure ( Mme [Z]).

Si Mme [J] n'a pas été entendue par les membres du CSSCT chargés de l'enquête, les conclusions reposent sur différents témoignages de professionnels travaillant au quotidien avec la salariée et d'autres éléments d'information recueillis notamment auprès de la médecine du travail, le dossier soumis à la cour ne recélant pas d'indice permettant de suspecter l'indépendance des membres du CSSCT vis-à-vis de la direction de l'association ni de considérer que leur enquête a été menée 'à charge'.

La cour rappelle qu'il a été précédemment jugé que la dégradation des conditions de travail dénoncée par Mme [J] et qui a justifié l'alerte dont elle a saisi l'employeur ne procédait pas d'un harcèlement moral et la chronologie des événements ainsi que la teneur des éléments de l'employeur précédemment analysés mettent en évidence que cette alerte a immédiatement suivi certains signalements qui la mettaient en cause et dont elle a eu connaissance officieusement.

Les témoignages produits par Mme [J] qui doivent être appréciés à l'aune du contexte relevé par le CSSCT dans les conclusions de son enquête ne contredisent pas factuellement ceux de l'employeur, certains des témoins n'étant plus de surcroît en exercice à l'époque des faits reprochés, étant relevé que ce ne sont pas la disponibilité, les connaissances et compétences techniques de la salariée qui sont en cause.

Les courriels attribués à des collègues sont des témoignages de soutien au moment de la mise à pied puis du licenciement mais il en ressort que leurs auteurs n'ont pas eu connaissance précisément des faits de sorte qu'ils ne les démentent pas.

Au résultat de l'ensemble de ces éléments, la cour juge le grief matériellement établi et, compte tenu du positionnement hiérarchique de Mme [J] et des risques induits pour la santé et la sécurité de plusieurs salariés, constitutif de faute grave rendant impossible son maintien dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis, sans qu'il soit nécessaire d'examiner le grief relatif au comportement de la salariée à l'égard d'enfants accueillis.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a considéré le licenciement légitime.

Il sera ajouté que le licenciement est justifié pour faute grave.

Il s'ensuit que Mme [J] doit être déboutée de ses demandes d'indemnités de rupture, de rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied conservatoire (dès lors que l'existence de la faute grave est retenue) ainsi que de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera confirmé de ces chefs.

Sur la régularité du licenciement

Mme [J] fait valoir que le délai prévu par les textes entre la convocation à entretien préalable et la date de cet entretien n'a pas été respecté.

Poursuivant l'infirmation du jugement entrepris de ce chef, l'association soutient que la salariée ne démontre pas l'existence d'un préjudice personnellement subi.

Sur ce,

L'article L.1232-2 in fine du code du travail énonce que l'entretien préalable à un éventuel licenciement ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la remise en main propre de la lettre de convocation.

Aux termes de l'article L.1235-2 du code du travail, lorsqu'une irrégularité a été commise au cours de la procédure, notamment si le licenciement d'un salarié intervient sans que la procédure requise aux dispositions pré-citées ait été observée, mais pour une cause réelle et sérieuse, le juge accorde au salarié à la charge de l'employeur une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire.

En l'espèce, la lettre de convocation a été remise en main propre à Mme [J] le 30 décembre 2019 à 15h55 ainsi qu'il résulte des mentions manuscrites contresignées par la salariée figurant sur ce document pour un entretien fixé au 2 janvier suivant à 11 heures.

Force est donc de constater que le délai de 5 jours requis à l'article L.1232-2 du code du travail a été méconnu par l'employeur.

Le fait que la salariée ait été assistée lors de cet entretien ne suffit à éluder tout préjudice. La brieveté du délai, sur laquelle l'employeur n'apporte aucune explication ou justification, n'a pas mis Mme [J] en mesure de préparer utilement sa défense.

Il est ainsi démontré l'existence d'un préjudice causé par l'inobservation de la règle de forme.

Au vu des éléments versés en cause d'appel, la cour retient que les premiers juges ont procédé à une exacte évaluation de la réparation dûe à la salariée dans la limite d'un mois de salaire lequel ressort à 3902 euros au vu des bulletins de paie.

Le jugement sera confirmé de ce chef et l'association déboutée de son appel incident.

Sur la demande de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire

Mme [J] fait valoir que la procédure de licenciement est de nature à la discréditer et à porter atteinte à sa dignité, que la mise à pied conservatoire ne lui a pas permis de saluer ses collègues, que cette mise à l'écart a été brutale et soudaine et a eu des conséquences sur son image et sa réputation.

L'intimée fait valoir en substance qu'aucun agissement vexatoire n'est caractérisé et que la salariée ne justifie pas de l'estimation du quantum de sa demande.

Sur ce,

Le salarié peut réclamer la réparation d'un préjudice particulier lié au caractère abusif et vexatoire de la procédure.

Il lui appartient d'établir à cet égard un comportement fautif de l'employeur.

En l'espèce, il résulte des pièces versées aux débats que la salariée s'est vue remettre en présence du chef comptable et d'une stagiaire qu'elle encadrait, et alors qu'elle était sur le point d'accompagner la sortie extérieure de plusieurs enfants, sa convocation à entretien préalable et qu'il lui a été demandé de quitter immédiatement son travail toutes affaires cessantes laissant seule la stagiaire pour prendre en charge neuf enfants ce qu'elle a tenté en vain de faire remarquer au directeur général.

Ce procédé qu'aucune nécessité ne commandait est vexatoire d'autant plus eu égard aux fonctions de cadre exercées par la salariée et son ancienneté.

Le préjudice causé à la salariée par l'abus de droit ainsi caractérisé dans la mise en oeuvre de la procédure de licenciement sera suffisamment réparé à hauteur de la somme précisée au dispositif.

Le jugement entrepris qui a débouté Mme [J] de cette demande sera infirmé de ce chef.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Eu égard à la solution donnée au présent litige, les dispositions de première instance seront infirmées.

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Succombant partiellement, l'Association [Localité 7] représentée par la société SPQR en qualité d'administrateur provisoire, sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort

Confirme le jugement rendu le 10 mai 2021 par le conseil de prud'hommes d'Abbeville sauf :

- en ce qu'il a débouté Mme [X] [J] de sa demande indemnitaire pour licenciement vexatoire

- en ses dispositions sur les frais irrépétibles et les dépens ;

L'infirme de ces chefs ;

Statuant des chefs infirmés et y ajoutant

Dit le licenciement justifié pour faute grave ;

Condamne l'Association [Localité 7] représentée par la société SPQR en qualité d'administrateur provisoire à payer à Mme [X] [J] la somme de 1500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant des circonstances vexatoires dans lesquelles la procédure de licenciement a été mise en oeuvre ;

Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile pour l'ensemble de la procédure ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires au présent arrêt ;

Condamne l'Association [Localité 7] aux dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 5eme chambre prud'homale
Numéro d'arrêt : 21/02786
Date de la décision : 19/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-19;21.02786 ?
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