ARRET
N°255
S.A.R.L. TECMAN
C/
URSSAF DE PICARDIE- SSI
JR
COUR D'APPEL D'AMIENS
2EME PROTECTION SOCIALE
ARRET DU 10 MAI 2022
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N° RG 19/08287 - N° Portalis DBV4-V-B7D-HSFJ
JUGEMENT DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE - POLE SOCIAL - DE SAINT-QUENTIN - DE EN DATE DU 05 novembre 2019
PARTIES EN CAUSE :
APPELANTE
S.A.R.L. TECMAN agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
ZA du Bois de la Chocque
02100 SAINT QUENTIN
Représentée et plaidant par Me Virginie BERNIER - VAN WAMBEKE de la SCP DUSSEAUX-BERNIER-VAN WAMBEKE-DATHY, avocat au barreau d'AMIENS
ET :
INTIME
URSSAF DE PICARDIE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
11 rue Ambroise Paré
CS 40586
60015 Beauvais Cedex
Représenté et plaidant par Me DEFER, avocat au barreau d'AMIENS subsituant Me Laetitia BEREZIG, avocat au barreau d'AMIENS
DEBATS :
A l'audience publique du 08 Février 2022 devant Madame Jocelyne RUBANTEL, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 10 Mai 2022.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
M. [T] [C]
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Madame [S] [Z] en a rendu compte à la Cour composée en outre de:
Madame Jocelyne RUBANTEL, Président,
Mme Chantal MANTION, Président,
et Mme Véronique CORNILLE, Conseiller,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
PRONONCE :
Le 10 Mai 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Madame Jocelyne RUBANTEL, Président a signé la minute avec Mme Blanche THARAUD, Greffier.
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DECISION
Suite à une opération de contrôle portant sur les assiettes des cotisations et contributions sociales des années 2014, 2015 et 2016, l'URSSAF de Picardie a adressé à la société Tecman une lettre d'observations du 13 juillet 2017 l'informant d'un redressement de cotisations et contributions de sécurité sociale, d'assurance chômage et d'AGS d'un montant de 21 216 euros.
Faisant suite à la réponse de la société Tecman, l'URSSAF de Picardie l'a informée, le 25 août 2017, du maintien intégral des régularisations opérées s'agissant des chefs de redressement n°2, n°3 et n°4 ainsi que du maintien partiel du chef de redressement n°6 portant ainsi les sommes redressées à 20 282 euros.
Une mise en demeure émise le 4 octobre 2017 a été adressée à la société Tecman pour un montant total de 23 068 euros, majorations afférentes incluses.
Contestant le bien-fondé des chefs de redressement n°2, n°3, n°4 et n°5 visés par la lettre d'observations, la société Tecman a saisi la commission de recours amiable de l'organisme puis, suivant décision explicite de rejet du 25 mai 2018 de ladite commission, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Saint-Quentin.
Par jugement en date du 5 novembre 2019, le pôle social du tribunal de grande instance de Saint-Quentin a :
- reçu la société Tecman en son recours,
- débouté la société Tecman de ses demandes,
- confirmé la décision de la commission de recours amiable de l'URSSAF de Picardie du 25 mai 2018,
- condamné la société Tecman au paiement de la somme de 23 068 euros correspondant à l'ensemble des chefs de redressement et majorations afférentes,
- condamné la société Tecman aux dépens de l'instance nés à compter du 1er janvier 2019,
- rejeté toute autre demande plus ample ou contraire.
Ce jugement a été notifié le 12 novembre 2019 à la société Tecman, qui en a relevé appel le 4 décembre 2019, limitant son appel au chef de redressement n°3.
Les parties ont été convoquées à l'audience du 18 mai 2021, date à laquelle l'affaire a été renvoyée à l'audience du 8 février 2022.
Aux termes de ses conclusions déposées le 18 mai 2021, oralement développées à l'audience, la société Tecman prie la cour de :
- la dire recevable et bien-fondée en ses fins, moyens et conclusions,
- en conséquence et à titre principal, infirmer en ses dispositions, sur le chef de redressement afférent aux primes de transports, le jugement rendu par le pôle social du tribunal de grande instance de Saint-Quentin,
- dire et juger qu'elle n'est pas redevable de la somme en principal de 13 004 euros, ainsi que les majorations de retard et intérêts y afférents,
- prononcer la décharge desdites cotisations sociales,
- en tout état de cause, condamner l'URSSAF de Picardie au paiement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Aux termes de ses conclusions déposées le 20 janvier 2022, oralement développées à l'audience, l'URSSAF de Picardie prie la cour de :
- dire recevable la société Tecman en son appel limité au chef de redressement n°3 : primes diverses,
- lui donner acte de ce qu'elle reconnait la portée et les effets du précédent contrôle notifié par lettre d'observations du 25 mars 2013 et consent donc à l'annulation du chef de redressement n°3 dans le cadre du contrôle notifié le 13 juillet 2017,
- en conséquent, annuler le chef de redressement n°3 relatif aux primes diverses pour un montant de 10 707 euros,
- condamner cependant la société Tecman à lui payer une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens.
SUR CE LA COUR,
La société Tecman expose avoir versé une prime de transport de trente euros pour ses salariés utilisant leur véhicule personnel pour le trajet entre le domicile et lieu du travail. Alors qu'au titre du chef de redressement n°3 de la lettre d'observations, l'URSSAF de Picardie a entrepris la réintégration de ces primes dans l'assiette de cotisations, la société se prévaut de l'accord implicite de l'organisme à l'égard de cette pratique tiré d'un précédent contrôle ayant donné lieu à une lettre d'observations du 25 mars 2013.
Sur ce point, la société Tecman soutient que lors de la précédente opération de contrôle, l'inspecteur du recouvrement avait consulté et vérifié la régularité des bulletins de salaire où figurait expressément la prime de transport versée à ses salariés.
En réponse, l'URSSAF de Picardie indique reconnaitre la portée et les effets du précédent contrôle ayant donné lieu à la lettre d'observations du 25 mars 2013 à l'aune des nouvelles pièces versées aux débats.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé des prétentions et moyens.
Motifs
A titre liminaire, si l'article R. 142-18 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction modifiée par le décret n°96-786 du 10 septembre 1996, subordonne la saisine du tribunal des affaires de sécurité sociale à la mise en 'uvre préalable d'un recours non contentieux devant la commission de recours amiable instituée au sein du conseil d'administration de chaque organisme social en application de l'article R.142-1 du même code, ces dispositions réglementaires ne confèrent pas pour autant compétence à la juridiction judiciaire pour statuer sur la validité ou la nullité de cette décision qui revêt un caractère administratif.
Il convient de relever que les premiers juges ont improprement confirmé la décision de la commission de recours amiable de l'URSSAF de Picardie du 25 mai 2018 de sorte que le jugement entrepris sera infirmé sur ce point.
Sur le chef de redressement n°3 relatif aux primes diverses
L'article 408 du code de procédure civile prévoit que l'acquiescement à la demande emporte reconnaissance du bien-fondé des prétentions de l'adversaire et renonciation à l'action. Il n'est admis que pour les droits dont la partie a la libre disposition.
Conformément à l'article R.243-59-7 du code de la sécurité sociale, le redressement établi en application des dispositions de l'article L. 243-7 ne peut porter sur des éléments qui, ayant fait l'objet d'un précédent contrôle dans la même entreprise ou le même établissement n'ont pas donné lieu à observations de la part de l'organisme effectuant le contrôle dans les conditions prévues à l'article R. 243-59 dès lors que :
1° L'organisme a eu l'occasion, au vu de l'ensemble des documents consultés, de se prononcer en toute connaissance de cause sur ces éléments ;
2° Les circonstances de droit et de fait au regard desquelles les éléments ont été examinés sont inchangées.
En l'espèce, la cour relève que la procédure de contrôle à l'origine des régularisations litigieuses avait été précédée d'une procédure similaire à l'égard de la société Tecman portant sur les assiettes des cotisations et contributions sociales des années 2010 et 2011, donnant lieu à l'émission d'une lettre d'observations le 25 mars 2013.
Afin de voir reconnaître l'existence d'un accord implicite de l'organisme, la société Tecman verse aux débats les bulletins de salaire de huit salariés du mois de décembre 2011 où figure expressément l'indemnité de trente euros dans le total des retenues sous la mention «'Ind. domicile lieu de travail'».
Compte tenu de ces éléments qui n'avaient pas été versés aux débats de première instance, l'URSSAF de Picardie reconnait la portée et les effets du précédent contrôle ayant donné lieu à la lettre d'observations du 25 mars 2013 et demande l'annulation du chef de redressement n°3 relatif aux primes diverses.
La cour prenant acte de l'acquiescement de l'organisme aux prétentions soutenues par la société Tecman, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il condamné l'appelante à payer à l'URSSAF de Picardie les cotisations et contributions sociales, y compris leurs majorations, afférentes au chef de redressement n°3 de la lettre d'observations du 13 juillet 2017.
Par voie de conséquence, le chef de redressement n°3 sera infirmé.
Sur les frais irrépétibles d'appel
Il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties la charge de ses frais irrépétibles exposés en appel.
Les demandes faites sur ce fondement seront rejetées.
Sur les dépens
Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.
L'issue du litige commande de laisser à chacune des parties la charge de ses propres dépens.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a confirmé la décision de la commission de recours amiable de l'URSSAF de Picardie du 25 mai 2018 et condamné la société Tecman à payer à l'URSSAF de Picardie les cotisations et contributions sociales, y compris leurs majorations, afférentes au chef de redressement n°3 de la lettre d'observations du 13 juillet 2017,
Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant,
INFIRME le chef de redressement n°3 de la lettre d'observations du 13 juillet 2017 relatif aux primes diverses,
DIT en conséquence que la société Tecman est tenue au paiement de la somme de 13 004 euros, outre les majorations de retard,
DÉBOUTE les parties de leurs demandes respectives fondées sur l'article 700 du code de procédure civile, s'agissant des frais irrépétibles d'appel,
DIT que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Le Greffier,Le Président,