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10/05/2022 | FRANCE | N°19/03827

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 2eme protection sociale, 10 mai 2022, 19/03827


ARRET

N°250





URSSAF DU NORD PAS-DE-CALAIS





C/



[N]







JR





COUR D'APPEL D'AMIENS



2EME PROTECTION SOCIALE





ARRET DU 10 MAI 2022



*************************************************************



N° RG 19/03827 - N° Portalis DBV4-V-B7D-HKNY



JUGEMENT DU TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE VALENCIENNES EN DATE DU 07 décembre 2018





PARTIES EN CAUSE :





APPELANTE





L'URSSAF DU NORD PAS-DE-CALAIS, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

293 Avenue du Président Hoover

BP 20001

59032 LILLE CEDEX



Représentée et plaidant par Me Maxim...

ARRET

N°250

URSSAF DU NORD PAS-DE-CALAIS

C/

[N]

JR

COUR D'APPEL D'AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 10 MAI 2022

*************************************************************

N° RG 19/03827 - N° Portalis DBV4-V-B7D-HKNY

JUGEMENT DU TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE VALENCIENNES EN DATE DU 07 décembre 2018

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

L'URSSAF DU NORD PAS-DE-CALAIS, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

293 Avenue du Président Hoover

BP 20001

59032 LILLE CEDEX

Représentée et plaidant par Me Maxime DESEURE de la SELARL LELEU DEMONT HARENG DESEURE, avocat au barreau de BETHUNE,

ET :

INTIME

Madame [L] [N]

92 rue de Lille

59300 VALENCIENNES

Représentée par Me Giuseppina MARRAS de la SCP DELARUE VARELA MARRAS, avocat au barreau d'AMIENS, postulant et plaidant par Me Delphine AUDENARD substituant Me Manuel DE ABREU de l'AARPI DE ABREU - GUILLEMINOT- PHILIPPE, avocat au barreau de VALENCIENNES

DEBATS :

A l'audience publique du 08 Février 2022 devant Madame Jocelyne RUBANTEL, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 10 Mai 2022.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

M. [T] [F]

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Madame Jocelyne RUBANTEL en a rendu compte à la Cour composée en outre de:

Madame Jocelyne RUBANTEL, Président,

Mme Chantal MANTION, Président,

et Mme Véronique CORNILLE, Conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 10 Mai 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Madame Jocelyne RUBANTEL, Président a signé la minute avec Mme Marie-Estelle CHAPON, Greffier.

*

* *

DECISION

M. [R] [N] exploitait en son nom personnel un hôtel et un restaurant dénommé « Modern Hôtel ' Alhambra Snack » à Valenciennes.

A la suite d'un contrôle de l'inspection du travail le 12 octobre 2011, un procès-verbal de travail dissimulé a été dressé en raison de la dissimulation des emplois de M. [P] [N] et de Mme [L] [N].

L'Urssaf a alors engagé une procédure de recouvrement des cotisations liées au constat de travail dissimulé, et décerné à M. [N] une mise en demeure le 22 mai 2013.

M. [N] a alors saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Valenciennes d'une contestation de la décision de la commission de recours amiable laquelle avait validé la mise en demeure décernée le 22 mai 2013.

Le tribunal des affaires de sécurité sociale par jugement du 11 mai 2016 a sursis à statuer dans l'attente de la décision du tribunal correctionnel saisi des poursuites engagées à l'encontre de M. [N].

M. [N] est décédé en cours de procédure le 23 mai 2017.

L'Urssaf a finalement émis une contrainte contre Mme [L] [N], épouse de M. [R] [N] le 20 mars 2018.

Le 4 avril 2018, Mme [L] [N] a formé opposition à la contrainte émise par l'URSSAF devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Valenciennes.

Le tribunal des affaires de sécurité sociale de Valenciennes, par jugement rendu le 7 décembre 2018, a :

- annulé la contrainte émise par l'URSSAF du Nord Pas-de-Calais pour la somme de 148 289 euros le 20 mars 2018,

- condamné l'URSSAF du Nord Pas-de-Calais à verser la somme de 500 euros à M. [L] [N] au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties au surplus de leurs demandes.

L'URSSAF a, le 27 décembre 2018, interjeté appel de cette décision qui lui avait été notifiée par courrier recommandé du 7 décembre 2018, dont elle a accusé réception le 10 décembre 2018.

En application des articles 12 de la loi du 18 novembre 2016, L.142-2 du code de la sécurité sociale, 114 de la loi du 18 novembre 2016, 16 du décret n°2018-928 du 29 octobre 2018 relatif au contentieux de la sécurité sociale et de l'aide sociale ainsi que du décret n° 2018-772 du 4 septembre 2018 désignant les tribunaux de grande instance et cours d'appel compétents en matière de contentieux général et technique de la sécurité sociale et d'admission à l'aide sociale, le dossier de la présente procédure a été transféré par le greffe de la cour d'appel de Douai à la présente cour.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 11 octobre 2019, date à laquelle un calendrier de procédure a été établi, la date des plaidoiries étant fixée au 7 avril 2020.

Le 7 avril 2020, l'affaire a fait l'objet d'un renvoi à l'audience des plaidoiries du 11 février 2021.

Lors de l'audience du 11 février 2021, l'affaire a fait l'objet d'un ultime renvoi à l'audience des plaidoiries du 8 février 2022.

Aux termes de ses conclusions récapitulatives visées par le greffe le 7 février 2022, l'Urssaf demande à la cour de :

- infirmer le jugement,

- valider le redressement et la mise en demeure en date du 22 mai 2013,

- condamner Mme [N] en sa qualité d'usufruitière des biens du défunt à payer à l'Urssaf Nord Pas-de-Calais les intérêts échus et à échoir de la dette de 148 289 euros à compter du 23 mai 2017, jour du décès,

- condamner Mme [N] aux entiers dépens.

Au soutien de ses demandes, l'Urssaf indique qu'après le décès de M. [N], elle a demandé au notaire chargé de la succession de lui communiquer le nom des héritiers, ce qui lui a été refusé au motif qu'une telle information constituerait une violation du secret professionnel.

C'est dans ces conditions qu'elle a décidé de décerner une contrainte à l'encontre de la veuve.

Le tribunal a annulé la contrainte au motif qu'elle ne produisait pas de document permettant d'établir à quel titre les sommes étaient réclamées, l'Urssaf expliquant qu'à l'époque, elle n'avait pas encore reçu la dévolution successorale qui lui a été transmise le 10 janvier 2019, laquelle fait apparaître que Mme [N] a opté pour l'usufruit de l'ensemble des biens dépendant de la succession.

Elle n'est dès lors pas tenue au paiement du capital mais seulement aux intérêts de la dette successorale.

En réponse à l'intimée qui soutient qu'il s'agit d'une demande nouvelle en cause d'appel, l'Urssaf réplique que sa demande est parfaitement recevable alors que les termes du litige sont identiques, puisqu'il oppose les mêmes parties, et qu'il a le même objet, soit la contrainte venant en exécution d'une mise en demeure après contrôle à la suite d'un redressement pour cause de travail dissimulé.

Elle soutient par ailleurs que le fait qu'une procédure soit en cours devant le pôle social de Valenciennes opposant l'Urssaf aux autres héritiers portant sur la contestation de la mise en demeure ne rend pas irrecevable sa demande, dès lors que l'Urssaf peut délivrer une contrainte, même en cas de contestation de la mise en demeure.

Au fond, l'Urssaf fait valoir que le contrôle effectué a montré que le fils de l'exploitant était inscrit sur le registre du personnel depuis février 2007 et que l'exploitant n'effectuait aucune déclaration et ne payait pas de cotisations. De même, il est apparu que Mme [N] assurait depuis 1986 l'entretien, les chambres le ménage en dehors de tout statut puisqu'elle n'était pas déclarée en tant que conjointe collaboratrice, ni en tant que salariée.

Mme [N], aux termes de ses conclusions développées oralement à l'audience, demande à la cour de :

- juger les demandes formulées par l'Urssaf irrecevables comme nouvelles en cause d'appel,

-confirmer le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Valenciennes le 7 décembre 2018 en ce qu'il a annulé la contrainte émise le 20 mars 2018,

- débouter l'Urssaf de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner l'Urssaf Nord Pas-de-Calais au versement d'une indemnité procédurale d'un montant de 2500 euros,

- condamner l'Urssaf aux éventuels frais et dépens.

Au soutien de ses demandes, elle expose que son époux avait contesté la mise en demeure décernée par l'Urssaf et le tribunal avait sursis à statuer dans l'attente de l'issue des poursuites pénales engagées contre lui.

L'action pénale s'est éteinte par suite du décès de M. [N], survenu le 23 mai 2017. L'Urssaf lui ayant délivré une contrainte en qualité de d'héritière, dans la limite de sa part successorale, la demande que forme désormais l'organisme tendant à ce que soit validés le redressement et la mise en demeure constituent des demandes nouvelles en cause d'appel. De plus, l'Urssaf demande désormais sa condamnation aux intérêts nés de la dette et non pas aux causes de la contrainte, ce qui là encore constitue une demande nouvelle en cause d'appel.

Elle soutient par ailleurs que l'Urssaf doit démontrer l'existence d'une dette successorale, or, celle-ci fait l'objet d'une contestation devant le pôle social, l'Urssaf ayant sollicité la réinscription de l'affaire en appelant en la cause l'ensemble des héritiers.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé de leurs demandes et des moyens qui les fondent.

Motifs :

Par suite de la procédure de travail dissimulé dressée le 12 octobre 2011 par l'inspection du travail à l'encontre de M. [N] exploitant un hôtel et un snack à Valenciennes, l'Urssaf a notifié une lettre d'observations le 19 mars 2013, informant le cotisant d'un redressement d'un montant de 120 444 euros au titre de l'assurance chômage et de l'AGS, fondé sur l'absence de déclaration de deux employés.

A l'issue de la procédure contradictoire, l'Urssaf a le 22 mai 2013 mis en demeure M. [N] de lui régler la somme de 149 660 dont 120 444 euros en principal et 29 216 au titre des majorations de retard.

Après rejet de sa contestation, M. [N] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d'une demande tendant à l'annulation de la mise en demeure, et à l'annulation de la procédure de redressement, et subsidiairement, à ce qu'il soit dit qu'elle était mal fondée.

Le tribunal par jugement du 11 mai 2016 a sursis à statuer dans l'attente de la décision pénale, M. [N] étant poursuivi devant le tribunal correctionnel.

L'action pénale a été éteinte par le décès de M. [N] survenu le 23 mai 2017.

L'Urssaf a le 4 août 2017 notifié une opposition à partage.

Le notaire chargé de la succession s'est retranché derrière le secret professionnel pour ne pas communiquer à l'Urssaf une dévolution successorale.

C'est dans ce contexte que l'Urssaf a décerné le 20 mars 2018 la contrainte objet du présent litige, visant la mise en demeure du 22 mai 2013.

Depuis le jugement critiqué, l'Urssaf a été rendue destinataire de la dévolution successorale, établie le 10 janvier 2019, laquelle fait apparaître que Mme [N] a opté pour l'usufruit de l'ensemble des biens dépendant de la succession.

Dès lors, elle ne peut être tenue au paiement du capital des dettes successorales, mais seulement des intérêts de cette dette, soit en l'espèce, les majorations de retard complémentaires qui continuent à courir jusqu'à paiement complet.

En vertu des dispositions de l'article 564 du code de procédure civile, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pas opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

En l'espèce, l'Urssaf est fondée à modifier les termes de sa demande pour l'adapter à la qualité de Mme [N] dont elle n'a appris qu'elle est usufruitière que par la dévolution successorale, très largement postérieure à la contrainte.

La demande initiale tendait à obtenir paiement de la dette dans sa totalité, la demande désormais formulée vise à obtenir condamnation au paiement des intérêts de celle-ci, pour tenir compte de ce que l'intimée a la qualité d'usufruitière.

La cour ne pourra toutefois se prononcer sur le bien-fondé de la contrainte, en son principe et son montant, que lorsque le tribunal se sera prononcé sur la validité du redressement et de la mise en demeure décernée.

Il appartient donc au tribunal de trancher ces points, et dès lors, il y a lieu de surseoir à statuer jusqu'à ce que cette décision soit rendue.

Les dépens sont réservés.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt rendu par mise à disposition au greffe, contradictoire,

Infirme le jugement en ce qu'il a annulé la contrainte au motif que la qualité de Mme [N] n'était pas justifiée,

Sursoit à statuer sur le bien-fondé de la contrainte jusqu'à ce que le tribunal judiciaire de Valenciennes ait statué sur la régularité du redressement et de la mise en demeure,

Ordonne le retrait du rôle du dossier, et dit qu'il sera réinscrit à la demande de la partie la plus diligente.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 2eme protection sociale
Numéro d'arrêt : 19/03827
Date de la décision : 10/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-10;19.03827 ?
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