La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/05/2022 | FRANCE | N°21/00112

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 10 mai 2022, 21/00112


ARRET

N°265





S.A.S. SOCIETE NATIONALE D'EXPLOITATION INDUSTRIELLE DES TABACS ET ALLUMETTES (SEITA)





C/



[X]

Etablissement Public CPAM DE L'OISE







RD





COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 10 MAI 2022



*************************************************************



N° RG 21/00112 - N° Portalis DBV4-V-B7E-H6PD



JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BEAUVAIS EN DATE DU 26 novemb

re 2020





PARTIES EN CAUSE :





APPELANTE





S.A.S. SOCIETE NATIONALE D'EXPLOITATION INDUSTRIELLE DES TABACS ET ALLUMETTES (SEITA) Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit ...

ARRET

N°265

S.A.S. SOCIETE NATIONALE D'EXPLOITATION INDUSTRIELLE DES TABACS ET ALLUMETTES (SEITA)

C/

[X]

Etablissement Public CPAM DE L'OISE

RD

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 10 MAI 2022

*************************************************************

N° RG 21/00112 - N° Portalis DBV4-V-B7E-H6PD

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BEAUVAIS EN DATE DU 26 novembre 2020

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

S.A.S. SOCIETE NATIONALE D'EXPLOITATION INDUSTRIELLE DES TABACS ET ALLUMETTES (SEITA) Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

143 Boulevard Romain Rolland

75014 PARIS

Représentée et plaidant par Me BERTIN, avocat au barreau de PARIS substituant Me Arnaud BLANC DE LA NAULTE de l'AARPI NMCG AARPI, avocat au barreau de PARIS et ayant pour avocat postulant Représentée par Me MANDONNET, avocat au barreau d'AMIENS substituant Me Hélène CAMIER de la SELARL LEXAVOUE AMIENS-DOUAI, avocat au barreau d'AMIENS

ET :

INTIMES

Monsieur [R] [X]

9 rue Jacques Brel

60320 SAINT SAUVEUR

Comparant, assisté et plaidant par Me Geneviève PIAT de la SELARL VAUBAN AVOCATS BEAUVAIS, avocat au barreau de BEAUVAIS

CPAM DE L'OISE Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

1 rue de Savoie BP 30326

60013 BEAUVAIS CEDEX

Représentée et plaidant par Mme [K] [N] dûment mandatée

DEBATS :

A l'audience publique du 01 Février 2022 devant Monsieur Renaud DELOFFRE, conseiller, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 10 Mai 2022.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Marie-Estelle CHAPON

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Monsieur Renaud DELOFFRE en a rendu compte à la Cour composée en outre de:

Mme Elisabeth WABLE, Président,

Mme Graziella HAUDUIN, Président,

et Monsieur Renaud DELOFFRE, Conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 10 Mai 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Elisabeth WABLE, Président a signé la minute avec Mme Blanche THARAUD, Greffier.

*

* *

DECISION

Monsieur [R] [X], salarié de la société SEITA (la Société) entre 1974 et 2004, a établi en date du 10 avril 2013 une déclaration de maladie professionnelle au titre d'un adénocarcinome de l'éthmoïde.

Par courrier du 15 juillet 2013, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise (la Caisse) a, après instruction du dossier, décidé de la prise en charge de cette maladie déclarée au titre du tableau 47 des maladies professionnelles.

Par courrier du 29 décembre 2014, Monsieur [R] [X] a saisi la caisse d'une procédure de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur.

Un procès-verbal de carence a été dressé le 5 mai 2015.

Par lettre recommandée du 4 juillet 2015, Monsieur [R] [X] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de l'Oise d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de son ancien employeur, la société SEITA.

Par jugement du 13 avril 2017, le tribunal a :

- dit que la maladie professionnelle déclarée par Monsieur [R] [X] le 10 avril 2013 est imputable à la faute inexcusable de la société SEITA;

- fixé au maximum légal la majoration de la rente perçue par Monsieur [R] [X] dans les conditions de l'article L.452-2 du Code de la sécurité sociale pour la période du 15 mars 2013 au 20 mars 2015;

- fixé au maximum légal l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L.452-3 1er alinéa, attribué à Monsieur [R] [X] à compter du 21 mars 2015 ;

Avant-dire droit sur la liquidation des préjudices subis par Monsieur [X] -Ordonné une expertise médicale et désigné pour y procéder le Docteur [W], avec pour mission de :

1°) Convoquer Monsieur [R] [X] et recueillir ses observations et doléances ;

2°) Se faire communiquer par les parties tous documents médicaux relatifs aux lésions subies, en particulier le certificat médical initial et les comptes rendus hospitaliers;

3°) Fournir le maximum de renseignements sur l'identité de la victime et sa situation familiale, son niveau d'études ou de formation, sa situation professionnelle antérieure et postérieure à l'accident ;

4°) A partir des déclarations de la victime et des documents médicaux fournis, décrire en détail les lésions initiales, les modalités du traitement, en précisant autant que possible les durées exactes d'hospitalisation et, pour chaque période d'hospitalisation, la nature et le nom de l'établissement, le ou les services concernés et la nature des soins ;

5°) Retranscrire dans son intégralité le certificat médical initial et, si nécessaire, reproduire totalement ou partiellement les différents documents médicaux permettant de connaître les lésions initiales et les principales étapes de l'évolution ; prendre connaissance et interpréter les examens complémentaires produits ;

6°) Décrire un éventuel état antérieur en interrogeant la victime et en citant les seuls antécédents qui peuvent avoir une incidence sur les lésions ou leurs séquelles ;

7°) Procéder dans le respect du contradictoire à un examen clinique détaillé en fonction des lésions initiales et des doléances exprimées par la victime ;

8°) Décrire, en cas de difficultés particulières éprouvées par la victime, les

2conditions de reprise de l'autonomie et, lorsque la nécessité d'une aide temporaire est alléguée, la consigner et émettre un avis motivé sur sa nécessité et son imputabilité ; indiquer si des dépenses liées à la réduction de l'autonomie sont justifiées et si l'assistance constante ou occasionnelle d'une tierce personne (étrangère ou non à la famille) a été nécessaire avant la consolidation ;

9°) Déterminer la durée du déficit fonctionnel temporaire, période pendant laquelle, pour des raisons médicales en relation certaine et directe avec les lésions occasionnées par l'accident ou la maladie, la victime a dû interrompre totalement ses activités professionnelles ou habituelles ; si l'incapacité fonctionnelle n'a été que partielle, en préciser le taux ;

10°) Lorsque la victime allègue une répercussion dans l'exercice de ses activités professionnelles, recueillir les doléances et les analyser ;

11°) Décrire les souffrances physiques ou morales avant consolidation résultant des lésions, de leur traitement, de leur évolution et des séquelles de l'accident ; les évaluer selon l'échelle de sept degrés ;

12°) Donner un avis sur l'existence, la nature et l'importance du préjudice esthétique, en précisant s'il est temporaire (avant consolidation) ou définitif; l'évaluer selon l'échelle de sept degrés ;

13°) Lorsque la victime allègue l'impossibilité de se livrer à des activités spécifiques sportives ou de loisir, donner un avis médical sur cette impossibilité et son caractère définitif, sans prendre position sur l'existence ou non d'un préjudice afférent à cette allégation ;

14°) Dire s'il existe un préjudice sexuel ; le décrire en précisant s'il recouvre l'un ou plusieurs des trois aspects pouvant être altérés séparément ou cumulativement, partiellement ou totalement : la libido, l'acte sexuel proprement dit (impuissance ou frigidité) et la fertilité (fonction de reproduction) ;

15°) Établir un état récapitulatif de l'ensemble des postes énumérés dans la mission ;

- dit que l'expert fera connaître sans délai son acceptation, qu'en cas de refus ou d'empêchement légitime, il sera pourvu aussitôt à son remplacement ;

- dit que l'expert pourra s'entourer de tous renseignements utiles auprès notamment de tout établissement hospitalier où la victime a été traitée sans que le secret médical ne puisse lui être opposé ;

- dit que l'expert rédigera, au terme de ses opérations, un pré-rapport qu'il communiquera aux parties en les invitant à présenter leurs observations dans un délai maximum d'un mois - dit qu'après avoir répondu de façon appropriée aux éventuelles observations formulées dans le délai imparti ci-dessus, l'expert devra déposer au secrétariat du tribunal des affaires de sécurité sociale un rapport définitif en double exemplaire dans le délai de quatre mois à compter de son acceptation de la mission ; -dit que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise fera l'avance des frais d'expertise ;

- alloué à Monsieur [R] [X] une indemnité provisionnelle à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices personnels d'un montant de 10.000 euros;

- dit que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise versera directement à Monsieur [R] [X] les sommes dues au titre de l'indemnité provisionnelle, de la majoration de la rente attribuée, de la majoration de l'indemnité forfaitaire, ainsi que de l'indemnisation à venir ;

- dit que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise pourra recouvrer le montant des indemnisations et majorations complémentaires attribuées à Monsieur [R] [X] à l'encontre de la société SEITA et condamne cette dernière à ce titre ;

- condamné la Société SEITA à verser à Monsieur [R] [X] la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision.

Par jugement en date du 26 novembre 2020, le Tribunal a décidé ce qui suit :

SURSOIT à statuer sur la liquidation des préjudices de Monsieur [R] [X] dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise définitif du Docteur [U] [T];

ALLOUE à Monsieur [R] [X] une provision complémentaire d'un montant de 20.000 (VINGT MILLE) euros à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices,

DIT que le greffe convoquera les parties à une audience ultérieure à réception du rapport,

RÉSERVE les dépens et autres demandes.

Aucun justificatif de la notification de ce jugement à la société SEITA ne figure au dossier de la Cour.

Par courrier électronique de son avocat du 24 décembre 2020, la société SEITA, a interjeté appel un appel limité des dispositions de ce jugement, cet appel portant sur celles relatives à la provision complémentaire accordée à Monsieur [X] ;

Par conclusions d'appelant n° 3 reçue par le greffe le 17 janvier 2022, enregistrées par le greffe en date du 19 janvier 2022 et soutenues oralement par avocat, la société SEITA demande à la Cour de :

-JUGER recevable et bien fondé l'appel formé par la Société SEITA ;

-INFIRMER le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de Beauvais le 26 novembre 2020 sous le numéro de RG 19/00136, seulement en ce qu'il a alloué à Monsieur [R] [X] une provision complémentaire d'un montant de 20.000 euros à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices,

CONFIRMER le jugement entrepris pour le surplus, et notamment en ce qu'il indique que la date de consolidation, fixée au 15 mars 2013, a un caractère définitif ;

Statuant à nouveau :

- DIRE ET JUGER que la liquidation provisoire des préjudices de Monsieur [X] doit s'opérer comme suit :

'Dans l'hypothèse où la Cour retient l'évaluation des préjudices telle que présentée devant le Tribunal judiciaire de Beauvais lors de l'audience du 22 octobre 2020 :

1) A TITRE PRINCIPAL

$gt; Déficit fonctionnel temporaire (DFT) :

'Pour un DFT total pendant 1 jour sur la base de 20 C/jour = 20 €

$gt;Assistance tierce personne : Pas d'indemnité à ce titre

$gt;Souffrances endurées : 12.000 €

$gt;Remboursement des frais kilométriques : Pas de remboursement des frais kilométriques

$gt;Remboursement des frais de déménagement : Pas de remboursement des frais de déménagement

$gt;Remboursement des frais non pris en charge par la sécurité sociale et la mutuelle : Pas de remboursement des frais non pris en charge par la sécurité sociale et la mutuelle

$gt;Préjudice esthétique temporaire : 3.000 €

$gt;Préjudice sexuel : Pas de préjudice sexuel

$gt;Préjudice d'agrément : Pas de préjudice d'agrément

LIMITER EN CONSEQUENCE, et compte tenu de la provision de 10.000 € déjà perçue par Monsieur [X], le versement d'une provision complémentaire à hauteur de 5.000 euros.

2) A TITRE SUBSIDIAIRE, si par extraordinaire la Cour venait à considérer que la maladie de Monsieur [X] n'était pas consolidée. au 15 mars 2013 :

$gt;Déficit fonctionnel temporaire (DFT) :

'Pour un DPT total pendant 5 jours (1+4) sur la base de 20 €/jour = 5 x 20 = 100 £

'Pour un DFT partiel de 75 % pendant 64 jours (57+7) sur la base de 20€/jour = 64 x 20 x 75% = 960 €

'Pour un DFT partiel de 50% pendant 345 jours (238+107) sur la base de 20€/jour = 345 x 20 x 50% = 3.450 €

'Pour un DFT partiel de 25% pendant 44 jours = 44 x 20 x 25% = 220 €

$gt;Assistance tierce personne :

'Pour une assistance tierce personne de 2h30 par jour pendant 36 jours sur la base de 13 €/heure = 36 x 2,5 x 13 = 1.170 £

'Pour une assistance tierce personne de 2h00 par jour pendant 61 jours sur la base de 13 €/heure = 61 x 2 x 13 = 1.586 €

'Pour une assistance tierce personne de 5h00 par semaine pendant 16 semaines sur la base de 13 €/heure = 16 x 5 x 13 = 1.040 €

$gt;Souffrances endurées : 12.000 £

$gt;Remboursement des frais kilométriques : Pas de remboursement des frais kilométriques

'Remboursement des frais de déménagement : Pas de remboursement des frais de déménagement

$gt;Remboursement des frais non pris en charge par la sécurité sociale et la mutuelle : Pas de remboursement des frais non pris en charge par la sécurité sociale et la mutuelle

$gt;Préjudice esthétique temporaire : 3.000 €

'Préjudice sexuel : Pas de préjudice sexuel

$gt;Préjudice d'agrément : Pas de préjudice d'agrément

3) A TITRE INFINIMENT SUBSIDIAIRE, si par extraordinaire la Cour venait à reconnaitre l'existence d'un préjudice d'agrément :

$gt;Préjudice d'agrément : 1.000 euros

-LIMITER EN CONSEQUENCE, et compte tenu de la provision de 10.000 déjà perçue par Monsieur [X], le versement d'une provision complémentaire à hauteur de 10.000 euros.

'Et seulement, si par extraordinaire la Cour retenait l'évaluation des préjudices présentée par Monsieur [X] en cause d'appel :

1) A TITRE PRINCIPAL

'Déficit fonctionnel temporaire (DFT) : 840 €

'Souffrances endurées : 12.000 €

'Remboursement des frais kilométriques : Pas de remboursement des frais kilométriques

'Remboursement des frais de déménagement : Pas de remboursement des frais de déménagement

'Remboursement des frais non pris en charge par la sécurité sociale et la mutuelle : Pas de remboursement des frais non pris en charge par la sécurité sociale et la mutuelle

'Préjudice esthétique temporaire : 1.000 €

'Préjudice esthétique permanent : 7.000

'Préjudice sexuel : Pas de préjudice sexuel

'Préjudice d'agrément : Pas de préjudice d'agrément

'Préjudice d'établissement : Pas de préjudice d'établissement

'Préjudice permanent exceptionnel : Pas de préjudice permanent exceptionnel

-LIMITER EN CONSEQUENCE, et compte tenu de la provision de 10.000 € déjà

perçue par Monsieur [X], le versement d'une provision complémentaire à hauteur de 5.000 euros.

A TITRE SUBSIDIAIRE, si par extraordinaire l'existence d'un préjudice d'agrément devait être reconnu :

Préjudice d'agrément : 1.000 euros

- LIMITER EN CONSEQUENCE, et compte tenu de la provision de 10.000 € déjà perçue par Monsieur [X], le versement d'une provision complémentaire à hauteur de 5.000 euros.

EN TOUT ETAT DE CAUSE :

RAPPELER que le recours subrogatoire de la CPAM de l'Oise contre la société concernant la majoration de la rente pour maladie professionnelle devra être limitée au taux d'IPP qui sera retenu par la CNITAAT,

DEBOUTER Monsieur [X] de sa demande de remboursement de ses éventuels frais d'expertise qui auraient été à sa charge,

DEBOUTER Monsieur [X] de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ou la réduire, à tout le moins, à de plus justes proportions,

RESERVER les dépens.

EN TOUT ETAT DE CAUSE :

RAPPELER que le recours subrogatoire de la CPAM de l'Oise contre la société concernant la majoration de la rente pour maladie professionnelle devra être limitée au taux d'IPP qui sera retenu par la CNITAAT,

RESERVER les dépens.

Par conclusions d'intimé n° 2 reçues par le greffe le 5 janvier 2022 et soutenues oralement par avocat, Monsieur [X] demande à la Cour de :

Vu l'absence de notification de date de consolidation,

Vu les rapports d'expertise judiciaire de Monsieur le Docteur [T],

CONFIRMER le jugement rendu par le TJ POLE SOCIAL de BEAUVAIS du 26 novembre 2020 lequel a condamné la société SEITA à verser à M. [X], à titre provisionnel, la somme de 20.000 € à valoir sur ses préjudices, et ce, en tenant compte de ce que M. [X] pourrait se faire indemniser ses préjudices comme suit :

- déficit fonctionnel temporaire : 1.150 €

-souffrances endurées : 25.000 €

- frais divers dont frais de déménagement : 17.710,70 €

-préjudice esthétique temporaire : 2.000 €

-préjudice esthétique permanent : 12.000 €

-préjudice sexuel : 10.000 €

-préjudice d'agrément : 5.000 €

-préjudice d'établissement : 8.000 €

-préjudice permanent exceptionnel : 10.000 €

Soit une somme globale de plus de 88.000 € sur laquelle devra se prononcer le TJ Pôle Social de BEAUVAIS.

CONDAMNER la Société SEITA à verser à Monsieur [X] la somme de 4.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

Par conclusions visées par le greffe à la date du 31 janvier 2022 et soutenues oralement par sa représentante, la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise demande à la Cour de :

'Donner acte à l'organisme concluant de ce qu'il s'en rapporte à Justice sur la fixation de la provision complémentaire à allouer à M.[X] ;

'Si par extraordinaire, la Cour devait infirmer le jugement déféré et diminuer le montant de la provision complémentaire, condamner M.[X] [R] à rembourser à la CPAM de l'Oise le montant de la somme avancée en surplus ;

'Rappeler que la CPAM de l'Oise dispose d'une action récursoire à l'encontre de la société SEITA pour les sommes avancées en réparation du préjudice de M.[X] ;

'Débouter la société SEITA portant sur le recours subrogatoire de la CPAM de l'Oise concernant la majoration de la rente pour maladie professionnelle devant être limitée au taux d'IPP qui sera retenu par la CNITAAT.

A l'audience, le Président a relevé d'office l'irrecevabilité de l'appel comme portant sur l'octroi d'une provision ainsi que l'irrecevabilité consécutive des appels incidents et il a autorisé l'appelant à adresser à la Cour sur ces points une note en délibéré sous 15 jours et les autres parties à répondre à cette note sous 15 jours de sa réception.

Par courrier du 11 février 2022 enregistré par le greffe à la date du 17 février 2022, la société SEITA fait notamment valoir que :

Le jugement du Tribunal judiciaire de Beauvais est un jugement mixte qui tranche une partie du principal, conformément au texte et décisions précitées, puisque celui-ci :

-fixe une créance à l'encontre de la société SEITA, à savoir le versement d'une provision complémentaire de 20.000 € en faveur de Monsieur [X];

-sursoit à statuer sur la liquidation des préjudices de Monsieur [X] dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise définitif du Docteur [T], nécessitant ainsi une nouvelle expertise médicale technique de sa part (Pièce n°7).

En statuant de la sorte, le Tribunal a finalement ordonné une nouvelle expertise « définitive ». A toutes fins utiles, vous pourrez d'ailleurs constater que cette nouvelle expertise a abouti à l'établissement d'un rapport définitif bien plus étayé que le pré-rapport établi par le Docteur [T] (Pièce de Monsieur [X] n°17).

C'est la raison pour laquelle le dispositif du jugement du Tribunal judiciaire de Beauvais indique expressément qu'il s'agit d'un «jugement contradictoire, mixte, en premier ressort» (Pièce n°7).

Vous constaterez, par ailleurs, que le Tribunal a tranché une partie du litige en ce qu'il a jugé que la date de consolidation fixée par la CPAM dans cette affaire a acquis un caractère définitif, de sorte que la liquidation des préjudices de Monsieur [X] doit être évaluée à l'aune de cette date (Pièce n°7).

Le jugement contesté tranche donc une partie du principal et est dès lors susceptible d'un appel immédiat.

Enfin, et à la lumière de ce qui précède, il ne saurait non plus être reproché à la société SEITA de ne pas avoir fait application de l'alinéa ler de l'article 380 du Code de procédure civile selon lequel la décision de sursis peut être frappée d'appel sur autorisation du premier présent de la cour d'appel, dès lors que le jugement entrepris ne se borne pas à prononcer le sursis à statuer et que l'appel ne porte pas sur ce chef de dispositif (Cass. 2e. Civ. 10 septembre n° 08-20.697; Cass. 3e Civ. 19 juin 1991, n° 87-20.014).

Il ressort ainsi de l'ensemble de ces principes que l'appel interjeté à l'encontre du jugement du TJ de Beauvais du 26 novembre 2020 est parfaitement recevable.

Il ne peut donc faire l'objet d'une quelconque cause d'irrecevabilité.

Par note en délibéré de son avocat du 18 février 2022 reçue par le Cour le 21 février 2022 Monsieur [X] fait valoir que :

Le jugement du 26 novembre 2020 critiqué mentionne bien dans son dispositif que le tribunal « sursoit à statuer ... dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise définitif » et qu'il « Alloue à Monsieur [R] [X] une provision complémentaire ».

Quant à l'expertise, il ressort de l'article 272 du Code de procédure civile que la décision ordonnant une expertise peut être frappée d'appel indépendamment du jugement sur le fond sur autorisation du premier président de la cour d'appel, s'il est justifié d'un motif grave et légitime. Il en résulte qu'est irrecevable l'appel formé, sans autorisation du premier président, contre une décision ordonnant avant dire droit une expertise (Cass. 2e civ., 19 mars 1980, no 78-16.542, Bull. civ. II, no 61 ; Cass. 2e civ., 24 mai 1984, no 83-11.781, Bull. civ. II, no 91 ; Cass. soc., 17 févr. 1993, no 89-45.744, Bull. civ. V, no 60 ; Cass. 3e civ., 23 nov. 1994, no 92-19.806, Bull. civ. III, no 197).

Partant, l'appel est bien irrecevable.

La SEITA ne peut non plus se retrancher derrière le fait que la date de consolidation était fixée par jugement du 26 novembre 2020 puisque le jugement n'a pas tranché cette question dans le dispositif, se contentant d'écrire:

Il est constant que la date de consolidation, notifiée à Monsieur [X] par la Caisse, a été fixée au 15 mars 2013 et n'a pas été fait l'objet d'une contestation en temps utile de sorte qu'elle a acquis un caractère définitif.

Il n'est pas davantage contesté que Monsieur [R] [X] s'est vu notifier le 28 janvier 2014, l'allocation à son profit et à compter du 15 mars 2013, d'une rente sur la base d'un taux d'incapacité permanente fixée à 70 % lequel a été réévalué à 100%, à l'aune de l'aggravation de son état de santé à compter du 24 mars 2015.

Il apparaît en conséquence, qu'en se limitant à la rédaction d'un pré-rapport au motif que les lésions tumorales de Monsieur [R] [X] ne pouvaient être considérées comme consolidées, l'expert n'a pas satisfait aux diligences qui lui étaient prescrites tout en outrepassant le cadre de la mission qui lui a été confiée.

Il n'a jamais été demandé à l'expert de fixer une date de consolidation. L'appel interjeté par la société SEITA sera donc déclaré irrecevable.

MOTIFS DE L'ARRET.

Attendu qu'aux termes de l'article 544 du Code de procédure civile les jugements qui tranchent dans leur dispositif une partie du principal et ordonnent une mesure d'instruction ou une mesure provisoire peuvent être immédiatement frappés d'appel comme les jugements qui tranchent tout le principal et qu'il en est de même lorsque le jugement statue sur une exception de procédure, une fin de non recevoir ou tout autre incident qui met fin à l'instance.

Qu'aux termes de l'article 545 du même code les autres jugements ne peuvent être frappés d'appel indépendamment des jugements sur le fond que dans les cas spécifiés par la loi.

Qu'il résulte de ces textes que le jugement se bornant à ordonner une provision ne peut être frappé d'appel immédiat (2e Civ., 5 juin 1996, pourvoi n° 94-15.791, Bulletin 1996, II, n° 120 ; 3e Civ., 7 octobre 1998, pourvoi n° 96-20.404, Bulletin civil 1998, III, n° 186 ; 2e Civ., 27 juin 2002, pourvoi n° 00-19.826, Bulletin civil 2002, II, n° 145 2e Civ., 14 décembre 2006, pourvoi n° 05-20.071).

Qu'il résulte par ailleurs de l'article 125 du Code de procédure civile que doit être relevé d'office du fait de son caractère d'ordre public l'irrecevabilité de l'appel à raison de ce que le premier juge n'a tranché aucune partie du principal.

Attendu qu'en l'espèce le moyen de la société SEITA selon lequel le Tribunal aurait ordonné une nouvelle expertise « définitive » manque en fait, rien de tel ne figurant au dispositif du jugement déféré et l'appel portant encore moins sur une telle disposition.

Que manque également en fait le moyen de la société SEITA selon lequel le Tribunal aurait jugé que la date de consolidation fixée par la CPAM dans cette affaire avait acquis un caractère définitif, de sorte que la liquidation des préjudices de Monsieur [X] doit être évaluée à l'aune de cette date, ce motif du jugement n'ayant aucun caractère décisoire pour ne pas figurer au dispositif du jugement déféré et rien n'ayant donc été jugé en ce sens.

Que la seule chose jugée par le Tribunal est relative à l'octroi d'une provision et au sursis à statuer dans l'attente du dépôt du rapport d'expertise.

Que le chef du jugement faisant l'objet de l'appel de la société SEITA, à savoir l'octroi d'une provision, n'a pas tranché une partie du principal ni statué sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident mettant fin à l'instance.

Qu'il convient de relever également que les dispositions non déférées du jugement attirent exactement les mêmes constatations puisque le chef non déféré du jugement déféré ordonnant le sursis à statuer ne tranche pas une partie du principal et ne met pas fin à l'instance et qu'il ne peut au surplus faire l'objet d'un appel immédiat, en application de l'article 380 du Code de procédure civile, que sur autorisation non sollicitée en l'espèce de Madame la Première Présidente de la présente Cour.

Qu'il convient dans ces conditions de déclarer l'appel irrecevable.

Attendu que le rapport à justice de la caisse sur le montant de la provision accordée par les premiers juges à Monsieur [X] valant contestation du montant de cette provision doit s'analyser comme un appel incident.

Attendu qu'aux termes de l'article 550 du Code de procédure civile, et sous réserve des articles 905-2, 909 et 910, l'appel incident n'est pas recevable si l'appel principal n'est pas lui-même recevable ou s'il est caduc.

Que l'irrecevabilité de l'appel principal entraînant celui de l'appel incident, il convient de déclarer également ce dernier irrecevable.

Attendu que succombant en ses prétentions, la société SEITA doit être condamnée aux dépens et à la somme de 2500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS.

La Cour, statuant par arrêt contradictoire rendu en audience publique par sa mise à disposition au greffe,

Déclare l'appel immédiat du jugement par la société SEITA ainsi que l'appel incident de la caisse irrecevables.

Condamne la société SEITA à verser à Monsieur [X] la somme de 2500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et la condamne aux dépens d'appel.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 21/00112
Date de la décision : 10/05/2022
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-10;21.00112 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award