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11/05/2022 | FRANCE | N°21/02626

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 5eme chambre prud'homale, 11 mai 2022, 21/02626


ARRET







S.C.O.P. S.A. ARPEGE CONTACT





C/



[M]



























































copie exécutoire

le 11/05/2022

à

SELARL DORE

Me MESUREUR

LDS/IL/BG



COUR D'APPEL D'AMIENS



5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE



ARRET DU 11 MAI 2022



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************************************************

N° RG 21/02626 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IDI7



JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AMIENS DU 20 AVRIL 2021



PARTIES EN CAUSE :



APPELANTE



S.C.O.P. S.A. ARPEGE CONTACT

venant aux droits de la SCOP SA A CAPPELLA

24 Square Friant 'Les 4 Chênes'

80000 AMIENS



représentée et con...

ARRET

S.C.O.P. S.A. ARPEGE CONTACT

C/

[M]

copie exécutoire

le 11/05/2022

à

SELARL DORE

Me MESUREUR

LDS/IL/BG

COUR D'APPEL D'AMIENS

5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE

ARRET DU 11 MAI 2022

*************************************************************

N° RG 21/02626 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IDI7

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AMIENS DU 20 AVRIL 2021

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

S.C.O.P. S.A. ARPEGE CONTACT

venant aux droits de la SCOP SA A CAPPELLA

24 Square Friant 'Les 4 Chênes'

80000 AMIENS

représentée et concluant par Me Christophe DORE de la SELARL DORE-TANY-BENITAH, avocat au barreau d'AMIENS substituée par Me Isabelle LESPIAUC, avocat au barreau d'AMIENS

ET :

INTIME

Monsieur [V] [M]

né le 05 Octobre 1974 à EL HAMMAM BENI SIDEL

52 B square Samarobrive

80000 AMIENS

représenté et concluant par Me Brigitte MESUREUR, avocat au barreau d'AMIENS

DEBATS :

A l'audience publique du 16 mars 2022, devant Madame Laurence de SURIREY, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, l'affaire a été appelée.

Madame Laurence de SURIREY indique que l'arrêt sera prononcé le 11 mai 2022 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Malika RABHI

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Madame Laurence de SURIREY en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :

Mme Laurence de SURIREY, présidente de chambre,

Mme Fabienne BIDEAULT, conseillère,

Mme Marie VANHAECKE-NORET, conseillère,

qui en a délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 11 mai 2022, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Laurence de SURIREY, Présidente de Chambre et Mme Isabelle LEROY, Greffière.

*

* *

DECISION :

M. [M], né le 5 octobre 1974, a été embauché par la SCOP A cappella, aux droits de laquelle se trouve la SCOP Arpège contact (la société ou l'employeur) à compter du 20 novembre 2001 par contrat d'apprentissage d'une durée d'un an, puis par contrat à durée indéterminée le 20 décembre 2002, en qualité de télé-assistant. Il s'est vu reconnaître la qualité de travailleur handicapé. Il a bénéficié du statut de salarié protégé en qualité de membre suppléant du comité d'entreprise de juin 2014 à juin 2017.

Son contrat est régi par la convention collective nationale des personnes prestataires de services dans le domaine du tertiaire du 13 août 1999.

La société emploie plus de 10 salariés. Elle exploite une activité de centre d'appel spécialisé dans le domaine de la relation client, assurant notamment à distance le service client d'autres entreprises.

Le 6 mai 2016, M. [M] a été mis à pied à titre disciplinaire pendant une durée de six jours pour avoir généré des appels conflictuels et n'avoir pas respecté les procédures d'appel.

Le 10 mars 2017, il a de nouveau fait l'objet d'une mise à pied disciplinaire d'une journée pour s'être montré impoli à l'égard d'une adhérente.

Il a été convoqué par la SCOP Arpège contact, par courrier du 13 mars 2019, à un entretien préalable fixé au 20 mars 2019 et s'est vu notifier une mise à pied conservatoire.

Par courrier du 25 mars 2019, il a été licencié pour faute grave.

M. [M] a saisi le conseil de prud'hommes d'Amiens, le 25 novembre 2019, afin de contester la légitimité de son licenciement.

Le conseil, par jugement du 20 avril 2021, a :

- dit et jugé que les demandes d'annulation des sanctions en date des 12 mai 2016 et 10 mars 2017 étaient prescrites en application de l'article L 1471-1 du code du travail ;

- débouté M. [M] de sa demande de rappel de salaire au titre des journées de mise à pied ;

- débouté M. [M] de sa demande de dommages et intérêts formulée à ce titre ;

- dit et jugé que le licenciement entrepris par la SCOP Arpège contact à l'encontre de M. [M] ne reposait ni sur une faute grave, ni sur une cause réelle et sérieuse ;

- condamné la SCOP Arpège contact à payer à M. [M] les sommes suivantes :

- 13 395,20 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

-737,67 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire du 17 au 26 mars 2019 ;

-73,76 euros au titre des congés payés sur mise à pied conservatoire du 17 au 26 mars 2019 ;

- 3 348,80 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

- 334,88 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis ;

- 8 419,60 euros à titre d'indemnité de licenciement ;

- 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté la SCOP Arpège contact de sa demande reconventionnelle ;

- condamné la SCOP Arpège contact aux entiers dépens, lesquels dépens comprendraient les frais avancés par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale accordée à M. [M].

Par conclusions remises le 13 août 2021, la SCOP Arpège contact, qui est appelante de ce jugement, demande à la cour de :

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Amiens en date du 20 avril 2021 en ce qu'il a considéré que les demandes d'annulation des sanctions en date des 12 mai 2016 et 10 mars 2017 étaient prescrites ;

A titre principal,

- dire et juger que l'action de M. [M] en contestation des mises à pied disciplinaires prononcées les 12 mai 2016 et 10 mars 2017 est prescrite ;

- dire et juger M. [M] irrecevable en ses demandes ;

A titre subsidiaire,

- dire et juger les sanctions disciplinaires prononcées les 12 mai 2016 et 10 mars 2017 comme étant régulières et bien fondées ;

En conséquence,

- débouter M. [M] de ses demandes indemnitaires et rappels de salaire formulées à ce titre ;

-infirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Amiens en date du 20 avril 2021 en ce qu'il a considéré que le licenciement de M. [M] était abusif ;

- dire et juger par ailleurs que le licenciement de M. [M] repose sur une faute grave ;

- débouter M. [M] de l'ensemble de ses demandes afférentes au licenciement ;

- condamner M. [M] à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [M] aux entiers dépens.

Par conclusions remises le 7 septembre 2021, M. [M] demande à la cour de :

- dire et juger la SCOP Arpège contact mal fondée en son appel ;

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Amiens en date du 20 avril 2021 en ce qu'il a dit et jugé que son licenciement ne reposait ni sur une faute grave ni sur une cause réelle et sérieuse ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la SCOP Arpège contact aux droits de laquelle se trouve la SCOP Arpège contact au paiement des sommes suivantes :

Au titre du rappel de salaire lié à la mise à pied conservatoire et des indemnités compensatrices de congés payé y afférent :

- 737,67 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied conservatoire du 17 au 26 mars 2019

- 73,76 euros au titre des congés payés sur mise à pied conservatoire du 17 au 26 mars 2019

A titre d'indemnité de licenciement :

- 8 419,60 euros à titre d'indemnité de licenciement

- 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- le dire et le juger recevable et bien fondé en son appel incident ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a dit prescrites les demandes relatives à l'annulation des sanctions disciplinaires des 12 mai 2016 et 10 mars 2017 et de ses demandes de rappel de salaire et indemnités y afférentes ;

- infirmer le jugement en ce qui concerne le quantum des indemnités compensatrices de préavis et de congés payés y afférent ainsi que du chef du montant des indemnités au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse pour les motifs sus exposés ;

- dire et juger que les demandes d'annulation des sanctions disciplinaires des 12 mai 2016 et 10 mars 2017 non prescrites ;

- dire et juger les sanctions disciplinaires des 12 mai 2016 et 10 mars 2017 non fondées et les annuler ;

- condamner la SCOP Arpège contact à lui payer la somme de 515,40 euros à titre de rappel de salaire (retenue mise à pied du 15 mai 2016 et du 10 mars 2017) outre 51,54 euros au titre des congés payés y afférents ;

- condamner la SCOP Arpège contact au paiement de la somme de 23 441,60 euros soit l'équivalent de 14 mois de salaire à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- condamner la SCOP Arpège contact au paiement de la somme de 5 023,20 euros soit l'équivalent de 3 mois de salaire à titre d'indemnité compensatrice de préavis (travailleur handicapé) outre la somme de 512,32 euros à titre d'indemnités compensatrices de congés payés y afférent ;

- condamner la SCOP Arpège contact au paiement de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel ;

- condamner la SCOP Arpège contact aux entier dépens.

Il est renvoyé aux conclusions des parties pour le détail de leur argumentation.

EXPOSE DES MOTIFS :

I-Sur la demande d'annulation des sanctions disciplinaires des 12 mai 2016 et 10 mars 2017

Sur la recevabilité des demandes :

L'employeur soulève la prescription de la demande par application de l'article L. 1471-1 alinéa 1 du code du travail.

Le salarié répond que ce texte n'est pas applicable puisqu'il invoque au soutien de sa demande d'annulation, le fait que ces sanctions constituaient des agissements discriminatoires et caractérisant un harcèlement moral de la part de l'employeur.

L'article L. 1471-1 du code du travail, dans sa version applicable à la cause, dispose que toute action portant sur l'exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit, mais que ce délai ne s'applique pas aux actions fondées sur la discrimination et le harcèlement moral.

En l'espèce, l'action du salarié vise à l'annulation de sanctions disciplinaires de sorte que, peu important qu'il soutienne que ces sanctions s'inscrivent dans le cadre d'un harcèlement moral ou d'une discrimination, le délai de prescription applicable est de deux ans.

L'action ayant été engagée le 7 septembre 2021, M. [M] est irrecevable à demander l'annulation des sanctions prononcées les 12 mai 2016 et 10 mars 2017 ainsi que l'a jugé le conseil de prud'hommes. Il est toutefois rappelé que ce dernier ne pouvait se prononcer sur le fond pour débouter le salarié.

II- Sur le licenciement :

La lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l'employeur, qui fixe les limites du litige, lie les parties et le juge qui ne peut examiner d'autres griefs que ceux qu'elle énonce.

La lettre de licenciement est motivée comme suit : « Vous avez été recruté le 20 décembre 2002 en contrat a durée indéterminée en qualité de Télé assistant.

Nous vous avons convoqué le mercredi 20 mars 2019 a 9 heures au siège social 12 boulevard Alsace Lorraine à Amiens (80000) mais vous ne vous êtes pas présenté à l'entretien préalable au licenciement que nous envisagions de prononcer à votre encontre. Vous aviez sollicité Monsieur [D] [C]. membre du personnel, pour qu'il vous assiste. Sans nouvelles de votre part il a tenté de vous joindre par téléphone mais sans succès. Depuis, vous ne vous êtes pas manifesté auprès de nous pour nous fournir des explications.

Au regard de votre attitude professionnelle au téléphone et des propos insultants totalement inadmissibles que vous avez tenus, nous avons décidé de vous licencier pour faute grave.

Les motifs de ce licenciement sont les suivants: le 12 mars 2019. notre donneur d'ordres, le groupe UP, nous demande de leur faire parvenir nos explications quant à la réclamation faite par Madame [W] de la société INICIO qui se plaint que le ton soit monté de la part du téléassistant qu'elle venait d'avoir au téléphone et qui est choquée d'avoir été de surcroit traitée de « conne».

L'écoute de l'enregistrement de rappel permet très clairement de valider les dires de la cliente. Après qu'elle vous ait fourni avec patience l'ensemble des explications nécessaires, vous la mettez en attente pour chercher des éléments de réponse auprès d'un collègue.

Ensuite, vous lui dites que vous ne pouvez rien faire d'autre que de remonter sa demande à votre hiérarchie. La cliente vous demande comment cela va se passer ensuite et vous manifestez avec agacement que ce n'est pas de votre ressort. La cliente demande de vous calmer et vous lui répondez que vous faites ce que vous pouvez «n'étant qu'un simple travailleur ''. Ce type de propos dévalorise votre rôle et la mission qui nous est confiée. Cela porte également atteinte à l'image de notre donneur d'ordre en donnant une vision piteuse des capacités professionnelles des personnes qui travaillent au nom du Groupe Up.

La cliente comprenant manifestement qu'elle n'obtiendra aucune explication. La conversation s'arrête sur cette insatisfaction et une assez mauvaise image du traitement réservé à une cliente. Au terme de votre échange. pour une raison incompréhensible, vous dites très distinctement « connasse''... sauf que la cliente n'avait pas raccroché, pas plus que vous-même !

Ces faits nous mettent dans une position très délicate par rapport a notre client donneur d'ordre. Ils sont de nature à mettre en danger la relation commerciale qui nous lie à eux. Par ailleurs, ils surviennent après plusieurs mesures disciplinaires sanctionnant des agissements inappropriés qui, jusqu'à maintenant, revêtaient un caractère interne à l'entreprise.

Dans le cas présent, par le ton et la teneur inacceptable de vos propos allant jusque l'insulte envers un client de notre donneur d'ordre, nous considérons que ces faits constituent une faute grave rendant impossible votre maintien même temporaire dans l'entreprise.

Votre licenciement est donc immédiat, sans préavis ni indemnité de rupture.

Nous vous signalons a cet égard qu'en raison de la gravité des faits qui vous sont reprochés le salaire correspondant à la période pendant laquelle nous vous avons mis à pied à titre conservatoire ne vous sera pas versé ».

La société fait valoir que M. [M], qui avait déjà par le passé fait l'objet de sanctions disciplinaires, en s'étant trouvé dans l'incapacité de gérer une situation conflictuelle, a failli dans l'exercice de la mission la plus élémentaire qui lui était confiée ; que la matérialité des faits est suffisamment démontrée par l'enregistrement de la conversation téléphonique litigieuse ; que sa faute a mis en danger sa relation commerciale avec le groupe UP qui a relayé la plainte de sa cliente ; que les attestations versées aux débats par M. [M] sont dépourvues de valeur probante et que quand bien même elles le seraient, le seul fait d'être apprécié de ses collègues ou d'avoir donné satisfaction dans son travail précédemment ne fait pas obstacle à ce qu'une faute grave lui soit reprochée au titre des faits commis.

Le salarié admet avoir prononcé le terme connasse mais affirme qu'il pensait que la cliente avait raccroché, qu'il a parfaitement respecté la procédure et a fait preuve de professionnalisme ainsi qu'il résulte de l'enregistrement de l'appel et que dans le contexte (fatigue, interlocutrice particulièrement véhémente et excédée), aucune faute ne saurait lui être reprochée.

Il fait valoir que ses qualités professionnelles sont reconnues et produit à l'appui de ses allégations, des attestations d'anciens collègues.

La faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié, qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail, d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

C'est à l'employeur qui invoque la faute grave et s'est situé sur le terrain disciplinaire de rapporter la preuve des faits allégués et de justifier qu'ils rendaient impossibles la poursuite du contrat de travail.

En l'espèce, il résulte de l'audition de l'enregistrement de la conversation téléphonique litigieuse, que M. [M], après avoir fait preuve de professionnalisme pendant la majeure partie de l'entretien, finit par s'énerver en haussant légèrement le ton et interrompant son interlocutrice, sans que l'attitude de cette dernière puisse être qualifiée de « particulièrement véhémente et excédée » puis alors qu'un bruit laisse penser que la cliente a raccroché, dit très distinctement, en appuyant sur chaque syllabe, « connasse ».

Toutefois, il est certain que le salarié pensait ne pas être entendu de la cliente de sorte que l'intention de l'insulter n'est pas établie. De plus, le fait que M. [M] ait indiqué à son interlocutrice qui se montrait insistante, que le problème qu'elle lui soumettait n'était pas de son ressort n'étant « qu'un simple travailleur » n'est pas de nature à discréditer l'entreprise, l'employeur ne démontrant pas et n'alléguant d'ailleurs même pas, qu'il était de la compétence de M. [M] de trouver une solution au problème posé.

Si le salarié avait effectivement fait l'objet de plusieurs sanctions disciplinaires précédemment, la dernière remontait au 10 mars 2017, soit deux ans auparavant.

Il n'est pas justifié de ce que la mauvaise image donnée de la société par le salarié ait eu des conséquences sur le plan commercial.

Ainsi, bien qu'établis, les faits invoqués dans la lettre de notification de la rupture n'ont pas revêtu un caractère de gravité suffisant pour justifier une sanction aussi sévère qu'un licenciement à l'égard d'un salarié présent dans l'entreprise depuis près de 18 ans.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a dit que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le licenciement étant injustifié, le salarié peut prétendre, non seulement aux indemnités de rupture mais également à des dommages et intérêts à raison de l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement.

Il convient de confirmer également le jugement en ce qui concerne les sommes allouées à M. [M] en paiement de la mise à pied conservatoire, des congés payés afférents et de l'indemnité de licenciement, ces sommes justifiées dans leur principe n'étant pas critiquées dans leur quantum.

En cas de licenciement, par application de l'article L.5213-19 du code du travail, la durée du préavis prévue à l'article L. 1234-1 du code du travail est doublée pour les bénéficiaires de l'obligation d'emploi sans que cette durée puisse dépasser 3 mois.

En l'espèce, le salarié justifie de ce qu'il avait le statut de travailleur handicapé jusqu'au 30 avril 2019 de sorte que les dispositions susvisées lui sont applicables. La société sera condamnée à lui payer la somme de 5 023,20 euros brut de ce chef outre celle de 502,32 euros au titre des congés payés y afférents, ces sommes étant pas contestées dans leur montant. Il y a lieu, par conséquent, à infirmation du jugement de ce chef.

Justifiant d'une ancienneté supérieure à deux ans dans une entreprise occupant habituellement au moins onze salariés, M. [M] peut prétendre à l'indemnisation de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement sur le fondement de l'article L.1235-3 du code du travail, dans sa version issue de l'ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017.

En application de ce texte, il peut solliciter une indemnisation d'un montant compris entre 3 et 14 mois de salaire.

En considération de la situation particulière du salarié et eu égard notamment à son âge, à l'ancienneté de ses services, à sa formation et à ses capacités à retrouver un nouvel emploi, la cour dispose des éléments nécessaires pour fixer la réparation qui lui est due à la somme mentionnée au dispositif.

Il convient de faire application des dispositions de l'article L.1235-4 du code du travail, dans sa version applicable à la cause, et d'ordonner à l'employeur de rembourser à l'antenne Pôle emploi concernée les indemnités de chômage versées à l'intéressé depuis son licenciement dans la limite de six mois de prestations.

III- Sur les demandes accessoires :

La société, qui perd le procès, sera condamnée aux dépens et déboutée de sa demande présentée au titre des frais irrépétibles.

Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'intimé dès lors qu'il bénéficie de l'aide juridictionnelle totale et ne justifie pas de frais restés à sa charge.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

confirme le jugement en ce qu'il a dit prescrites, et donc irrecevables, les demandes d'annulation des sanctions en date des 16 mai 2016 et 10 mars 2017, dit que le licenciement de M. [M] était dépourvu de cause réelle et sérieuse, a condamné la Scop Arpège contact à payer à ce dernier les sommes de 737,67 euros à titre de rappel sur mise à pied conservatoire du 17 au 26 mars 2019, 73,76 euros au titre des congés payés sur mise à pied conservatoire, 8 419,60 euros au titre de l'indemnité de licenciement et 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, débouté la Scop Arpège contact de sa demande reconventionnelle et condamné cette dernière aux dépens,

l'infirme pour le surplus,

statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

condamne la société Arpège contact à payer à M. [M] les sommes de :

- 5 023,20 euros brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre celle de 502,32 euros au titre des congés payés y afférents,

- 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

rejette toute autre demande,

condamne la société Arpège contact aux dépens d'appel qui seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 5eme chambre prud'homale
Numéro d'arrêt : 21/02626
Date de la décision : 11/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-11;21.02626 ?
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