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28/04/2022 | FRANCE | N°21/02794

France | France, Cour d'appel d'Amiens, 5eme chambre prud'homale, 28 avril 2022, 21/02794


ARRET







[Z]





C/



Société SCT SOCIETE COMMERCIALE DE TELECOMMUNICATION



























































copie exécutoire

le 28/04/2022

à

Me LETICHE

Me TACCHELLA

MVH/IL/MR



COUR D'APPEL D'AMIENS



5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE



ARRET DU 28 AVRIL 2022<

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N° RG 21/02794 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IDTJ



JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AMIENS DU 28 AVRIL 2021 (référence dossier N° RG 19/00140)



PARTIES EN CAUSE :



APPELANTE



Madame [V] [Z] divorcée [N]

née le 09 Mai 1967 à [Localité 6]

de nationalité Fr...

ARRET

[Z]

C/

Société SCT SOCIETE COMMERCIALE DE TELECOMMUNICATION

copie exécutoire

le 28/04/2022

à

Me LETICHE

Me TACCHELLA

MVH/IL/MR

COUR D'APPEL D'AMIENS

5EME CHAMBRE PRUD'HOMALE

ARRET DU 28 AVRIL 2022

*************************************************************

N° RG 21/02794 - N° Portalis DBV4-V-B7F-IDTJ

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE D'AMIENS DU 28 AVRIL 2021 (référence dossier N° RG 19/00140)

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

Madame [V] [Z] divorcée [N]

née le 09 Mai 1967 à [Localité 6]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 3]

concluant par Me Arnaud LETICHE, avocat au barreau de COMPIEGNE

ET :

INTIMEE

SOCIETE COMMERCIALE DE TELECOMMUNICATION agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège :

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée, concluant et plaidant par Me Cécile TACCHELLA de la SELEURL Cécile TACCHELLA AVOCAT, avocat au barreau de PARIS,

représentée par Me Hervé SELOSSE-BOUVET, avocat au barreau D'AMIENS, avocat postulant

DEBATS :

A l'audience publique du 03 mars 2022, devant Mme Marie VANHAECKE-NORET, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, ont été entendus :

- Mme Marie VANHAECKE-NORET en son rapport,

- l'avocat en ses conclusions et plaidoirie

Mme Marie VANHAECKE-NORET indique que l'arrêt sera prononcé le 28 avril 2022 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Isabelle LEROY

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Marie VANHAECKE-NORET en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :

Mme Corinne BOULOGNE, présidente de chambre,

Mme Fabienne BIDEAULT, conseillère,

Mme Marie VANHAECKE-NORET, conseillère,

qui en a délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 28 avril 2022, l'arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Marie VANHAECKE-NORET, pour la présidente empêchée, et Mme Malika RABHI, Greffière.

*

* *

DECISION :

Vu le jugement en date du 28 avril 2021 par lequel le conseil de prud'hommes d'Amiens, statuant dans le litige opposant Mme [V] [Z] (la salariée) à son ancien employeur, la Société commerciale de télécommunications (la société), a dit le licenciement de la salariée justifié pour faute grave et débouté celle-ci de l'intégralité de ses demandes, a dit que la procédure engagée n'était pas abusive et a débouté la société de sa demande de dommages et intérêts, a débouté les parties de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, a condamné Mme [Z] aux dépens de l'instance ;

Vu l'appel interjeté le 27 mai 2021 par voie électronique par Mme [Z] à l'encontre de cette décision qui lui a été notifiée le 11 mai précédent ;

Vu la constitution d'avocat de la Société commerciale de télécommunications, intimée, effectuée par voie électronique le 16 juin 2021 ;

Vu les conclusions notifiées par voie électronique le 31 janvier 2022 par lesquelles la salariée appelante, soutenant n'avoir commis aucune faute de nature à justifier son licenciement, exposant que sa situation s'est dégradée à partir du moment où elle a réclamé le paiement des commissions qui lui étaient dues, faisant valoir qu'au regard de l'article 10 de la convention 158 de l'organisation internationale du travail et de l'article 24 de la charte sociale européenne, l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse telle que prévue par l'article L.1235-3 du code du travail n'offre pas une réparation adéquate et appropriée du préjudice qu'elle a subi, dénonçant le caractère illicite des modalités contractuelles de fixation de la rémunération variable et soutenant que le société n'apporte pas la preuve qu'elle n'a pas droit aux commissions qu'elle réclame, sollicite l'infirmation du jugement entrepris en ce qu'il a dit le licenciement justifié pour faute grave, l'a déboutée de l'intégralité de ses demandes et l'a condamnée aux dépens, prie la cour statuant à nouveau de la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes, de dire que le contrat de travail a été rompu sans cause réelle et sérieuse par la société, de dire que les dispositions de l'article 10 de la convention 158 de l'OIT sont applicables de plein droit et que les dispositions de l'article L.1235-3 du code du travail leur sont contraires car elles ne fixent pas une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée, dire que les modalités de fixation de sa rémunération variable sont illicites car potestatives, en conséquence de condamner la société à lui payer les sommes reprises au dispositif de ses conclusions devant lui être allouées à titre d'indemnité compensatrice de préavis (4010,42 euros), d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis (401,04 euros), de rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire du 19 octobre au 7 novembre 2018 (1296,97 euros), à titre de congés payés sur rappel de salaire (127 euros), à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (6015,63 euros), d'indemnité légale de licenciement (459,53 euros), de rappel de commissions (10221,54 euros), de congés payés y afférents (1022,15 euros), d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile (4000 euros), d'ordonner à la société de rectifier les documents de fin de contrat sous astreinte, de dire que les sommes allouées porteront intérêt au taux légal à compter du dépôt de la requête, de condamner la société aux dépens de première instance et d'appel ;

Vu les conclusions notifiées par voie électronique le 15 février 2022 aux termes desquelles la société intimée, réfutant les moyens et l'argumentation de la partie appelante, aux motifs notamment que les griefs adressés à la salariée sont établis et rendaient impossible la poursuite des relations contractuelles même pendant la durée limitée du préavis, subsidiairement que la méthode retenue par la salariée pour le calcul de l'indemnité compensatrice de préavis est erronée et que le barème d'indemnisation instauré par l'article L.1235-3 du code du travail et dont l'inconventionnalité n'est pas utilement soulevée s'impose à cette dernière, que le plan de commissionnement faisant partie intégrante du contrat de travail a été accepté par la salariée laquelle en fait une interprétation erronée, qu'il est justifié du calcul des commissions et de ce que la salariée a été remplie de ses droits au titre de sa rémunération variable, sollicite pour sa part la confirmation de la décision déférée en toutes ses dispositions, prie la cour à titre reconventionnel de condamner Mme [Z] à lui verser une indemnité de 3000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, à titre subsidiaire de fixer l'indemnité compensatrice de préavis à la somme de 3600 euros outre 360 euros au titre des congés payés et de limiter la créance de dommages et intérêts dans le respect des dispositions de l'article L.1235-3 du code du travail ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 23 février 2022 renvoyant l'affaire pour être plaidée à l'audience du 3 mars suivant ;

Vu les conclusions transmises le 31 janvier 2022 par l'appelante et le 15 février 2022 par l'intimée auxquelles il est expressément renvoyé pour l'exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d'appel ;

SUR CE, LA COUR

Mme [V] [Z], née en 1967, a été engagée suivant contrat de travail à durée indéterminée à compter du 5 février 2018 en qualité d'attachée commerciale, non cadre, relevant du groupe D, par la société commerciale de télécommunications.

La salariée était rattachée à l'agence SCT d'Amiens.

La société commerciale de télécommunications propose et fournit à des entreprises des services de télécommunications intégrés ; elle applique la convention collective nationale des télécommunications et emploie plus de onze salariés.

Aux termes du contrat de travail, le salaire de Mme [Z] était composé d'une partie fixe, soit un salaire brut annuel de 21600 euros versé en 12 mensualités de 1800 euros pour un horaire correspondant à la durée légale du travail, et d'une part variable déterminée selon un plan de rémunération variable annexé au contrat.

La salariée a sollicité une rupture conventionnelle.

Des pourparlers se sont engagés qui n'ont pas abouti.

Mme [Z] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 29 octobre 2018 par lettre du 19 octobre précédent, mise à pied à titre conservatoire, puis licenciée pour faute grave par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 7 novembre 2018, motivée comme suit :

'Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 8 octobre 2018, nous vous avons convoquée à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement, assorti d'une mise à pied à titre conservatoire.

L'entretien s'est déroulé le 29 octobre 2018, en ma présence. Vous étiez assistée par Madame [X] [C], déléguée du Personnel et membre du Comité d'Entreprise.

Au cours de cet entretien, vous n'avez pas été en mesure de nous fournir la moindre explication susceptible de justifier les faits qui vous sont reprochés. Nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave.

Nous avions pourtant constaté de graves manquements à vos obligations contractuelles.

Il convient de vous rappeler que vous avez émis le souhait de quitter la société et fait une demande de rupture conventionnelle par courriel du 24 septembre 2018. Cette rupture a été validée dans son principe par notre Direction le 12 octobre 2018.

Nous avons dès lors fixé une réunion le 15 octobre 2018 afin de vous informer de vos droits, de nous mettre d'accord sur le principe et l'opportunité de cette rupture et d'en négocier les conditions et modalités.

Au cours de cette réunion, je vous ai expliqué la démarche à suivre (rédaction d'une convention de rupture et validation par la Direccte). Je vous ai également précisé le montant de votre indemnité spécifique - qui s'élevait à 371€- et octroyé, par dérogation, une prime exceptionnelle de 2065 € correspondant à des commissions liées à des ventes réalisées mais non installées, auxquelles vous ne pouviez prétendre à date.

Vos propos ont été les suivants:

« Si vous n'avez que ça à me proposer, ce n'est pas même pas la peine de vous déplacer avec les documents de la rupture. Je ne signerai rien ». Vous avez alors ajouté « mon salaire va vous coûter beaucoup plus cher si je reste sans réaliser de chiffres ».

Très surprise par vos propos et par ce chantage inacceptable, je comprenais que vous reveniez sur votre décision et que vous refusiez les modalités de cette rupture conventionnelle.

Votre refus d'exécuter les missions confiées par votre employeur n'était, en tout état de cause, pas acceptable.

Comme cela vous a été rappelé lors de votre entretien, vous êtes en droit de renoncer à votre demande de rupture conventionnelle. En revanche, vous êtes dans l'obligation d'accomplir les missions qui vous ont été confiées dans le cadre de votre activité professionnelle.

Nous vous rappelons que lorsqu'un salarié conclut avec son employeur un contrat de travail, il accepte de se placer sous l'autorité de ce dernier.

Tout acte d'insubordination est dès lors constitutif d'une faute.

Alors qu'au terme de l'article 3 de votre contrat de travail, il est prévu que vous avez notamment pour attributions de :

- Développer le chiffre d'affaires auprès d' une clientèle de professionnels sur un secteur géographique défini avec notre Direction commerciale,

- prospecter de nouveaux clients par la présentation de la vente de notre gamme de produits,

- assurer le suivi et la fidélisation des clients de la Société en répondant à leurs demandes et en proposant des offres de services adaptées à leurs besoins,

- Assurer le reporting des activités commerciales sur les bases de données internes,

Vous vous étiez également engagée à respecter les règles et obligations suivantes:

- Assurer un minimum de rendez-vous par semaine avec des prospects : minimum de deux (2) face-à-face par jour, soit dix (10) rendez-vous par semaine avec des prospects,

- Adresser sous 48h aux services du siège une copie des factures VOlX, GSM, PABX et internet de l'opérateur actuel d'un prospect. pour chaque rendez-vous effectué, que le rendez-vous ait donné lieu à signature ou non,

- Renseigner l'activité commerciale au quotidien : informer dans les bases de données de l'outil SCT ou toute autre base de données l'activité commerciale journalière,

- Organiser l'activité terrain en fonction des consignes du responsable d'agence : (atteindre les objectifs de rendez-vous fixés en matière de prospection physique, effectuer les sessions de phoning déterminées, mener les actions spécifiques confiées,...),

Nous sommes au regret de constater que vous vous obstinez à ne pas vouloir prospecter de nouveaux clients et avez décidé unilatéralement de rester dans les locaux de l'agence quotidiennement sans «'contrepartie'».

Depuis le 24 septembre 2018, vous avez cessé toutes démarches commerciales et n'avez prospecté aucun client.

Plus encore, vous avez indiqué par courriel à votre manager que : «Comme je ne suis plus sur le terrain, je t'informe que je travaille au bureau de 9h00 à 17h00 chaque jour sauf le lundi où je pars à 18h00 car c'est la réunion hebdomadaire et le vendredi de 9h00 à 16h00. Ce qui me fait un total de 35 heures par semaine, durée légale du travail».

Vous avez non seulement décidé de ne plus exécuter vos tâches d'Attachée Commerciale, mais vous vous êtes permis d'aménager unilatéralement vos propres horaires de travail.

Votre carence et votre insubordination nous causent un important préjudice, aucun contrat n'étant signé par votre intermédiaire, et nous ne pouvons tolérer que cette situation se pérennise au détriment des intérêts de notre entreprise.

En outre, vous adoptez, depuis la manifestation de votre souhait de quitter notre société, un comportement négatif en totale contradiction avec ce que nous sommes légitimement en droit d'attendre d'un collaborateur de votre expérience, ce qui s'avère inacceptable à de multiples égards.

En effet, lors des réunions commerciales du lundi matin, vous ne cessiez d'intervenir et de couper la parole de votre manager avec sarcasme et ironie. Vous souhaitiez « bon courage » à vos collègues, sous entendant qu'il n'est pas possible de « vendre du SCT TELECOM ».

Vous narguez également vos collègues partant en prospection physique en leur indiquant qu' « à partir de maintenant moi je reste au bureau ».

C'est dans ce contexte que votre manager a été contraint de solliciter la Direction des Ressources Humaine, en lui demandant de ne plus vous convier aux réunions commerciales, compte tenu de votre attitude délétère.

Nous ne pouvons tolérer ce comportement dénigrant envers votre Direction et plus généralement la société qui vous emploie, votre insubordination à l'égard de votre supérieur hiérarchique et votre attitude d'opposition.

De même, nous ne pouvons accepter que vous portiez atteinte à l'ambiance de travail de l'équipe au sein de l'agence, ce qui va à l'encontre des intérêts de l'entreprise.

Par ailleurs, alors que nous regrettons le peu de contrats signés par votre intermédiaire, nous venons de recevoir une réclamation écrite de votre client JLD, accompagnée d'une lettre manuscrite de votre main.

Il en ressort que vous avez pris la liberté de confirmer par écrit une proposition engageant la responsabilité de notre société, sans obtenir au préalable une quelconque approbation de notre part.

Vous ne pouvez ignorer votre obligation d'obtenir une validation de la part de votre direction pour toute dérogation commerciale.

En effet, lors de la signature du contrat, vous lui avez précisé, par écrit, que l'ensemble de ses indemnités de rupture de contrat (IR) serait pris en charge par notre société dans un délai de 6 semaines.

Or le dossier de cette cliente ayant été refusé par notre leaser, ce remboursement s'est avéré impossible. A l'appui de votre écrit, découvert à cette occasion, elle demande la nullité de son contrat.

Enfin, lors de la remise en main propre de votre convocation à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement, le 19 octobre 2018, vous avez à nouveau refusé de vous soumettre à nos directives.

En effet, vous nous avez demandé d'utiliser le véhicule de service afin de pouvoir regagner votre domicile, difficile d'accès en transports en commun. Nous avons accepté votre demande à titre exceptionnel, à la seule condition que vous nous le restituiez le lundi 22 octobre 2018.

Par courriel du 21 octobre 2018, vous avez finalement refusé de respecter l'engagement pris lors de cet entretien, en présence de Monsieur [J], Monsieur [E] et moi-même.

Je vous rappelais alors la charte automobile annexée à votre contrat de travail, laquelle prévoit qu''«'en cas de suspension du contrat de travail, le collaborateur devra restituer dès la première demande et sans délai son véhicule. Dans ce cas, le versement des frais y afférents sera donc suspendu. A défaut, le collaborateur devra s'acquitter du loyer du véhicule ».

Nous vous rappelons que le refus réitéré de se soumettre aux instructions de sa Direction et le comportement désinvolte d'un salarié sont caractéristiques d'une faute grave. A plus forte raison lorsque vos manquements rendent impossible votre maintien dans l'entreprise.

Cette nonchalance associée au fait que vous indiquiez ouvertement lors de notre entretien «'ne plus croire en SCT et ne plus vouloir réintégrer votre poste» nous amène à devoir en tirer toute conséquence utile à votre encontre en vue de préserver les intérêts de notre Société.

En raison de la gravité des faits qui vous sont reprochés, le salaire correspondant à la période pendant laquelle nous vous avons mis à pied à titre conservatoire ne vous sera pas versé.

Votre licenciement sera donc effectif dès la date d'envoi de cette lettre, sans préavis ni indemnité de rupture.

Nous vous remercions donc de nous restituer au Siège de la Société (en prenant pour ce faire attache auprès de [R] [E] des services Généraux) dès réception de la présente l'ensemble du matériel qui a été mis à votre disposition par l'entreprise pour l'exercice de vos fonctions tout document et matériel de l'entreprise.

(...)'».

Contestant la légitimité de son licenciement et estimant ne pas avoir été remplie de ses droits au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail, Mme [Z] a saisi le conseil de prud'hommes d'Amiens, qui, statuant par jugement du 28 avril 2021, dont appel, s'est prononcé comme indiqué précédemment.

Sur la demande de rappel de commissions

Mme [Z] soutient que les modalités de fixation de sa rémunération variable sont illicites car purement potestatives ; ainsi, elle expose que ces modalités ménageaient à la société la possibilité de déterminer unilatéralement si elle validait ou non la vente réalisée et si la solution devait finalement être installée ou pas alors que la part variable de la rémunération doit être fondée sur des éléments objectifs et indépendants de la volonté de l'employeur. Elle fait valoir qu'il est anormal qu'elle ne puisse bénéficier de commissions sur des ventes qu'elle a réalisées.

Elle expose en outre que lorsque le calcul de la rémunération dépend d'éléments détenus par l'employeur celui-ci est tenu de les produire en vue d'une discussion contradictoire et qu'en l'espèce la société ne rapporte pas la preuve qu'elle n'avait pas le droit aux commissions réclamées alors que pour sa part elle détaille les sommes qui lui sont dues et démontre que des validations de contrats sont intervenues sans pourtant que les commissions lui soient réglées.

Elle ajoute que les modalités de fixation de la rémunération variable telles que mises en oeuvre par la société ont permis à cette dernière d'éviter de payer des commissions, que la société a mis en place des stratégies pour ne pas les régler, qu'aucune annexe au bulletin de paye ne permettait de comprendre le montant de la part variable de la rémunération.

La société oppose que Mme [Z] a pleinement accepté le plan de commissionnement annexé au contrat de travail, que ce dernier prévoit plusieurs 'déclencheurs' ouvrant droit à commission, que la validation en interne des contrats ne suffit pas à justifier que le plan de rémunération variable trouve à s'appliquer, que Mme [Z] interprète de manière erronée les stipulations de ce plan dont les règles ne sont pas unilatérales, que pour une part majoritaire la production de la salariée a été résiliée ou était invalidable ou encore que Mme [Z] sollicite le paiement de certains dossiers alors qu'elle n'était pas à objectif le mois concerné.

Sur ce,

En l'espèce, le plan de rémunération variable constituant l'annexe 4 du contrat de travail auquel renvoie ce dernier et que la salariée a signée est ainsi libellé :

' Rappel des objectifs :

Le salarié s'engage à réaliser durant le 1er mois de collaboration un objectif de chiffre d'affaires réel de 600 euros hors taxes, montant apprécié sur la base de la prise d'ordre validée.

Pendant le deuxième mois de collaboration, le salarié s'engage à réaliser un objectif de chiffre d'affaires de 900 euros hors taxes, montant apprécié sur la base de la prise d'ordre validée.

Au terme des deux premiers mois suivant l'embauche, le salarié s'engage mensuellement à réaliser un objectif de chiffre d'affaires de 1200 euros hors taxes, montant apprécié sur la base de la prise d'ordre validée.

Commissionnement mensuel sur le chiffre d'affaires :

Les tableaux 1 et 2 ci-après décrivent la méthode de calcul de la rémunération variable, si l'un des 2 déclencheurs suivant est atteint :

° 1200 € HT de CA mensuel c-à-d les mensualités notées au contrat de vente : loyer, forfait services et options, solutions informatiques, mobile (si la DFC et le PO de chaque ligne à porter sont renseignés)

° 2 ventes finançables c-à-d validées par la direction commerciale avec un accord de financement répondant à la stratégie commerciale

A noter que les contrats Parc seront comptabilisés dans l'atteinte des déclencheurs et commissionnés comme pour les contrats New Business dans le cas où ces derniers seront finançables et respecteront les conditions de resignature fixées plus bas.

Tableau 1 : commissions sur la marge (1) brute HT et sur la mensualité totale des services fixe, mobile, solutions informatiques (ci-après soli) exprimée en pourcentage sur le CA mensuel encaissé

% de commission sur la marge en € HT

% com sur la mensualité (services fixe, mobile, soli)

Call

interne 4%

100%

Call

leasing 8%

150%

Perso

interne 5%

150%

Perso

leasing 10%

200%

La marge (1) est calculée comme suit : montant accord de financement obtenu sur la base de la mensualité loyer vendu sur les contrats SCT/CE - prix d'achat

du matériel (Pabx/ centrex, smartphones intégrés en 'déclencheurs commerciaux'), main d'oeuvre, IRQPD ; (pour les dossiers Parc : mensualités matériel restantes (montant de la partie matériel*le nombre de mois restant du dernier contrat validé technique).

Il est entendu également que le commissionnement de la mensualité (services fixe, mobile, soli) dépendra de la durée de l'engagement comme suit :

Tableau 2 : la mensualité service fixe/mobile/ soli est calculée en fonction de la duré d'engagement sur le New et de réengagement pour le Parc :

Durée de réengagement suite à la resignature

Assiette de calcul du commissionnement sur la mensualité interne (services fixe, mobile, soli)

de 0 à 12 mois

0%

de 13 à 24 mois

0%

de 25 à 47 mois

50%

de 48 à 62 mois

80%

63 mois

100%

De plus, il est convenu les points suivants :

-Mise en place d'une avance sur commission à M+1 de 40%

- l'avance sur commission est corrélée à la validation technique c-à-d statut 'Welcome technique OK' et à la réception au siège du contrat original

- le contrôle de gestion procédera aux contrôles de la production jusqu'au 20 de chaque mois à M+1 pour identifier les contrats qui bénéficieront de cette avance

- le montant des commissions restantes sera versé le mois suivant l'encaissement de la facture pleine du client en fonction du chiffre d'affaires réel facturé encaissé.

Des cas de reprises / non versement sont identifiés :

- Une reprise de l'avance sur commission sera exécutée dans le cas ou le contrat est 'abandonné', 'résilié' pour raisons commerciales (statut invalidable FDV/ Commerce) ou en impayé

- Le non-versement du montant sera exécuté dans le cas où un contrat est 'abandonné' pour raisons techniques (statut invalidable technique)

Au sujet des contrats Parc :

- Il est convenu que pour être commissionnés, les contrats ne devront pas excéder une baisse de CA supérieure à 15% par rapport au dernier contrat validé technique.

Dans le cas où la baisse de CA excède les 15%, les directions commerciales et financières pourront statuer de manière dérogatoire au sujet du commissionnement en fonction du contexte de chaque dossier.

- Tous les dossiers non finançables et validés par la direction commerciale, financière et technique seront rémunérés sur la base de la mensualité signée, le % appliqué sera diminuée et passera donc à 50%.

Modalités de rémunération : le montant des commissions est exprimé en brut

Clause de bonne fin :

En cas de rupture du contrat de travail, aucun élément de rémunération variable ne sera dû après la date de départ du salarié de l'entreprise, le montant de celle-ci n'étant pas définitivement connu et d'ores et déjà acquis au salarié. Le droit à commission et/ou prime est donc perdu après le départ de l'entreprise.

Révision des objectifs

Les objectifs conditionnant la rémunération variable définie ci-avant sont déterminés unilatéralement par la société qui peut les modifier dans le cadre de son pouvoir de direction.'

Il résulte de ce plan de commissionnement que la rémunération variable de la salariée dépendait soit de l'atteinte d'un niveau de chiffre d'affaires générée par les contrats passés par son intermédiaire soit de la réalisation de deux opérations mensuelles en leasing après accord de financement par les partenaires de l'employeur et validation de la faisabilité technique, que le taux de commissionnement était fonction de la marge brute dont le calcul est précisé, du montant de la mensualité prévue au contrat, de la durée de l'engagement du client. Il s'en déduit que la variation de la rémunération reposait sur des critères objectifs indépendants de la volonté de la société étant relevé que le fait que Mme [Z] n'ait pas d'emprise sur le déploiement des solutions vendues ne signifie pas que la société déterminait de manière subjective et discrétionnaire la rémunération variable.

C'est donc en vain que la salariée conteste la validité du plan de commissionnement annexé au contrat de travail et qu'elle a accepté lors de son engagement.

Toutefois lorsque, comme tel est le cas en l'espèce, le calcul de la rémunération dépend d'éléments détenus par l'employeur, celui-ci est tenu de les produire en vue d'une discussion contradictoire.

Mme [Z] verse pour sa part notamment un tableau récapitulatif des commissions qui lui sont dues selon elle faisant apparaître par client la mensualité du contrat souscrit, la marge, le montant du financement accordé, les détails de ses calculs.

Elle fournit un second tableau faisant figurer la date de souscription du contrat, la date de validation par la direction commerciale et celle de l'accord de financement étant rappelées que ces deux critères conditionnent l'un des deux déclencheurs du droit à commissions (deux ventes "finançables").

S'agissant du client "[F]", il ressort des propres pièces de l'employeur et des explications fournies dans ses conclusions, que celui-ci se reconnaît redevable de la somme de 554,56 euros, calculée sur la marge brute conformément à ce que prévu par le plan de commissionnement. La cour relève que bien que s'agissant du premier contrat conclu par l'intermédiaire de Mme [Z] en février 2018, la commission due ne lui a jamais été réglée.

S'agissant du client "Acl compiègne", l'employeur justifie avoir versé à la salariée la somme de 325,36 euros calculée conformément aux stipulations du plan de commissionnement.

S'agissant des clients "Acl Palissy et Acl bvs 2", l'employeur soutient s'être libéré en versant à la salariée une avance sur commission de 165,56 euros pour chacun des contrats et réfute devoir le reste de la commission au motif que les contrats ont été résiliés avant le lancement du déploiement de l'installation. La cour constate néanmoins à l'examen des éléments de la société et notamment des copies d'écran "vie du contrat" et des "tickets" que la résiliation est intervenue après le départ de Mme [Z] (les commentaires relatifs à cet événement sont du mois de janvier 2019) et pour des raisons non commerciales apparues postérieurement à son licenciement qui paraissent imputables à une insuffisance technique du dispositif ou des délais d'intervention trop longs pour le client. Dès lors, il n'apparaît pas qu'un des cas de non versement de la commission tels qu'identifiés au contrat sont caractérisés ; Mme [Z] n'a donc pas été remplie de ses droits.

S'agissant du dossier "JLD", l'employeur justifie avoir réglé une partie de la commission mais que le restant n'a pas été versé faute d'avoir pu pour des raisons techniques finaliser l'installation de sorte qu'aucun encaissement n'a été enregistré.

S'agissant du dossier "[Localité 7]", l'employeur justifie avoir versé 781,89 euros et produit les élements de calcul sans être contredit par la salariée qui de manière erronée détermine pour partie le montant de sa réclamation non sur la marge mais sur le montant total du financement ce qui n'entre pas dans les prévisions du plan de commissionnement.

S'agissant du dossier "Journées cinématographiques" , l'employeur fait valoir que la salariée qui a perçu 146 euros a été remplie de ses droits, qu'elle ne peut prétendre à d'autres commissions dès lors que l'installation du matériel a été finalisée après son départ. Cette assertion se trouve démentie par la copie d'écran "vie du contrat" versée par la salariée qui fait figurer le listing des différents événements depuis la création du contrat et dont il ressort que l'installation a été réalisée le 18 octobre 2018 soit antérieurement au licenciement de Mme [Z]. Cette dernière a donc droit à l'intégralité de la commission due.

S'agissant du client "TAH", la société invoque que l'installation a été finalisée après le départ de la salariée. Toutefois à l'examen de la pièce versée au soutien de cette affirmation "ticket suivi déploiement", il apparaît que la difficulté qui a fait l'objet de l'édition de ce ticket le 5 novembre 2018 a été résolue le jour même et qu'il ressort suffisamment que l'installation était effective (déjà facturée) mais que la cliente était en attente de l'envoi de deux mobiles. La salariée a été licenciée en outre le 7 novembre 2018. Elle pouvait dès lors prétendre au paiement de l'intégralité de la commission sous réserve de calculer cette dernière pour partie sur la marge brute.

S'agissant des contrats souscrits par l'intermédiaire de Mme [Z] au mois de juillet 2018, la cour retient au vu des éléments soumis à son appréciation que ces ventes ont reçu la validation de la direction commerciale et du service technique et que si pour deux d'entre elles le client s'est tourné vers un autre fournisseur c'est en raison des délais de déploiement trop longs imposés par la société employeur. Contrairement à ce que soutenu, Mme [Z] avait donc atteint ses objectifs en termes de "ventes finançables" en juillet 2018 et pouvait prétendre au moins pour partie à commission sur ces trois contrats.

S'agissant du client "Artisien", contrat validé par la direction commerciale et ayant reçu un accord de financement, la société oppose pour refuser tout droit à commission que la salariée n'avait pas atteint ses objectifs mensuels en se référant à un tableau rendant compte de l'activité uniquement en termes de chiffre d'affaires alors que selon le plan de commissionnement cet indicateur est un des deux déclencheurs devant être atteints au choix et que Mme [Z] avait par son intermédiaire permis la conclusion d'une autre vente "Cersia" étant relevé que l'employeur ne produit pas d'éléments suffisants de nature à légitimer objectivement l'absence de validation commerciale de ce dernier contrat ; en effet il est invoqué un prix minimum qui n'aurait pas été atteint, ce constat étant fait selon le ticket d'incident deux mois après la date de conclusion du contrat sans qu'il soit produit d'avantage d'éléments.

En conséquence de ces développements, Mme [Z] est partiellement fondée en ses réclamations.

Par application des paramètres de calcul de la rémunération variable tels que définis par le plan annexé au contrat de travail, elle peut prétendre à un rappel de commissions à hauteur de 3 965,27 euros outre les congés payés y afférents.

De nature salariale, ces sommes doivent être assorties des intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a intégralement débouté Mme [Z] de sa demande.

Sur la légitimité du licenciement pour faute grave

La faute grave s'entend d'une faute d'une particulière gravité ayant pour conséquence d'interdire le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée limitée du préavis ; les faits invoqués comme constitutifs de faute grave doivent par conséquent être sanctionnés dans un bref délai.

La preuve des faits constitutifs de faute grave incombe à l'employeur et à lui seul et il appartient au juge du contrat de travail d'apprécier au vu des éléments de preuve figurant au dossier si les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont établis, imputables au salarié, et s'ils ont revêtu un caractère de gravité suffisant pour justifier l'éviction immédiate du salarié de l'entreprise.

La lettre articule différents griefs qu'il convient d'examiner.

Sur le refus d'exécuter les taches contractuelles

L'employeur invoque et produit aux débats différents courriels ainsi que l'attestation de Mme [U] et le compte-rendu d'entretien préalable rédigé par Mme [C], pour soutenir que la salariée a aménagé unilatéralement ses horaires, pourtant affichés dans l'agence, et a refusé d'accomplir certaines de ses missions notamment de prospection et toute activité de terrain alors que les pourparlers en cours à la suite de sa demande de rupture conventionnelle ne l'autorisaient pas à se dispenser d'exécuter son travail.

Cependant, la salariée produit des compte-rendus d'activité et de rendez-vous en clientèle sur le terrain, plusieurs échanges de courriels et la retranscription de l'entretien qu'elle a eu avec la direction le 19 octobre 2018 dont il ressort qu'elle a poursuivi ses activités commerciales après sa demande de rupture conventionnelle assurant plusieurs rendez-vous auprès de prospects jusqu'au 8 octobre, que si elle n'a plus eu d'activité sur le terrain à compter du 9 octobre pour se concentrer sur des tâches administratives et des relances téléphoniques, cette situation ne résulte pas d'une décision unilatérale mais a été cautionnée par la hiérarchie (MM [L] et [J]) dans un contexte où son départ de la société était proche et des pourparlers en cours sur le principe et les conditions financières d'une rupture conventionnelle, l'échec de ces pourparlers devant finalement être constaté non pas le 9 ou le 15 octobre comme soutenu par la société mais uniquement le 19 octobre suivant à l'occasion d'un entretien avec Mme [U] et M. [J] au cours duquel la salariée s'est vue finalement notifier sa mise à pied conservatoire en même temps qu'elle était convoquée à un entretien préalable.

La cour relève que la salariée a informé MM [L] et [J] ainsi que Mme [U] (responsable ressources humaines) le 9 octobre 2018 des horaires qu'elle effectuerait dorénavant sans que cette information n'appelle alors une quelconque réaction ni un rappel à l'ordre. La cour constate que la photographie produite aux débats par la société n'est pas horodatée et qu'aucun élément ne permet de s'assurer que les documents sont ceux affichés dans l'agence d'[Localité 5]. Au surplus et ainsi que le souligne avec pertinence la salariée le contrat de travail ne précise pas la répartition de l'horaire hebdomadaire ; enfin les horaires qu'elle indique dans son courriel du 9 octobre correspondent à 35 heures par semaine soit la durée de travail convenue.

En conséquence les pièces en sens contraire produites par les parties ne permettent pas de tenir les faits reprochés à Mme [Z] comme établis avec certitude.

Sur l'attitude négative et le dénigrement

L'employeur s'appuie essentiellement sur les attestations de M. [L] et de Mme [U].

Toutefois, le témoignage de M. [L] est une interprétation subjective de propos prêtés à la salariée, non corroborée par d'autres éléments, aucun des collègues ayant participé aux réunions commerciales ou côtoyé Mme [Z] n'attestant en procédure pour confirmer qu'elle a adopté une attitude d'opposition et contribué à la dégradation de leurs conditions de travail et de l'ambiance.

De surcroît, ce grief a été formulé dans un contexte où Mme [Z] avait saisi sa hiérarchie, dont M. [L], de réclamations s'agissant des commissions, sans obtenir gain de cause, ce que ne fait que conforter le témoignage de Mme [U], alors qu'il s'évince de ce qui a été précédemment statué que ses prétentions étaient pour partie fondées et que l'employeur avait donc manqué à ses propres obligations.

Le grief n'est pas établi.

Sur les manquements relevés dans la gestion du dossier du client JLD

Il est reproché à la salariée de ne pas avoir obtenu l'accord préalable de l'employeur sur des conditions dérogatoires (la prise en charge par la société des indemnités de rupture du contrat avec l'ancien opérateur).

Cependant les commentaires internes figurant dans le dossier informatique relatif au contrat ne contredisent pas factuellement la teneur de l'attestation de Mme [I], gérante de la société JLD, selon laquelle lors de l'établissement du contrat, les termes de l'écrit établi par Mme [Z] relatif à la prise en charge des frais de résiliation avec l'ancien opérateur, ont été dictés par téléphone par le directeur d'agence. Le fait qu'un litige ait opposé par la suite l'employeur à la société JLD ne suffit à remettre en cause la sincérité de ce témoignage quant aux circonstances dans lesquelles ces conditions ont été dans un premier temps accordées à la cliente et ce avec la validation du supérieur de Mme [Z].

Le grief n'est pas établi.

Sur le refus de restitution du véhicule de service

Il résulte des pièces versées de part et d'autre que la salariée a restitué le véhicule de service mis à sa disposition pour ses déplacements professionnels dès le 23 octobre 2018, au lieu du 22 octobre, après un recadrage de la responsable des ressources humaines.

Dans ces conditions, les faits ne sont pas suffisamment sérieux pour justifier un licenciement.

En conséquence de l'ensemble de ces développements, dont il résulte que les griefs ne sont pas établis ou ne sont pas suffisamment sérieux, il convient d'écarter l'existence d'une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce sens.

La salariée est par conséquent en droit de prétendre, non seulement aux indemnités de rupture (indemnité compensatrice de préavis augmentée des congés payés afférents, indemnité légale ou conventionnelle de licenciement), mais également à des dommages et intérêts au titre de l'absence de cause réelle et sérieuse de licenciement.

Mme [Z] demande à la cour une indemnité compensatrice de deux mois de préavis. Rappelant que tous les éléments de la rémunération, le fixe et la part variable, doivent être pris en compte dans la détermination de l'indemnité, elle sollicite la somme de 4010,42 euros (soit 2 005,21 euros x 2) outre les congés payés y afférents.

La société conteste le montant du salaire retenu comme base de calcul soulignant que le salaire mensuel est fixé à 1800 euros et que les commissions n'étaient nullement garanties.

La cour rappelle que la salariée relevait du groupe D selon la classification conventionnelle. L'article 4.4.1.1 de la convention collective prévoit pour ce groupe un préavis de deux mois en cas de démission ou licenciement sauf faute grave ou lourde et ce sans condition d'ancienneté dans l'entreprise.

Selon l'article L.1234-5 du code du travail, le salarié qui n'exécute pas le préavis a droit, sauf faute grave, à une indemnité compensatrice.

L'indemnité compensatrice de préavis est égale au salaire brut, assujetti au paiement par l'employeur des cotisations sociales, que le salarié aurait reçu s'il avait travaillé pendant la durée du préavis. Elle correspond aux salaires et avantages, y compris l'indemnité de congés payés, qu'aurait perçus le salarié s'il avait travaillé pendant cette période. Elle comprend tous les éléments constituant le salaire ou s'ajoutant à celui-ci : avantages en nature, gratifications et primes (dès lors qu'elles auraient été perçues pendant la durée du préavis).

Par ailleurs, le montant de l'indemnité doit être calculé en fonction de la durée de travail contractuellement prévue.

En l'espèce, la rémunération de la salariée était composée d'une partie fixe et d'une partie variable proportionnelle aux résultats obtenus de sorte qu'il est justifié de se référer à la moyenne de la rémunération depuis son embauche en février 2018.

C'est donc sans être utilement contestée que Mme [Z] se réfère pour déterminer ses droits à un salaire de 2 005,21 euros.

Il convient donc de faire droit à ses demandes.

Eu égard à leur nature salariale, les sommes allouées doivent être assorties des intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation.

Les droits de la salariée au titre de l'indemnité légale de licenciement, non spécifiquement critiqués dans leur quantum seront précisés au dispositif de la décision.

La condamnation sera assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation.

Mme [Z], sollicitant que le barème d'indemnisation prévu par les dispositions de l'article L.1235-3 du code du travail soit écarté, demande à la cour de lui allouer la somme de 6015,63 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Elle invoque expressément les textes suivants :

- l'article 10 de la convention internationale du travail n° 158 de l'Organisation internationale du travail (l'OIT ci-après) dont il ressort que si les tribunaux «'arrivent à la conclusion que le licenciement est injustifié, et si, compte tenu de la législation et de la pratique nationales, ils n'ont pas le pouvoir ou n'estiment pas possible dans les circonstances d'annuler le licenciement et/ou d 'ordonner ou de proposer la réintégration du travailleur, ils devront être habilités à ordonner le versement d'une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée'»

- l'article 24 de la charte sociale européenne du 3 mai 1996, qui énonce «'En vue d'assurer l'exercice effectif du droit a la protection en cas de licenciement, les Parties s'engagent à reconnaître (...) :

b) le droit des travailleurs licenciés sans motif valable à une indemnité adéquate ou a une autre réparation appropriée»

La cour constate que le point litigieux est relatif au fait que les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse prévus à l'article L. 1235-3 du code du travail ne constituent pas une indemnité adéquate au sens des articles 10 de la Convention internationale du travail n° 158 de l'OlT et 24 de la Charte sociale européenne.

L'article 55 de la Constitution du 4 octobre 1958 dispose que les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie.

Lorsque des dispositions internes sont en cause, comme en l'espèce, le juge du fond doit vérifier leur compatibilité avec les normes supra-nationales que la France s'est engagée à respecter, au besoin en écartant la norme nationale en cas d'incompatibilité irréductible.

Les dispositions de l'article 24 de la Charte sociale européenne révisée le 3 mai 1996 ne sont pas d'effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers ; dès lors, la cour retient que ce texte ne peut être utilement invoqué pour voir écarter les dispositions de l'article L.1235-3 du code du travail.

L'article 10 de la Convention n° 158 précitée est d'application directe en droit interne.

La cour retient que Mme [Z] ayant au jour du licenciement une ancienneté de huit mois, elle est en droit d'obtenir en vertu de l'article L.1235-3 du code du travail, une indemnité maximale d'un mois de salaire brut dès lors que la Société commerciale de télécommunications emploie plus de 11 salariés.

A l'examen des moyens débattus, la cour retient que les dispositions de l'article L 1235-3, prévoyant pour un salarié ayant moins d'une année complète d'ancienneté dans une entreprise comportant au moins onze salariés, une indemnité d'un montant maximal d'un mois, sont compatibles avec les stipulations de l'article 10 de la convention n° 158 de l'OIT au motif que :

- une indemnité dite adéquate ou une réparation appropriée n'implique pas, en soi, une réparation intégrale du préjudice de perte d'emploi injustifiée et peut s'accorder avec l'instauration d'un plafond

- le terme adéquat doit donc être compris comme réservant aux Etats parties une marge d'appréciation, dont l'Etat français n'a fait qu'user en instituant des planchers et des plafonds d'indemnisation

- lorsque le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, comme c'est le cas en l'espèce, le juge peut proposer la réintégration et ce n'est que lorsque celle-ci est refusée par l'une ou l'autre des parties que le juge octroie au salarié une indemnité dans la limite du barème

- le barème est écarté en cas de nullité du licenciement en application de l'article L 1235-3-1 du code du travail.

Mme [Z] justifie avoir été indemnisée, après son licenciement, par Pôle emploi durant 5 mois.

En considération de sa situation particulière et eu égard notamment à son âge, à l'ancienneté de ses services, à son niveau de rémunération au moment de la rupture du contrat de travail, à sa formation et à ses capacités à retrouver un nouvel emploi, la cour dispose des éléments nécessaires pour évaluer la réparation qui lui est due à la somme qui sera indiquée au dispositif de l'arrêt et qui offre une indemnisation adéquate et appropriée du préjudice subi du fait du licenciement illégitime.

Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

Par ailleurs, en l'absence de faute grave, la retenue opérée sur le salaire durant la période de mise à pied conservatoire n'est pas justifiée.

Il convient dès lors de condamner la société au paiement des sommes précisées au dispositif de la décision à titre de rappel de salaire et au titre des congés payés y afférents, ce avec intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation.

Sur la remise des documents de fin de contrat

Il convient de condamner la Société commerciale de télécommunications à remettre à la salariée les documents de fin de contrat conformes au présent arrêt dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision sans qu'il y ait lieu à ce stade de la procédure de prononcer une astreinte.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Il convient d'infirmer les dispositions de première instance.

Succombant, la Société commerciale de télécommunications sera condamnée à verser à Mme [V] [Z] en application de l'article 700 du code de procédure civile une somme que l'équité commande de fixer à 2 500 euros pour la procédure de première instance et d'appel.

Partie perdante, la Société commerciale de télécommunications sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire en dernier ressort

Infirme le jugement rendu par le conseil de prud'hommes d'Amiens en ce qu'il a dit le licenciement de Mme [V] [Z] justifié pour faute grave, débouté Mme [Z] de ses demandes financières en lien avec un licenciement dénué de cause réelle et sérieuse, débouté intégralement Mme [Z] de sa demande de rappel de commissions et de congés payés y afférents ainsi qu'en ses dispositions sur les frais irrépétibles et les dépens ;

Statuant des chefs infirmés et y ajoutant

Dit le licenciement de Mme [V] [Z] prononcé par la Société commerciale de télécommunications dénué de cause réelle et sérieuse ;

Condamne la Société commerciale de télécommunications à verser à Mme [V] [Z] les sommes suivantes avec intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes :

- 3 965,27 euros à titre de rappel de commissions,

- 396,52 euros au titre des congés payés y afférents,

- 4010,42 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 401,04 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

- 459,53 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 1 269,97 euros à titre de rappel de salaire correspondant à la période de mise à pied conservatoire (19 octobre 2018 au 7 novembre 2018),

- 127 euros au titre des congés payés y afférents ;

Condamne la Société commerciale de télécommunications à payer à Mme [V] [Z] la somme de 1 800 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Ordonne à la société commerciale de télécommunications de remettre à Mme [V] [Z] les documents de fin de contrat (attestation Pôle emploi, certificat de travail et reçu pour solde de tout compte) rectifiés conformément au présent arrêt dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision ;

Dit n'y avoir lieu à astreinte ;

Condamne la société commerciale de télécommunications à verser à Mme [V] [Z] la somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance et d'appel ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires au présent arrêt ;

Condamne la société commerciale de télécommunications aux dépens de première instance et d'appel .

LA GREFFIERE, P/ LA PRESIDENTE EMPECHEE.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel d'Amiens
Formation : 5eme chambre prud'homale
Numéro d'arrêt : 21/02794
Date de la décision : 28/04/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-04-28;21.02794 ?
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