ARRET
N°214
CPAM DES FLANDRES
C/
S.A. AIR LIQUIDE FRANCE INDUSTRIE
GH
COUR D'APPEL D'AMIENS
2EME PROTECTION SOCIALE
ARRET DU 05 MAI 2022
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N° RG 19/03458 - N° Portalis DBV4-V-B7D-HJ5X
JUGEMENT DU TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE LILLE EN DATE DU 12 juillet 2018
ARRETS DE LA COUR D'APPEL D'AMIENS EN DATE DES 22 juin et 23 novembre 2020
PARTIES EN CAUSE :
APPELANT
CPAM DES FLANDRES agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
2 rue de la Batellerie
CS 94523
59386 DUNKERQUE CEDEX 1
Représentée et plaidant par Mme Stéphanie PELMARD dûment mandatée
ET :
INTIMEE
S.A. AIR LIQUIDE FRANCE INDUSTRIE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège
6 Rue Cognacq-Jay
75007 PARIS
Représentée et plaidant par Me Bruno FIESCHI de la SCP FLICHY GRANGÉ AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
DEBATS :
A l'audience publique du 31 Janvier 2022 devant Mme Graziella HAUDUIN, Président, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 05 Mai 2022.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
M. Pierre DELATTRE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Mme Graziella HAUDUIN en a rendu compte à la Cour composée en outre de:
Mme Elisabeth WABLE, Président,
Mme Graziella HAUDUIN, Président,
et Monsieur Renaud DELOFFRE, Conseiller,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
PRONONCE :
Le 05 Mai 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, Mme Graziella HAUDUIN, Président a signé la minute avec Mme Blanche THARAUD, Greffier.
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DECISION
Vu le jugement en date du 12 juillet 2018 auquel il convient de se référer pour l'exposé des faits, procédure et prétentions initiales des parties par lequel le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lille, statuant sur le recours de la société Air liquide France à l'encontre de la décision de rejet de la commission de recours amiable de la CPAM des Flandres de sa contestation de l'opposabilité à son égard de la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de la maladie déclarée le 19 avril 2016 par M. [N] [M] (tumeur vésicale), a :
- dit le recours de la société Air liquide France industrie recevable et non contesté ;
- dit la décision de la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres en date du 8 décembre 2016 de prise en charge de l'affection de M. [N] [M] au titre de la législation sur les risques professionnels inopposable à la société Air liquide France industrie ;
- débouté la société Air liquide France industrie de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- invité la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres à donner les informations utiles à la CARSAT compétente pour la rectification du taux de cotisations AT/MP de la société Air liquide France industrie.
Vu l'arrêt en date du 23 novembre 2020 par lequel la présente cour, saisie de l'appel interjeté le 1er janvier 2019 par la CPAM, a, avant dire droit :
Désigné le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région Grand Est, sis 22 rue de l'Université 50106 67003 STRASBOURG CEDEX pour donner un avis motivé sur le point de savoir si la maladie dont est atteint M. [N] [M] a été essentiellement et directement causée par son travail habituel au sein de la SA Air liquide France industrie ;
Dit que ce comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles prendra connaissance du dossier de la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres, et devra transmettre son avis dans les quatre mois de sa saisine ;
Dit que l'affaire sera rappelée à l'audience du Jeudi 08 Avril 2021 à 13h30.
Vu le renvoi au 13 décembre 2021 accordé à l'audience du 8 avril 2021.
Vu l'avis du CRRMP de la région Grand Est reçu au greffe le 10 septembre 2021.
Vu la convocation des parties à l'audience du 31 janvier 2022 pour examen de l'affaire.
Vu les conclusions visées par le greffe le 31 janvier 2022 et soutenues oralement à l'audience, par lesquelles la CPAM demande à la cour de :
- confirmer le bien-fondé de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle déclarée par M. [M],
' déclaré opposable à la société la décision de prise en charge de cette maladie,
' prendre acte que les conséquences financières de la maladie professionnelle ont été inscrites au compte spécial,
' débouter l'employeur de l'ensemble de ses demandes.
Vu les conclusions visées par le greffe le 31 janvier 2022 et soutenues oralement à l'audience, par lesquelles la société Air liquide France industrie demande à la cour de confirmer le jugement entrepris :
' entériner l'avis rendu par le second CRRMP du 23 août 2021 en ce qu'il caractérise l'absence de lien de causalité directe essentielle entre la maladie du salarié et son travail actuel au sein de la société,
En conséquence,
' juger que le caractère professionnel de la maladie déclarée n'est pas établi dans les rapports caisse/Air liquide France industrie,
Subsidiairement, dire et juger que la CPM des Flandres n'a pas respecté son obligation d'information,
' dire et juger inopposable à la société la décision du 8 décembre 2016 de prise en charge de la maladie professionnelle déclarée,
' condamner la CPM des Flandres à payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens d'appel.
SUR CE, LA COUR :
Sur la base d'un certificat médical initial en date du 19 avril 2016, mentionnant une tumeur vésicale, M. [N] [M] a, le même jour, effectué une déclaration de maladie professionnelle.
Par courrier en date du 8 août 2016, la CPAM des Flandres a informé la Air liquide France industrie, dernier employeur de M. [M], de la transmission du dossier au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (CRRMP) de la région Nord-Pas-de-Calais Picardie, la maladie déclarée ne figurant dans aucun tableau des maladies professionnelles, et le taux d'incapacité permanente de l'assuré étant au moins égal à 25 %.
Ce CRRMP ayant rendu un avis favorable à la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie le 30 novembre 2016, la caisse a, par courrier en date du 8 décembre 2016, notifié à l'employeur sa décision de prise en charge de la maladie au titre de la législation sur les risques professionnels.
La SA AIR LIQUIDE FRANCE INDUSTRIE a contesté cette décision en saisissant, le 8 février 2017, la commission de recours amiable de la CPAM, laquelle a rejeté son recours, puis le tribunal des affaires de sécurité sociale qui, par jugement dont appel, a statué ainsi qu'il l'a été rappelé précédemment.
Le CRRMP de la région Grand est, désigné par la présente cour dans son arrêt du 23 novembre 2020, a par avis reçu au greffe le 10 septembre 2021 conclu à ce qu'aucun lien direct et essentiel ne peut être établi entre la maladie présentée et l'activité professionnelle exercée mais en revanche a retenu que l'exposition du salarié antérieure à 1965, soit avant son embauche par la société Air liquide, permet de retenir ce lien.
Il résulte des articles L. 461-1, R.441-11 et R. 441-13 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable, que la prise en charge d'une maladie au titre de la législation professionnelle ne prive pas l'employeur auquelle elle est opposable de la possibilité, en démontrant qu'elle n'a pas contracté son service, de contester l'imputabilité si une faute inexcusable reprochée ou si les cotisations d'accidents du travail afférente à cette maladie sont inscrites sur son compte.
En l'espèce, alors qu'un lien direct essentiel entre la maladie et l'activité professionnelle du salarié a été reconnu, il convient de constater que la faute inexcusable de la société Air liquide, dernier employeur, n'est pas recherchée et que le litige ne porte pas, dans le cas de la tarification, sur le montant des cotisations inscrites à son compte, étant observé que la caisse soutient sans être contredite que les conséquences de la maladie professionnelle ont été inscrites au compte spécial. Il s'ensuit donc que la contestation de l'imputabilité à son égard est inopérante.
Ensuite, la CPAM justifie avoir informé par courrier du 8 août 2016, dont l'objet est la consultation du dossier avant transmission au CRRMP, la société de la possibilité de consulter les pièces constitutifs du dossier jusqu'au 28 août 2016 pour formuler ses observations, puis avoir transmis le dossier au CRRMP pour avis le 29 août 2016, soit postérieurement à l'expiration du délai laissé à la société.
Enfin, la société n'établit pas avoir sollicité avant la transmission du dossier au CRRMP en application des dispositions de l'article D. 461-29 du code de la sécurité sociale la communication de l'avis motivé du médecin du travail et du rapport établi par le service du contrôle médical à son médecin-conseil.
Il doit être aussi constaté que la lettre par laquelle la société conteste l'existence d'un lien de causalité direct et essentiel entre le travail habituel et la pathologie a été envoyée le 31 août 2016 par télécopie à la CPAM, soit postérieurement à l'envoi du dossier au CRRMP, si bien qu'il ne peut être reproché à cette dernière de n'avoir pas transmis au comité ce courrier.
Aucun manquement de la CPAM à ses obligations n'est donc démontré.
Pour l'ensemble de ces motifs, la décision de prise en charge de la maladie professionnelle de M. [M] sera, par infirmation du jugement entrepris, déclarée opposable à la société Air liquide France industrie.
La société, qui succombe, sera condamnée à supporter les dépens nés postérieurement au 31 décembre 2018 et conservera la charge de ses frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
Vu l'arrêt avant dire droit de la cour d'appel d'Amiens du 23 novembre 2020 ;
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau :
Dit la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de la maladie déclarée le 19 avril 2016 par M. [N] [M] opposable à la société Air liquide France industrie ;
Rejette toutes autres demandes de la société Air liquide France industrie ;
Condamne la société Air liquide France industrie aux dépens nés postérieurement au 31 décembre 2018.
Prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Le Greffier,Le Président,